Paris s'engage pour la reconnaissance des massacres du 8 mai 1945 à Sétif (Algérie)
17 avril 2015 | Par Danielle Simonnet
Cette note de blog reprend, en l'actualisant, une tribune que j'ai fait paraître dans l'Humanité du vendredi 10 avril. J’ai présenté un voeu au Conseil de Paris des 13 et 14 avril derniers qui a été adopté à l’unanimité, demandant au Président de la République de reconnaître les massacres d’Etat commis le 8 mai 1945 à Sétif, Guelma et Kherrata en Algérie et pour l’ouverture de toutes les archives relatives à ces terribles évènements. La bataille n'est pas finie, mais cela constitue un bon point d'appui. Depuis le 14 avril, un collectif s'est constitué regroupant associations, historiens et partis politiques. Il entend organiser un premier rassemblement ce 8 mai 2015, à l'occasion des 70 ans des évènements de 15h à 17h sur le parvis de l'Hôtel de Ville à Paris ainsi que devant les mairies d'autres villes de France.
Le 8 mai 1945, le peuple Français fêtait l’armistice, la paix retrouvée et la victoire sur le nazisme. Ce même 8 mai 1945, commençaient en Algérie, à Sétif mais aussi à Guelma et Kherrata, des répressions sanglantes de manifestations nationalistes, indépendantistes et anti-colonialistes.
Dans la rue principale de Sétif en Algérie, de nombreux Algériens s’étaient rassemblés pacifiquement pour fêter l’armistice mais aussi exiger la libération du dirigeant nationaliste Messali Hadj, et défendre « l’Algérie libre », pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et pour l’indépendance. Pendant plusieurs semaines, l’armée française et de nombreuses milices coloniales, composées de civils d’origine européenne, ont alors fait régner la terreur pour rétablir l’ordre colonial et défendre l’Algérie française.
Si le nombre des victimes algériennes est difficile à établir, car encore sujet à débat, le gouvernement algérien avance le nombre de 45 000 morts et la très grande majorité des historiens français attestent d’un bilan de dizaines de milliers de victimes arrêtées, torturées et exécutées. Il y aurait eu également 102 victimes issues de la population dite «européenne», ayant perdu la vie au cours des émeutes provoquées par les massacres.
Depuis 70 ans, ces crimes de guerre commis par l’État et ceux qui le servaient, ne sont toujours pas reconnus officiellement. Une telle situation est inacceptable. J'ai donc demandé, et ma proposition a été adoptée à l'unanimité par la Conseil de Paris, que la Ville de Paris assume sur ce sujet sa fonction tribunicienne, et interpelle le Président de la République pour la reconnaissance par l'Etat français de ce massacre d'Etat. Paris pourrait aussi instaurer un lieu du souvenir à la mémoire de celles et ceux qui furent assassinés, comme elle le fit pour les massacres du 17 octobre 1961.
Cette page de l’histoire est à fois Française et Algérienne, la reconnaître contribuerait à consolider la fraternité entre le peuple Algérien et Français. Reconnaître ce massacre commis par l’Etat français permettra à tous nos concitoyens, notamment ceux issus de l'immigration algérienne, de se construire toujours plus fraternellement dans l’avenir commun de la communauté légale républicaine, où toutes les mémoires doivent être respectées.
Alors que le FN mène une bataille culturelle réactionnaire, en nostalgie de l’Algérie française et des criminels de l’OAS, en débaptisant comme à Béziers la « rue du 19 mars 1962 », date du cessez le feu de la guerre de l’Algérie, ce devoir de mémoire doit être pris très au sérieux.
Il a fallu attendre 2005 pour qu’un ambassadeur de France à Alger qualifie les «massacres du 8 mai 1945» de «tragédie inexcusable», puis son successeur déclara à Guelma en 2008 que «le temps de la dénégation des massacres perpétrés par la colonisation en Algérie est terminé». Il faut enfin que le Président de la République, François Hollande s’exprime, lui qui avait promis lors de sa campagne électorale que l’Etat Français procéderait à la reconnaissance des crimes coloniaux. L'engagement de Paris dans ce sens est une très bonne chose, et j'espère qu'il sera décisif.
Je vous invite toutes et tous à venir au rassemblement ce 8 mai 2015 sur le parvis de l'Hôtel de Ville à Paris de 15h à 17h.
