Le système de crises (sécuritaire, politique, économique, sociale, religieuse et culturelle) usant l’Etat et le corps social tunisien conjugué aux profonds bouleversements géopolitiques restructurant le voisinage stratégique (Libye, Algérie et profondeur sahélienne) dopent la montée en puissance du terrorisme menaçant la sécurité nationale tunisienne et susceptible d’enclencher une dynamique de violence et de fragmentation en mesure d’amorcer un déraillement du processus démocratique encore fragile.
En Tunisie, telle une araignée ayant eu toute la latitude nécessaire afin de tisser sa toile, l’enracinement du terrorisme s’est accompagné d’une double menace mettant en cause l’unité nationale et le principe même de l’Etat national:
L’affaiblissement de l’Etat a provoqué une régression politique qui s’est exprimée par la remontée de la logique tribale. L’effort d’intégration nationale entrepris au lendemain de l’indépendance avait réussi à surmonter les clivages traditionnels des tribus et des clans. Cet acquis a été ébranlé par des revendications particularistes en vertu desquelles les ressources nationales (le phosphate dans le bassin minier) doivent profiter aux populations locales. Les désordres et les révoltes qui ont éclaté dans le bassin minier ont ouvertement soulevé cette revendication matérialisée notamment par la prise en otage du secteur des phosphates, production stratégique pour le pays. Dans le reste de la région maghrébo-sahélienne où subsistent des minorités individualisées (Amazigh, Touaregs et Toubous), la problématique se pose en tant que facteur structurel de l’intégration nationale et de la construction de l’Etat. La Tunisie, en dépit de ces soubresauts, se distingue néanmoins dans le tableau régional par une unité nationale forte et éprouvée. Néanmoins, la campagne électorale clivante menée par le président Marzouki a mis à jour des vulnérabilités et des lignes de fracture oubliées depuis l’indépendance et susceptibles, via leur instrumentalisation par des forces intérieures ou étrangères, de constituer un danger sérieux quant à la sécurité nationale;
D’autre part, la transition démocratique en Tunisie a révélé l’existence d’une minorité qui, niant la légitimité de l’Etat territorial, milite pour l’avènement de l’Etat communautaire (arabe ou islamique). Ces groupuscules s’attaquent aux symboles de l’Etat, apportent leur appui déclaré à l’avènement d’un Emirat ou à la proclamation d’un Etat islamique tel que Daesh. Ils constituent une force intérieure à l’appui des thèses jihadistes. Les contradictions et le double langage du parti relevant des Frères Musulmans devront être levées au regard de leur nature sectaire, de leur idéologie et des multiples stratégies qu’ils ont déployé suivant le même schéma, hormis des ajustements tactiques dictés par les circonstances, depuis leur création afin de prendre le pouvoir en Egypte et au sein du monde arabe.
Si la menace politique provincialiste reste surmontable par une stratégie de développement économique et social et d’équilibre régional, la menace communautariste constitue un danger profond lié au jihadisme islamiste international. La démarche, globale, doit vaincre toutes les menaces.
La violence jihadiste résiliente et mutante constitue le défi principal d’ordre sécuritaire pour les autorités nouvellement élues. En dépit des coups qui lui sont portée, ses protagonistes renouvellent constamment les rangs de leurs combattants, s’adaptent aux évolutions intérieures et régionales sans changer pour autant leurs objectifs et leur référentiel idéologique. La multiplication des embuscades suivant le modèle algérien visant les forces armées et de sécurité intérieure et l’attentat spectaculaire du Bardo du 18 mars 2015 viennent nous rappeler à quel point la menace terroriste est ancrée dans la réalité tunisienne. Cet attentat visant le cœur du pouvoir tunisien, le tourisme, pilier d’une économie tunisienne au bord de l’asphyxie et le musée du Bardo, symbole de l’identité plurielle de la Tunisie, marque un tournant majeur. Par son mode d’action et ses cibles inédits, il frappe en plein cœur la jeune démocratie tunisienne, met à jour ses vulnérabilités et l’enracinement d’une menace terroriste en mesure de cibler la capitale et le cœur des institutions. Le premier gouvernement de la deuxième république doit revoir ses priorités et adopter les mesures à court et moyen-terme inhérentes à un Etat en guerre contre la menace terroriste et criminelle.
