Par Saïd Sadi
L’injonction de Goebbels n’est pas encore assumée mais elle doit figurer en bonne place dans le bréviaire des citations de M. Deroua. A lire sa réaction du 21/12/2014 c’est, en effet, celle qui reflète le mieux la dernière opération de désinformation dont il est chargé.
La sortie de la quatrième édition du livre dédié au colonel Amirouche avec les révélations portant, notamment, sur l’ordre de Boussouf d’exécuter le colonel Lotfi a rallumé les passions.
Confiscation mémorielle
Pour les censeurs de la mémoire, le problème n’est pas que pareil ordre ait été donné mais que je rende public le témoignage de l’officier qui a refusé d’y donner suite. On était pourtant en droit d’espérer qu’après les assauts lancés par les spadassins du Malg une année durant contre la première édition, ces nouveaux apports allaient enfin permettre d’ouvrir les pages les plus douloureuses de notre histoire.
Voyant venir dès le départ les diversions visées par le polémiste, je m’étais interdit de d’alimenter une provocation destinée à polluer le débat de fond afin d’égarer, une fois de plus, la délicate problématique de l’Histoire de la guerre de Libération dans l’invective et les contre-vérités les plus grotesques. Pour des raisons que je vais essayer de décoder, M. Deroua s’abîme dans la grossièreté jusque et y compris sur des faits historiques ou des évènements politiques dont l’observateur le moins avisé peut retrouver les fondements et les réalités. Plusieurs patriotes ayant vécu de près le tragique dénouement de la guerre m’ont contacté pour confirmer ce que l’on savait par déduction. Ces incohérences et mensonges ne sont pas des travers exclusifs de M. Deroua. Ils sont emblématiques de la stratégie qui guide la conception de la nation depuis 1962. L’Histoire est un levier de pouvoir, ceux qui la confisquent mentent délibérément pour bien signifier au citoyen que l’Etat n’est qu’un instrument de domination. La tactique est violente : c’est l’anathème où tout le monde perd ou le silence ; d’où le retrait des témoins les plus dignes, laissant la mémoire otage des clans les moins scrupuleux. Certains anciens membres du Malg ont même estimé que les dernières réponses de M. Deroua sont écrites à plusieurs mains.
C’est donc pour tenter de déconstruire la campagne en cours que je m’oblige à reprendre la litanie des slogans frelatés de M. Deroua. L’individu n’est intéressant que dans la mesure où il est une caricature d’une école politique qui a dégradé la cité algérienne.
L’imposture revendiquée
Pour l’école stalino-goebbelienne, l’adage est simple : «Plus c’est gros, mieux ça passe.»
Apprécions la mise en bouche. «Tout d’abord, je me permets de lui rappeler son voyage en Afrique du Sud où je l’ai fait recevoir par… Thabo Mbeki, le président de la République d’Afrique du Sud», car, ajoute l’entremetteur autoproclamé : «M. Saïd Sadi a oublié que dans le cadre de l’adhésion de son parti à l’Internationale socialiste, il fallait l’agrément préalable à l’échelle des pays africains membres de cette institution. C’est ainsi que je lui ai préparé ce voyage d’une semaine…» !
Devant tant d’affabulation, on serait tenté de croire à de la mythomanie ou, si l’on veut être plus compassionnel, à la sénilité. On verra qu’il y a plus que cela.
Le voyage que j’ai effectué en République d’Afrique du Sud en avril 2001 a été préparé par son ambassadeur à Alger, Raiz Shaik. Cette mission avait été décidée dans la foulée du colloque international organisé par le RCD à Alger les 2 et 3 décembre 1999 aux Pins-Maritimes au cours duquel sont intervenues une vingtaine de personnalités nationales et étrangères devant 700 participants dont une majorité venait de la société civile. Personne au RCD n’avait alors entendu parler de M. Deroua.
C’était l’époque de la concorde civile qui annonçait une désastreuse «réconciliation nationale». Le RCD, ayant publiquement préconisé une démarche adossée à la justice et à la transparence pour dépasser la crise sanglante qui endeuillait le pays, avait demandé à l’ambassadeur d’Afrique du Sud de venir exposer l’expérience de son pays à travers les mécanismes de la commission vérité et justice qui a permis de résorber les séquelles de l’Apartheid. Les actes de ce colloque contiennent l’intervention intégrale de Raiz Shaik. On n’y retrouve pas la moindre allusion à l’adhésion à l’Internationale socialiste à laquelle serait lié le voyage de 2001. Une fois l’invitation lancée par l’ambassadeur, Pretoria, qui avait pourtant donné son accord de principe, garde le silence. Perplexe, son représentant à Alger relance la démarche et à la rentrée de septembre 2000, il m’appelle pour demander une audience. Je le reçois pour l’entendre me dire que l’ambassadeur d’Algérie avait mené une guerre de harcèlement effrénée auprès du gouvernement sud-africain pour le dissuader de recevoir un «contre-révolutionnaire» plusieurs fois emprisonné pour activités subversives…
J’appelle Ali Benflis, alors chef du gouvernement, pour l’informer des manœuvres du diplomate algérien en lui disant que ces indignités devaient cesser instamment, faute de quoi j’allais faire de cette perversion institutionnelle une affaire publique.
