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Yasmina Khadra: J’ai le droit de dire ce que je pense

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  • Yasmina Khadra: J’ai le droit de dire ce que je pense

    J'ignorais tout de la polémique dont Yasmina Khadra avait fait l'objet lors du dernier Sila que relate ce journaliste de l'expression qui par ailleurs taxe Yasmina khadra de "mi-fier mi-égocentrique" lorsqu'il répond qu'il n'a pas besoin de la presse algérienne car la gloire il l'a déja et pourtant ce n'est que la stricte vérité Yasmina Khadra a déjà une gloire qui a dépassé les frontières alors de le dire n'est que l'expression d'une vérité et non pas un non vérité comme le dit le journaliste de l'expression.
    En tous les cas, prendre la défense de Benmalek était tout à son honneur car les propos émis par ce journaliste –prêcheur moralisateur d’el Khabar ne sont pas des paroles vides de sens et il ne doit pas oublier sa fonction et la portée des mots qu'il emploie et puis la réponse de Yasmina Khadra ne pouvait être qu'à hauteur de la gravité propos émis et Yasmina Khadra avait ce droit de dire ce qu'il pensait, tant pis pour le journaliste froissé d'Al Khabar.


    ===

    Son passage récemment au Sila n’a laissé personne indifférent. L’auteur de l’Attentat et Les Sirènes de Bagdad a fait récemment l’objet d’une polémique suite à son attaque verbale rappelle-t-on envers un journaliste qui aurait mal critiqué O Maria de Anouar Benmalek.

    Ne pouvant rester insensible, Yasmina Khadra avait pris la défense de Benmalek qui, d’après le dit article, aurait blasphémé l’Islam dans son ouvrage. C’est un Yasmina Khadra «écoeuré» d’après ses dires, que nous avons rencontré au Sila lors de la vente-dédicace qui lui était consacrée au stand Sédia. Il nous avouera, mi-fier mi-égocentrique, ne pas avoir besoin de la presse algérienne, car la gloire, il l’a, en atteste tout le parterre de gens qui constitue son auditoire venus le voir et acheter ses livres ce jour-là.

    Il s’adressera à nous de ce fait par des propos qui juraient avec la prétention, n’était cette révolte consumée contre la haine, l’incompréhension, bref la bêtise humaine qui le poussait à cet extrême-là.

    Dans cet entretien qu’il nous a accordé par voie électronique, Yasmina Khadra nous avouera, tout de même, être triste d’en arriver à de tels propos...S’en suivra, en tout cas une polémique-ironie du sort- engendrée de ce «malentendu» occasionné dans le feu de l’action lors de son passionnant et passionné débat...Le trop-plein de «verve» de Yasmina Khadra serait-il mal interprété? Cela dit, c’est un écrivain résolument déterminé à dire et à écrire ce qui lui semble être le plus «juste» et faire entendre sa voix de par une audience qui lui est acquise, notamment grâce à l’étranger et cette langue française qu’il chérit tant, qu’il se confiera à nous... Ce qui est sûr, c’est que Yasmina Khadra a très gros sur le coeur. Ecoutons-le avant de trancher.

    L’Expression: «On n’est pas criminel de naissance, mais on le devient. C’est la vie qui nous façonne, qui nous forge» vous avez déclaré un jour à un collègue. On comprend par là vos intentions réelles quand on lit attentivement vos livres, sinon les derniers à savoir L’Attentat et Les Sirènes de Bagdad. Votre démarche serait-elle donc: expliquer, pour comprendre, d’autant que dans ces deux romans, vous tentez d’expliquer comment on arrive à devenir kamikaze. Etes-vous d’accord?


    Yasmina Khadra: Expliquer n’est pas cautionner. J’essaye seulement de donner un sens à l’absurde. Je pars d’un principe simple: rien ne relève de la fatalité. Ce qui nous arrive, de bon ou de mauvais, nous le fabriquons de nos mains. Ou nous sommes victimes ou nous sommes responsables. La nature nous a fait intelligents, mais terriblement fragiles et vulnérables. Une rencontre sur notre chemin, un incident à une bretelle de notre existence, en somme un accident de parcours, et tout pourrait nous échapper. Raison pour laquelle nous devrions être attentifs à ce qui nous arrive. Le kamikaze ne rêve pas de mourir et de tuer.