Mediapart
17 avril 2015 | Par Danielle Simonnet
Cette note de blog reprend, en l'actualisant, une tribune que j'ai fait paraître dans l'Humanité du vendredi 10 avril. J’ai présenté un voeu au Conseil de Paris des 13 et 14 avril derniers qui a été adopté à l’unanimité, demandant au Président de la République de reconnaître les massacres d’Etat commis le 8 mai 1945 à Sétif, Guelma et Kherrata en Algérie et pour l’ouverture de toutes les archives relatives à ces terribles évènements. La bataille n'est pas finie, mais cela constitue un bon point d'appui. Depuis le 14 avril, un collectif s'est constitué regroupant associations, historiens et partis politiques. Il entend organiser un premier rassemblement ce 8 mai 2015, à l'occasion des 70 ans des évènements de 15h à 17h sur le parvis de l'Hôtel de Ville à Paris ainsi que devant les mairies d'autres villes de France.
Le 8 mai 1945, le peuple Français fêtait l’armistice, la paix retrouvée et la victoire sur le nazisme. Ce même 8 mai 1945, commençaient en Algérie, à Sétif mais aussi à Guelma et Kherrata, des répressions sanglantes de manifestations nationalistes, indépendantistes et anti-colonialistes.
Dans la rue principale de Sétif en Algérie, de nombreux Algériens s’étaient rassemblés pacifiquement pour fêter l’armistice mais aussi exiger la libération du dirigeant nationaliste Messali Hadj, et défendre « l’Algérie libre », pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et pour l’indépendance. Pendant plusieurs semaines, l’armée française et de nombreuses milices coloniales, composées de civils d’origine européenne, ont alors fait régner la terreur pour rétablir l’ordre colonial et défendre l’Algérie française.
Si le nombre des victimes algériennes est difficile à établir, car encore sujet à débat, le gouvernement algérien avance le nombre de 45 000 morts et la très grande majorité des historiens français attestent d’un bilan de dizaines de milliers de victimes arrêtées, torturées et exécutées. Il y aurait eu également 102 victimes issues de la population dite «européenne», ayant perdu la vie au cours des émeutes provoquées par les massacres.
Depuis 70 ans, ces crimes de guerre commis par l’État et ceux qui le servaient, ne sont toujours pas reconnus officiellement. Une telle situation est inacceptable. J'ai donc demandé, et ma proposition a été adoptée à l'unanimité par la Conseil de Paris, que la Ville de Paris assume sur ce sujet sa fonction tribunicienne, et interpelle le Président de la République pour la reconnaissance par l'Etat français de ce massacre d'Etat. Paris pourrait aussi instaurer un lieu du souvenir à la mémoire de celles et ceux qui furent assassinés, comme elle le fit pour les massacres du 17 octobre 1961.
Cette page de l’histoire est à fois Française et Algérienne, la reconnaître contribuerait à consolider la fraternité entre le peuple Algérien et Français. Reconnaître ce massacre commis par l’Etat français permettra à tous nos concitoyens, notamment ceux issus de l'immigration algérienne, de se construire toujours plus fraternellement dans l’avenir commun de la communauté légale républicaine, où toutes les mémoires doivent être respectées.
Alors que le FN mène une bataille culturelle réactionnaire, en nostalgie de l’Algérie française et des criminels de l’OAS, en débaptisant comme à Béziers la « rue du 19 mars 1962 », date du cessez le feu de la guerre de l’Algérie, ce devoir de mémoire doit être pris très au sérieux.
Il a fallu attendre 2005 pour qu’un ambassadeur de France à Alger qualifie les «massacres du 8 mai 1945» de «tragédie inexcusable», puis son successeur déclara à Guelma en 2008 que «le temps de la dénégation des massacres perpétrés par la colonisation en Algérie est terminé». Il faut enfin que le Président de la République, François Hollande s’exprime, lui qui avait promis lors de sa campagne électorale que l’Etat Français procéderait à la reconnaissance des crimes coloniaux. L'engagement de Paris dans ce sens est une très bonne chose, et j'espère qu'il sera décisif.
Je vous invite toutes et tous à venir au rassemblement ce 8 mai 2015 sur le parvis de l'Hôtel de Ville à Paris de 15h à 17h.
Mediapart
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