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Pierre DAUM. Journaliste, auteur de Le dernier Tabou : les «harkis» restés en Algérie après l’indépendance La major

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  • Pierre DAUM. Journaliste, auteur de Le dernier Tabou : les «harkis» restés en Algérie après l’indépendance La major

    Pierre DAUM. Journaliste, auteur de Le dernier Tabou : les «harkis» restés en Algérie après l’indépendance
    La majorité des harkis n’a pas quitté l’Algérie
    le 27.03.15 | 10h00




    Deux ans et demi d’enquête, 20 000 km parcourus et des dizaines de témoignages inédits ont été nécessaires pour construire ce livre-enquête (parution le 2 avril en France chez Actes Sud). Le mot «harki» n’aura désormais plus la même résonance en France et en Algérie, où il est resté otage des discours politiciens et de l’histoire officielle


    Votre enquête bouleverse beaucoup d’idées reçues, à commencer par le «massacre massif» de harkis, pierre angulaire de l’argumentaire victimaire de certains groupes mémoriaux en France et de l’extrême droite. Que s’est-il vraiment passé pour les «supplétifs musulmans» après 1962 en Algérie ?

    En France, depuis 50 ans, les nostalgiques de l’Algérie française instrumentalisent de façon éhontée les souffrances (réelles) que de nombreux harkis ont vécues au moment de l’indépendance. En exagérant le nombre de morts (le chiffre de 150 000 est très souvent repris alors qu’il ne repose sur aucun fondement historique) et en parlant de «massacre», voire de «génocide» des harkis, ces nostalgiques tentent, sous couvert d’un pseudo-humanisme, de justifier le combat des ultras de l’Algérie française, notamment de l’OAS.

    Derrière leurs discours dénonçant le «massacre des harkis», il faut en fait entendre : «Nous n’aurions jamais dû lâcher l’Algérie, regardez ce que ces pauvres harkis ont subi !» Ce discours a été plutôt efficace puisqu’aujourd’hui, la plupart des Français pensent qu’en 1962, les harkis ont soit réussi à s’enfuir en France, soit ont été «massacrés».

    Et qu’aucun harki, en tout cas, n’est resté vivre en Algérie. Ce qui est complètement faux. Mon enquête révèle qu’en réalité, la grande majorité des harkis est restée dans son pays sans y être assassinée.

    La plupart d’entre eux sont retournés dans leurs villages et ont retrouvé la vie de paysans très pauvres qu’ils avaient avant la guerre. Beaucoup n’ont pas été véritablement inquiétés. D’autres sont passés par des tribunaux populaires, devant lesquels beaucoup ont réussi à s’en sortir, expliquant n’avoir «rien fait de mal», ou avoir été «forcés par les Français».

    D’autres, reconnus coupables de violences à l’égard de la population civile, ont été soumis pendant quelques semaines à des travaux forcés. Certains ont passé plusieurs années en prison avant d’être libérés.

    En général, seuls les plus coupables (de tortures, viols, exactions en tout genre) ont été exécutés. Mais cela n’empêcha pas, en cette période de chaos de l’été/automne 1962, qu’aient lieu de nombreux crimes aveugles, des vengeances sordides et des exécutions sommaires, sans rapport parfois avec la guerre. Il s’agissait alors de vieilles querelles de terre, d’héritage ou de femmes.
    L’ALN/FLN a eu plusieurs politiques envers les harkis durant la période de la guerre, puis de l’indépendance...

    Lorsqu’on étudie les mémoires des anciens moudjahidine ainsi que les quelques documents et écrits accessibles (tous les chercheurs, algériens et étrangers, aimeraient que le gouvernement algérien rende enfin accessibles toutes les archives de l’ALN/FLN), on comprend que tout au long du conflit, les deux camps se sont livrés à une véritable lutte psychologique afin de gagner à eux les masses paysannes indécises. Pour l’armée française, recruter un harki, c’était avant tout une façon (illusoire) de rallier la population algérienne.

    A l’inverse, les cadres de l’ALN/FLN, conscients de la stratégie ennemie, ont toujours tenu un discours vis-à-vis des harkis du type : «Vous vous êtes trompés, vous êtes manipulés par l’oppresseur colonial, si vous nous rejoignez, on vous pardonnera vos erreurs.» De fait, un certain nombre de harkis ont quitté l’armée française et ont rejoint les rangs de l’ALN. Et inversement.

    Ce genre de va-et-vient a été constant pendant toute la durée de la guerre. A l’indépendance, l’ALN n’a donné aucune consigne à suivre vis-à-vis des harkis.