    Il rêve de vivre. Mais quand ses rêves sont évincés, quand ses espoirs sont confisqués, il prend conscience du danger qui le menace et cède à la panique. Alors, il devient l’otage, puis l’instrument de ses angoisses. Il n’est plus dans la lucidité mais dans une colère sourde qui le possède tel un démon. Le reste, le saut final, est une sorte de conjuration. Il se délivre du mal qu’on lui fait, du mal qui le ronge. J’écris pour dire cet itinéraire vertigineux, cette dérive traîtresse qui conduit de l’autre côté du miroir. De cette façon, j’espère éclairer les consciences qui ont tendance à se dissoudre dans leur noirceur.

    Quel sentiment avez-vous suite à cette polémique, qui vous oppose au journaliste d’El Khabar, dont l’article a nui, d’après-vous, à Anouar Benmalek? Une affaire qui vous a amené tout de même à dénigrer toute la presse algérienne, tous organes confondus?

    Toute la presse? N’exagérons rien. J’ai protesté contre la conduite d’un SEUL journaliste, et il est d’El Khabar. Je n’ai jamais mis tous les journalistes dans un même sac. C’est M.Jerri qui essaie d’ameuter tout le monde, croyant ainsi défigurer mon image. Il peut toujours courir. Nous sommes tous des Algériens, et nous n’avons pas de secrets les uns pour les autres. Les lâches sautent aux yeux, et les braves aussi. Puisqu’il s’agit de liberté d’expression, M.Jerri a le droit de dire ce qu’il veut. Et moi, j’ai le droit de dire ce que je pense. Cela s’arrête là.

    Ne pensez-vous pas que traiter un journaliste de «terroriste» est un peu exagéré? qu’avez -vous à répondre là-dessus?

    Vous défendriez le journaliste concerné ou la déontologie? Le fait de pouvoir écrire dans un journal n’autorise personne à mettre en péril la vie d’autrui. Par les temps qui courent, un excès de zèle ou un accès de colère pourrait revêtir des conséquences impensables. Le journaliste d’El Khabar a gravement fauté à l’encontre d’Anouar Benmalek. J’ai rencontré Anouar à Saint-Etienne, une semaine avant de venir à Alger pour le Salon. J’ai trouvé un homme terrassé. Il m’a brisé le coeur. Savez-vous que suite à cet article virulent, Anouar Benmalek a reçu des menaces de mort et vu débarquer chez lui la DST, la police, avant d’être contraint de se séparer de ses enfants, placés en lieu sûr, et de ne se déplacer qu’avec des gardes du corps? Vous trouvez ça raisonnable, vous? Moi, pas. Et je considère l’écrit aussi responsable que le fait. Ce qu’a fait ce journaliste est criminel (je n’ai pas dit terroriste, mais criminel), et je le maintiens. Personne n’a le droit, avec une arme ou avec des propos, mettre la vie d’autrui en danger. Nous avons eu suffisamment de morts comme ça. J’ai écrit dans Les Agneaux du Seigneur: «Il n’y a aucune différence entre celui qui désigne la cible et celui qui lui tire dessus». Ça devrait donner à réfléchir.

    On sent chez l’écrivain que vous êtes, permettez-moi de vous le dire, une certaine montée en puissance de je ne sais quoi de révolte, jusque-là contenue...Vous êtes un peu à l’image de votre personnage de Les Sirènes de Bagdad.

    Erreur. Je n’ai pas d’affinités avec mon personnage. J’essaye seulement de l’accompagner à travers sa propre descente aux enfers. Certes, j’ai de la colère. Sauf que je la situe constamment en dehors de mes textes. Je suis en colère contre la mauvaise foi qui sévit chez nous, contre la lâcheté de certains journalistes de chez nous qui, heureusement, ne sont pas représentatifs de la presse algérienne dont je salue le courage et l’intégrité, en colère contre cette mentalité rétrograde qui particularise certains intellectuels toujours prêts à contester et à médire d’autres Algériens, attitude qui nous maintient dans la négation de nous-mêmes, torpillant ainsi nos rares espoirs et nos rares chances de nous en sortir.
    Mon dernier passage au Salon d’Alger m’a réconforté. Le public venu nombreux à ma rencontre est éloquent. Nous croyons encore en notre salut. C’est l’essentiel. Que les mauvaises langues se taisent pour que l’Algérie chante sa rédemption!

    Vous n’y allez pas non plus de main morte, avec les Occidentaux mais tout aussi, en s’attaquant aux Arabes passifs. Une sorte de neutralité: expliquer sans juger, le rôle de l’écrivain, (vous même) mais aussi de l’intellectuel que vous récusez pourtant dans votre roman.

