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Le recours aux emprunts obligataires préconisé pour faire face à la crise n’est pas la panacée, au mieux un pis-all

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  • Le recours aux emprunts obligataires préconisé pour faire face à la crise n’est pas la panacée, au mieux un pis-all

    Le recours aux emprunts obligataires préconisé pour faire face à la crise n’est pas la panacée, au mieux un pis-aller

    TSA, Économie - le 27 décembre 2014 à 11 h 41 min - Par Dr Lachemi Siagh*.


    CONTRIBUTION. A l’issue de son Conseil des ministres restreint, le gouvernement a exploré certaines pistes en vue de faire face à la crise grave qui pourrait découler de la chute drastique des prix du pétrole et de la baisse substantielle des recettes en devises pour le pays. Parmi ces mesures, le recours aux emprunts obligataires en vue de financer les grands projets d’infrastructure de l’Etat a été retenu.

    Les obstacles majeurs à cela sont nombreux. Il s’agit de la non disponibilité de ressources longues, la nature non prêtable des liquidités des banques en raison du ratio de transformation imposé par la Banque centrale, la concentration des liquidités aux mains de seulement deux acteurs majeurs que sont la BEA (dépôts de la Sonatrach) et la CNEP Banque (épargne des ménages), en dehors du Trésor (fonds de régulation) avec ce que cela a comme conséquences en matière de ratio de division des risques. Une autre difficulté majeure d’un autre ordre, sera la disponibilité d’emprunteurs éligibles, capables de générer des profits et de rembourser leur dette.

    Avant d’analyser cette mesure il convient de préciser, pour le non initié, que l’emprunt obligataire est le recours au marché de la dette sans l’intermédiation bancaire. L’entreprise qui a recours au marché obligataire émet son propre papier commercial qui est acheté par les banques, les sociétés d’assurances et autres institutions financières. Dans ce cas il s’agit d’un emprunt obligataire corporatif ou « corporate bond ». La référence ou benchmark en matière de pricing est la courbe de taux. Cette courbe qui était publiée régulièrement ne l’est plus depuis 2010. Il faudra donc la réactiver avec les emprunts sur de multiples maturités du Trésor.

    L’emprunt peut aussi être destiné au grand public à savoir, les particuliers, les commerçants et les entreprises en plus des institutionnels. Il s’agit dans ce cas d’un emprunt grand public ou « retail bond ». Les conditions de prix et de mise en marché sont sensiblement différentes dans ce deuxième cas dans lequel la référence est le taux de dépôt à la CNEP et dont la mise en marché nécessite une longue et coûteuse campagne de communication.

    L’emprunt obligataire est un produit attractif et très flexible. Grâce au jeu de la concurrence, les taux (coupons) sont très concurrentiels par rapport aux crédits classiques. Le remboursement du principal est modulé en fonction des capacités de remboursement de l’entreprise et de ses cash-flows. Les remboursements peuvent être annuels ou in fine. Les titres émis peuvent être sériés, ou encore avec une option intégrée, rétractables ou extensibles.

    C’est un mode de financement qui génère beaucoup d’avantages, tant pour l’émetteur que pour les souscripteurs. L’emprunt obligataire peut faire partie d’un financement structuré, qui est, un financement qui n’entre pas dans le cadre des financements classiques tels que le crédit acheteur ou fournisseur. Il s’agit, en effet, d’opérations d’ingénierie financière visant à adapter un financement à un cas particulier.
    Face à ces avantages, peu d’entreprises peuvent y accéder au vu des conditions d’éligibilité. Les entreprises publiques, puisque c’est d’elles dont il s’agit, peuvent-elles remplir ces conditions ?

    L’emprunt obligataire corporatif

    Ne peuvent accéder à ce marché que les entreprises (SPA) d’une certaine taille et disposant d’au moins deux bilans certifiés par le commissaire aux comptes et approuvés par l’Assemblée générale de l’entreprise. Les entreprises, selon les meilleures pratiques, doivent se soumettre à une transparence totale. En plus de soumettre le même dossier que pour un emprunt classique à savoir, un dossier administratif (statuts, registre de commerce, informations sur les actionnaires et dirigeants, etc.), un dossier financier, comprenant les trois derniers bilans et rapports des commissaires aux comptes ainsi qu’un business plan détaillé avec des projections financières sur cinq ans et dévoilant dans une notice d’information les grandes lignes des stratégies de l’entreprise.

