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Entretien avec Sonja Lyubomirsky
Bonne nouvelle : le bonheur est possible. Mauvaise nouvelle : pas pour longtemps. Peut-être, pour être heureux, faut-il chercher le bonheur, pas le trouver.
Vous écrivez dans votre dernier livre que pour être heureux, il faut se débarrasser de certaines idées préconçues sur le bonheur. Lesquelles ?
J’en vois deux principales. D’abord, nous pensons que certaines choses nous rendront malheureux sans retour, comme la maladie, le célibat, le vieillissement… Or nous sommes incroyablement résilients et capables de nous adapter au négatif. Il y a vraiment peu de chose qui puisse nous rendre malheureux en permanence. Ensuite, c’est une erreur de penser que si l’on n’est pas heureux maintenant, on le sera plus tard, quand on sera marié, quand on sera plus riche, quand il sera arrivé ceci ou cela… Il ne faut pas compter sur l’argent, ni même le mariage, les enfants, l’installation dans la ville de nos rêves, le métier idéal. Car le problème, c’est que ces événements nous rendront bel et bien heureux, mais pas autant ou aussi longtemps qu’on l’imagine.
L’un des thèmes majeurs de votre ouvrage est justement l’adaptation (ou l’habituation) hédonique
: après avoir lutté durement pour le trouver, nous sommes vite lassés par le bonheur. Est-ce pour cela que pour vous, le bonheur n’est pas le but, mais le chemin ?
En effet, l’adaptation est un phénomène si puissant que nous nous habituons aussi bien aux événements positifs que négatifs, et que nous revenons à notre niveau de bonheur moyen. En un sens, quand nous atteignons un but dont dépend notre bonheur, nous sommes heureux, puis nous nous en fixons un nouveau. Mais c’est très bien de chercher constamment autre chose ! L’humanité n’aurait sans doute pas fait de tels progrès si nous étions satisfaits de notre sort…
Bonheur et sagesse sont-ils synonymes ?
Bonne question ! Je ne suis pas une experte en sagesse, mais il me semble que le bonheur est une combinaison d’émotions positives et de satisfaction à propos de votre existence, tandis que la sagesse est une affaire de jugement avisé dans les situations que la vie vous amène. J’imagine que bonheur et sagesse vont de pair, que les gens les plus avisés sont aussi les plus heureux, mais sincèrement, je ne peux pas vraiment répondre.
Pourquoi dites-vous que se focaliser sur ce qui va bien vaut parfois mieux qu’affronter ce qui va mal ?
Les recherches en psychologie positive démontrent, même si ce n’est pas toujours vrai, qu’il est aussi judicieux de se focaliser sur le positif que d’essayer de réparer le négatif. Parfois, il arrive que des émotions positives neutralisent indirectement les négatives : devenir plus optimiste, savourer l’instant présent, mieux savoir pardonner, éprouver de la reconnaissance. Je ne dis pas qu’il faille se concentrer uniquement sur le positif et ignorer le négatif. Par exemple, quand un couple va mal, il est judicieux de se pencher sur le négatif. Je pense qu’il est aussi important, mais pas plus, de se concentrer sur le positif que sur le négatif.
Dans quelles circonstances porter un regard trop positif peut-il constituer un risque ?
C’est surtout dans certaines relations que se montrer trop positif n’est pas judicieux. Si votre conjoint devient infidèle ou violent, alors essayer de voir le bon côté des choses, de pardonner, d’oublier, peut s’avérer risqué ou inadapté. Dans ce cas, il est préférable de ne pas se montrer trop positif.
Pourquoi est-il important de voir nos épreuves avec le regard d’un autre ?
Je pense surtout aux problèmes de couple, mais c’est valable aussi pour d’autres domaines. Les recherches montrent qu’il est parfois efficace d’analyser la situation comme un observateur impartial, extérieur. Cet élargissement du cadre, cette mise en perspective, ce recul par rapport à nos propres émotions, ce jugement plus rationnel, peut nous faire sentir mieux. Se confier à quelqu’un d’extérieur procure souvent le même résultat.
Vous attachez une grande importance à l’écriture, que ce soit pour tenir un journal ou réécrire en imagination le film de notre vie en essayant différents scénarios. Vous y voyez un procédé aussi efficace que le soutien social.
Quand vous consignez vos problèmes ou l’histoire de votre vie, vous êtes obligé de les ordonner. Par définition, une phrase a un sujet, un verbe et un complément : vous devez vous emparer de ce que vous ne comprenez pas vraiment, l’analyser, établir des liens de cause à effet, ce qui vous aide à affronter les expériences négatives. Écrire à propos de ses problèmes peut aider à les surmonter et à gagner en bonheur et en maturité.
Quel est le meilleur conseil que vous ayez reçu ou donné pour être heureux ?
Un des meilleurs conseils que je connaisse est celui-ci : quand quelque chose vous perturbe, quand vous êtes malheureux, demandez-vous si cela comptera encore dans un an. Peut-être que vous êtes ennuyé par un problème professionnel ou conjugal ? Projetez-vous dans un an. Il est possible que le problème ait encore de l’importance à ce moment-là, mais le plus souvent, ce ne sera pas le cas. Quoi que vous expérimentiez maintenant, ce n’est pas aussi primordial que vous le pensez !
sciences humaines
Bonne nouvelle : le bonheur est possible. Mauvaise nouvelle : pas pour longtemps. Peut-être, pour être heureux, faut-il chercher le bonheur, pas le trouver.
