"SwissLeaks" : Des surprises dans le listing des clients algériens d’HSBC Suisse
es profils des Algériens détenant des comptes à HSBC-Suisse sont divers. En 2006-2007, période couverte par le listing, ils disposaient de comptes pourvus de montants disparates allant de quelques centaines de dollars à plusieurs millions de dollars. Ils sont pour beaucoup dans l’import-export. Parmi eux un chocolatier bien connu en Algérie, un influent homme d’affaires, un chef activiste de la Révolution et un intermédiaire d’affaires en détention préventive dans l’affaire de l’autoroute Est-Ouest*.
Pour cette première publication, l’enquête de Maghreb Émergent s’est arrêtée sur six comptes en particulier et a tenté d’entrer en contact avec leurs détenteurs pour leur permettre d’expliquer comment leurs comptes ont été alimentés. Parmi les détenteurs de ses comptes, un chocolatier bien connu en Algérie, un influent homme d’affaires, un chef activiste de la Révolution et un intermédiaire d’affaires en détention préventive dans l’affaire de l’autoroute Est-Ouest.
La législation algérienne interdit aux Algériens résidents de se constituer des avoirs monétaires, financiers et immobiliers à l’étranger à partir de leurs activités en Algérie. Une exception est expressément prévue par l’article 126 de l’ordonnance n°03-11 du 26 août 2003, relative à la monnaie et le crédit. Elle autorise les résidents devant assurer le financement d’activités à l’étranger complémentaires à leurs activités de production de biens et de services en Algérie à transférer des capitaux à l’étranger. La disposition n’est toutefois entrée en vigueur qu’à la fin 2014, date de publication par la Banque d’Algérie d’un texte réglementaire définissant les conditions préalables à l’octroi de cette autorisation. Cevital est le seul groupe privé à avoir été autorisé à transférer des devises pour financer son développement à l’international. Ainsi, tout résident algérien qui dépose de l’argent à l’étranger, sans être nécessairement lié à des affaires de corruption, fait entorse à la loi. Et des présomptions d’évasion fiscale peuvent alors planer sur ceux qui génèrent d’importants revenus en Algérie.
Une source proche de la Banque d’Algérie a estimé au sujet de ce listing algérien de HSBC Suisse que « l’existence à l’étranger de dépôts bancaires importants d’Algériens résidents pose un problème d’évasion fiscale bien plus qu’un problème de respect de la législation des changes ». Et d’ajouter : « Si des revenus générés par une activité en Algérie alimentent des comptes bancaires à l’étranger la première suspicion est qu’ils n’ont pas été déclarés aux impôts. Leur transfert à l’étranger ne peut dans ce cas se faire par le canal bancaire officiel. »
Les 10 millions du propriétaire de la marque Bimo
Amar Hamoudi et sa famille détenait en 2006-2007 dix millions de dollars dans un compte de HSBC Suisse ouvert dix années plus tôt. Amar Hamoudi, 66 ans, originaire de Boghni dans la wilaya de Tizi Ouzou, est le patron d’un des plus importants groupes privés du pays. Sa biscuiterie-chocolaterie, fondée en 1984 à Alger commercialise une multitude de produits sous la marque BIMO. Elle a d’importantes parts de marché en Algérie (35%) et exporte une partie de sa production. Amar Hamoudi est assisté dans la gestion du groupe par ses deux fils Yacine et Mehdi Sid Ali qui sont ses deux vice-présidents. Il a ouvert son compte à HSBC Suisse en février 1997. Ses deux enfants ainsi que son épouse, Baya Abbes, sont associés à ce compte. La famille est arrivée à porter la provision de ce compte à 10 millions de dollars américains. Selon une source à l’administration fiscale, le groupe Bimo, composé de quatre filiales (biscuits, chocolats, gaufrettes et cacao) a fait, durant les dix dernières années, l’objet de plusieurs redressements fiscaux.
Selon les documents consultés, le conseiller bancaire suisse d’Amar Hamoudi a noté, au passage de ce dernier à la banque en juin 2005, l’intérêt de son client pour les prix de transfert.
Les prix de transfert, selon la définition admise par l’OCDE, sont « les prix auxquels une entreprise transfère des biens corporels, des actifs incorporels, ou rend des services à des entreprises associées ». En clair, ce sont les prix des transactions entre filiales d’un même groupe et résidentes d’États différents. Un classique de l’optimisation des charges fiscales.