    En plus d’un audit juridique et administratif le travail d’ingénierie financière consiste à faire l’analyse financière, examiner les différents risques, dont les risques commerciaux, opérationnels, de taux, de liquidité, etc. Examiner les capacités d’endettement et surtout les capacités de remboursement au regard des projections de cash-flows qu’il faudra valider. Le montage consiste à trouver les durées de l’emprunt qui conviennent le mieux aux capacités de remboursement de l’entreprise et la structure de financement la moins onéreuse. Des actifs doivent être apportés en garantie en cas de besoin.

    Les entreprises publiques sont-elles prêtes à ces exigences de la réglementation en matière de transparence, sans que le conseiller qui les accompagne et qui traite leurs chiffres ne fasse les frais de cet excès de transparence, requis par ce marché comme ce fut le cas il y a voilà presque cinq ans, pour un acteur du marché ?

    La plupart des entreprises publiques sont endettées et ont toujours reçu des aides de l’Etat et continuent de générer de la dette. Elles ne pourront prétendre recourir à ce marché sans la garantie de l’Etat. Dans ce cas, il est préférable de recourir aux crédits syndiqués des banques.

    Exempter des entreprises publiques, pour le seul motif qu’elles appartiennent à l’Etat, des conditions d’éligibilité comme l’avait fait la Commission d’organisation et de surveillance des opérations de bourse (COSOB) par le passé pour une entreprise surendettée, aux capacités de remboursement nulles et dont le premier responsable annonçait au même moment qu’il ne paierait pas ses dettes, enverrait un mauvais signal au marché et lui ferait perdre sa crédibilité.

    La COSOB qui est le chien de garde du marché doit valider le dossier d’emprunt du point de vue juridique, administratif et financier pour ensuite lui accorder son visa. Souvent en l’absence de rating, la COSOB exige pour les entreprise privées la validation des états financiers par un cabinet de renom, généralement KPMG, Hadj Ali, Deloitte, etc., qui analyse et valide ces informations. Pour l’intégrité du marché, cette rigueur doit également s’appliquer au secteur public. Le but du passage par l’emprunt obligataire est de rendre les dirigeants de l’entreprise responsables de la gestion de leur endettement, de veiller au remboursement de la dette à échéance et de mettre en place les règles de bonne gouvernance.

    Toutes les informations doivent, dans le cadre de la transparence requise, figurer dans la notice d’informations que le public et les journalistes économiques peuvent consulter sur le site de la COSOB. Celle-ci est tenue par la loi de publier sur son site toute l’information financière ou commerciale des entreprises émettrices. C’est le principe de transparence.

    Les projets que l’Etat souhaite financer via les emprunts obligataires doivent être initiés par des entreprises SPA. Ces projets doivent générer des cash-flows positifs dès leur réalisation, ce qui n’est pas le cas pour les aérogares, les tronçons d’autoroute ou les tramways, à moins qu’ils ne soient structurés et donnés en concessions. Il va sans dire que les entreprises publiques éligibles au marché obligataire sont en premier lieu les entreprises commerciales qui génèrent des cash-flows substantiels comme la Sonatrach et certaines de ses filiales, Mobilis, Algérie télécom, probablement Air Algérie et Cosider.

    Maintenant quelle est la quantité de ressources disponible sur le marché et qui pourrait être accessible à elles ?

    La disponibilité de ressources longues sur le marché

    Les projets d’infrastructure que compte lancer l’Etat (aérogares, tramways, tronçons d’autoroutes, etc.) nécessitent des ressources longues, dix à quinze ans, dont une période de construction de 3 ans minimum. En général les détenteurs de ressources longues ce ne sont pas les banques. Ce sont les fonds de pension, les caisses de retraite, les sociétés d’assurance vie, les caisses de dépôt, etc. Or en Algérie ces institutions n’existent quasiment pas. Les institutions qui auraient pu en faire partie sont la Caisse d’assurance chômage (CNAC) et la Caisse nationale d’assurance sociale (CNAS). Ces deux caisses n’ont plus les poches profondes et il leur fut interdit, depuis la faillite de Khalifa Bank, de placer leurs excédents éventuels sur le marché.

