Annonce

Réduire
Aucune annonce.

La double victoire du 11 décembre 1960

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • La double victoire du 11 décembre 1960

    «Vive le FLN!» criait le peuple algérien sorti, pour la première fois, manifester ce jour-là à l'occasion de la visite de De Gaulle. Sur un autre registre et pour la femme algérienne, le 11 décembre 1960 est aussi une journée historique. Pourquoi? Rappel des faits...

    Moment fort! L'un des plus importants pans de notre histoire de Libération nationale a eu lieu le 11 décembre 1960. Il y a donc 54 ans jour pour jour. Ce jour-là, à Alger, les Algériens sont sortis dans la rue manifester leur union derrière le FLN et le Gpra. En fait, les Algérois s'exprimaient à leur tour et après les populations des différentes villes où est passé le général de Gaulle qui effectuait une visite en Algérie. Capitale oblige, ces manifestations ont été, à l'époque, les plus visibles à l'international.

    La concentration des journalistes, venus couvrir le voyage officiel du chef de l'Etat français, a donné à ce soulèvement une tonalité et une portée plus grandes que les autres manifestations dans diverses régions du pays. Ceci étant et aux cris «Vive le FLN!», «Vive le Gpra!», «Vive Ferhat Abbas (le président du Gpra)!», les Algérois ont démontré que la France ne pouvait pas avoir plusieurs interlocuteurs dans le processus d'autodétermination annoncé en septembre 1959 par De Gaulle.

    En effet, le président français avait tenté de semer le doute sur la représentativité du FLN et du Gpra. L'objectif de cette politique se retrouve dans le fameux slogan de «l'Algérie algérienne» qu'il avait lancé. Le peuple algérien sorti en masse dans les rues, tout au long de ses étapes, a coupé court à cette tentative politicienne. Ces manifestations du 11 décembre 1960 sont immortalisées pour l'éternité avec la photo des manifestants massés à l'entrée du quartier d'El Aguiba de Belcourt (actuellement Belouizdad) face au cordon impressionnant de CRS. C'est dire la résonance médiatique qu'offrait la capitale. Tout ceci est connu.

    A chaque commémoration les écrits ne manquent pas pour décrire, dans le détail, ces manifestations qui avaient démarré à Diar El Mahçoul, sur les hauteurs de la capitale avant de se répandre au Clos Salembier (El Madania), La Redoute (El Mouradia), quartier où naquit et grandit le chahid Didouche Mourad, pour ensuite converger vers Belcourt où l'armée française s'était déployée en force. Jusque-là, nous n'apportons rien de nouveau aux lecteurs.

    Par contre, il y a un aspect de ces manifestations du 11 décembre 1960 qui n'a jamais été abordé. D'abord, que c'était la première fois que le peuple algérien est sorti dans la rue manifester son soutien au FLN depuis le déclenchement du 1er novembre 1954. Il y a eu certes, la grève des 8 jours en janvier 1957 qui était une autre forme d'expression. La propagande coloniale poussait jusqu'à dire, à l'époque, que la population était prise en otage par les commerçants et les travailleurs.

    La dernière manifestation des Algériens dans la rue remontait au 8 mai 1945 comme chacun le sait. Ensuite et c'est là que nous voulions en venir, au-delà de sa dimension politique, la manifestation du 11 décembre 1960 comportait une dimension sociétale unique dans les annales du peuple algérien. C'était la première de toute son existence que la femme algérienne a brisé ses chaînes qui la retenaient cloîtrée à la maison pour sortir faire entendre sa voix dans la rue.

    Auparavant ses sorties étaient limitées, codifiées socialement, organisées au sein de la famille. On peut les résumer par les visites familiales et le bain public uniquement. Même dans ces cas, il lui fallait être toujours accompagnée par un homme de la famille où à la limite un de ses enfants mâle. Il était hors de question de la voir déambuler seule dans la rue. Même à la maison, elle n'avait pas le droit de se montrer à la fenêtre ou au pas de sa porte. Les seules femmes algériennes que l'on pouvait rencontrer dans la rue étaient les femmes de ménage que le dénouement poussait à travailler chez les pieds-noirs. On les appelait toutes «la Fatma». Ce 11 décembre 1960 donc, ce fut comme une déflagration qui a pulvérisé un tabou aussi vieux que l'éternité.

    Toutes les femmes sans exception, ont peu à peu, au fur et à mesure que leur parvenait le mot d'ordre du FLN qui demandait à tous les Algériens sans exception aucune de sortir manifester, rejoint la foule de manifestants. Le voile dont elles ne s'étaient jamais séparé et qu'elles avaient pris dans un geste de réflexe avant de sortir a fini par tomber dans leur fuite pour échapper aux charges de l'armée coloniale qui avait utilisé, outre les armes à feu qui ont fait de nombreux morts et blessés, les gaz lacrymogènes (on disait gaz moutarde à l'époque parce qu'il piquait dans les voies respiratoires et aux yeux comme la sauce du même nom) largués par des hélicoptères. Elles fuyaient également les coups de crosse et de bâtons ainsi que les arrestations.

    Impossible, dans de telles conditions de retenir un voile retenu seulement par un de ses pans sous les aisselles. On le voit d'ailleurs sur les images d'archives. On voit toutes ces femmes courir en agitant le drapeau national et hurlant leur attachement à l'indépendance. Ce jour-là, les manifestants réclamaient la libération du pays. Ce jour-là aussi, les femmes venaient d'arracher leur libération! A la Journée internationale du 8 Mars, la femme algérienne devrait célébrer sa (vraie) journée nationale le 11 décembre de chaque année. C'est dans notre histoire!

    Zouhir Mebarki

    L'Expression 11/12/2014
Chargement...
X