    Chaque officier –voire chaque djoundi– a agi selon sa conscience. Certains se sont montrés cléments –«La guerre est finie, on tourne la page, on ne va pas continuer à se tuer entre nous»–, d’autres, au contraire, ont cherché la vengeance. Il faut souligner que les violences envers les harkis ont souvent été le fait de «marsiens», ces résistants de la vingt-cinquième heure, ceux qui ont joué les héros quand la guerre était finie (après le cessez-le-feu du 19 mars, d’où ce surnom de «marsiens»).

    Pour ces hommes sans courage, frapper ou tuer un harki au moment de l’indépendance ne comportait aucun risque. Alors que se battre contre l’armée française, comme l’ont fait les moudjahidine, c’était évidemment autre chose.

    Quel est le nombre exact d’Algériens engagés avec la France durant la guerre d’indépendance ? Combien sont-ils encore en vie en Algérie et comment avez-vous quantifié leur présence ?

    Les chiffres précis restent très difficiles à établir à cause de lacunes dans les archives de l’armée française et aussi parce que tous les Algériens qui ont travaillé en secret pour l’armée française n’apparaissent pas dans les listes. Mais les historiens sont d’accord sur les estimations suivantes : entre 1954 et 1962, au moins 250 000 Algériens (des hommes âgés entre 16 et 50 ans environ) se sont retrouvés supplétifs de l’armée française à un moment ou à un autre de la guerre.

    A ces hommes, il convient d’ajouter les Algériens véritablement engagés dans l’armée française (50 000 hommes, des militaires de carrière), ainsi que ceux qui ont répondu à l’appel du service militaire (120 000 jeunes appelés). Cela fait donc environ 420 000 Algériens qui ont porté l’uniforme de l’armée française pendant la guerre.

    Enfin, on estime à 30 000 hommes les civils ostensiblement pro-français : caïds, aghas, bachaghas, gardes-champêtres, gendarmes, policiers, membres du corps préfectoral, conseillers municipaux, etc. Au total, on peut évaluer à 450 000 le nombre d’Algériens (hommes adultes) qui se sont trouvés du côté de la France pendant la guerre de Libération. En considérant leurs femmes et leurs enfants, cela donne 1,5 à 2 millions d’Algériens –sur les 9 millions que comptait le pays à ce moment-là.

    Sur les 450 000, seuls 30 000 au maximum sont partis en France. Il en est donc resté 420 000. Le nombre total de harkis (toutes catégories confondues) assassinés reste la grande inconnue des bilans de cette guerre. François-Xavier Hautreux, dont les travaux sur le sujet sont les plus récents, considère que «reconnaître l’impossibilité à évaluer le phénomène oblige à l’incertitude, et à évoquer des massacres de "plusieurs milliers d’Algériens" sans plus de précisions».

    Donc, arithmétiquement, le nombre de harkis (toutes catégories confondues) restés en Algérie s’élève à plusieurs centaines de milliers. Quant au nombre de harkis encore en vie aujourd’hui en Algérie, il est évidemment plus réduit puisqu’en un demi-siècle, beaucoup sont morts de vieillesse. Pour évaluer le nombre des vivants aujourd’hui, j’ai utilisé deux méthodes.


    La première est très empirique. Pendant mes deux années et demie d’enquête, je me suis rendu dans une soixantaine de villages répartis dans toute l’Algérie. A chaque fois, je ne disposais que d’un seul contact d’ancien harki. Je pensais d’ailleurs n’en trouver qu’un seul dans chaque village.

    Or, à chaque fois, à la fin de l’entretien, je demandais à mon interlocuteur s’il connaissait d’autres harkis restés dans son village. A chaque fois, la réponse était : «Mais oui, j’en connais plein !»

    Et mon témoin était alors disposé à m’en présenter cinq, huit, dix, voire quinze dans certains cas. La seconde méthode est plus scientifique. Il existe à Alger un service de l’ambassade de France destiné aux anciens combattants de l’armée française.

    Ce service s’appelle l’ONAC (Office national des anciens combattants) et ses bureaux sont situés dans le quartier du Télemly. Pendant très longtemps, ce service ne s’occupait que des anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale, de la guerre d’Indochine ainsi que des militaires (engagés et appelés) de la guerre d’Algérie.

    Depuis 2010, la loi française a changé et les anciens supplétifs ont eu aussi le droit de demander la carte de combattant avec la retraite qui l’accompagne (668 euros par an). Les demandes ont alors explosé et les gens du quartier ont soudain vu des queues de vieux messieurs se former tous les matins devant les bureaux de l’ONAC. Jusqu’en 2010, l’ONAC avait délivré 16 500 cartes de combattant à des Algériens domiciliés en Algérie. Deux ans plus tard, l’Office enregistrait en Algérie 29 300 bénéficiaires de la retraite du combattant.