    Par ailleurs, les liquidités disponibles au niveau des banques sont en majeure partie des dépôts à vue et ne peuvent être utilisés pour financer des projets dont la maturité des prêts serait de dix ans et plus. Les banques doivent se conformer au ratio de transformation de la Banque d’Algérie qui permet de transformer seulement un certain pourcentage de ces dépôts en crédit à moyen et long terme.

    De plus les projets de développement sont hautement capitalistiques. De ce fait les banques seront contraintes par le ratio de division des risques qui stipule qu’une banque ne peut pas prêter plus de 15% de ses fonds propres à une même entreprise voir 25% si une étude d’expert démontre que l’entreprise dispose de capacités de remboursement suffisantes.

    En finançant un nombre de projet sur des périodes longues et avec des montants substantiels, les banques encourent à terme un risque majeur de liquidité et un risque de taux, sachant que nous ne disposons d’aucun outil de couverture en Algérie.

    Le financement des projets publics par le marché au vu de leur nombre et des ressources substantielles qu’elles vont mobiliser vont créer un effet d’éviction ou « crowding out » pour les entreprises privées pour qui le financement va se tarir et le coût va augmenter.
    ./..
    Othmane BENZAGHOU

  • #2
    Les emprunts obligataires grand public

    Nous avons vu les limites en ce qui concerne les emprunts institutionnels. Le recours par les entreprises aux émissions d’emprunts obligataires grand public pour financer leurs investissements constitue-t-il une alternative crédible ? L’expérience passée a montré que les montants collectés auprès des particuliers étaient minimes, en comparaison aux fonds provenant des épargnants institutionnels (banques, établissements financiers et assurances). Les raisons sont nombreuses.

    Le particulier en tant qu’investisseur n’est pas enclin à engager son épargne sur des périodes longues de 7, 10 ou 15 ans comme l’exige le financement de projet. L’horizon du particulier est court, entre 3 et 5 ans maximum.

    Les emprunts grand public doivent obligatoirement être côtés à la Bourse d’Alger. En l’absence d’un teneur de marché et l’inexistence d’un marché secondaire il ne faut pas s’attendre à un développement du compartiment obligataire à la Bourse d’Alger. Les intermédiaires en opération de bourse (IOB) n’ont jamais voulu jouer le rôle qui est le leur à cet égard. Par ailleurs la non liquidité des titres en capital au niveau de la bourse et la non répercussion des résultats des entreprises listés sur la valeur des titres décrédibilise la bourse et décourage plus d’un investisseur.

    A titre d’illustration si l’on devait financer par un emprunt grand public 20% seulement de la valeur du titre de Djezzy par un emprunt obligataire grand public, en estimant que ces 20% valent 150 milliards de dinars il faudrait un million cinq cent mille algériens qui souscriraient chacun 100 000 dinars pour couvrir l’emprunt. C’est la quadrature du cercle. C’est pour cela et au vu de ce qui précède que l’option d’un recours aux emprunts obligataires pour faire face à la crise est loin d’être une panacée, au mieux c’est un pis-aller.



    *Dr Lachemi Siagh est Conseiller en investissement financier
    Membre de l’ACIFTE régulé par l’Autorité des marchés financiers, (AMF) Paris
    [email protected]
    Othmane BENZAGHOU

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    • #3
      C'est incroyable cette manie chez certains experts, manipulant des techniques de financement et d'ingénierie financière très sophistiqués dans leurs pays d'adoption, de dénier et nier toute autre source de financement que la rente pétrolière pour leur pays d'origine. Au moment de la crise de 2008 en France, Sarkozy avait lancé son emprunt d'avenir, avec des rentabilités encore moins garantis, et à très long terme. Heureusement que la France ne collectionne pas des citoyens pessimistes, navigant toujours à contre courent, preuve pour eux de leur valeur démocratique et de leur liberté.

      En parcourant cette contribution, je m’interroge réellement sur certaines expertises. La courbe de taux utilisée pour pricer des obligations est une courbe construite sur un marché interbancaire IBOR ou de futures de taux à court terme, et sur le marché obligataire du trésor à long terme, à défaut de swaps, instrument illiquides en Algérie, à condition, que ces obligations soient échangés dans un marché secondaire, à contrario, ces obligations sont évalués comme certains compartiment d'obligations non cotés, émises par certaines entreprises dans le monde. Le pricing est donc un faux problème.