Amar Hamoudi gère aussi une société immobilière domiciliée en France. SCI Lyamaya est en activité depuis février 2003, son capital social est de 2,6 millions d’euros et elle est spécialisée dans la location de terrains et autres biens immobiliers. Le patron de BIMO n’a, en tout cas, pas manqué de parler de ses biens immobiliers à son banquier suisse : « J’ai vendu mon hôtel à Paris et acheté des appartements ». La famille Hamoudi que nous avons contacté a préféré ne pas donner suite à nos demandes d’explication.
Le frère du président du NAHD et son associé de NSC
Bachir Ould Zemirli détenait en 2006-2007 un compte HSBC pourvu de 5,6 millions de dollars.
Bachir Ould Zemirli, 57 ans, est le frère de Mahfoud Ould Zemirli, actuel président du club de football algérois le NA Hussein Dey (Ligue1 professionnelle). Il est présenté dans le milieu du football comme le vrai décideur de ce club. C’est un homme d’affaires associé dans plusieurs entreprises en Algérie. Il dispose de plusieurs sociétés offshores également. Il est ainsi associé dans la Société algérienne des eaux minérales d’Oumalou (SAEMO) au capital social de 80 millions de DA (1 million USD) qui commercialise l’eau minérale Sidi Rached et réalise un chiffre d’affaires annuel de 220 millions de DA (3 millions USD). Sa plus importante affaire en France est la société immobilière SCI PATIO, créée à Paris en février 2012 au capital social de 1,3 millions d’euros. Il dispose d’une société offshore, Drilling Consultant Limited, domiciliée aux îles Vierges britanniques et d’un autre compte bancaire dans la filiale libanaise d’HSBC. Bachir Ould Zemirli n’a pas d’activités commerciales au Liban. Il n’est en tout cas pas inscrit au Registre du commerce de ce pays. Son associé dans la SCI PATIO est le transitaire Zakaria Rezgui, 55 ans, patron de la SARL North Star Consulting. Zakaria Rezgui dispose de deux comptes à HSBC Suisse. Les deux comptes ont été ouverts au nom de sa société North Star Consulting. En 2006, ils étaient provisionnés respectivement de 592.254 USD (4,5 milliards de centimes environ) et 278.431 USD (2 milliards de centimes de dinars environ). Soit un total de 870 685 USD (6,5 milliards de centimes environ).
Bachir Ould Zemirli et Zakaria Rezgui se sont avérés injoignables pendant notre enquête.
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es profils des Algériens détenant des comptes à HSBC-Suisse sont divers. En 2006-2007, période couverte par le listing, ils disposaient de comptes pourvus de montants disparates allant de quelques centaines de dollars à plusieurs millions de dollars. Ils sont pour beaucoup dans l’import-export. Parmi eux un chocolatier bien connu en Algérie, un influent homme d’affaires, un chef activiste de la Révolution et un intermédiaire d’affaires en détention préventive dans l’affaire de l’autoroute Est-Ouest*.
Pour cette première publication, l’enquête de Maghreb Émergent s’est arrêtée sur six comptes en particulier et a tenté d’entrer en contact avec leurs détenteurs pour leur permettre d’expliquer comment leurs comptes ont été alimentés. Parmi les détenteurs de ses comptes, un chocolatier bien connu en Algérie, un influent homme d’affaires, un chef activiste de la Révolution et un intermédiaire d’affaires en détention préventive dans l’affaire de l’autoroute Est-Ouest.
La législation algérienne interdit aux Algériens résidents de se constituer des avoirs monétaires, financiers et immobiliers à l’étranger à partir de leurs activités en Algérie. Une exception est expressément prévue par l’article 126 de l’ordonnance n°03-11 du 26 août 2003, relative à la monnaie et le crédit. Elle autorise les résidents devant assurer le financement d’activités à l’étranger complémentaires à leurs activités de production de biens et de services en Algérie à transférer des capitaux à l’étranger. La disposition n’est toutefois entrée en vigueur qu’à la fin 2014, date de publication par la Banque d’Algérie d’un texte réglementaire définissant les conditions préalables à l’octroi de cette autorisation. Cevital est le seul groupe privé à avoir été autorisé à transférer des devises pour financer son développement à l’international. Ainsi, tout résident algérien qui dépose de l’argent à l’étranger, sans être nécessairement lié à des affaires de corruption, fait entorse à la loi. Et des présomptions d’évasion fiscale peuvent alors planer sur ceux qui génèrent d’importants revenus en Algérie.
