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UKRAINE-RUSSIE:Accusation de génocide : vers un scénario à la kosovare ?

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  • UKRAINE-RUSSIE:Accusation de génocide : vers un scénario à la kosovare ?

    Après la découverte de fosses communes dans la région de Donetsk, Moscou accuse le régime ukrainien de crimes de guerre et alerte l'opinion sur un éventuel “génocide” contre les habitants du Donbass. Une escalade inquiétante pour l'avenir


    Il ne se passe pas un jour sans que la presse nationale russe ne fasse état de la découverte de nouveaux charniers dans l'est de l'Ukraine [Le 23 septembre, une première fosse commune contenant les corps de 40 personnes a été découverte à 60 kilomètres de Donetsk. Aujourd'hui, on en serait à 400 corps. Les autorités russes en imputent la responsabilité à la Garde nationale ukrainienne. L'organisation humanitaire Human Rights Watch a appelé à une enquête indépendante]. Le Comité d'enquête fédéral a même lancé des poursuites contre le ministre ukrainien de la Défense, Valeri Gueleteï, ainsi qu'à l'encontre du chef de l'état-major Viktor Moujenko et du commandant de la 25e brigade des forces armées ukrainiennes, Oleg Mikas. Ils sont accusés d'organisation de meurtres, de recours à des méthodes et moyens de guerre interdits et de génocide.
    Au début des années 2000, les accusations de génocide contre les Albanais du Kosovo n'ont pas seulement résonné au procès de Slobodan Milosevic, mais ont également servi d'argument pour affirmer que les Albanais du Kosovo ne pouvaient plus vivre sous l'autorité de Belgrade. Par la suite, cela a favorisé la reconnaissance de l'indépendance du Kosovo par la plupart des pays occidentaux. Le gouvernement russe et la classe politique soutenaient majoritairement Belgrade, et la Russie n'a pas reconnu le Kosovo. Ce qui n'a pas empêché Moscou d'utiliser plus tard le précédent kosovar.

    Déjà en Ossétie du Sud

    Ainsi en août 2008, Vladimir Poutine, alors Premier ministre, qualifiait de “génocide” les événements d'Ossétie du Sud [l'attaque de la capitale, Tskhinvali, par l'armée géorgienne, qui a déclenché l'intervention militaire de la Russie]. Dmitri Rogozine, représentant permanent de la Russie à l'Otan, taxait le président géorgien Mikheïl Saakachvili de “criminel de guerre ayant véritablement organisé un nettoyage ethnique”. Cette accusation de génocide avait alors légitimé la reconnaissance par la Russie de l'indépendance de l'Ossétie du Sud, comme de celle de l'Abkhazie [autre république sécessionniste de Géorgie].

    Le cas du Kosovo, puis celui de l'Ossétie du Sud, a ouvert la voie à un type de raisonnement particulier dans la reconnaissance de nouveaux territoires. De fait, tant qu'il n'y a pas d'accusation de meurtres de masse, de nettoyage ethnique ou de génocide, la sauvegarde de l'intégrité territoriale du pays "mis en cause" (Serbie, Géorgie) est privilégiée. On reconnaît alors l'existence d'un conflit difficile à arbitrer entre les peuples en question, mais on estime que leur réconciliation est en principe possible. Tandis que si le mot “génocide” est prononcé, la voie de la réconciliation est fermée. Car il est impossible de vivre avec ceux qui ont voulu ou qui veulent vous exterminer.

    Moscou maintient sa ligne dure dans l'est de l'Ukraine

    En ce moment, il semblerait que l'on essaie d'appliquer le scénario kosovar dans l'est de l'Ukraine, ou plutôt à ce territoire aux frontières mouvantes que les insurgés locaux, leurs sympathisants de la classe politique russe et nombre de commentateurs appellent Novorossia [la Nouvelle Russie]. Notons que les informations concernant les charniers sont apparues dans la presse russe au lendemain des négociations de Minsk [le 5 septembre], de l'accord de cessez-le-feu entre les indépendantistes et Kiev et de la reconnaissance par Kiev du statut spécial des républiques populaires de Louhansk et Donetsk. Le Kremlin semblait alors avoir moins à cœur de se porter garant de l'indépendance des deux républiques autoproclamées que de préserver l'intégrité territoriale de l'Ukraine (la Crimée en moins, bien sûr) et de s'assurer une zone d'influence stable et un joker dans toutes les négociations futures avec Kiev.

    Aujourd'hui, on entend de plus en plus résonner ce mot, “génocide” ; on organise à Moscou des marches du souvenir ; on ouvre des enquêtes, y compris celle qui met en cause un ministre sous l'autorité directe du président ukrainien. Tout cela signifie que le Kremlin n'a finalement pas renoncé à sa ligne dure dans l'est de l'Ukraine. D'un autre côté, le scénario à la kosovare ne peut porter ses fruits que s'il fait l'objet d'un large consensus international. Et la Russie va avoir beaucoup de mal à faire qualifier de génocide la situation dans l'est de l'Ukraine par ses homologues occidentaux.


    le courrier international
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