      Or de quoi s'agit-il dans les modes de financement de projets que cherche à diversifier les autorités. S'agit il d'opération de financement d'entreprises par l'émission d'obligations, comme celle opérée avec succès par l'Aéroport d'Alger, pour la construction du nouvel aérogare, ou s'agit-il tout bonnement de l'émission de titres du trésor sur 5, 10 ou 15 ans, permettant ainsi de contribuer à l’émergence d'un marché financier en dinars, auprès d'une bourse qui peine à décoller, de capter une épargne privée, qui contrairement aux dires d'expert, est abondante, de fournir des instruments d'épargne au marché de l'assurance, lui même très prospère en Algérie, et enfin à structurer, sur la base d'un marché obligataire émis par le trésor, ou garantit par le trésor, un marché obligataire d'entreprises, en dinars, permettant de financer des projets d'investissement, freinés par un financement bancaire pas toujours à la hauteur, et dans lequel les banques françaises en Algérie jouent un rôle marginal, voulant cantonner leur engagements à court terme, qui a permis de dégager des marges considérables, autre anomalie du financement en Algérie.

      J'ose espérer que la contribution critique des algériens se fasse dans la direction de construire au lieux de systématiquement déconstruire toute idée nouvelle dans ce pays...
      Dernière modification par ott, 27 décembre 2014, 15h05.
      Othmane BENZAGHOU

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      • #4
        Lachemi Siagh : La biographie non autorisée

        Lachemi Siagh : La biographie non autorisée
        Posté par Rédaction LQA on juin 25th, 2010


        Génie des finances ou maître de l’espionnage économique ? Lachemi Siagh, homme des réseaux, qui prospère dans le business boursier, est désormais la bête noire du Premier ministre Ahmed Ouyahia. Enquête sur le prince sulfureux de la place financière d’Alger.


        « Je vous informe que toute relation d’affaires avec le cabinet d’études Strategica et Lachemi Siagh est désormais prohibée. Ce bureau d’études, à travers ses différentes activités, s’est constitué une importante banque de données tant sur le secteur financier national que sur des entreprises publiques stratégiques, données pour lesquelles il ne fait guère preuve de réserves dans ses relations avec les milieux économiques étrangers. » Juin 2010. Ahmed Ouyahia a enfin la peau de celui qu’il traque depuis quelques années. Lachemi Siagh, 62 ans, accusé à demi-mot d’espionnage économique, était encore présenté il y a quelques mois comme le « sauveur financier » des entreprises algériennes, le « Monsieur emprunt obligataire » sans lequel aucune ouverture de capital ne pouvait se faire. Mais qui se cache derrière cet expert financier contesté, homme secret et redoutable homme de réseau ?

        Son ascension commença dans les années 1970. Cet Algérien né à Touggourt fait ses débuts à la Société nationale de sidérurgie, un des fleurons de l’industrie algérienne. En 1977, il en devient le directeur général avant d’être nommé conseiller spécial du ministre de l’Industrie lourde en Algérie. « Ce garçon était brillant », se souvient un de ses ex-collègues, directeur d’une entreprise publique. Mais en 1980, il préfère quitter le gouvernement pour rejoindre Tunis où il est recruté comme assistant spécial du secrétaire général de l’Organisation arabe pour le développement industriel (AIDO). Il est ensuite nommé à Baghdad. Là commence son périple au Moyen-Orient et surtout dans les pays du Golfe. Nommé à plusieurs postes de management dans des institutions bancaires et financières arabes, il enrichit son CV déjà chargé.

        Lachemi Siagh est diplômé de l’Institut supérieur des sciences économiques et commerciales de Paris, diplômé en science administrative de l’Ecole des hautes études commerciales de Montréal (HEC) où il a aussi passé un doctorat en management stratégique qui lui a permis de devenir directeur pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord chez SNC Lavalin. C’est là qu’il se fait connaître comme expert financier. Alors qu’Abdelaziz Bouteflika lance un appel à la diaspora algérienne établie à l’étranger « redevables envers (sa) patrie pour avoir fait des études en Algérie », l’expatrié est sollicité par son ami Abdelatif Benachenhou, autre expert financier, membre du « brain-trust » du président.

