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Akli Moussouni: « L’agriculture s’est transformée en source d’inquiétude au plus haut niveau de l’Etat »

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  • Akli Moussouni: « L’agriculture s’est transformée en source d’inquiétude au plus haut niveau de l’Etat »

    Elle est presque passée inaperçue, mais la déclaration du secrétaire général du ministère de l’Agriculture et du Développement rural, faite récemment, fait froid dans le dos. En effet, ses services prévoient un taux de croissance du secteur agricole de 6 à 8% durant le quinquennat prochain (2015-2019) contre une moyenne de 13% réalisée durant les quatre dernières années. Pour l’expert agronome Akli Moussouni, la prétention même d’une croissance à deux chiffres comme annoncée par les pouvoirs publics n’a jamais été enregistrée par le secteur. « Cela relève du pur mythe », affirme-t-il. Les statistiques agricoles ont été largement manipulées, elles ont totalement perdu de leur crédibilité. La sécheresse enregistrée actuellement s’ajoute, selon lui, à un ensemble d’effets négatifs contre lesquels l’Etat n’a jamais pris des mesures atténuantes. Selon lui, le consommateur algérien doit se préparer, à partir de 2015, à subir un marché très contraignant de produits agricoles trop chers et de très mauvaise qualité.


    Reporters : Les pouvoirs publics prévoient un taux de croissance de 6 à 8% durant le quinquennat prochain (2015-2019) contre une moyenne de 13% réalisée durant les quatre dernières années, selon le secrétaire général du ministère de l’Agriculture et du Développement rural, Fodhil Ferroukhi. Quelle analyse faites-vous de ces prévisions plutôt pessimistes ?

    Akli Moussouni : C’est une déclaration inquiétante, qui cache mal la déconfiture d’un secteur de souveraineté. D’abord, de par l’estimation du taux de développement estimé à 13 % durant le quinquennat précédent qui relève d’un mythe, sachant pertinemment qu’aucune composante de ce secteur n’a échappé à l’anarchie qui s’est exprimée par des crises répétitives par rapport à tous les produits agricoles (lait, pomme de terre, tomate, céréales, légumes secs…) qui ont tenu en haleine les pouvoirs publics, qui, mis dans une camisole de force, n’ont pu s’en sortir face au consommateur qu’en recourant à l’importation. Cette situation s’est compliquée par le fait que des territoires et des plantations entières ont été massacrés par les mauvaises conduites culturales. Et dans tout cela, les opérateurs n’ont jamais été accompagnés par des instituts techniques qui plutôt se sont investis dans des missions protocolaires. En conséquence, ce secteur économique en (théorie) s’est transformé en source d’inquiétude au plus haut niveau de l’Etat. En clair, il n’y a pas eu de développement de ce secteur d’une manière significative. Les statistiques agricoles ont été largement manipulées, elles ont totalement perdu de leur crédibilité. Par rapport aux estimations prochaines de taux de croissance réduites de moitié (6 à 8%), ce genre de déclaration pose problème à deux niveaux. D’abord, si on a cru à un taux de croissance de 13 % jusqu’ici, quel est ce problème majeur qui peut réduire « cet élan de développement » de 50 %, une chute terrible aux conséquences incalculables à l’échelle de tout un pays ? En fait, en réponse à votre question, il y a lieu de retenir qu’il n’y a pas eu de développement de ce secteur qui va au contraire ralentir. C’est un secteur qui s’est figé depuis la révolution agraire, il ne fonctionne qu’à la limite du niveau des subventionnements l’Etat.

    Quelles sont les prévisions pour 2014-2015 avec cette étonnante sécheresse ?

    La hausse des prix des intrants agricoles qui dépendent essentiellement des importations, la démobilisation des agriculteurs qui subissent des contraintes permanentes, les maladies qui touchent le végétal comme l’animal, la dilapidation des terres agricoles par le phénomène d’érosion (éolienne et hydrique) et du sel (irrigation), le gaspillage de l’eau (techniques d’irrigation no économiques)… sont un ensemble d’effets négatifs qui s’accumulent à l’effet de sécheresse contre lequel l’Etat n’a jamais pris des mesures atténuantes et dont les symptômes ostentatoires se manifestent de plus en plus à travers des fruits et légumes de petits calibres et d’un aspect dégradant. En plus des rendements qui n’ont pas évolué. La situation telle qu’elle se présente n’autorise pas l’optimisme. En conséquence, le consommateur algérien doit se préparer à partir de 2015 à subir un marché très contraignant de produits agricoles trop chers et de très mauvaise qualité.

    Pourriez-vous nous donner un aperçu sur le secteur agricole aujourd’hui ?

    En termes de superficie et de vocation des territoires, il n’y a jamais eu d’expertise élaborée à l’échelle nationale. Le PNDA (Programme national de développement agricole), qui a généralisé le système d’attribution des aides de l’Etat, a contribué pleinement à la déperdition des vocations agricoles territoriales. Aussi, l’introduction anarchique de variétés étrangères a compliqué la situation en fragilisant les plantations vis-à-vis des aléas naturels (climat, maladies, infection parasitaires…), le tout conjugué à la faiblesse des rendements du fait de l’inadaptation de ces variétés (nationale et étrangère) à des contextes naturels locaux spécifiques à une multitude de différences qu’offre l’étendue de nos territoires qui devraient au contraire constituer une force pour une économie agricole diversifiée.


    Auteur: Yanis Koceyla
    reporters.dz
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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