Beaucoup de chrétiens sont persuadés que l’islam a été imposé par la force aux populations conquises. À tort.
Beaucoup de chrétiens sont persuadés que l’islam a été imposé par la force aux populations conquises, et les horreurs de l’Émirat Islamique les confortent dans cette opinion.
Or ce n’est arrivé qu’exceptionnellement, comme pour le christianisme (Charlemagne en Saxe, puis certains Allemands en Europe du nord-est, sans parler du retour un peu brutal dans le giron papal de nos compatriotes du Languedoc). D’ailleurs les conquérants arabes tenaient à leur spécificité culturelle et religieuse (et à la supériorité sociale qu’elle entraînait) et ont longtemps vu d’un mauvais œil les convertis, ressentis à juste titre comme des concurrents.
En effet, la carte des conquêtes musulmanes ne correspond pas à la diffusion de cette religion. Par exemple, le Sénégal et l’Indonésie (qui, je le rappelle, comptent plus de musulmans qu’il n’y a d’Arabes) n’ont pas été conquis, mais ont été convertis par des marchands prosélytes, probablement parce que l’islam était infiniment plus simple que les religions qu’il a remplacées, respectivement l’animisme et l’hindouisme. Inversement l’Europe centrale et balkanique est restée en grande majorité chrétienne malgré des siècles d’occupation turque.
Et même le Proche-Orient est resté largement chrétien jusqu’à tout récemment : mettre 13 siècles pour convertir une majorité renvoie à des raisons fiscales et sociales et non à des conversions forcées lors de la conquête. Reste le Maghreb, qui est resté partiellement chrétien pendant des siècles, l’histoire de son islamisation totale étant plus complexe que quelques coups de sabre (voir l’œuvre de Xavier de Planhol et d’innombrables articles et ouvrages).
Les conversions à l’islam n’ont donc été que très partiellement dues aux conquêtes, puisqu’il y a des centaines de millions de musulmans dans les pays qui n’ont jamais été conquis, et d’importantes populations restées chrétiennes dans les zones conquises. Cette analyse très factuelle risque de susciter quelques protestations énergiques, certains Occidentaux concevant mal que l’islam puisse être attractif intellectuellement, ce qui a pourtant été le cas face à l’animisme en Afrique et à l’hindouisme dans le monde malais, et l’est aujourd’hui très ponctuellement en Europe (des dizaines de milliers de cas, ce qui est une proportion très faible, mais une contribution non négligeable au djihadisme). L’arrière-plan de telles critiques peut provenir d’une confusion entre violence et contrainte religieuse. Je m’explique : quand les Barbaresques razzient les villages méditerranéens, il s’agit de violence à but commercial puisque l’on veut vendre les prisonniers, soit comme esclaves, soit à des œuvres chrétiennes qui vont les rapatrier. Il s’agit d’autant moins d’en faire des musulmans que la conversion à l’islam libère automatiquement l’esclave et prive donc le prisonnier de toute valeur marchande. Même remarque en Afrique, dont certaines régions ont été très sauvagement dépeuplées, surtout au XIXe siècle en Afrique orientale, par des razzias arabes à l’issue desquelles une partie des populations était massacrée et le reste vendu comme esclaves… qu’il ne fallait surtout pas convertir.
Ces violences ont évidemment entraîné une vision très négative de l’islam et surtout des Arabes chez les chrétiens et les populations subsahariennes de ces régions. Et il est regrettable que l’épisode barbaresque soit souvent présenté dans les ports du sud de la Méditerranée comme une période glorieuse, ce qui accroît encore l’incompréhension réciproque. Mais, encore une fois, il s’agit de violences et non de conversions.
contre points
Beaucoup de chrétiens sont persuadés que l’islam a été imposé par la force aux populations conquises, et les horreurs de l’Émirat Islamique les confortent dans cette opinion.
Or ce n’est arrivé qu’exceptionnellement, comme pour le christianisme (Charlemagne en Saxe, puis certains Allemands en Europe du nord-est, sans parler du retour un peu brutal dans le giron papal de nos compatriotes du Languedoc). D’ailleurs les conquérants arabes tenaient à leur spécificité culturelle et religieuse (et à la supériorité sociale qu’elle entraînait) et ont longtemps vu d’un mauvais œil les convertis, ressentis à juste titre comme des concurrents.
En effet, la carte des conquêtes musulmanes ne correspond pas à la diffusion de cette religion. Par exemple, le Sénégal et l’Indonésie (qui, je le rappelle, comptent plus de musulmans qu’il n’y a d’Arabes) n’ont pas été conquis, mais ont été convertis par des marchands prosélytes, probablement parce que l’islam était infiniment plus simple que les religions qu’il a remplacées, respectivement l’animisme et l’hindouisme. Inversement l’Europe centrale et balkanique est restée en grande majorité chrétienne malgré des siècles d’occupation turque.
Et même le Proche-Orient est resté largement chrétien jusqu’à tout récemment : mettre 13 siècles pour convertir une majorité renvoie à des raisons fiscales et sociales et non à des conversions forcées lors de la conquête. Reste le Maghreb, qui est resté partiellement chrétien pendant des siècles, l’histoire de son islamisation totale étant plus complexe que quelques coups de sabre (voir l’œuvre de Xavier de Planhol et d’innombrables articles et ouvrages).
Les conversions à l’islam n’ont donc été que très partiellement dues aux conquêtes, puisqu’il y a des centaines de millions de musulmans dans les pays qui n’ont jamais été conquis, et d’importantes populations restées chrétiennes dans les zones conquises. Cette analyse très factuelle risque de susciter quelques protestations énergiques, certains Occidentaux concevant mal que l’islam puisse être attractif intellectuellement, ce qui a pourtant été le cas face à l’animisme en Afrique et à l’hindouisme dans le monde malais, et l’est aujourd’hui très ponctuellement en Europe (des dizaines de milliers de cas, ce qui est une proportion très faible, mais une contribution non négligeable au djihadisme). L’arrière-plan de telles critiques peut provenir d’une confusion entre violence et contrainte religieuse. Je m’explique : quand les Barbaresques razzient les villages méditerranéens, il s’agit de violence à but commercial puisque l’on veut vendre les prisonniers, soit comme esclaves, soit à des œuvres chrétiennes qui vont les rapatrier. Il s’agit d’autant moins d’en faire des musulmans que la conversion à l’islam libère automatiquement l’esclave et prive donc le prisonnier de toute valeur marchande. Même remarque en Afrique, dont certaines régions ont été très sauvagement dépeuplées, surtout au XIXe siècle en Afrique orientale, par des razzias arabes à l’issue desquelles une partie des populations était massacrée et le reste vendu comme esclaves… qu’il ne fallait surtout pas convertir.
Ces violences ont évidemment entraîné une vision très négative de l’islam et surtout des Arabes chez les chrétiens et les populations subsahariennes de ces régions. Et il est regrettable que l’épisode barbaresque soit souvent présenté dans les ports du sud de la Méditerranée comme une période glorieuse, ce qui accroît encore l’incompréhension réciproque. Mais, encore une fois, il s’agit de violences et non de conversions.
contre points
Commentaire