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Mort de René Vautier, cinéaste combattant

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  • Mort de René Vautier, cinéaste combattant

    Résistant sous l'occupation, emprisonné pour son premier film, passé du côté du FLN pendant la guerre d'Algérie, membre du groupe Medvedkine après mai 1968, défenseur de l'autonomie bretonne, le cinéaste René Vautier est mort le 4 janvier en Bretagne. Il avait 86 ans.

    Le grand public a pris conscience de son existence en 1972, lorsque Avoir vingt ans dans les Aurès a été présenté à Cannes, à la Semaine de la critique. Le film racontait la désertion d'un soldat français en Algérie qui refusait l'exécution sommaire d'un prisonnier algérien. Mais ce n'est pas l'histoire de René Vautier. Il a passé le conflit algérien de l'autre côté, son itinéraire l'ayant porté depuis longtemps dans le camp des colonisés.
    Né le 15 janvier 1928 à Camaret, dans le Finistère, ce fils d'ouvrier rejoint la Résistance en 1943. Après la guerre, il suit les cours de l'IDHEC et adhère au parti communiste. En 1950, la Ligue de l'enseignement le charge de réaliser un film sur l'éducation française en Afrique subsaharienne. Vautier détourne la commande et évoque une réalité méconnue : le travail forcé, les violences des autorités coloniales contre les populations entre la Côte d'Ivoire et le Mali. Le film qu'il rapporte de ce que l'on appelait alors l'A.O.F., Afrique 50, est non seulement censuré (il le restera quarante ans), mais vaut à son auteur une condamnation à un an de prison, exécutée dans les prisons militaires.
    UN FOCUS SUR L'ALGÉRIE
    Au moment du déclenchement du conflit algérien, René Vautier part pour l'Afrique du Nord, d'abord pour la Tunisie, où il tourne deux courts métrages avant de gagner l'Algérie, aux côtés de maquis du FLN. Il y tourne deux documentaires, Une nation, l'Algérie, aujourd'hui perdu et L'Algérie en flammes. Cette collaboration lui vaut d'être poursuivi par les autorités françaises et René Vautier reste en exil jusqu'en 1966.

    Peu après son retour en France, il rejoint en 1967 le groupe Medvedkine formé à Besançon autour de Chris Marker. Cette coopérative destinée à donner une image cinématographique des luttes ouvrières inspire René Vautier qui s'établit finalement en Bretagne où il fonde l'Unité de production cinématographique de Bretagne.
    C'est dans ce cadre qu'il produit ses deux longs métrages de fiction Avoir vingt ans dans les Aurès et La Folle de Toujane (1973). D'Avoir vingt ans, Louis Marcorelles dira dans ces colonnes qu'il s'agit du « film le plus libre, le moins conformiste que nous ayons vu en France depuis longtemps ». Le cinéaste tourne aussi des documentaires sur les luttes ouvrières Quand tu disais Valéry (1975) ou Quand les Femmes ont pris la colère (1976) coréalisé avec Soazig Chappedelaine.

    En 1972, René Vautier entre en grève de la faim après que le refus d'un visa d'exploitation pour le film Octobre à Paris, réalisé par Jacques Panijel après le massacre des manifestants algériens à Paris le 17 octobre 1961. Vautier voulait enfin sortir le film à travers sa société de distribution, et ne cesse sa grève qu'après avoir reçu du ministre de la culture de l'époque, Jacques Duhamel, l'assurance que les critères politiques n'entreront plus en ligne de compte dans les décisions de la commission de contrôle cinématographique.
    En 1981, l'UPCB ferme, faute de financement, mais René Vautier ne cesse pas pour autant de tourner, des films sur les essais nucléaires dans le Pacifique, sur l'immigration, sur la Résistance. En 1985, lors du procès qui oppose Le Canard enchaîné à Jean-Marie Le Pen au sujet des tortures infligées par ce dernier pendant la guerre d'Algérie, l'hebdomadaire produit le témoignage d'une des victimes du lieutenant Le Pen, Ali Rouchaï que le cinéaste a tourné à Alger. René Vautier est aussi l'auteur de plusieurs ouvrages dont Caméra citoyenne - Mémoires, publié en 1988.

    par Thomas Sotinel
    le monde
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  • #2
    René Vautier: De l’Algérie en flammes à la «caméra citoyenne»

    Sa dernière œuvre, cosignée avec sa fille, date tout juste de l’année écoulée et signe, d’une certaine manière, les engagements d’une existence vouée au cinéma et aux luttes pour un monde plus juste, plus fraternel. Son titre : Histoires d’images, Images d’histoire. Ma dernière rencontre avec René Vautier, fin 2011, était tout à fait inopinée et presque improbable. Je rejoignais la gare de Lorient pour regagner Paris, au lendemain d’un colloque d’hommage à Germaine Tillion, et j’avais eu la belle surprise de voir René Vautier en sortir en compagnie de Abderrahmane Moussaoui. J’en fus ému. Je savais Vautier fatigué et il sortait précisément d’une hospitalisation qui, visiblement, affectait son moral. Ses yeux si vifs, si expressifs affichaient la tristesse et je m’étais surpris à penser aux chênes qu’on abat… Et René Vautier était, à tous égards, le plus fécond des arbres de la terre bretonne. Il avait d’abord été un résistant précoce et distingué qui avait pensé trouver dans le Parti communiste français le cadre nécessaire pour construire une société plus libre, plus juste ; la censure de son film Afrique 50 aura raison de ses illusions mais pas de son engagement. En marge d’un film sur la colonisation de l’Algérie, il plaide déjà en faveur d’une indépendance jugée inéluctable et légitime et il en découvre les militants en marge d’un tournage en Tunisie. Il y rencontre notamment Abane, découvre Djamel Chanderli et se retrouve engagé dans les premiers pas d’un cinéma de combat, dans les maquis des Aurès Nememcha ; le film qu’il en tire, L’Algérie en flammes (monté en RDA en 1958) fera le tour du monde alors que son auteur sera assigné à l’isolement dans la prison tunisienne de Denden par décision des responsables algériens. En novembre 1984, dans le cadre du premier panorama «Cinéma et Révolution» tenu à Constantine, Vautier, qui y avait gagné le pseudo de Farid Edendani, évoqua sans rancœur l’épisode. Il sera, au lendemain de l’indépendance, aux avant-postes de la mise en place d’un cinéma national algérien. Il cosignera, en 1963, le premier long métrage documentaire sur la résistance algérienne, Peuple en marche et participera au lancement de l’opération «Cinéma populaire», les fameux «cinépops». René Vautier était un peu plus qu’un ami de l’Algérie et, faut-il le rappeler a fait l’objet de poursuites, de condamnations par la justice française en raison de ses engagement. Mais il témoignera toujours avec passion de son attachement à l’Algérie et, à travers elle, aux principes de justice, de liberté. Il sera ainsi à Constantine pour rendre hommage, en janvier 1991, à son ami Djamel Chanderli et dira, avec une fine intelligence, la réalité des contraintes aux libertés dans les pays réputés libres.
    En France, son film Avoir vingt ans dans les Aurès ou son combat en faveur de la levée de la censure qui frappait le documentaire de Jacques Panigel sur les massacres de 1961, Octobre à Paris, rajoutaient à l’image sulfureuse qu’en donnaient volontiers les médias et la profession.
    René Vautier était un combattant de la liberté ; son arme était la «caméra citoyenne», si nécessaire aujourd’hui au parachèvement d’une indépendance à laquelle il a apporté son courage et sa générosité.
    par Abdelmadjid Merdaci
    dz(0000/1111)dz

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