        En 2001, Siagh crée son cabinet Strategica Finance et s’installe dans l’appartement de Abdelatif Benachenhou, à la cité des Amandiers de Ben Aknoun (en face du ministère des Finances). A la même époque est créée la Bourse d’Alger, prometteuse de fructueuses transactions financières. Six banques publiques (BNA, BEA, BADR, CPA, CNEP Banque et BDL) créent Algérie Clearing SPA spécialisée dans les transactions en Bourse et autres activités financières. Trois emprunts obligataires sont lancés pour l’ouverture du capital d’El Aurassi, Saidal, Eriad Sétif). Une première dans l’histoire de l’économie algérienne.

        « Monsieur emprunt obligataire »

        Siagh, en spin doctor, réussit avec son associé Lies Kerrar et l’aide de son « mentor » Benachenhou, à s’intégrer dans les milieux d’affaires et à influencer les managers des entreprises publiques en souffrance, tels ceux d’Air Algérie, Sonatrach, Algérie Télécom ou Sonelgaz. En lançant des emprunts obligataires tous azimuts, présentés comme des succès, il apparaît comme le « sauveur des entreprises publiques ». En parlant de l’emprunt obligataire d’Air Algérie, il déclarait dans Jeune Afrique en 2005 : « C’était une opération inespérée pour Air Algérie qui cherchait de l’argent pour renouveler sa flotte. Auparavant, la compagnie faisait appel à des financements internationaux, mais cela coûtait très cher.

        L’emprunt obligataire lui permet d’éviter de courir le risque de change, de ne pas payer la prime de risque, qui peut atteindre 10% sur un emprunt de dix ans et, enfin, d’emprunter en dinars à un taux défiant toute concurrence. Air Algérie a payé 50% moins cher que si elle était passée par un consortium bancaire. » En réalité, d’après un observateur de la place financière d’Alger, « les entreprises publiques n’ont pas réellement redémarré et souffrent toujours d’endettement ». Solidement implanté dans les milieux des affaires, en particulier dans les milieux financiers, le cabinet Strategica devient incontournable et, avec lui, Lachemi Siagh, le nouveau « Monsieur emprunt obligataire ». Il gagne beaucoup d’argent, bien sûr, mais accède aussi aux données les plus confidentielles des entreprises. Comment ?

        Lors de l’élaboration des notices présentées à la Commission d’organisation et de surveillance des opérations en Bourse (Cosob), les entreprises – y compris les banques – doivent ouvrir tous les documents aux experts du cabinet : états comptables et financiers, résultats commerciaux, actifs, comptes… « Lachemi Siagh était mieux informé sur l’économie nationale que les ministres concernés du secteur, confie une source au gouvernement. Même le Premier ministre ne disposait pas d’une telle base de données ! Il avait accès à des informations sensibles sur toutes les entreprises publiques, les grands comptes privés, les banques… »

        Les affaires prospèrent

        Le financier soigne aussi ses amitiés et se rapproche du très puissant Issad Rebrab, patron de Cevital. Il entrera plus tard dans le conseil d’administration. « Rebrab avait une totale confiance en Siagh : il voyait en lui ce conseiller qui lui manquait », confie un proche collaborateur. En 2006, Siagh lance un emprunt obligataire de plus de 90 milliards de dinars pour le financement d’un des projets de l’empereur de l’agro-alimentaire. Cette opération, première du genre à être initiée par une entreprise privée en Algérie, se solde par un succès qui ne fera que consolider la renommée de Lachemi Siagh. On s’arrache son numéro de téléphone, il est invité dans les grandes réceptions, se rend aussi souvent à l’étranger, tous les patrons se ruent vers le nouveau siège de Strategica à la tour ABC aux Pins Maritimes.