    Puis 34 200 bénéficiaires au 31 décembre 2012 et 47 300 au 31 décembre 2013. Actuellement, 500 nouvelles demandes sont déposées chaque mois et aujourd’hui, on devrait avoir atteint les 60 000 bénéficiaires. Et encore, ce chiffre ne représente pas tous les harkis encore en vie, puisque beaucoup d’entre eux n’ont pas déposé de demande auprès de l’ONAC.


    ( à suivre)
    " Celui qui passe devant une glace sans se reconnaitre, est capable de se calomnier sans s'en apercevoir "

  • #2
    La majorité des harkis ( suite et fin)

    Les motivations pour rejoindre l’armée française à l’époque semblent plus complexes qu’une simple adhésion à la France coloniale ou la «trahison» pure et simple…

    Le recrutement des supplétifs s’est fait exclusivement parmi les masses paysannes écrasées par la misère. Une misère provoquée par 130 années d’oppression coloniale, accentuée par la guerre, les massacres de populations par l’armée française (bombardements, napalm) et les déplacements massifs –2,5 millions de paysans algériens ont été arrachés de leurs terres et internés dans des camps de regroupement où régnaient la famine, les maladies et la mort.

    C’est essentiellement pour assurer la survie de leurs familles que des jeunes sont «allés travailler» (c’est l’expression utilisée par tous mes témoins) pour l’armée française. Une autre raison –dont a très bien parlé l’historien et ancien moudjahid Mohammed Harbi– est la violence complètement contreproductive exercée par certains moudjahidine sur la population rurale.

    Finalement, depuis cinquante ans, qui ose continuer à affirmer que les harkis ont porté l’uniforme français «par amour de la patrie française» ? Les ultras de l’Algérie française et… les manuels scolaires algériens ! C’est là une proximité idéologique qui devrait faire réfléchir. Les ultras de l’Algérie française, je ne crois pas qu’on puisse un jour leur faire changer d’avis.

    Par contre, en ce qui concerne les manuels scolaires algériens, je suis convaincu qu’il existe en Algérie suffisamment d’historiens capables de prendre leurs distances avec un discours historique figé dans de vieilles erreurs. Et de rectifier certaines images complètement erronées concernant les harkis.


    Qu’en est-il de la phobie algérienne de la prétendue omniprésence des harkis dans les rouages de l’Etat ?


    Il s’agit là d’un très vieux fantasme qui ne repose sur aucune réalité. Aucune des personnes qui colportent cette rumeur n’a jamais donné le moindre nom ni la moindre preuve. Dans mon livre, j’ai esquissé la généalogie de cette phobie du harki comme l’«ennemi intérieur». Elle est apparue dès le début de l’Algérie algérienne, dans la bouche de Ben Bella en 1964, qui accusa les maquis insurrectionnels de Kabylie (dirigés par deux héros de la Révolution, Hocine Aït Ahmed et le colonel Mohand Oulhadj) d’être composés de harkis rémunérés par la France.

    Puis il y a eu l’accusation du président Liamine Zeroual qui, dans une interview à El Watan en novembre 1995, a déclaré à propos des terroristes islamistes : «La plupart des criminels et des mercenaires sont des harkis ou des fils de harkis, soutenus et financés par des puissances étrangères et qui ont choisi la destruction de leur pays.» Jamais aucune preuve n’a été apportée pour asseoir une telle assertion, mais beaucoup de gens continuent à croire à ces affabulations.

    Finalement, si l’accusation de «harki» est tellement utilisée en Algérie, c’est qu’elle permet, par ricochet, de se valoriser soi-même. Si je traite l’autre de «harki», ça veut dire que moi, je suis un «vrai Algérien», que j’aime mon pays, etc. Un peu comme les «marsiens» qui, en 1962, se construisaient à bas prix une figure de héros.

    Comment vivent leurs enfants dans l’Algérie d’aujourd’hui ?


    Au milieu de la jeunesse en mal de vivre, les enfants de harki ont encore moins de possibilité de s’en sortir que les autres. Pour la moindre demande de document, ils se font insulter par le plus petit des employés de l’APC qui peut, de façon totalement arbitraire, le leur refuser en les traitant de «ould harki !» ou de «bent harki !» Quant à trouver un emploi, c’est bien pire ! Par définition, un harki ne possède aucune relation dans l’administration ou dans l’armée afin d’aider ses enfants à obtenir un poste.