Il me rappelle trois jours après pour me dire qu’aucune autorité d’Alger n’est à l’origine de cette cabale et que le coupable, sommé d’arrêter ses intrigues, a même été instruit pour faciliter le séjour en cas de besoin. J’ai revu récemment Ali Benflis, nous avons brièvement évoqué les gesticulations de M. Deroua et, naturellement, il n’a aucun souvenir de son implication dans cette visite.
Au début du mois de novembre 2000, je reprends contact avec Raiz Shaik pour lui dire que le sectarisme du représentant d’Alger n’était que l’expression d’un zèle et d’une obséquiosité par lesquels certains commis de l’Etat essayent de prouver leur vassalité pour protéger leur carrière.
C’est donc à partir de la fin de l’année 2000 que les préparatifs ont été à nouveau engagés pour arrêter une date qui convienne à la visite. Pour le plus grand malheur de M. Deroua, un journaliste du Soir d’Algérie avait fait partie du voyage.
A l’exception du tête-à-tête avec Thabo Mbeki, il a assisté, lui aussi, à la douzaine de rencontres ou de réunions qui ont eu lieu à Prétoria ou Johannesburg. Elles ont associé des partis, dont l’ANC, des associations de femmes, des juristes, des syndicats, des intellectuels, le SAIA (South African Institute of International Affairs)… Toutes ont porté sur la situation algérienne, l’essor sud-africain et les perspectives de reconstruction d’une société multiculturelle et multiconfessionnelle déstructurée par l’un des pires avatars politiques de l’histoire contemporaine.
Il suffit d’ailleurs de relire les comptes-rendus quotidiens de l’envoyé spécial du Soir d’Algérie pour savoir que l’adhésion à l’Internationale socialiste n’était en aucune façon l’objet de la mission.
La fuite en avant
L’injonction de Goebbels n’est pas encore assumée mais elle doit figurer en bonne place dans le bréviaire des citations de M. Deroua. A lire sa réaction du 21/12/2014 c’est, en effet, celle qui reflète le mieux la dernière opération de désinformation dont il est chargé.
La sortie de la quatrième édition du livre dédié au colonel Amirouche avec les révélations portant, notamment, sur l’ordre de Boussouf d’exécuter le colonel Lotfi a rallumé les passions.
Confiscation mémorielle
Pour les censeurs de la mémoire, le problème n’est pas que pareil ordre ait été donné mais que je rende public le témoignage de l’officier qui a refusé d’y donner suite. On était pourtant en droit d’espérer qu’après les assauts lancés par les spadassins du Malg une année durant contre la première édition, ces nouveaux apports allaient enfin permettre d’ouvrir les pages les plus douloureuses de notre histoire.
Voyant venir dès le départ les diversions visées par le polémiste, je m’étais interdit de d’alimenter une provocation destinée à polluer le débat de fond afin d’égarer, une fois de plus, la délicate problématique de l’Histoire de la guerre de Libération dans l’invective et les contre-vérités les plus grotesques. Pour des raisons que je vais essayer de décoder, M. Deroua s’abîme dans la grossièreté jusque et y compris sur des faits historiques ou des évènements politiques dont l’observateur le moins avisé peut retrouver les fondements et les réalités. Plusieurs patriotes ayant vécu de près le tragique dénouement de la guerre m’ont contacté pour confirmer ce que l’on savait par déduction. Ces incohérences et mensonges ne sont pas des travers exclusifs de M. Deroua. Ils sont emblématiques de la stratégie qui guide la conception de la nation depuis 1962. L’Histoire est un levier de pouvoir, ceux qui la confisquent mentent délibérément pour bien signifier au citoyen que l’Etat n’est qu’un instrument de domination. La tactique est violente : c’est l’anathème où tout le monde perd ou le silence ; d’où le retrait des témoins les plus dignes, laissant la mémoire otage des clans les moins scrupuleux. Certains anciens membres du Malg ont même estimé que les dernières réponses de M. Deroua sont écrites à plusieurs mains.
C’est donc pour tenter de déconstruire la campagne en cours que je m’oblige à reprendre la litanie des slogans frelatés de M. Deroua. L’individu n’est intéressant que dans la mesure où il est une caricature d’une école politique qui a dégradé la cité algérienne.
