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Le livre abandonné

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  • Le livre abandonné

    Voici une chronique en parfait accord avec ce que je ressens. Je m'explique l'auteur de cet article relate ce nouveau concept qui est d'abandonner un livre afin que quelqu'un le ramasse, le lise et à son tour fasse de même et l'abandonne. Or c'est quelque chose qu'il me serait impossible de pratiquer vis à vis du livre. Je ne saurai abandonner un livre ignorant ainsi tout de son devenir. J'ai un contact quasi "charnel" avec le livre et je ne sais pas le prêter. Je l'offre, je le donne ou en achète un autre .
    De même je ne sais pas lire un livre online il me faut le contact avec le livre avec toute la gestuelle que cela entraine, le prendre le reposer, le feuilleter etc..

    ===

    Station Invalides. En descendant de la rame, on se rend compte - allez savoir pourquoi à ce moment-là - que l’on n’a toujours pas de sujet de chronique et que celles qui sont au marbre demandent à être sérieusement rafraîchies.

    Et là, se produit, comme c’est souvent le cas, le petit miracle hebdomadaire; le déclic qui fait se dire «mais bon sang, mais c’est bien sûr !». En fait, on ne réalise pas tout de suite que c’est «le» sujet de la semaine, emporté que l’on est par l’élan de l’action, toutes oreilles ouvertes pour capter une conversation. Racontons.

    Sur le quai, un jeune homme maigrichon, pantalon de velours noir et baskets blanches, laisse tomber un livre qui fait un gros ploc en touchant le sol. Son propriétaire ne s’en aperçoit pas et continue sa marche rapide dans le flot des salariés encore mal réveillés et, pour nombre d’entre eux, sûrement déprimés à l’idée d’une semaine qui ne fait que commencer et qui, même à son terme, ne rapprochera que très peu des vacances - s’il y en a - de fin d’année.

    Une dame, blonde, longiligne, chaussures pointues, se baisse et ramasse le bouquin. Monsieur, monsieur, crie-t-elle. Il n’entend rien. Normal, les haut-parleurs de la station crachent une annonce qui explique en espagnol que l’arrêt n’est pas marqué à la station Duroc pour cause de travaux. Alors, la dame essaie d’accélérer le pas, d’aller plus vite que ceux qui vont déjà vite et qui, de toutes les façons, n’aiment pas qu’on essaie de les dépasser parce que c’est ainsi, cela ne se fait pas. C’est une question de principe. Tu ne passeras pas devant moi, car c’est ma façon de dire, de me dire, que j’existe, que j’ai droit au respect que, malheureusement, mon supérieur au bureau ne me témoigne pas.

    Quant à moi, poussé par le flair du chroniqueur, je suis le mouvement. Va-t-elle le rattraper ? C’est un suspense ordinaire, mais délicieux, comparable à celui qu’on vit quand, d’une terrasse de café ou d’un balcon, on regarde avec un brin de moquerie quelqu’un courir derrière un bus. Va-t-il arriver à temps, avant que l’engin ne reparte ? Non, c’est raté. Mais si ! Il y a encore une chance puisque le bus s’arrête au feu rouge. Le malheureux se remet à courir et rattrape la boîte verte qui roule au gaz pour ne pas polluer la ville. Peine perdue, le chauffeur refuse de lui ouvrir la porte: «C’est pas réglementaire». Alors, c’est selon, le poursuiteur revient vers l’arrêt, continue sa marche à pied ou, plus intéressant, commence à cogner les vitres du bus et à traiter le chauffeur de petits noms pas très sympathiques. Parfois, cela peut s’envenimer pour le plus grand plaisir des curieux et des badauds.

    Revenons à la dame blonde. Premier escalier: le propriétaire du livre n’est qu’à trois mètres devant. Dans le couloir, il garde son avance. Monsieur, monsieur... C’est étrange, personne ne se retourne. Elle essaie de s’intercaler mais un coup d’épaule d’un benêt venant en sens inverse lui fait perdre un mètre supplémentaire. Deuxième escalier, direction Créteil.

    A droite ou à gauche ? Ça y est, elle le repère in extremis. Quand elle débouche sur le quai, le métro est là et la sonnerie retentit déjà.

    Pas le temps de monter dans le même wagon que lui. Vite, s’engouffrer dans celui d’à côté. A l’intérieur, elle va - et moi aussi - vers le fond, là où on peut apercevoir les voyageurs de l’autre wagon. Le jeune homme est bien là, lisant un journal gratuit. La blonde agite le livre en espérant qu’il la verra en relevant la tête. Cela me permet de lire le titre. C’est un récit en anglais qui a connu son heure de gloire outre-Manche: «A year in the *****» du journaliste anglais Stephen Clarke ou les aventures d’un British à la découverte de la France. Livre un peu méchant et bourré de clichés dont la traduction en langue française s’intitule, c’est moins offensant, «God save la France». Mais bref. Ce qui m’étonne aussi, c’est qu’elle ne l’ouvre pas, comme si elle s’interdisait de profiter, même quelques instants, d’un objet qui ne lui appartient pas.

