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Définir l’économie politique avec J. S. Mill

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  • Définir l’économie politique avec J. S. Mill

    Fidèle à son intérêt pour l’histoire de l’économie, Contrepoints vous propose cette série documentaire sur l’essai de l’un des plus influents penseurs libéraux du XIXe siècle, John Stuart Mill.

    L’économie politique a posé de nombreux problèmes épistémologiques et a suscité de profondes interrogations, et parfois des débats ou des controverses, chez tous ceux qui se sont intéressés aux sciences humaines. Discipline relativement nouvelle et surtout émancipée d’une forme et d’un objet qui l’enfermaient dans un mode de fonctionnement intellectuel principalement tourné vers l’action, l’économie politique a probablement été le premier champ d’étude, le premier domaine d’investigation (philosophie bien-sûr mise à part) à s’imposer comme science sociale ou morale, entendons par là, une science qui porte son attention sur un objet autre que l’explication et la compréhension de la matière.

    Avant de tracer un sillon pour des sciences humaines aux objets de plus en plus pointus et aux méthodes aussi précises que diverses1, l’économie politique a dû affronter les hésitations et les doutes inhérents à la construction d’un édifice théorique novateur. Les difficultés rencontrées par les bâtisseurs de cette science nouvelle tenaient autant à la jeunesse d’un champ de réflexion inexploré et donc peu ou mal organisé (par rapport aux sciences de la matière déjà mieux rodées au niveau méthodologique), qu’à l’objet précis (et la méthode qu’il induit) retenue dans le cadre de l’économie politique. Pour mettre de l’ordre dans ce chantier théorique, nombreux sont ceux qui ont essayé de proposer une définition et d’élaborer une méthode permettant à l’économie politique de se développer sur des bases saines et de se comparer aux sciences de la matière, en s’affirmant comme une transposition de la méthode scientifique au domaine non-matériel, c’est-à-dire humain aux sens spirituel, social, moral.

    Parmi tous ceux qui se sont attelés à cette entreprise délicate, John Stuart Mill est probablement celui qui a le plus contribué à l’organisation de ce nouveau champ scientifique, par sa préoccupation permanente de vouloir en définir le domaine d’investigation ainsi que la méthode, comme en témoigne son essai intitulé Sur la définition de l’économie politique et sur la méthode d’investigation qui lui est propre. La rigueur intellectuelle dont il a fait preuve dans cet essai, ainsi que l’esprit de finesse et de nuance manifesté dans ses écrits par une certaine prudence2 et reconnaissance des positions adverses ou antagonistes, lui permettent d’envisager le problème épistémologique posé par l’économie politique dans sa globalité et de proposer une méthode de travail subtile et répondant par avance aux critiques qu’on pourrait trop rapidement formuler.

    La formulation du titre de son essai, Sur la définition de l’économie politique et sur la méthode d’investigation qui lui est propre, révèle clairement le plan suivi par Mill pour aborder le problème de l’économie politique et démontrer la nécessité d’adopter une approche individualisante pour expliquer les phénomènes sociaux : Mill va dans un premier temps essayer de parvenir à une définition satisfaisante de l’économie politique et de délimiter précisément son champ d’investigation, avant de proposer la méthode qui lui semble la plus appropriée à la science qu’il a lui-même définie plus tôt. Il expose dans une troisième et dernière partie de son raisonnement les limites de la méthode proposée et les solutions qui permettent d’y recourir, ce qui sera l’occasion d’une réhabilitation de la méthode a posteriori. On notera la rigueur scientifique dans l’approche « définition-méthode-limites » de Mill qui donne un ton résolument épistémologique3 à son essai et qui ne peut qu’encourager une démarche d’analyse de ses propos tout aussi respectueuse de cet effort et de cette progression logique.

    Nous verrons dans un prochain article comment s’y prend Mill pour parvenir à une définition satisfaisante de l’économie politique.

    Au premier rang desquelles on trouve bien sûr la sociologie, qui semble s’être construite en réaction à la science économique fondée sur un esprit révolutionnaire et rationaliste (esprit de l’Encyclopédie) et au modèle contractualiste. La sociologie serait née d’une prise de conscience des limites d’une pensée extrêmement rationaliste, et d’une réflexion sur une vision révolutionnaire qui voudrait refonder la société sur le contrat, au mépris des minorités et des identités diverses (Bouvier). ↩

    Même s’il est vrai, comme on le verra, qu’il pose avec force la méthode dite a priori comme la seule méthode valable « par laquelle il est possible d’atteindre la vérité dans tout domaine de la science sociale », position tempérée par la reconnaissance de la pertinence de la méthode a posteriori, ce qui le démarque d’une approche purement individualiste qu’on pourrait attribuer à l’économie standard actuelle. ↩

    L’épistémologie étant entendue comme « l’étude critique des principes, des hypothèses et des résultats des diverses sciences destinée à déterminer leur origine logique, leur valeur et leur portée objective », article « épistémologie », A. Lalande, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, PUF, 2002.

    contrepoints ↩
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