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Les compagnies aérienne américaines demandent le réexamen du traité de l’open sky, La guerre pour le ciel

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  • Les compagnies aérienne américaines demandent le réexamen du traité de l’open sky, La guerre pour le ciel

    Ce rapport des forces sévit longtemps entre des entreprises petites et faibles, d’un côté, et d’autres plus grosses et plus fortes, d’un autre
    Cette révision visera à protéger les intérêts des compagnies américaines, ce qui est une aberration dans la logique du marché mais lorsqu’on est puissant, on a la possibilité de reprocher aux autres nos propres erreurs.

    La question centrale de la compétitivité est, pour toute entreprise, de rester en vie. Or, pour rester en vie, il faut savoir intégrer les changements de l’environnement auxquels on réagit, qu’on anticipe ou qu’on provoque lorsqu’on en a la force. La meilleure façon de faire tout cela est d’élaborer une stratégie qui doit nécessairement aboutir, sinon à augmenter la part de marché de ces entreprises, du moins à la préserver. C’est, jusque-là, ce que l’on apprend aux étudiants dans toutes les universités du monde.

    Cette compétitivité entre entreprises impose que certaines d’entre elles perdent, alors que celles qui arrivent à gagner se renforcent en se taillant des parts de marché plus importantes. Lorsque ces parts de marché ne proviennent pas d’une augmentation de la demande, alors elles sont prises aux concurrents qui, dans certains cas, peuvent même quitter le marché. C’est là aussi ce que dit la théorie que les universités dispensent à leurs étudiants et qui, pour le plus gros, provient des Etats-Unis, on s’en doute.

    Un peu d’histoire

    En 1999, ont commencé les négociations entre les Etats-Unis, le Qatar et les Emirats arabes unis à propos de l’ouverture du ciel au transport aérien dans le cadre de ce qu’on appelle dans le jargon un «traité de ciel ouvert». La signature de ces traités a eu lieu en 2001 et 2002. La Qatar Airways, créée en novembre 1993 n’était qu’une toute petite compagnie et Emirates Airlines, créée en 1985, n’était pas plus importante et, chose significative, aucune d’entre elles n’avait de ligne qui reliait les Etats-Unis. Quant à Ettihad Airways, l’autre compagnie émiratie, elle n’existait tout simplement pas car elle allait être créée en… 2003.

    En d’autres termes, ces traités étaient plutôt favorables aux compagnies américaines qui n’avaient en face que deux transporteurs de petite taille. En toute logique, on peut dire que, dans ce cas, les compagnies américaines avaient une belle occasion pour développer de nouveaux marchés non seulement dans les deux pays, mais aussi dans le Golfe car Doha et Dubaï desservaient bien et régulièrement le reste des capitales des pays de la région.

    Ces traités étaient donc un moyen volontairement choisi par les Américains pour stimuler une croissance de leurs entreprises par la diversification de leur marché. Restait alors à ces dernières de proposer soit de nouveaux services pour les clients, soit de proposer les mêmes services qu’elles avaient jusque-là. Cela dépendait de la stratégie choisie et, en pratique, elles avaient préféré n’offrir que ce qu’elles offraient déjà à leurs anciens clients.

    Quelques chiffres

    Ce rapport des forces sévit longtemps entre des entreprises petites et faibles, d’un côté et d’autres plus grosses et plus fortes, d’un autre et personne n’avait rien trouvé à redire. Ainsi, par exemple et pour reprendre les chiffres rapportés par un document officiel très récent, en 2008, les compagnies américaines et leurs partenaires se taillaient 40% du marché du transport aérien entre les Etats-Unis et le sous-continent indien alors que les compagnies du Golfe arrivaient à peine à s’y frayer un chemin avec leurs 12%. Durant la même année, les entreprises américaines et leurs partenaires mettaient la main sur 43% du marché entre l’Est des Etats-Unis et le Sud-Est asiatique alors que les entreprises du Golfe n’avaient que… 1% du même marché.

    Toujours, pour cette même année 2008, la ligne Milan-New York était dominée à 97% par les compagnies américaines et leurs partenaires alors que celles du Golfe ne la desservaient même pas.

    A l’époque personne n’avait pensé crier au scandale et tous semblaient bien accepter les règles du jeu.

    Les compagnies du Golfe se lancèrent dès 2009 dans l’exécution d’une stratégie qui allait s’avérer, à terme, très payante. Elles s’attaquèrent d’abord, aux lignes reliant les Etats-Unis au sous-continent indien. Leur part de marché connut alors une croissance régulière. Elle passa de 12% en 2008 à 19% en 2009, puis à 24% en 2010, ensuite à 28% en 2011 jusqu’à atteindre 40% en 2014.