Vous écrivez dans votre dernier livre que pour être heureux, il faut se débarrasser de certaines idées préconçues sur le bonheur. Lesquelles ?
J’en vois deux principales. D’abord, nous pensons que certaines choses nous rendront malheureux sans retour, comme la maladie, le célibat, le vieillissement… Or nous sommes incroyablement résilients et capables de nous adapter au négatif. Il y a vraiment peu de chose qui puisse nous rendre malheureux en permanence. Ensuite, c’est une erreur de penser que si l’on n’est pas heureux maintenant, on le sera plus tard, quand on sera marié, quand on sera plus riche, quand il sera arrivé ceci ou cela… Il ne faut pas compter sur l’argent, ni même le mariage, les enfants, l’installation dans la ville de nos rêves, le métier idéal. Car le problème, c’est que ces événements nous rendront bel et bien heureux, mais pas autant ou aussi longtemps qu’on l’imagine.
L’un des thèmes majeurs de votre ouvrage est justement l’adaptation (ou l’habituation) hédonique
: après avoir lutté durement pour le trouver, nous sommes vite lassés par le bonheur. Est-ce pour cela que pour vous, le bonheur n’est pas le but, mais le chemin ?
En effet, l’adaptation est un phénomène si puissant que nous nous habituons aussi bien aux événements positifs que négatifs, et que nous revenons à notre niveau de bonheur moyen. En un sens, quand nous atteignons un but dont dépend notre bonheur, nous sommes heureux, puis nous nous en fixons un nouveau. Mais c’est très bien de chercher constamment autre chose ! L’humanité n’aurait sans doute pas fait de tels progrès si nous étions satisfaits de notre sort…
Bonheur et sagesse sont-ils synonymes ?
Bonne question ! Je ne suis pas une experte en sagesse, mais il me semble que le bonheur est une combinaison d’émotions positives et de satisfaction à propos de votre existence, tandis que la sagesse est une affaire de jugement avisé dans les situations que la vie vous amène. J’imagine que bonheur et sagesse vont de pair, que les gens les plus avisés sont aussi les plus heureux, mais sincèrement, je ne peux pas vraiment répondre.
Pourquoi dites-vous que se focaliser sur ce qui va bien vaut parfois mieux qu’affronter ce qui va mal ?
Les recherches en psychologie positive démontrent, même si ce n’est pas toujours vrai, qu’il est aussi judicieux de se focaliser sur le positif que d’essayer de réparer le négatif. Parfois, il arrive que des émotions positives neutralisent indirectement les négatives : devenir plus optimiste, savourer l’instant présent, mieux savoir pardonner, éprouver de la reconnaissance. Je ne dis pas qu’il faille se concentrer uniquement sur le positif et ignorer le négatif. Par exemple, quand un couple va mal, il est judicieux de se pencher sur le négatif. Je pense qu’il est aussi important, mais pas plus, de se concentrer sur le positif que sur le négatif.
Dans quelles circonstances porter un regard trop positif peut-il constituer un risque ?
C’est surtout dans certaines relations que se montrer trop positif n’est pas judicieux. Si votre conjoint devient infidèle ou violent, alors essayer de voir le bon côté des choses, de pardonner, d’oublier, peut s’avérer risqué ou inadapté. Dans ce cas, il est préférable de ne pas se montrer trop positif.
Pourquoi est-il important de voir nos épreuves avec le regard d’un autre ?
Je pense surtout aux problèmes de couple, mais c’est valable aussi pour d’autres domaines. Les recherches montrent qu’il est parfois efficace d’analyser la situation comme un observateur impartial, extérieur. Cet élargissement du cadre, cette mise en perspective, ce recul par rapport à nos propres émotions, ce jugement plus rationnel, peut nous faire sentir mieux. Se confier à quelqu’un d’extérieur procure souvent le même résultat.
Vous attachez une grande importance à l’écriture, que ce soit pour tenir un journal ou réécrire en imagination le film de notre vie en essayant différents scénarios. Vous y voyez un procédé aussi efficace que le soutien social.
Quand vous consignez vos problèmes ou l’histoire de votre vie, vous êtes obligé de les ordonner. Par définition, une phrase a un sujet, un verbe et un complément : vous devez vous emparer de ce que vous ne comprenez pas vraiment, l’analyser, établir des liens de cause à effet, ce qui vous aide à affronter les expériences négatives. Écrire à propos de ses problèmes peut aider à les surmonter et à gagner en bonheur et en maturité.
Quel est le meilleur conseil que vous ayez reçu ou donné pour être heureux ?
Un des meilleurs conseils que je connaisse est celui-ci : quand quelque chose vous perturbe, quand vous êtes malheureux, demandez-vous si cela comptera encore dans un an. Peut-être que vous êtes ennuyé par un problème professionnel ou conjugal ? Projetez-vous dans un an. Il est possible que le problème ait encore de l’importance à ce moment-là, mais le plus souvent, ce ne sera pas le cas. Quoi que vous expérimentiez maintenant, ce n’est pas aussi primordial que vous le pensez !
sciences humaines
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