Une source proche de la Banque d’Algérie a estimé au sujet de ce listing algérien de HSBC Suisse que « l’existence à l’étranger de dépôts bancaires importants d’Algériens résidents pose un problème d’évasion fiscale bien plus qu’un problème de respect de la législation des changes ». Et d’ajouter : « Si des revenus générés par une activité en Algérie alimentent des comptes bancaires à l’étranger la première suspicion est qu’ils n’ont pas été déclarés aux impôts. Leur transfert à l’étranger ne peut dans ce cas se faire par le canal bancaire officiel. »
Les 10 millions du propriétaire de la marque Bimo
Amar Hamoudi et sa famille détenait en 2006-2007 dix millions de dollars dans un compte de HSBC Suisse ouvert dix années plus tôt. Amar Hamoudi, 66 ans, originaire de Boghni dans la wilaya de Tizi Ouzou, est le patron d’un des plus importants groupes privés du pays. Sa biscuiterie-chocolaterie, fondée en 1984 à Alger commercialise une multitude de produits sous la marque BIMO. Elle a d’importantes parts de marché en Algérie (35%) et exporte une partie de sa production. Amar Hamoudi est assisté dans la gestion du groupe par ses deux fils Yacine et Mehdi Sid Ali qui sont ses deux vice-présidents. Il a ouvert son compte à HSBC Suisse en février 1997. Ses deux enfants ainsi que son épouse, Baya Abbes, sont associés à ce compte. La famille est arrivée à porter la provision de ce compte à 10 millions de dollars américains. Selon une source à l’administration fiscale, le groupe Bimo, composé de quatre filiales (biscuits, chocolats, gaufrettes et cacao) a fait, durant les dix dernières années, l’objet de plusieurs redressements fiscaux.
Selon les documents consultés, le conseiller bancaire suisse d’Amar Hamoudi a noté, au passage de ce dernier à la banque en juin 2005, l’intérêt de son client pour les prix de transfert.
Les prix de transfert, selon la définition admise par l’OCDE, sont « les prix auxquels une entreprise transfère des biens corporels, des actifs incorporels, ou rend des services à des entreprises associées ». En clair, ce sont les prix des transactions entre filiales d’un même groupe et résidentes d’États différents. Un classique de l’optimisation des charges fiscales.
Amar Hamoudi gère aussi une société immobilière domiciliée en France. SCI Lyamaya est en activité depuis février 2003, son capital social est de 2,6 millions d’euros et elle est spécialisée dans la location de terrains et autres biens immobiliers. Le patron de BIMO n’a, en tout cas, pas manqué de parler de ses biens immobiliers à son banquier suisse : « J’ai vendu mon hôtel à Paris et acheté des appartements ». La famille Hamoudi que nous avons contacté a préféré ne pas donner suite à nos demandes d’explication.
Le frère du président du NAHD et son associé de NSC
Bachir Ould Zemirli détenait en 2006-2007 un compte HSBC pourvu de 5,6 millions de dollars.
Bachir Ould Zemirli, 57 ans, est le frère de Mahfoud Ould Zemirli, actuel président du club de football algérois le NA Hussein Dey (Ligue1 professionnelle). Il est présenté dans le milieu du football comme le vrai décideur de ce club. C’est un homme d’affaires associé dans plusieurs entreprises en Algérie. Il dispose de plusieurs sociétés offshores également. Il est ainsi associé dans la Société algérienne des eaux minérales d’Oumalou (SAEMO) au capital social de 80 millions de DA (1 million USD) qui commercialise l’eau minérale Sidi Rached et réalise un chiffre d’affaires annuel de 220 millions de DA (3 millions USD). Sa plus importante affaire en France est la société immobilière SCI PATIO, créée à Paris en février 2012 au capital social de 1,3 millions d’euros. Il dispose d’une société offshore, Drilling Consultant Limited, domiciliée aux îles Vierges britanniques et d’un autre compte bancaire dans la filiale libanaise d’HSBC. Bachir Ould Zemirli n’a pas d’activités commerciales au Liban. Il n’est en tout cas pas inscrit au Registre du commerce de ce pays. Son associé dans la SCI PATIO est le transitaire Zakaria Rezgui, 55 ans, patron de la SARL North Star Consulting. Zakaria Rezgui dispose de deux comptes à HSBC Suisse. Les deux comptes ont été ouverts au nom de sa société North Star Consulting. En 2006, ils étaient provisionnés respectivement de 592.254 USD (4,5 milliards de centimes environ) et 278.431 USD (2 milliards de centimes de dinars environ). Soit un total de 870 685 USD (6,5 milliards de centimes environ).
Bachir Ould Zemirli et Zakaria Rezgui se sont avérés injoignables pendant notre enquête.
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