Outre les indispensables mesures économiques, sociales, religieuses, culturelles, la bataille purement sécuritaire devra être menée sur trois fronts : affirmer sans aucune faiblesse l’autorité de l’Etat, réprimer radicalement le terrorisme, éradiquer le crime organisé transnational. Le crime organisé, connu depuis plus de 20 ans, a pris une ampleur démesurée dans les pays du Sahel africain (trafics de cigarettes, voitures, pétrole, drogues, armes, êtres humains, etc.) et étendu son réseau à la Tunisie (pétrole, cigarettes, armes, drogues, produits alimentaires) ; il porte un potentiel de déstabilisation insidieux. Terrorisme et crime organisé transnational prolifèrent à la faveur de l’affaiblissement de l’Etat et opposent conjointement une capacité de résilience plus forte.
La politique de sécurité de la Tunisie devrait se déployer suivant les axes suivants:
Recentrer l’armée sur le cœur de son métier, à savoir le combat (défendre le territoire national, sécuriser les frontières, faire face aux menaces conventionnelles et développer les capacités de lutte contre les menaces asymétriques : terrorisme, crime organisé transnational, etc.). Etudier et initier un processus progressif d’externalisation de certaines fonctions (nourriture, habillement, gestion du parc automobile, etc.);
Etablir la fonction de chef d’état-major interarmées ou des armées (CEMA) veillant à l’emploi des forces et assurant le commandement des opérations militaires. Les chefs d’états-majors (terre, mer, air) quant à eux forment et préparent les forces armées. Cette fonction doit être institutionnalisée et les prérogatives du chef d’état-major interarmées clairement définies. Il a autorité sur les chefs d'état-major de l'armée de terre, de la marine et de l'armée de l'air ainsi que sur les directeurs et les chefs des organismes interarmées qui lui sont rattachés. Il a autorité sur l'état-major des armées ;
Reconstituer et valoriser la réserve militaire. Tous les conscrits effectuant leur service national doivent sans exception être formés au maniement des armes et au combat (beaucoup trop, à ce stade, sont cantonnés à des taches connexes, dont la surveillance des bases, etc.). La réserve doit être réorganisée suivant le modèle des forces, chacun pouvant être appelé à tout moment pour rejoindre son poste. Afin de demeurer opérationnels, sur le modèle suisse, une période de 15 jours par année ou tous les deux ans de retour au sein de l’institution militaire afin de mener les manœuvres et les entraînements nécessaires pourrait être instituée. Ainsi, progressivement, une réserve organisée, efficace et mobilisable à tout moment pourrait être constituée;
Abou Iyadh, chef de l’organisation terroriste Ansar al-Charia, a constamment renouvelé son appel en faveur du jihad en Syrie et invité les Tunisiens à rallier les rangs du nouveau Califat. Ces derniers représentent, avec un nombre estimé à 3000 individus dont plus de 580 rentrés en Tunisie, le plus important contingent au monde de jihadistes engagés en Syrie, loin devant les Marocains estimés à 1500, les Algériens à 200 et les Libyens à 600 (totalpour le Maghreb d’environ 6000 individus). Le retour de ces jihadises radicalisés, fanatisés et aguerris au combat représente la menace principale à la sécurité nationale tunisienne, menace susceptible de déstabiliser durablement le pays et d’entraver le processus de consolidation démocratique . Des mesures urgentes doivent être mises en place par les autorités tunisiennes afin de détecter ces individus, assurer la neutralisation des plus radicaux et réinsérer et déradicaliser les moins extrémistes à travers un processus d’encadrement judiciaire, professionnel et médical. Les mosquées, associations caritatives, sites internet, etc. doivent faire l’objet d’un contrôle rigoureux en conformité avec les droits constitutionnels afin de ne pas leur octroyer une caisse de résonance amplifiant leur capacité de nuisance (capacité à endoctriner eux-mêmes d’autres tunisiens une fois de retour). Dans cette optique, les autorités tunisiennes pourraient:
Lancer un plan national de prévention de la radicalisation des jeunes pouvant être élargi aux pays du Maghreb et aux cinq pays de l’arc latin (plan dans le cadre du Dialogue 5+5);
Le succès dans l’éradication de la violence jihadiste en Tunisie ne peut se limiter au renforcement des moyens technico-opérationnels et de la coopération interservices, mais suppose également une attitude consensuelle de la part des différents courants politiques autour de cet objectif, une désidéologisation de l’enseignement religieux et des lieux de cultes et enfin une synergie des services de l’Etat avec la société civile. Il s’agit là du volet « politico-social » de l’action publique contre l’extrémisme armé, trop longtemps négligé ou rejeté tant à l’époque de Ben Ali que sous le gouvernement de la Troïka, mais qui est indissociable du renforcement et de l’adaptation de l’outil sécuritaire.
