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Les États-Unis renouent avec l'hégémonie

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  • Les États-Unis renouent avec l'hégémonie

    A l'offensive sur les négociations commerciales, la lutte contre la fraude fiscale ou le terrorisme, les Etats-Unis s'emploient à réactiver leur puissance sur tous les fronts. Dans cette bataille pour garder la main, Washington dispose d'une arme essentielle: le dollar.

    Pas de doute, Christine Lagarde sait y faire. Rien ne manquait à son vibrant discours sur l'amitié franco-américaine prononcé fin octobre devant un parterre de 600 invités réunis salle Wagram par la très prestigieuse French-American Foundation : des mots diplomatiques pesés au trébuchet, de l'émotion à travers l'évocation du débarquement en Normandie, du "concret" au vu du travail en commun accompli par les deux pays dans le cadre du G20.

    Et une conclusion hyperbolique comme son auditoire bilingue les aime : "La France et les Etats-Unis, best friends forever ". Immense ovation. Peut-être trop marquée, d'ailleurs. Comme si ce record à l'applaudimètre devait couvrir une gêne palpable entre les deux amis, réchauffer un froid bilatéral.

    Et pour cause : aucun des convives n'a oublié l'énorme amende infligée par les Etats-Unis à BNP Paribas, l'été dernier. Pour avoir violé des embargos américains, notamment au Soudan, la banque française a été condamnée à payer 8,9 milliards de dollars. Alors, après quelques verres, les langues des invités de la French-American Foundation se délient.

    "Suite à cette affaire, nous avons embauché un Américain pour être sûrs d'être en conformité avec les lois des Etats-Unis", chuchote un cadre haut placé d'un géant français de l'énergie. "Cette personne mettra des mois avant de comprendre toutes nos activités. Mais pas question de prendre le moindre risque."

    Un risque pèse sur toutes les transactions en dollars

    Kenneth Courtis, président de Starfort Holdings et ancien vice-président de Goldman Sachs-Asie, se risque même à donner la morale de l'histoire : "Au fond, les Etats-Unis ont réussi leur coup. Ils ont effrayé tout le monde." Le message véhiculé par l'Oncle Sam est très clair : peu importe l'endroit où vous vous trouvez. Si vous effectuez une transaction en dollars, le droit américain s'applique.

    Dans leur sabir fait de néologismes pas commodes, les juristes appellent cela l'extraterritorialité. "En principe, et cela a été dit par la Cour suprême des Etats-Unis, le droit américain est à usage interne, et les Etats-Unis ne doivent pas régir le monde entier", rappelle François Vié, président du Mouvement européen-Pas-de-Calais.

    Mais, visiblement, les Etats-Unis ne l'entendent pas de cette oreille et préfèrent faire de leur monnaie une arme économique et politique. "Ils auraient tort de s'en priver", commente l'économiste Michel Santi. Monnaie dominante, le dollar représente 62% des réserves mondiales de change, 87% des échanges financiers, et 81% du commerce mondial.

    Reste que cette fameuse extraterritorialité du droit américain fait désormais peser un risque sur tous les organismes qui gèrent des transactions en dollars, même s'ils n'ont aucune activité aux Etats-Unis. Alors, en coulisse, les banques s'adaptent. Les tensions montent entre les Etats-Unis et la Russie ?

    Les banques -grandes utilisatrices de billets verts- réduisent leur voilure. "Lors d'une réunion récente à Washington, j'ai rencontré 36 groupes bancaires de tous les horizons (Japon, Union européenne, Moyen-Orient, Turquie, Amérique latine, Australie...), explique Kenneth Courtis. Ils ont tous -et je dis bien tous- coupé des lignes de crédits aux entreprises russes et à toute autre entreprise qui pourrait faire affaire avec elles (par exemple des entreprises kazakhes ou ouzbekes). Ils n'étaient pas obligés de le faire.

