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Pourquoi les mesures de la BCE sont vouées à l'échec

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  • Pourquoi les mesures de la BCE sont vouées à l'échec

    Le « QE » à l'européenne est donc lancé. Jeudi 2 octobre à Naples, Mario Draghi a voulu convaincre que les mesures détaillées pouvaient être efficaces. En réalité, personne - à commencer par les opérateurs de marché - ne croit que ce programme pourra modifier radicalement la donne macroéconomique en Europe.

    La politique de la BCE
    Rappelons ce que la BCE a, pour le moment, annoncé, depuis le 5 juin. D'abord, elle a ramené ses taux directeurs au niveau le plus faible possible, aujourd'hui le taux directeur est à 0,05 %. Sans impact sur le crédit, pour le moment. Ensuite, elle a instauré des taux négatifs, aujourd'hui à -0,20 % pour la facilité de dépôts. Ceci a permis de libérer 15 milliards d'euros pour l'ensemble de la zone euro sur les 39 qui étaient fin mai sur cette facilité. L'impact est donc faible et l'abaissement de ce taux négatif n'a pas permis de libérer encore de la liquidité. Troisième mesure : le TLTRO, cette opération de prêts à 4 ans de la BCE aux banques. La première opération a fait un « flop » et, selon Christopher Dembik, économiste chez Saxo Bank à Paris, la session de décembre ne s'annonce guère mieux. Jusqu'à présent, le seul résultat concret de cette politique est la baisse forte de l'euro. Mais elle semble plus attribuable à la hausse du dollar. Et l'effet devise n'est sans doute pas suffisant pour contrebalancer la situation.


    Restait donc dans l'arsenal de la BCE les rachats d'actifs comme les « Asset Backed Securities » ABS, les prêts aux entreprises titrisés et les obligations sécurisées ou « covered bonds. » C'est le détail de ces rachats que la BCE a rendu public jeudi. Mario Draghi a estimé que le bilan de la BCE pourrait, au final, revenir au niveau du début de 2012, soit gonfler de 1.000 milliards d'euros.

    Manque de liquidités
    En réalité, cet objectif semble inatteignable. Christopher Dembik évalue certes l'ensemble du marché visé par la BCE à 970 milliards d'euros, mais le problème, comme le souligne Jacques Cailloux, économiste chez Nomura Securities à Londres, c'est la faible liquidité de ces titres. « Une grande partie des émissions de ces produits a été retenue sur le bilan des banques dans le cadre des opérations de refinancement de la BCE », explique-t-il. Le marché étant fort étroit, la BCE se retrouve face à deux problèmes. Le premier, c'est de fixer un prix pour les rachats ; le second, de devenir, sur un marché très étroit, le seul acteur d'importance sur le marché si sa politique de rachat est trop agressive. « Je ne crois pas que la BCE souhaite se retrouver dans la position de devoir se substituer aux acteurs privés sur ces marchés », estime Jacques Cailloux. Du coup, la BCE se retrouve prise en étau entre cette prudence et la nécessité de frapper fort. « La BCE achètera donc des actifs de façon réduite pour ne pas tuer le marché », conclut-il ;

    « Cannibalisation » des mesures ?
    Même problème quant à la définition des actifs rachetés. « La BCE a fait le choix de s'appuyer sur des actifs sûrs, mais les banques aujourd'hui préfèrent sans doute conserver ces actifs qui sont rares et dont elles ont besoin pour renforcer leurs bilans que d'obtenir auprès de la BCE de la liquidité », souligne Jacques Cailloux. Bref, là encore, la BCE a dû arbitrer entre sa volonté de se montrer prudente et la nécessité de créer de la monnaie dans l'économie réelle. D'autant qu'il risque d'y avoir une « cannibalisation » des différentes mesures de la BCE. « Pourquoi les banques auraient-elles recours à des produits qui sont complexes et chers à émettre pour aller les vendre à la BCE alors qu'elles peuvent obtenir aisément et à bon marché avec le TLTRO ! », s'interroge Jacques Cailloux...

    Un « QE » souverain ?
    Bref, tout semble converger vers un impact « clairement insuffisant », comme le note Christopher Dembik, de ces opérations. « Les 1.000 milliards d'euros évoqués ne sont même pas un objectif possible, c'est simplement une borne haute théorique », ajoute-t-il. L'ennui, c'est que la BCE n'a plus guère de cartouches dans sa gibecière. Il n'en reste finalement qu'un seul : le « QE » souverain ou l'achat massif de dette publique de la zone euro. Dans ce cas, la liquidité serait largement suffisante, mais ici on se trouve face à un refus radical et absolu de l'Allemagne, auquel s'ajoute le problème judiciaire posé par la Cour constitutionnelle de Karlsruhe. Selon Christopher Dembik, c'est impensable à court terme, mais c'est inévitable que la BCE tente d'y venir « à moyen et long terme. »

    Le choix de l'Europe
    En attendant, Christopher Dembik estime que la BCE ne fait que de la « communication » pour combler son impuissance réelle. Plus que jamais, la clé, c'est l'attitude de Berlin. L'Allemagne acceptera-t-elle la nécessité de faire un geste fort de politique économique capable de relancer la demande de crédits, là où le bât blesse réellement ? « Mario Draghi a lancé un appel à l'aide à Jackson Hole », rappelle Jacques Cailloux. Pour le moment, il n'a pas réellement été entendu. La zone euro répond de façon divergente. Pourtant, l'enjeu est clair. « Nous entrons dans une phase nouvelle de la crise où les politiques de la déflation compétitive sont contradictoires avec l'objectif de stabilité monétaire de la BCE », résume Jacques Cailloux. Si la zone euro ne peut dépasser cette contradiction, si elle ne fait pas le choix clair de la relance, alors elle sera condamnée à la stagnation au mieux, à la déflation, au pire. La situation devient très urgente pour Jacques Cailloux : « les marchés ont saisi les limites de la politique actuelle et les anticipations d'inflation vont encore reculer. » Plus que jamais, la balle est dans le camp d'Angela Merkel.

    la tribune fr
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