Proposer la création d’une structure d’accueilet de dé radicalisation en mesure de:
En Tunisie, telle une araignée ayant eu toute la latitude nécessaire afin de tisser sa toile, l’enracinement du terrorisme s’est accompagné d’une double menace mettant en cause l’unité nationale et le principe même de l’Etat national:
L’affaiblissement de l’Etat a provoqué une régression politique qui s’est exprimée par la remontée de la logique tribale. L’effort d’intégration nationale entrepris au lendemain de l’indépendance avait réussi à surmonter les clivages traditionnels des tribus et des clans. Cet acquis a été ébranlé par des revendications particularistes en vertu desquelles les ressources nationales (le phosphate dans le bassin minier) doivent profiter aux populations locales. Les désordres et les révoltes qui ont éclaté dans le bassin minier ont ouvertement soulevé cette revendication matérialisée notamment par la prise en otage du secteur des phosphates, production stratégique pour le pays. Dans le reste de la région maghrébo-sahélienne où subsistent des minorités individualisées (Amazigh, Touaregs et Toubous), la problématique se pose en tant que facteur structurel de l’intégration nationale et de la construction de l’Etat. La Tunisie, en dépit de ces soubresauts, se distingue néanmoins dans le tableau régional par une unité nationale forte et éprouvée. Néanmoins, la campagne électorale clivante menée par le président Marzouki a mis à jour des vulnérabilités et des lignes de fracture oubliées depuis l’indépendance et susceptibles, via leur instrumentalisation par des forces intérieures ou étrangères, de constituer un danger sérieux quant à la sécurité nationale;
D’autre part, la transition démocratique en Tunisie a révélé l’existence d’une minorité qui, niant la légitimité de l’Etat territorial, milite pour l’avènement de l’Etat communautaire (arabe ou islamique). Ces groupuscules s’attaquent aux symboles de l’Etat, apportent leur appui déclaré à l’avènement d’un Emirat ou à la proclamation d’un Etat islamique tel que Daesh. Ils constituent une force intérieure à l’appui des thèses jihadistes. Les contradictions et le double langage du parti relevant des Frères Musulmans devront être levées au regard de leur nature sectaire, de leur idéologie et des multiples stratégies qu’ils ont déployé suivant le même schéma, hormis des ajustements tactiques dictés par les circonstances, depuis leur création afin de prendre le pouvoir en Egypte et au sein du monde arabe.
Si la menace politique provincialiste reste surmontable par une stratégie de développement économique et social et d’équilibre régional, la menace communautariste constitue un danger profond lié au jihadisme islamiste international. La démarche, globale, doit vaincre toutes les menaces.
La violence jihadiste résiliente et mutante constitue le défi principal d’ordre sécuritaire pour les autorités nouvellement élues. En dépit des coups qui lui sont portée, ses protagonistes renouvellent constamment les rangs de leurs combattants, s’adaptent aux évolutions intérieures et régionales sans changer pour autant leurs objectifs et leur référentiel idéologique. La multiplication des embuscades suivant le modèle algérien visant les forces armées et de sécurité intérieure et l’attentat spectaculaire du Bardo du 18 mars 2015 viennent nous rappeler à quel point la menace terroriste est ancrée dans la réalité tunisienne. Cet attentat visant le cœur du pouvoir tunisien, le tourisme, pilier d’une économie tunisienne au bord de l’asphyxie et le musée du Bardo, symbole de l’identité plurielle de la Tunisie, marque un tournant majeur. Par son mode d’action et ses cibles inédits, il frappe en plein cœur la jeune démocratie tunisienne, met à jour ses vulnérabilités et l’enracinement d’une menace terroriste en mesure de cibler la capitale et le cœur des institutions. Le premier gouvernement de la deuxième république doit revoir ses priorités et adopter les mesures à court et moyen-terme inhérentes à un Etat en guerre contre la menace terroriste et criminelle.
Outre les indispensables mesures économiques, sociales, religieuses, culturelles, la bataille purement sécuritaire devra être menée sur trois fronts : affirmer sans aucune faiblesse l’autorité de l’Etat, réprimer radicalement le terrorisme, éradiquer le crime organisé transnational. Le crime organisé, connu depuis plus de 20 ans, a pris une ampleur démesurée dans les pays du Sahel africain (trafics de cigarettes, voitures, pétrole, drogues, armes, êtres humains, etc.) et étendu son réseau à la Tunisie (pétrole, cigarettes, armes, drogues, produits alimentaires) ; il porte un potentiel de déstabilisation insidieux. Terrorisme et crime organisé transnational prolifèrent à la faveur de l’affaiblissement de l’Etat et opposent conjointement une capacité de résilience plus forte.