    Mais l'affaire BNP Paribas les a traumatisés." La leçon à retenir : via le dollar, tout le monde a affaire indirectement aux Etats-Unis, et chacun doit se le tenir pour dit.

    Menaces à l'encontre des banques récalcitrantes

    La règle vaut en matière financière et commerciale, mais s'applique aussi au nom de la lutte contre la fraude fiscale ou le terrorisme. En 2010, les Etats-Unis ont voté la loi Fatca, qui impose aux "pays amis" de livrer des informations sur les comptes bancaires des contribuables américains à l'étranger. "Les Etats-Unis ne disposent d'aucun support législatif ou réglementaire pour faire cela.

    Ils ont simplement menacé les banques récalcitrantes de geler une partie de leurs avoirs", constate Georges Ugeux, ancien vice-président de la Bourse de New York et aujourd'hui patron de Galileo Global Advisors, une banque d'affaires. Un véritable chantage.

    Pis, le droit américain "inspire" le droit suisse. Pendant longtemps, les contrôleurs de Genève ou de Lausanne toléraient la "soustraction fiscale", c'est-à-dire le droit de ne pas leur fournir une déclaration fiscale complète. Désormais, sous la pression américaine, faire de l'évasion fiscale en Suisse avec un client allergique au percepteur relève du droit pénal. Le secteur bancaire suisse va donc devoir se trouver un nouveau modèle de croissance. "Je ne m'en fais pas trop pour les banquiers suisses.

    Ils sauront rebondir. Ils ne manquent pas d'ingéniosité", ironise un expert de la finance. Mais le plus irritant, ajoute un homologue, c'est que les Etats-Unis ne s'appliquent pas la loi Fatca à eux-mêmes. "L'Oncle Sam demeure un paradis fiscal. Il continue d'accueillir des fonds en provenance du Mexique, de Cuba, du Brésil, de l'Argentine... et ses banques ne sont pas inquiétées pour cela."

    Certes, elles ont été mises à l'amende pour leurs responsabilités dans la crise des subprimes. Depuis 2009, les six plus grandes banques de Wall Street - JPMorgan Chase, Bank of America, Citigroup, Wells Fargo, Goldman Sachs, Morgan Stanley - ont dû payer 130 milliards de dollars en guise de dédommagement. Une somme plus que rondelette. Mais même si l'addition est salée, on est loin d'une vague punitive.

    Washington, bien moins sévère avec ses banques

    "Les banques fautives ont toutes été renflouées par Washington", rappelle un financier. Pis, les amendes infligées aux banques américaines ne représentent que 5% des profits générés pendant la période des subprimes ! La règle du "un poids deux mesures" s'appliquerait donc aussi à la grande démocratie américaine, adepte du well balanced, comme disent les hommes d'affaires.

    Pourtant, le risque de déséquilibre angoisse les partenaires européens sur un sujet aux abords techniques, mais aux conséquences économiques majeures: le round de négociations commerciales entre les Etats-Unis et le Vieux Continent, actuellement en discussion. Le fameux accord de libre-échange Tafta.

    Difficile de savoir ce qui sortira de ces accords : les négociations se déroulent de manière opaque entre les lobbys des multinationales et quelques fonctionnaires de Bruxelles.

    Les nouvelles technologies, une arme de contrôle

    Mais l'accord Tafta prévoit néanmoins un nouvel effacement des droits de douane et un abaissement des normes d'exportation dans certains secteurs, potentiellement préjudiciables aux fleurons du Vieux Continent. Mise en garde de l'économiste Thomas Porcher : "Moins protégés, des pans entiers de l'industrie européenne risquent de tomber. Les négociations risquent aussi de remettre sur la table une grande partie de nos choix (interdiction des OGM, fracturation hydraulique...)."