        EEPAD, ENTP, Enafor, ETRHB Haddad, ALC et bien d’autres font désormais partie de ses clients attitrés. Il fait même main basse sur les campagnes de publicité des emprunts obligataires. « Il veille toujours à ce que la clause réservée à la publicité dans les contrats de lancement des emprunts obligataires lui revienne de droit », confie un ex- collaborateur. Ainsi, toutes les campagnes de publicité estimées à coups de milliards sont gérées par ses soins. Pour cela, il ouvre sa propre agence de communication, Kalamcom, spécialisée dans la communication financière. Il a même mis sur pied un institut algérien des hautes études financières, dont il est PDG, destiné à former les cadres des institutions bancaires et financières et « à rafler le marché de la formation spécialisée pour les financiers », souligne ironiquement un ancien collaborateur. Il lance également Strategica Business & Finance, une revue mensuelle, distribuée à environ 5000 exemplaires. Son chef de rédaction : Omar Zeghmi, ancien journaliste de l’APS.

        Cette revue n’est pas visible dans le paysage de la presse algérienne, mais attire tout de même beaucoup de publicité. Ses affaires prospèrent, il enchaîne emprunt sur emprunt obligataires, multiplie ses contacts et se lance dans des affaires d’investissement et l’installation en Algérie de banques notamment arabes – qu’il connaît lors de son passage au Moyen-Orient. D’après ses anciens collaborateurs, il serait derrière l’installation de Eemar, EIIC, Al Rayane Bank, Essalem Bank et bien d’autres investisseurs principalement arabes. En 2007, il figure même sur la liste des ministrables pour les Finances. D’après ses collaborateurs, il devient aussi de plus en plus « inaccessible et autoritaire » et éclipse son associé Lies Kerrar. « Trop marginalisé », ce dernier décide de claquer la porte en 2007 et de créer son propre cabinet conseil à Paris : Humilis Corporate Finance Advisory. Mais il ne réussit pas à s’implanter en Algérie et à rafler des marchés monopolisés par son ex-ami de Montréal.

        Le tournant « Ouyahia »

        Mais le vent tourne. Ahmed Ouyahia s’est déjà opposé à sa nomination de ministre. Il aurait gardé en mémoire son rôle dans le projet de privation du CPA, première banque commerciale en Algérie, dont Siagh fut un fervent partisan. La Banque d’Algérie lui refuse l’autorisation pour ouvrir la banque dont il rêve. Alors il cède 51% des parts de Strategica à Deutsche Bank en juin 2007, mais reste directeur. Une année plus tard, il cède la totalité du capital. Strategica est transformée en une entreprise de cotation boursière, Deutsche Capital Markets Algeria (DCMA). C’est en 2008 que s’opère le véritable tournant. Au premier semestre, Ahmed Ouyahia prépare le tour de vis protectionniste qu’il compte donner à l’économie du pays avec la loi de finances complémentaire de 2009, et aurait demandé, selon nos sources, d’enquêter sur les banques étrangères installées dans le pays. L’IGF s’en occupe. Les premiers éléments de l’enquête auraient révélé un quasi-monopole des fonds levés par Strategica.

        Pendant l’été 2008, la Cosob refuse de délivrer le visa au groupe Dahli appartenant à l’homme d’affaires Abdelwahab Rahim (un ami de Lachemi Siagh), Maghreb Leasing et Taurus Ingineering, et traîne pour que soit accordée l’augmentation du captial d’Essalem Bank. Un coup qui rejaillira sur les émiratis d’EIIC, qui devaient être accompagnés, entre autres, par Essalem Bank, dans ses investissements en Algérie. L’homme derrière ces montages financiers : Lachemi Siagh. L’enquête va loin. Les chancelleries auraient reçu des ordres de surveiller l’homme de près. Des informateurs assurent qu’il vendrait des informations sensibles sur l’économie nationale. Cette année, après le remaniement ministériel, il perd son dernier appui : Chekib Khelil. Pour certains observateurs, il se serait montré trop gourmand. Pour d’autres, les accusations d’espionnage économique par Ahmed Ouyahia seraient fondées. Enfin, pour d’autres encore, il ferait certainement partie, avec d’autres (Rahim, Nouar Harzallah), d’un clan à éliminer, celui de Larbi Belkheir. Bien des questions restent sans réponse. A commencer par celle-ci : Lachemi Siagh, parti depuis des mois à l’étranger, serait-il en fuite ?