    Dans le royaume de la maârifa, qui va donner un emploi à un enfant de harki ? Personne, évidemment. Résultat : tous les jours, les services du consulat français à Alger reçoivent des dizaines de lettres désespérées d’enfants de harki qui demandent à partir s’installer en France, en espérant que l’ancien statut de leur père leur ouvre le droit à un visa. Or la loi française, qui accorde de nombreux droits aux 30 000 harkis partis en France en 1962 et à leurs enfants, n’accorde strictement rien à ceux restés en Algérie.

    Ces demandes de visa sont donc systématiquement refusées. Comme pour Djamel, le fils d’un harki que j’ai rencontré à Tazmalt, en Petite-Kabylie, qui m’a confié : «Pour nous, toutes les portes sont fermées. La porte pour entrer en France et la porte pour entrer en Algérie.»

    Adlène Meddi

    El Watan
    " Celui qui passe devant une glace sans se reconnaitre, est capable de se calomnier sans s'en apercevoir "

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    • #3
      Si seulement ça pouvait recadrer les débats et que chacun retourne à sa place, comme au bon vieux temps oeilfermé
      Les libertés ne se donnent pas, elles se prennent

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      • #4
        Si seulement ça pouvait recadrer les débats et que chacun retourne à sa place, comme au bon vieux temps
        Dure est l'apprentissage de l'ordre démocratique, synonyme pour les adeptes de l'ordre abrupte d'anarchie. Les mécanismes ne sont pas les memes, passer de la peur à la raison est loin d'etre acquis, mais il n'y a pas d'autres voies, qu'un long travail de construction d'une conscience citoyenne, avec les travers d'une histoire douloureuse et d'une sociologie algériennes si particulières... L'éducation démocratique est bien plus délicate que l'éducation tout court, sachant que sur ce sujet, il y a déjà un déficit chronique....
        Dernière modification par ott, 28 mars 2015, 11h42.
        Othmane BENZAGHOU

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        • #5
          les «harkis» restés en Algérie après l’indépendance
          La majorité des harkis n’a pas quitté l’Algérie
          Comme si on ne le savaient pas ! C'est l'histoire officiel de la France qui a une fois de plus transformer la réalité à son avantages, pour perpétuer le souvenir des soit disant bien fait de la colonisation.

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          • #6
            Sa7a Hbibna wouhou

            Comme si on ne le savaient pas !
            Wallah !

            Les catastrophistes,les alarmistes,la mafia de l'immobilier entre autre...

            A+.
            La pire chose pour l'Homme, serait qu'il meurt idiot.
            De grâce épargnez-moi la prolixe, la syntaxe et la chiffrerie à tout va
            .
            Merci.
            " TOUCHE PAS A MA NAPPE ALBIENNE "

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            • #7
              Les Harki ces soldat supplétifs de l'armée française durant la guerre d’Algérie
              d'après le reportage ils étaits 400 000 sur 8M et a peine 200 000 sont partis en métropole et les massacres étaient très relatif comme 1,5 million de chahid
              et les moudjahidines donc une équation difficile a résoudre mais les faits étaient et restent là ,l'histoire à été tronquée que dire des membres des assemblés élues et bien avant les bachaghas, aghas, caids ... l'emir Abdelkader décoré de la croix de la légion d'honneur à fait une rédition avec le traité de la tafna , grand ami de la france, du fils du roi françois 1er duc d'aumale, elu a l'assemblé française Abderhmane Fares,Ali chekal tué au stade en france à coté de René cotty President,FERHAT ABBAS 1ER GPRA
              le sinistre comandos George, Belounis et le MNA Bachagha Boualem, Bachagha Chentouf, BOULENFAD,etc... des colabos oubien des algeriens qui envisagaient une assimilation ? la mise a plat est tjrs d'actualité bien qu'une guerre de 7ans et demi a définitivement scellé le sort de l’Algérie française et 50 ans après c'est vraiment inopportun et il faudrait dépasser tout cela pour avancer à tous les niveaux entre l’Algérie et la France

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              • #8
                travail qui suscite réflexion

                les Harkis au lendemain de l'indépendance ont eu à se prononcer sur leur avenir. Une partie a essayé de suivre les Français. La majorité des plus démunis et des moins instruits a fini dans les camps du Sud. Les plus dégourdis qui avient le courage d'affronter seuls la société française ont tenté l'intégration au même titre que les pieds noirs et bénéficiés d'aides sociales. Ceux qui sont restés au pays , , ont pour certains été maltraités , mais leur majorité s'est fondus dans la foule et l'anonymat.

                Les harkis ont ils plus souffert des Français que des Algériens ?

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