    La demande n’ayant pas changé sensiblement, il est aisé de comprendre que ces parts de marché étaient prises sur celles des compagnies américaines et leurs partenaires qui passèrent de 39% en 2008 à 34% en 2014. En même temps, ces compagnies du Golfe se sont intéressées aux lignes qui reliaient l’Est des Etats-Unis au Sud-Est asiatique. Sur ce marché, leur part passa de 1% en 2008 à 13% en 2014. A partir de 2012 et dans une deuxième phase de leur stratégie, ces compagnies se sont attaquées à la ligne «Milan – New York» et en l’espace de deux années seulement, leur part du marché passa de 0% à près de 20%.

    Si on résume, on peut observer que ces compagnies du Golfe ont finalement élaboré et exécuté une stratégie bien réfléchie qui leur a permis de se frayer une place respectable sur le marché des Etats-Unis relatif au transport aérien des voyageurs. Elles ont appliqué les recommandations universitaires qui veulent que pour gagner il faut grandir et que pour grandir il faut savoir être compétitif. Rien de plus, rien de moins!

  • #2
    Suite

    La loi du plus fort

    Mais, en réalité, il convient de comprendre que, pour les compagnies américaines en tout cas, ce qu’on enseigne à l’université n’est bon que lorsqu’il sert leurs seuls intérêts. A partir du moment où elles perdent face à une stratégie plus forte, ces compagnies renversent la table et rejettent tout, y compris les principes de base de la concurrence, de la stratégie et même du marché.

    C’est ainsi que, voyant ces ogres du Golfe arriver leur prendre leurs parts du marché, les trois plus grandes compagnies aériennes américaines (American Airlines, Delta Airlines et United Airlines) se sont concertées pour étudier ensemble ce qu’il y a lieu de faire avant qu’il ne soit trop tard. Elles se mirent d’accord pour mettre en place des équipes chargées de mener des enquêtes approfondies au cours desquelles l’activité des trois compagnies du Golfe (Emirates Airlines, Qatar Airways et Ettihad Airways) serait passée au peigne très, vraiment très fin!

    Au bout de deux ans d’enquête, ces équipes arrivèrent à boucler un rapport de plus de 70 pages qui ne reproche rien à la stratégie mise en place, ni aux activités elles-mêmes mais qui attaque par le flanc en accusant ces compagnies d’avoir bénéficié de soutien de la part de leurs Etats respectifs. Cet aspect (la subvention) n’est pas fortuit mais, au contraire, il a l’air d’avoir été bien pensé car si ce rapport arrive à convaincre les responsables politiques américains, il leur donne la possibilité de réviser les termes du traité de «ciel ouvert».

    Cette révision, on s’en doute, visera à protéger les intérêts des compagnies américaines, ce qui est une aberration dans la logique du marché mais lorsqu’on est puissant, on a la possibilité de reprocher aux autres nos propres erreurs. Pour justifier la protection qu’elles tentent d’obtenir des autorités américaines, les compagnies d’outre-Atlantique évoquent une protection de la part des autorités de Doha et de Dubaï.

    Dans une situation normale, les entreprises qui ont perdu des parts de marché auraient réagi autrement. En se cherchant de nouveaux avantages compétitifs surtout. Elles auraient mis le paquet pour soit améliorer leurs services, soit réduire les prix, soit les deux à la fois.

    La réaction du Moyen-Orient ne tarda pas à arriver. Cette réaction essaya de recadrer le débat sur l’essentiel en mettant le doigt sur le point faible des compagnies américaines. «Nous ne «prenons» ou ne «volons» aucun client. Nous offrons un excellent produit à un prix compétitif, ce qui parle aux clients, qui choisissent de voler avec nous.

    L’obsession des trois compagnies américaines pour les parts de marché rend encore plus visible ce qu’ils recherchent vraiment: non pas la compétition, non pas des marchés ouverts ou des ciels ouverts, mais purement et simplement une allocation du marché dirigée par le gouvernement», écrivit Tim Clark, le président-directeur général d’Emirates Airlines, dans un sévère réquisitoire contre les trois compagnies américaines. Il poursuit en indiquant que «les consommateurs devraient demander à Delta, American et United pourquoi elles sont parmi les compagnies aériennes les plus profitables au monde, mais bien loin d’être classées parmi les meilleures compagnies en termes de services et de produits».

    Il va même plus loin, essayant de démontrer le jeu des trois compagnies «Les aéroports, les offices de tourisme, les Chambres de commerce et les entreprises, écrit-il, devraient demander aux régulateurs et législateurs pourquoi d’importantes liaisons aériennes directes, essentielles pour les entreprises et critiques pour le tourisme, devraient être limitées à quelques hubs aéroportuaires uniquement, desservis par les trois gros transporteurs américains et leurs partenaires de joint-venture, avec lesquels ils coordonnent leurs prix et leur capacité, couverts par une immunité antitrust.»

    Une guerre du ciel semble engagée entre, d’un côté des compagnies du Golfe qui appliquent une stratégie prédatrice à outrance et d’un autre côté, des compagnies américaines qui, non seulement ne veulent pas jouer le jeu de la compétitivité mais, en plus, font tout pour légitimer une éventuelle et probable, protection de la part de leur Etat. La guerre ne fait que commencer.

    Lundi 30 mars, L'expression via Algérie 360

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