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Qu’est-ce que la « siba » ?

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  • Qu’est-ce que la « siba » ?

    Depuis quelque temps, le terme « siba » apparaît régulièrement dans la presse et dans le langage politique. La siba concerne non seulement la sécurité, mais aussi la circulation, l’immobilier, voire le fonctionnement de la recherche universitaire. Le terme est en fait d’un usage courant et a une forte résonnance dans la mémoire collective. Il renvoie aux notions de désordre, de dérèglement, de non-respect des lois et des conventions dans les relations sociales et le rapport aux institutions. En fait, au-delà du sens commun, la siba recèle des significations qui éclairent certains aspects de la culture politique. Pour en rendre compte, il est utile de rappeler quelques acquis de la recherche historique et socio-anthropologique. Depuis la fin du XIXe siècle, la littérature ethnographique française a d’abord opposé « Blad el Makhzen » à « Blad es-siba ». Deux territoires distincts : des villes et des plaines à dominante arabophone soumises au Makhzen, et des montagnes à dominante berbérophone, en dissidence continue, refusant de se soumettre à l’impôt et ne reconnaissant pas l’autorité du sultan. Dans le cadre d’une stratégie de « pénétration pacifique », la domination coloniale voulait dire réformer le Makhzen en réduisant l’espace de la siba. Cette image allait subir une succession de relectures et de débats. Les historiens nationalistes ont d’abord quasiment nié le contenu du binôme Makhzen/siba, et affirmé l’unité de la nation, de l’État et du territoire marocains ; les phénomènes de tension seraient ainsi des manifestations d’une situation de crise née de la pénétration européenne que le pays a subie depuis la conquête d’Alger (1830). L’évolution de la recherche a ensuite nuancé les deux approches contradictoires. Tout en admettant l’existence d’un espace de la siba, on a relevé qu’il ne connaissait pas la fixité supposée et qu’il n’impliquait pas une non-reconnaissance du pouvoir sultanien. Autrement dit, la rébellion n’impliquait pas la négation de l’allégeance.
    Dans le détail, l’historien rencontre çà et là une révolte contre le caïd, un refus de l’arbitraire fiscal, ou un conflit entre groupes autour du contrôle de ressources, comme les pâturages ou l’eau. Mais, à un niveau plus global, la siba est de plus en plus appréhendée comme une des clés d’analyse pour comprendre le fonctionnement du système makhzénien. Elle serait ainsi, du côté du pouvoir central, l’expression de : l’oscillation entre une vacance chronique et une présence abusive ; l’exercice d’une fonction d’arbitrage qui tempère une anarchie tribale latente ; la manipulation des antagonismes tribaux en vue de susciter une demande d’arbitrage ; et l’utilisation des tensions comme espace de cooptation et de renouvellement des élites makhzéniennes. Par ailleurs, loin d’être lié au contexte du XIXe siècle, le terme même de « siba » apparaît dans des époques antérieures dans les textes des historiographes, du Makhzen et même des juristes (fuqahâ).
    Que signifie la pérennité du mot malgré les transformations vécues par la société marocaine au cours du siècle dernier ? Cette continuité supposée concerne-t-elle des réalités concrètes ou seulement un phénomène de langage ? Avec le Protectorat, un changement majeur est constitué par l’État territorial muni d’outils de contrôle inconnus jusqu’alors. Mais, le pouvoir colonial a maintenu un appareil makhzénien domestiqué, et réutilisé du même coup les techniques traditionnelles de manipulation. Le Protectorat a qualifié la résistance nationale de siba. Il a aussi envisagé de neutraliser éventuellement le mouvement national en s’appuyant sur les espaces de la siba précoloniale, notamment le Moyen Atlas, laissé exprès en dehors de tout effort de modernisation. Après l’Indépendance, certaines études ont considéré que le contrôle politique des campagnes a eu comme corollaire le déplacement de la siba vers les villes. Or, il s’agit là de phénomènes de contestation sociale dont la logique n’est pas spécifique à l’expérience historique marocaine. Par contre, au niveau du vécu quotidien et jusqu’à nos jours, l’image de la siba renvoie à une interaction particulière entre des pratiques irrégulières qui ont cours au sein de la société et des pratiques makhzéniennes qui ne manquent pas d’ambivalence. Deux espaces symptomatiques qui peuvent paraître anodins, mais qui sont très révélateurs : la circulation routière et l’espace scolaire ; et deux styles d’exercice de l’autorité : l’impunité liée au privilège et la complaisance envers la tricherie et la médiocrité au nom du souci sécuritaire.
    Il s’avère donc qu’au delà de l’idée de désordre, la siba a un contenu complexe, lié à différentes représentations de la loi, du droit, et de l’État. Elle signifie, en quelque sorte, que la transgression de la loi devient, pour beaucoup, une valeur en soi ; et de ce fait, la siba constitue un facteur de blocage dans le processus d’instauration de la citoyenneté et de l’État de droit.

    Zamane

  • #2
    Mon site préféré !!! Rien que pour avoir posté une article de Zamane, je te dis merci Haddou.

    il n’impliquait pas une non-reconnaissance du pouvoir sultanien
    Mais bien entendu, la rébellion de ces régions étaient mener des fois par des Caïds intronisés par le Sultan.

    Moi je rajouterais un point : je me demande si Siba etait aussi présente surtout dans les régions negligées par le pouvoir ... Par exemple, pendant que les Saadiens pompaient l'or de tombouctou, des régions au Maroc étaient complétement oubliées du Sultan. Et si le pouvoir n'envoie pas de percepteurs, faut pas compter sur ces contrées lointaines pour venir d'elle-même.

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    • #3
      Chez nous "siba" veut dire misère extrême et par extrapolation une grande saleté .
      On dit rahom fi wahd essiba !!!
      L’ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit.”Aristote

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      • #4
        Chez nous "siba" veut dire misère extrême et par extrapolation une grande saleté .
        Nous aussi au Maroc on utilise Siba dans les expressions, mais ça veut juste dire "bros boxon" Chno had siba.

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