        Par Zouheir Aït Mouhoub
        Othmane BENZAGHOU

        Commentaire


        • #5
          Il apparait au vu du CV, que l'expert est plus motivé par un réglement de compte, que par la réussite de l'émission obligataire, ayant lui meme lancé avec succès plusieurs opérations dans les années 2000...
          Othmane BENZAGHOU

          Commentaire


          • #6
            Bonsoir ott,

            J'ai commencé à lire ton intervention car celle de Lachemi je la connais en l'ayant côtoyé mais je me suis arrêté à ça:

            Envoyé par OTT Expert es Finance
            La courbe de taux utilisée pour pricer des obligations est une courbe construite sur un marché interbancaire IBOR ou de futures de taux à court terme...
            Peux-tu m'en dire davantage sur l'évaluation des obligations?

            PS: L'obligation est un des deux produits les plus basiques de la finance (avec l'Action)...Sa valorisation est des plus simple.

            Commentaire


            • #7
              Bonsoir Boubena,

              La citation que tu fais est en rapport avec l'affirmation étonnante de cet expert concernant la courbe des taux,

              La référence ou benchmark en matière de pricing est la courbe de taux. Cette courbe qui était publiée régulièrement ne l’est plus depuis 2010. Il faudra donc la réactiver avec les emprunts sur de multiples maturités du Trésor.
              Or, la courbe ZC (zero coupons), est construite par bootstrapping à partir de taux "à risque neutre", sur des instruments émis par le "porteur de risque neutre", principalement IBOR, et obligations souveraines, mais des futures et swaps longs sont tout aussi utilisés, quand ils sont liquides.

              C'est donc les obligations souveraines échangés qui forment la courbe de taux, son coté fixé par la banque centrale est surprenant pour un chantre de la finance, qui sait qu'il existe un cours des obligations...

              Au plaisir de lire vos contributions, et celles de vos amis...
              Dernière modification par ott, 27 décembre 2014, 22h33.
              Othmane BENZAGHOU

              Commentaire


              • #8
                Une des définitions de l'emprunt en question:

                L'obligation donne le droit à son titulaire de percevoir une rémunération annuelle appelée "intérêt".

                Au regard de l'incompétence de l’émetteur c'est plus que risqué.

                Perso: Je préfères miser ailleurs.

                Commentaire


                • #9
                  Ott,

                  Tu sembles quelqu'un qui a une tête bien faite (même souffrant de melonite) et rien que pour cela on peut te consacrer un peu de temps.

                  Je dois avouer que je n'ai pas lu l'intervention de Lachemi à laquelle tu fais référence. Je dois y remédier à cela.

                  Quelques remarques:
                  1. L'IBOR n'est pas un instrument "porteur de risque neutre" comme tu l'appelles. IBOR est un taux de refinancement interbancaire (Interbank Offered Rate). AIBOR pour Algiers Interbank Offered Rate n'existe pas encore. Toutes les banques algériennes ont l'obligation de céder leur excédent de trésorerie à la BA et d'emprunter du cash auprès de la BA...En sommes, c'est la BA qui fixe ce taux ...qu'on ne pourrait pas appeler un IBOR!!!!

                  2. Il n'existe pas qu'une seule de courbe de taux mais une multitude. L'essentiel est de justifier l'utilisation d'une courbe de taux par rapport à une autre. Les courbes de taux se divisent en deux catégories: courbe de taux observés et courbe de taux théorique dont fait partie la courbe ZC.Le boottrapping n'est qu'une seule méthode parmi d'autres pour construire une courbe de taux.

                  Je te parle du cas algérien:
                  1. La courbe des taux en Algérie est construite exclusivement sur la base des obligations de l’État algérien...pour des raisons évidentes (Pas de swap, pas de futures, obligations corporate de maturités courtes....etc.)
                  2. Est-ce que le coupon payé par les bons de trésor algériens sont représentatifs des risques liés au temps et ceux à la solvabilité intrinsèque de l'émetteur (Etat Algérien)? C'est une question que je te ose.

                  Donc, évaluer le prix des obligations émises en Algérie n'est pas un problème, au moins d'un point de vue théorique....

                  Il est où donc le problème?