La politique de sécurité de la Tunisie devrait se déployer suivant les axes suivants:
Recentrer l’armée sur le cœur de son métier, à savoir le combat (défendre le territoire national, sécuriser les frontières, faire face aux menaces conventionnelles et développer les capacités de lutte contre les menaces asymétriques : terrorisme, crime organisé transnational, etc.). Etudier et initier un processus progressif d’externalisation de certaines fonctions (nourriture, habillement, gestion du parc automobile, etc.);
Etablir la fonction de chef d’état-major interarmées ou des armées (CEMA) veillant à l’emploi des forces et assurant le commandement des opérations militaires. Les chefs d’états-majors (terre, mer, air) quant à eux forment et préparent les forces armées. Cette fonction doit être institutionnalisée et les prérogatives du chef d’état-major interarmées clairement définies. Il a autorité sur les chefs d'état-major de l'armée de terre, de la marine et de l'armée de l'air ainsi que sur les directeurs et les chefs des organismes interarmées qui lui sont rattachés. Il a autorité sur l'état-major des armées ;
Reconstituer et valoriser la réserve militaire. Tous les conscrits effectuant leur service national doivent sans exception être formés au maniement des armes et au combat (beaucoup trop, à ce stade, sont cantonnés à des taches connexes, dont la surveillance des bases, etc.). La réserve doit être réorganisée suivant le modèle des forces, chacun pouvant être appelé à tout moment pour rejoindre son poste. Afin de demeurer opérationnels, sur le modèle suisse, une période de 15 jours par année ou tous les deux ans de retour au sein de l’institution militaire afin de mener les manœuvres et les entraînements nécessaires pourrait être instituée. Ainsi, progressivement, une réserve organisée, efficace et mobilisable à tout moment pourrait être constituée;
Abou Iyadh, chef de l’organisation terroriste Ansar al-Charia, a constamment renouvelé son appel en faveur du jihad en Syrie et invité les Tunisiens à rallier les rangs du nouveau Califat. Ces derniers représentent, avec un nombre estimé à 3000 individus dont plus de 580 rentrés en Tunisie, le plus important contingent au monde de jihadistes engagés en Syrie, loin devant les Marocains estimés à 1500, les Algériens à 200 et les Libyens à 600 (totalpour le Maghreb d’environ 6000 individus). Le retour de ces jihadises radicalisés, fanatisés et aguerris au combat représente la menace principale à la sécurité nationale tunisienne, menace susceptible de déstabiliser durablement le pays et d’entraver le processus de consolidation démocratique . Des mesures urgentes doivent être mises en place par les autorités tunisiennes afin de détecter ces individus, assurer la neutralisation des plus radicaux et réinsérer et déradicaliser les moins extrémistes à travers un processus d’encadrement judiciaire, professionnel et médical. Les mosquées, associations caritatives, sites internet, etc. doivent faire l’objet d’un contrôle rigoureux en conformité avec les droits constitutionnels afin de ne pas leur octroyer une caisse de résonance amplifiant leur capacité de nuisance (capacité à endoctriner eux-mêmes d’autres tunisiens une fois de retour). Dans cette optique, les autorités tunisiennes pourraient:
Lancer un plan national de prévention de la radicalisation des jeunes pouvant être élargi aux pays du Maghreb et aux cinq pays de l’arc latin (plan dans le cadre du Dialogue 5+5);
Le succès dans l’éradication de la violence jihadiste en Tunisie ne peut se limiter au renforcement des moyens technico-opérationnels et de la coopération interservices, mais suppose également une attitude consensuelle de la part des différents courants politiques autour de cet objectif, une désidéologisation de l’enseignement religieux et des lieux de cultes et enfin une synergie des services de l’Etat avec la société civile. Il s’agit là du volet « politico-social » de l’action publique contre l’extrémisme armé, trop longtemps négligé ou rejeté tant à l’époque de Ben Ali que sous le gouvernement de la Troïka, mais qui est indissociable du renforcement et de l’adaptation de l’outil sécuritaire.
Proposer la création d’une structure d’accueilet de dé radicalisation en mesure de:
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