    Plus inquiétants encore, les accords prévoient la création d'un tribunal arbitral destiné à régler les contentieux entre les Etats et les entreprises. Celles-ci pourraient le saisir afin d'obtenir réparation en cas de réglementations jugées trop contraignantes. "Un tribunal composé de fonctionnaires irresponsables sans aucune légitimité démocratique et de représentants de multinationales dont les intérêts passent avant ceux de la collectivité", imagine déjà Jean-Michel Quatrepoint, auteur du Choc des empires (Gallimard).

    Rien n'est encore signé, les négociations prendront beaucoup de temps, mais la volonté de puissance américaine ne fait pas mystère. Bien sûr, les omnipotences de l'Oncle Sam ne datent pas d'hier mais, selon Jean-Michel Quatrepoint, deux éléments récents viennent les renforcer.

    D'abord, l'ambition de la Chine. Il y a quelques années, les Etats-Unis rêvaient d'exploiter le potentiel économique chinois et de former un G2 avec le géant asiatique. Mais, entre 2006 et 2008, le projet leur échappe. Les Etats-Unis ne voient plus dans la Chine un partenaire tout disposé à ouvrir grand son marché intérieur, mais un concurrent lui aussi en quête de puissance.

    Pékin veut des porte-avions, envoyer des hommes sur la lune, posséder une monnaie forte... "Depuis que le projet du G2 est enterré, les Etats-Unis se tournent à nouveau vers l'Europe pour former un bloc commercial capable de peser sur la Chine", décrypte Thomas Porcher.

    Ensuite, le développement des nouvelles technologies, comme auxiliaire puissant d'influence et de contrôle. Aujourd'hui, il est beaucoup plus facile de repérer les transactions en dollars dans les pays litigieux. Une anecdote en dit long : l'ambassadeur d'un grand pays européen à Cuba vient d'en faire l'amère expérience.

    Celui-ci voulait acheter en billets verts une voiture de marque européenne à La Havane pour ses déplacements personnels. Son compte bancaire a été bloqué pendant plus de quinze jours ! En fin diplomate, peut-être s'est-il rabattu sur une vieille Cadillac...

    Les constructeurs français évincés du marché automobile iranien

    Impossible d'en parler avec les constructeurs automobiles français. Sujet trop sensible. Mais, selon plusieurs sources, c'est bien sous la pression américaine que PSA et Renault -mais aussi les constructeurs coréens- ont quitté le marché iranien, en 2011. Une sortie surtout dommageable pour PSA : la marque écoulait 420 000 véhicules par an sous forme de "kits", et l'Iran était son deuxième meilleur marché en matière de marge nette.

    Depuis la fin de 2013, une partie des sanctions contre l'Iran a été levée. Du coup, PSA et Renault se repositionnent. Mais les entreprises européennes manquent, comme par hasard de partenaires bancaires -ces derniers ont, eux aussi, plié bagage. Les Etats-Unis -par le biais du Trésor, de l'organisme chargé de veiller au respect des embargos (Ofac) et de General Motors- exerceraient des pressions pour rafler plusieurs marchés en Iran, et pas seulement celui de l'automobile.

    Confidence d'une source proche du dossier : "Les Etats-Unis veulent retrouver la position de leader incontesté qu'ils connaissaient avant la révolution de 1979."

    Par Sébastien Julian
    L'Express
    Dernière modification par zek, 30 décembre 2014, 18h44.
    Si vous ne trouvez pas une prière qui vous convienne, inventez-la.” Saint Augustin

  • #2
    pour une fois rien compris à l'intérêt ou la nouveauté de ce post

    le dollar ? çà a toujours été la base de l'empire marikano-saoudien

    les BRICS auraient-ils tenté une récente et significative "dédollarisation" de la vente du pétrole ?

    le monde vient-il d'échapper à une roublaridisation, comme déjà dit , poutinienne ?

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    • #3
      Les États-Unis renouent avec l'hégémonie
      L'avaient-ils jamais abandonnée pour parler de renouement!!!!?

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