    Je ne suis pas manichéen. Je donne à voir une réalité, et je me dois de la présenter dans son ensemble. Il est étonnant de constater, qu’à l’heure où le monde nous traîne dans la boue, diabolisant les Arabes et les musulmans, nos intellectuels préfèrent continuer de faire les saintes-nitouches lorsqu’ils ne dénigrent pas carrément ceux qui tentent de réagir. Malek Benabi plaignait les colonisés, mais redoutait férocement les colonisables. Un colonisé peut, un jour, vouloir se libérer. Un colonisable est persuadé d’être incapable de vivre sans maître. Mon combat rejoint un peu l’inquiétude de notre éminent philosophe dont je vous recommande vivement la lecture de son Les conditions de la renaissance algérienne. Ce petit opus est d’une actualité saisissante. Sa lucidité est, à elle seule, un soleil.

  • #2
    Vous dites que vous avez «grandi dans le malentendu». Est-ce là l’objectif que vous vous êtes assigné à travers votre écriture: dissiper les malentendus, historiques de surcroît?

    Le malentendu est à l’origine de tous les malheurs. Si nous réclamons un soupçon d’éclaircie, c’est dans le souci permanent de dissiper les malentendus. Souvent, cet avatar est en nous. Nous sommes les premiers à nous tromper sur nous-mêmes. Commençons d’abord par situer la faille qui fait prendre l’eau à nos certitudes avant de se pencher sur les anachronismes alentour. Je crois que nous ne savons pas vraiment ce que nous voulons. Dans cette inaptitude à déceler nos intentions, nous en voulons à ceux qui avancent.

    «Le vrai racisme a toujours été intellectuel» est une phrase extraite de Les Sirènes de Bagdad. Que voulez-vous entendre par là?

    Exactement ce que j’ai écrit. Avec du recul, je dois admettre que la négation n’est pas exclusivement que de ce côté. Chez nous aussi, la ségrégation est en marche. Elle est clanique, «linguistique», et espère, avec les frustrations grandissantes des écrivains ratés, élargir son audience.

    Vous m’avait déclaré l’autre jour être «écoeuré» contre la bêtise humaine, cela s’entend et certainement contre la presse algérienne ou une frange d’entre elle... Cela vous inspirera-t-il pour votre prochain roman?

    Je ne le pense pas. Je suis triste d’en être arrivé à ces propos, mais depuis des années, j’entends des abominations, lis des papiers injustes, prétentieux, mensongers et je ne disais rien, espérant, à la longue, amener les détracteurs à s’assagir. Puis, le ton est passé de l’invective à la diabolisation, et là les sonnettes d’alarme se sont déclenchées. Il fallait réagir. J’ai réagi. Je ne prétends pas être un écrivain inexpugnable. Je respecte ceux qui n’aiment pas les livres. Et il y en a beaucoup, heureusement pour mon équilibre. Cependant, accepter que des gens qui ne vous lisent même pas, vous jugent, c’est dangereux. Certains me haïssent parce que j’écris en français. J’adore la langue française. Si elle était femme, je l’aurais épousée. Mais en quoi ce choix nuirait à ma sensibilité d’Algérien, en quoi remettrait-elle en question mon identité, ma religion, mes racines et mes combats? Il est temps de sortir la tête de la fange et de respirer l’air du temps. Je suis Algérien, je garde mon passeport algérien et je contribue à l’essor de la beauté de mon pays.


    Où en sont les négociations pour l’adaptation de votre livre L’Attentat au grand écran par Hollywood?


    La fin du tournage est prévue en juillet 2007. C’est un réalisateur américain d’origine libanaise qui a été choisi. Ziad Douéri, auteur de Beiruth West, un jeune qui promet. Je suis content de ce choix.

    Enfin, après a Rose de Blida, une petite histoire teintée de mélancolie amoureuse, êtes-vous tenté de refaire cette expérience. J’entends par là, laisser de côté ou du moins pour un moment, les sanglantes pages de l’histoire pour vous focaliser sur la vôtre?

    J’espère un jour raconter mon pays dans sa beauté, transcender les fausses notes et supplanter les discours négatifs. Pour cela, apprenons d’abord à nous respecter. C’est un vaste programme, mais c’est notre dernière roue de secours pour sortir de notre mauvaise passe.

    Par l'Expression

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