L’imposture revendiquée
Pour l’école stalino-goebbelienne, l’adage est simple : «Plus c’est gros, mieux ça passe.»
Apprécions la mise en bouche. «Tout d’abord, je me permets de lui rappeler son voyage en Afrique du Sud où je l’ai fait recevoir par… Thabo Mbeki, le président de la République d’Afrique du Sud», car, ajoute l’entremetteur autoproclamé : «M. Saïd Sadi a oublié que dans le cadre de l’adhésion de son parti à l’Internationale socialiste, il fallait l’agrément préalable à l’échelle des pays africains membres de cette institution. C’est ainsi que je lui ai préparé ce voyage d’une semaine…» !
Devant tant d’affabulation, on serait tenté de croire à de la mythomanie ou, si l’on veut être plus compassionnel, à la sénilité. On verra qu’il y a plus que cela.
Le voyage que j’ai effectué en République d’Afrique du Sud en avril 2001 a été préparé par son ambassadeur à Alger, Raiz Shaik. Cette mission avait été décidée dans la foulée du colloque international organisé par le RCD à Alger les 2 et 3 décembre 1999 aux Pins-Maritimes au cours duquel sont intervenues une vingtaine de personnalités nationales et étrangères devant 700 participants dont une majorité venait de la société civile. Personne au RCD n’avait alors entendu parler de M. Deroua.
C’était l’époque de la concorde civile qui annonçait une désastreuse «réconciliation nationale». Le RCD, ayant publiquement préconisé une démarche adossée à la justice et à la transparence pour dépasser la crise sanglante qui endeuillait le pays, avait demandé à l’ambassadeur d’Afrique du Sud de venir exposer l’expérience de son pays à travers les mécanismes de la commission vérité et justice qui a permis de résorber les séquelles de l’Apartheid. Les actes de ce colloque contiennent l’intervention intégrale de Raiz Shaik. On n’y retrouve pas la moindre allusion à l’adhésion à l’Internationale socialiste à laquelle serait lié le voyage de 2001. Une fois l’invitation lancée par l’ambassadeur, Pretoria, qui avait pourtant donné son accord de principe, garde le silence. Perplexe, son représentant à Alger relance la démarche et à la rentrée de septembre 2000, il m’appelle pour demander une audience. Je le reçois pour l’entendre me dire que l’ambassadeur d’Algérie avait mené une guerre de harcèlement effrénée auprès du gouvernement sud-africain pour le dissuader de recevoir un «contre-révolutionnaire» plusieurs fois emprisonné pour activités subversives…
J’appelle Ali Benflis, alors chef du gouvernement, pour l’informer des manœuvres du diplomate algérien en lui disant que ces indignités devaient cesser instamment, faute de quoi j’allais faire de cette perversion institutionnelle une affaire publique.
Il me rappelle trois jours après pour me dire qu’aucune autorité d’Alger n’est à l’origine de cette cabale et que le coupable, sommé d’arrêter ses intrigues, a même été instruit pour faciliter le séjour en cas de besoin. J’ai revu récemment Ali Benflis, nous avons brièvement évoqué les gesticulations de M. Deroua et, naturellement, il n’a aucun souvenir de son implication dans cette visite.
Au début du mois de novembre 2000, je reprends contact avec Raiz Shaik pour lui dire que le sectarisme du représentant d’Alger n’était que l’expression d’un zèle et d’une obséquiosité par lesquels certains commis de l’Etat essayent de prouver leur vassalité pour protéger leur carrière.
C’est donc à partir de la fin de l’année 2000 que les préparatifs ont été à nouveau engagés pour arrêter une date qui convienne à la visite. Pour le plus grand malheur de M. Deroua, un journaliste du Soir d’Algérie avait fait partie du voyage.
A l’exception du tête-à-tête avec Thabo Mbeki, il a assisté, lui aussi, à la douzaine de rencontres ou de réunions qui ont eu lieu à Prétoria ou Johannesburg. Elles ont associé des partis, dont l’ANC, des associations de femmes, des juristes, des syndicats, des intellectuels, le SAIA (South African Institute of International Affairs)… Toutes ont porté sur la situation algérienne, l’essor sud-africain et les perspectives de reconstruction d’une société multiculturelle et multiconfessionnelle déstructurée par l’un des pires avatars politiques de l’histoire contemporaine.
Il suffit d’ailleurs de relire les comptes-rendus quotidiens de l’envoyé spécial du Soir d’Algérie pour savoir que l’adhésion à l’Internationale socialiste n’était en aucune façon l’objet de la mission.
La fuite en avant
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