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Présidentielle : Kalthoum Kannou, la femme qui veut diriger la Tunisie

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  • Présidentielle : Kalthoum Kannou, la femme qui veut diriger la Tunisie

    PORTRAIT. Kalthoum Kannou, une juge chevronnée, est l'unique femme parmi les 27 candidats à briguer un mandat pour investir le Palais de Carthage.

    Par Nehed Jendoubi

    À quelques jours de la présidentielle, la campagne électorale tunisienne bat son plein avec une note féminine, une seule. Celle-ci est apportée par Kalthoum Kannou, une juge opiniâtre qui n'est pas là pour amuser la galerie. Sa volonté de fer s'appuie sur un parcours brillant qu'elle a assuré depuis de nombreuses années. C'est que son combat pour l'indépendance de la justice, l'égalité sociale et, surtout, son opposition déclarée au régime du président tunisien déchu "Ben Ali" ont fait d'elle une personnalité respectée en Tunisie.

    Une militante de longue date
    Le parcours militant de Kalthoum Kannou commence en 1981. Elle a alors 22 ans. C'est le moment où cette jeune femme fougueuse intègre la faculté de droit de Tunis et, dans la même année, l'Union générale des étudiants tunisiens. Très active, elle navigue entre cours à l'université, vie syndicale et son travail commencé très tôt pendant l'année du bac. La voilà qui passe sa licence et obtient dans la foulée le concours de la magistrature.

    Devenue magistrate, elle s'engage de plus belle
    En 1999, elle est élue au sein du bureau exécutif l'Association des magistrats tunisiens (AMT). Problème : l'association et tout le système juridique tunisien sont aux mains de Ben Ali. Celui-ci ne tarde pas à se manifester à elle. Le président lui envoie son ministre de la Justice pour la convaincre de devenir la présidente de l'association. En contrepartie, il propose son "aide". Kalthoum Kannou refuse et affirme qu'elle ne sera jamais porte-parole du gouvernement. La sanction tombe vite. Harcèlement policier, traque, pressions, menaces, arbitraires..., tout y passe. Pendant dix ans, le régime fait tout pour lui nuire, mais elle ne se laisse pas intimider.

    Le régime Ben Ali s'acharne sur elle
    Première "punition" : une mutation arbitraire au centre du pays, à Kairouan, "pour limiter son influence". Elle réplique. La syndicaliste se saisit d'Internet et des réseaux sociaux en pleine expansion dans les années 2000, et ce, malgré un système de contrôle et de censure très puissant instauré par l'État et par le ministère de la Communication. Sous un pseudo, elle dénonce et attaque sans relâche Ben Ali et son entourage. Celui-ci commence à prendre peur quand le nom de Kalthoum Kannou ainsi que son combat pour une justice libre et indépendante ont un écho à l'international. Devenue en 2010 commissaire à la Commission internationale de juristes (CIJ), la magistrate s'attaque de plus en plus à des dossiers sensibles et des personnes "intouchables" du clan proche de la famille Ben Ali. Dans une dernière manoeuvre d'intimidation, le régime la mute en 2010. Son tort est alors d'avoir lancé un mandat d'amener contre Moez Trabelsi, le neveu de Leila Trabelsi, l'épouse de Ben Ali, et d'avoir cherché à l'auditionner. Cette fois, la mutation l'envoie à 400 kilomètres de Tunis, à Tozeur. Elle n'y restera pas longtemps. Quelques mois après, le régime s'effondre sous la poussée de la révolution tunisienne du 14 janvier 2011.

    "Je suis une femme, je connais les problèmes que rencontrent les femmes"
    Féministe revendiquée, Kalthoum Kannou veut un vrai changement politique pour les Tunisiens. Sur la Radio Shems FM, elle a ainsi déclaré : "Le prochain chef d'État devra prendre des décisions urgentes sur les plans sécuritaire et diplomatique." Et de poursuivre : "Ma candidature est un message fort pour l'ensemble des Tunisiens. Elle signifie que la femme tunisienne peut entrer en concurrence avec les hommes dans les postes de décisions politiques." Bien que l'égalité entre hommes et femmes soit inscrite dans la Constitution et acceptée dans la conscience sociale tunisienne. Pour rappel, nombreux étaient les hommes qui sont venus manifester aux côtés des femmes après 2011 afin de sauvegarder et de consolider les acquis de la femme tunisienne, lesquels font d'elle aujourd'hui l'une des plus émancipées, cultivées et admirées du monde arabo-musulman.

    Une candidature féminine pas du goût de tout le monde
    Malgré ce fait, l'idée de voir une femme présidente de la République ne plaît pas à tout le monde. Kalthoum Kannou en a conscience. "Je sais que c'est difficile pour certains, mais le fait qu'une femme se présente à l'élection présidentielle est avantageux pour l'image de la Tunisie tant à l'intérieur qu'à l'extérieur, non pas seulement pour sa qualité de juge mais en tant que citoyenne tunisienne."

    Un programme innovant
    La magistrate ne dénigre pas pour autant le rôle des hommes dans ce combat déterminant. Pour le secteur éducatif par exemple qui enregistre une régression assez impressionnante depuis quelques années, elle affirme que le recours à la loi est primordial puisque l'enseignement est obligatoire jusqu'à l'âge de 16 ans. "Chaque père qui empêche sa fille d'aller à l'école doit pouvoir être sanctionné par la loi. Cette dernière doit intervenir et s'appliquer de manière rigoureuse", dit-elle. Son programme se différencie grâce à des idées simples mais qui peuvent changer beaucoup de choses, car il concerne les priorités des Tunisiens.

    Contre le terrorisme, pour la justice
    Dans son programme, un volet concerne le terrorisme. Son objectif : éviter que les jeunes soient attirés par le discours et les actes des extrémistes engagés dans ces actions violentes qui véhiculent ce genre d'idées. Le terrorisme qui fait encore très mal à la Tunisie et à son armée. Juge à la Cour de cassation, Kalthoum Kannou est marquée par son passé, mais n'en est pas pour autant aigrie. Bien au contraire, cette mère de famille de 55 ans entend pousser sa logique jusqu'au bout pour une Tunisie démocratique et juste, bien loin des pratiques des années sombres du régime de Ben Ali.
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