    Station Opéra. Il est descendu. Nous aussi. La dame le hèle. Monsieur, monsieur. Vous avez laissé tomber votre livre à Invalides. J’ai essayé de vous rattraper mais vous alliez trop vite. Sourire et remerciements. Bizarre. Le premier est un peu crispé et les seconds sont presque froids. La dame est visiblement déçue. Elle ne hurle pas «c’est bien la dernière fois que je me donne ce mal» mais son regard bleu le dit. Elle tourne le dos et monte dans la rame qui vient d’arriver. Je pourrai en faire de même mais quelque chose me dit d’attendre.

    Alors que les portes automatiques vont se refermer, le maigrichon pose le livre sur la faïence bleue où, c’est selon, s’asseyent les fatigués ou dorment les SDF Il s’éloigne ensuite avec son pas toujours aussi rapide. Dans le wagon, la blonde l’a vu faire et, l’espace d’une seconde, je la vois blêmir et se pincer les lèvres. Vous allez me dire que vous avez tout deviné. Que le jeune homme n’a pas supporté ce qui était écrit dans ce livre à propos de son pays et de son peuple et qu’il a préféré s’en débarrasser. Erreur. Je vous explique. Ce «A year in the *****», je l’ai ramassé. Dans la première page, habituellement blanche, il y avait, écrit à l’encre turquoise, le message suivant: «Ce livre ne vous appartiendra que le temps de sa lecture. Lisez-le puis libérez-le dans un endroit fréquenté. Donnez-moi de ses nouvelles à l’adresse suivante: [email protected] ». Signé un certain Olivier B.

    Cela s’appelle le «bookcrossing» et son principe, vous l’avez compris, est simple. On lit un livre puis on l’abandonne dans un lieu public en espérant que celui qui le trouvera jouera le jeu et ainsi de suite, le tout formant une chaîne de lecteurs liés par un même ouvrage.

    Tout cela, au nom d’un concept né en 2001 qui appelle à la «libération des livres». Il y a même des sites internet dédiés à cette pratique et on y découvre que certains romans voyagent d’un continent à l’autre (remarquez, il suffit de les abandonner dans un aéroport). «Libération des livres»... Voilà donc, une nouvelle fois exprimée, la vacuité qui caractérise le monde dans lequel nous vivons !

    Bien entendu, j’ai pris le bouquin du maigrichon. Je vais le lire et quand j’en aurai terminé, je le garderai ou le prêterai peut-être à quelqu’un de mon entourage (qui devra le rendre, n’est-ce pas Gassier ?). Sinon, j’irai voir un bouquiniste pour l’échanger contre quelques bandes dessinées. Car c’est ainsi, un livre, ça s’offre, ça se prête, ça s’échange, ça se vend, ça se donne, ça peut même se voler, mais ça ne s’abandonne pas au profit de lecteurs virtuels même si c’est la dernière mode «new âge» qui le commande.

    Par Akram Belkaïd, le Quotidien d'Oran

  • #2
    bonsoir morjane

    ton histoire m'as intrigué car cette pratique je l'exerce depuis les années de l'université "90" mais avec les journaux ...... moi je met sur sa "une" : "JOURNAL GRATUIT .......PASSE A L'AUTRE" .....mais réelement je me soucis pas de son parcours ..... l'idée de l'adresse E-mail n'est pas mal


    J'ai un contact quasi "charnel"
    j'espère que ses livres ne croisent pas ton chemin
    Dernière modification par cybinus, 23 novembre 2006, 19h17.
    "Se réunir est un début ; rester
    ensemble est un progrès ; travailler
    ensemble est la réussite."
    Henry Ford

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    • #3
      "Bien entendu, j’ai pris le bouquin du maigrichon. Je vais le lire et quand j’en aurai terminé, je le garderai ou le prêterai peut-être à quelqu’un de mon entourage (qui devra le rendre, n’est-ce pas Gassier ?). Sinon, j’irai voir un bouquiniste pour l’échanger contre quelques bandes dessinées. Car c’est ainsi, un livre, ça s’offre, ça se prête, ça s’échange, ça se vend, ça se donne, ça peut même se voler, mais ça ne s’abandonne pas au profit de lecteurs virtuels même si c’est la dernière mode «new âge» qui le commande.
      et pourquoi tu as joue le lecteur virtuel si tu n'etais pas d'accord avec ce principe?
      il fallait je pense laisser ce livre en place, car lorsqu'on a un principe on va jusqu'au bout.
      comme on dit, tu voulais le beurre et l'argent du beurre...
      J'ai appris que le courage n 'est pas l'absence de peur, mais la capacité de la vaincre. Nelson Mandela

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      • #4
        Najib2006

        tu sais j'espère que tu t'adresse au journaliste du "Quotidien d'Oran" et non a Morjane car elle ne fait que reporter son article donc je doute qu'il puisse répondre à ta question seulement moi je dis qu'il à déjà répondu

        ça peut même se voler
        et oui en etant au courant du principe et sachant que ce bouquin n'est sûrement pas sa proprièté c'est du vole qualifié ni plus ni moins .......
        "Se réunir est un début ; rester
        ensemble est un progrès ; travailler
        ensemble est la réussite."
        Henry Ford