                  Commentaire


                  • #10
                    Boubenna,

                    Les obligations souveraines par définition sont des instruments longs. La partie monétaire (moins de 1 an) utilise le taux IBOR, considérés risque neutre (tu auras remarqué les guiemets). L'inexistance d'un taux IBOR en Algérie, fait que sur le marché monétaire, les taux d'échange des liquidités, avec la banque centrale fait référence. Il y a donc, comme conclu dans mon commentaire pas de problème de pricing insurmentable, comme semble etre décrit par ton ami, qui veut nous faire croire que ce qu'il avait fait il y a quelques années n'est plus à la portée de l'Algérie. L'Algérie ayant perdu le melon de ton ami, peut etre...
                    Dernière modification par ott, 27 décembre 2014, 23h10.
                    Othmane BENZAGHOU

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                    • #11
                      Ott,

                      Il n'est pas mon ami loin de là. Nous ne sommes pas de la même génération.
                      J'ai eu à débattre avec lui dans plusieurs réunions mais nous ne partageons presque rien, exception faite de nos nationalités et de notre amour de viande fraiche.

                      Ott tu sais ce que c'est des les TCN, BTAN, CD, BT...Etc?

                      Le taux des opérations de refinancement interbancaire en Algérie est fixé d'une façon administrative et non pas par la loi de l'offre et de la demande. De ce fait, ces taux ne peuvent être considérés dans la construction de la courbe des taux.


                      Qu'est ce que dit Lachemi Siagh qui ne te sied pas?

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                      • #12
                        Boubena,

                        Tu conviendras que ces instruments monétaires ne sont pas des obligations. Quand il existe un marché interbancaire, il est utilisé comme référence de pricing pour les taux courts.

                        Je suis mitigé concernant la contribution de cet expert, entre du marketing de celui, longtemps appelé monsieur obligations en Algérie, et une critique négative, des intentions des pouvoirs publiques, qui finalement envisagent des mesures de financement qu'il a largement manipulé en Algérie, avec une opération d'envergure sur le projet immobilier gigantesque de son ami Rahim, qui n'a pas été suivi par les institutionnels, certains diront à juste titre. Rahim a probablement trop fait confiance à son ami, sur la maturité de son projet, et du marché, en ce qui concerne un financement nouveau en Algérie. On peut comprendre que ce financier garde une rancune tenace contre ceux qui l'ont poussé à vendre ses actifs et à partir, mais de la à dénier à l'Algérie la possibilité de recourir au financement par émissions obligataires, c'est un pas franchis qui est critiquable...
                        Othmane BENZAGHOU

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                        • #13
                          Ott,

                          Et tu conviendras que le taux de refinancement interbancaire ne peut être ni considéré comme un taux à risque zéro ni utilisé pour construire le courbe de taux?

                          C'est l’aigreur de tous les experts qui sont échaudés. Son intervention vaut ce qu'elle vaut. C'est aux autres experts de différencier l'ivraie de l’avoine.

                          Je dois lire ces récentes interventions pour me faire une idée et peut être lui faire une réponse via la presse.

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                          • #14
                            Le risque neutre est une notion théorique. Les taux IBOR, ne t'en déplaisent sont utilisés sur les devises majeures, EUR, USD, JPY, GBP, CAD... Sur des devises de marchés emergents, ayant un marché secondaire liquide, la construction de la courbe ZC utilise la cotation de ces instruments (futures, obligs, swaps). Dans le cas de l'Algérie, il y a eu des émissions de bons du trésor et de OAT à des taux fixés par la BA. Le marché secondaire est par contre illiquide, mais c'est semble-t-il l'objectif des pouvoirs publiques que de dynamiser ce marché, par des émissions obligataires souveraines plus importantes, et par l'encouragement d'émissions d'obligation, comme mode de financement des entreprises publiques.

                            Concernant les contributions et expertises ici et là, il y a une tendance à induire les lecteurs à de fausses conclusions, des lecteurs qui ne sont as aussi armés que toi, pour décrypter certains messages en filigranes, éminement politiques. Et c'est bien ce que j'ai dénoncé...

                            Au plaisir de te relire...
                            Othmane BENZAGHOU

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                            • #15
                              Ott,

                              Je te dis juste qu'il n'existe pas d'IBOR en Algérie...Suis-je plus clair?

                              Pour le reste, je lis tes interventions avec intérêt...évite juste d'utiliser un jargon trop technique si ton objectif est de vulgariser la finance et de faire adhérer les forumistes à tes points de vue.

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