Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Le capitalisme est amoral et c’est normal

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Le capitalisme est amoral et c’est normal

    Les Français aiment les entreprises mais pas le capitalisme. Selon Pascal Lamy, l'ex-directeur général de l'OMC, c’est aux patrons de faire de la pédagogie pour les faire changer d’avis.


    C’est un paradoxe tout hexagonal : selon les sondages, les Français déclarent à 90% aimer les entreprises … mais seulement 20% jugent que le capitalisme est un bon système. A la question :"Souhaitez-vous sortir du capitalisme " 30% des Français répondent oui... contre seulement 3% des Chinois ! C’est pour éclairer ce constat et réfléchir à comment améliorer l’acceptation de ce système qu’étaient conviés à débattre le philosophe André Comte-Sponville, le président de Danone Franck Riboud et le socialiste ex-directeur général de l’OMC Pascal Lamy, jeudi au Sommet de l’économie organisé par Challenges.

    Au patron, le retour de terrain : "La France est bien le dernier pays où l’on a ce genre d’état d’âme sur aimer ou pas le capitalisme ! s’exclame Frank Riboud. Dans les pays émergents, ils se posent pas de questions, tout le monde est plongé dedans et y va à fond. Quand je vois le niveau des débats amers entre chefs d’entreprises et politiques en France, malgré mon optimisme légendaire, j’en deviens maussade."

    "L'Etat doit créer le conditions de la justice"

    Au politique, le décryptage psychologique : "Les Français aiment l’entreprise car c’est du concret, une collectivité humaine, mais ils rejettent le capitalisme en tant que concept car ils en rejettent l’inégalitarisme et ont peur de la mondialisation, relève Pascal Lamy. Les Américains voient que le système est injuste mais l’acceptent parce qu’ils sont persuadés que chacun à sa chance d’arriver au sommet. Les Français ne croient pas en la mobilité sociale, ils sont obsédés d’égalité. Cette diabolisation de l’économie de marché, exception française, est très nocive car, du coup, les gens n’adhèrent pas au modèle économique dans lequel ils vivent. Résultat : les Français sont les champions du monde du pessimisme !"

    Au philosophe, l’analyse théorique. "Les Français jugent le capitalisme injuste et immoral. Ce n’est pas faux mais ces reproches relèvent d’une erreur de raisonnement. Immoral, le capitalisme ? En fait, le système est plutôt amoral, c’est-à-dire nullement préoccupé de morale. Pour lui c’est hors sujet… ce qui est une condition de son efficacité! Le capitalisme est motivé par l’intérêt personnel et familial, par l’égoïsme et c’est pourquoi il fonctionne bien, car l’intérêt est un moteur très puissant. Le communisme, basé sur le partage, est évidemment plus altruiste… et du coup ne fonctionne pas, car il finit par démotiver tout le monde. Injuste, le capitalisme? Certes mais ce n’est pas la question. A l’échelle des grands nombres, l’économiste Thomas Piketty a raison de dire que, dans un monde capitaliste, la meilleure façon de mourir riche est d’être né riche. Sauf qu’un système économique n’est là que pour permettre de créer la richesse. Ensuite, c’est aux politiques, à l’Etat de la répartir et donc de créer les conditions de la justice. Chacun son rôle."

    La méthode douce de Lamy

    Mais comment faire comprendre aux Français qu’il vaut mieux essayer de s’accommoder et d’améliorer le système capitaliste plutôt que de le combattre? Comte-Sponville est pour le parler-franc: "Il faut briser les tabous et parler clairement. En France, on euphémise, dit qu’une entreprise est là pour «créer des richesses». En fait, il faudrait bien expliquer que le rôle d’une entreprise c’est de «faire des profits, gagner de l’argent» quitte à utiliser les mots qui fâchent, puis expliquer : sans profits, pas de R&D, pas d’investissements, pas d’embauches...Il faut marteler que ce n’est pas au monde de s’adapter aux nostalgies françaises mais bien à la France de s’adapter au monde d’aujourd’hui!"

    Pascal Lamy, lui, en bon politique, prône une méthode plus douce: "Lionel Jospin s’est fait battre pour avoir prononcé ce qui est pourtant une évidence: «l’Etat ne peut pas tout». Les Français ne voulaient pas l’entendre. Donc, pour faire passer le message, il faut d’abord recaler le GPS français sur le monde contemporain. Sans cacher les défis car le capitalisme mondialisé n’est pas univoque : à la fois il sort des territoires entiers de la pauvreté mais développe aussi les inégalités. Il faut bien faire comprendre ces enjeux et la classe politique, trop endogame et discréditée, n’est pas à la hauteur. C’est aux forces vives de la société civile de se bouger et particulièrement aux chefs d’entreprises et entrepreneurs. Or le monde de l’entreprise français est très mauvais en pédagogie. Les patrons n’interviennent pas assez dans le débat public, ou pas assez constructivement. Leurs instances ne font pas campagne pour informer sur les grandes questions économiques. Leurs think-tanks ont trois à quatre fois moins de moyens que leurs collègues en Allemagne, au Royaume-Uni, en Belgique, en Italie. Le monde du business français porte une lourde responsabilité dans l’ignorance voire la défiance du grand public !"

    Riboud croit aussi dans le rôle de l’Etat

    Qu’en dit le patron Riboud ? Un instant ému par le souvenir de son père Antoine, patron atypique connu pour sa fibre sociale, il n’a pas peur d’entrer dans le débat du rôle citoyen des entreprises : "Le rôle premier des entreprises est bien de dégager des profits mais elles doivent aussi, après, réfléchir à l’usage qu’elles en font et, si elles décident de prendre à cœur leur responsabilité plus globale, citoyenne, elles peuvent avoir un impact fantastique."

    Il en donne l’exemple du programme Dan’Cares déployé dans sa société Danone, qui assure la même couverture santé sur un certain nombre de soins fondamentaux (chirurgie, hospitalisation, maternité, consultation médicale, pharmacie) à ses 100.000 salariés à travers le monde. Cependant, il ne croit pas vraiment au rôle de modèles qu’on veut attribuer aux patrons : "Les PDG sont des humains comme les autres, parfois bons, parfois mauvais, parfois avides, parfois, sociaux mais ce n’est pas au vu du comportement des têtes d’affiches du CAC40, qui représentent une toute petite minorité des chefs d’entreprise, qu’il faut juger du capitalisme!" Et Riboud croit aussi dans le rôle de l’Etat: "je ne vais pas me faire des amis mais il faut bien poser des règles et obligations sociales pour équilibrer les rapports de force dans les entreprises. Sinon, dans le dialogue social, face aux pressions, les employés les plus modestes, ceux des plus petites entreprises, n’arriveraient pas à faire valoir leurs droits." Au final, entre le philosophe, le politique et le patron, n’est pas le plus libéral qui l’on croit…

    Challenges

  • #2
    Ce modèle c’est celui de la loi du plus fort, de la concurrence déloyale internationale, du dumping social, de la spéculation débridée, etc.
    "When I saw the Hoggar Mountains, my jaw dropped. If you think of Bryce, or Canyonlands National Park, you're close, but the Hoggar Mountains are more spectacular." David Ball, Empire of sands

    Commentaire

    Chargement...
    X