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        • #5
          bien sur que je m'adressais au chroniqueur du Quotidien d'Oran.
          dont soit dit en passant, j'aime bien lire les chroniques hebdomadaires, mais sur ce coup, il m'a vraiment deçu.
          J'ai appris que le courage n 'est pas l'absence de peur, mais la capacité de la vaincre. Nelson Mandela

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          • #6
            la vacuité du journal d'Oran

            Voilà donc, une nouvelle fois exprimée, la vacuité qui caractérise le monde dans lequel nous vivons !
            De quelle vacuité s'agit-il là? S'il y a vacuité littéraire c'est plutôt dans les villes d'Algérie. Il y a dans cette méthode populaire une fantastique façon de partager. Personnellement, et j'ai souvent raconté cette histoire, j'ai trouvé, par cette manière de procéder, dans le désert du Nevada, au milieu de nowhere, Conversation avec Dieu, le #2, un livre qui m'a secoué par sa perspicacité et la dialectique. À côté de celui-ci, il y avait un thermos, neuf à en croire l’état, d’une excellente qualité dont je me sers encore aujourd’hui. Pour ce qui est du livre j'ai toujours voulu répondre aux dialogues extrêmement bien ficelées mais je n'en ai jamais eu le temps, cependant l'exercice est digne d'intérêt et de courage.
            Pour ce qui est de la vacuité, ce journaliste démontre encore-là un esprit saturé de suffisance, à la maghrébin. Cela s’apparente à de la bêtise ou de la jalousie envers cette autre culture démocratique, envers sa vitalité à transmettre la connaissance et sa manière toujours dynamique de trouver de nouveaux moyens d’échanger, en outre gracieusement, par le don.

            À Montréal, il y a une journée spéciale consacrée à cette occasion.
            Dernière modification par akiles, 25 novembre 2006, 12h20.

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            • #7
              Akiles:Pour ce qui est de la vacuité, ce journaliste démontre encore-là un esprit saturé de suffisance, à la maghrébin. Cela s’apparente à de la bêtise ou de la jalousie envers cette autre culture démocratique, envers sa vitalité à transmettre la connaissance et sa manière toujours dynamique de trouver de nouveaux moyens d’échanger, en outre gracieusement, par le don.
              À Montréal, il y a une journée spéciale consacrée à cette occasion.
              Akiles, tu as vraiment su bien resume le fond de ma pensee.
              Merci.
              J'ai appris que le courage n 'est pas l'absence de peur, mais la capacité de la vaincre. Nelson Mandela

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              • #8
                Bonjour

                Merci pour vos réactions. En vous lisant , je me rends compte que j'avais zappée lorsqu'il avait parlé de voler le livre et là je ne le rejoins pas de même pour trouver de la vacuité à ce concept.

                Tout simplement parce que ce serait très vaniteux de dénigrer quelque chose uniquement parce que l'on n'y adhère pas.

                Ce qui me chagrinais était tout à fait personnel et propre à ma conception du livre et de son usage . Ce n'est pas le fait de favoriser sa divulgation qui ne me plait pas c'est le fait de l'abandonner. C'est cet abandon sans savoir son devenir à savoir être piétiné recevoir des crachats etc...

                J'accorde sans doute trop de valeur, à ce que certain et la plupart des gens sans doute accorde, au livre.

                Concernant le fait de le voler, je trouve cela stupide sans compter le coté moral de l'acte mais parce qu'un livre est le fruit du labeur d'un auteur et d'un éditeur et qu'il est normal qu'ils en soient les bénéficiaires et de plus il est tout à fait agréable de se promener dans une librairie de feuilleter les livres et d'en choisir un plutôt qu'un autre alors le fait de le voler gâche ce moment de plaisir.

                Autrement, je suis tout à fait pour que tout soit entrepris pour favoriser sa divulgation de la façon la plus large( création de bibliothèques, de bibliobus, créer un système de collecte et de redistribution, etc..) mais je sais que je ne saurai l'abandonner dans la rue dans l'espoir qu'un hypothétique lecteur le trouve en prenne soin le lise et continue cette chaine.

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                • #9
                  A Montréal, le livre n'a pas beaucoup de valeur, chez quelques uns.
                  La semaine passé, je me suis procuré les 20 tomes du dictionnaire Quillet de la langue française, les 20 reliures à l'état neuf, m'ont coûté 10 dollars environ. au Village des Valeurs, dans ces magasins le livre coûte entre 25ç et 1 dollar, rares sont les preneurs.......Un livre abondonné à Montréal, est un livre "orphelin" à jamais, et finira ses jours dans les dépotoirs.

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                  • #10
                    production littéraire: montréal-alger

                    Tiens, t'en as une qui va être contente d'entre ça!
                    (PS: est-ce que tu as visitié l'exposition du livre qui vient de se terminer à Montréal? Tu voudrais peut-être la comparer à celle d'Alger? )

                    Pour vous en faire une idée
                    Dernière modification par akiles, 25 novembre 2006, 23h28.

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