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Justice algérienne: La fin de l’autosaisine à deux vitesses ?

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  • Justice algérienne: La fin de l’autosaisine à deux vitesses ?

    De hauts responsables de l’État sont impliqués dans des affaires de corruption sans pour autant faire l’objet de poursuites judiciaires. Que vaut donc, devant l’impunité consacrée, l’injonction du Premier ministre sur la déclaration du patrimoine ou l’instruction de son ministre de la Justice sur l’autosaisine du parquet général, si ce n’est cacher le soleil avec un tamis ?

    Les mandats du président Bouteflika se suivent et se ressemblent sur de nombreux points. Ils ont particulièrement un dénominateur commun assez édifiant : l’éclatement au grand jour de gros scandales de corruption éclaboussant de hauts responsables de l’État sans leur nuire réellement au fond.
    Aussi bien l’affaire Khalifa, que Sonatrach, ou encore celle de l’autoroute Est-Ouest, impliquent des anciens ministres et ceux en exercice, des dirigeants d’institutions de l’État, du patron de la Centrale syndicale…
    Depuis des années, leurs noms sont cités dans les arrêts de renvoi de la justice, les colonnes de la presse nationale et internationale, les débats publics… Pourtant, rien n’est entrepris contre eux. De rares fois, de statut d’accusés, ils passent à celui de témoins, sans obligation aucune de se présenter aux audiences. Au-delà, l’opinion publique assiste médusée, ces derniers jours, à des révélations fracassantes contre la ministre de la Culture, Nadia Labidi, présumée coupable de conflit d’intérêts en faisant profiter sa boîte de communication de projets de Constantine, capitale de la culture arabe ; son collègue des Ressources en eau, Hocine Necib, qui aurait fait profiter son fils de terres agricoles à Khenchela, et contre le ministre de l’Industrie et des Mines (aussi impliqué dans l’affaire Khalifa Bank) sur lequel pèsent des soupçons de délit d'initié chez les concessionnaires.
    Ce même membre du gouvernement, ainsi que l’un de ses prédécesseurs au département de l’Industrie, Chérif Rahmani, le secrétaire général du FLN, Amar Saâdani, et la fille du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, sont évoqués dans un livre, paru dernièrement en France, pour des biens immobiliers acquis dans des quartiers chics de Paris. Les ministres en poste ont-ils cherché à démentir ces allégations ? Pas du tout. Ont-ils démissionné de leurs fonctions pour ne pas compromettre la probité et la crédibilité du gouvernement ? Nullement. Dans ce pays, les mœurs politiques ne se soumettent pas aux principes de la morale, tels qu’ils sont compris et appliqués ailleurs.
    Pour l’exemple, en mars 2015, le ministre italien des Transports et des Infrastructures, Maurizio Lupi, a démissionné parce que soupçonné d’avoir joué de son pouvoir pour faire bénéficier son fils de faveurs dans un système de marchés truqués. À la même période, le chef du gouvernement roumain n’a pas hésité à pousser son ministre des Finances, accusé de corruption, vers la sortie pour “préserver l’Exécutif d’une atteinte à sa crédibilité”.
    En novembre 2014, le ministre français des Anciens combattants, Kader Arif, a quitté ses fonctions dès que son nom est apparu dans une enquête préliminaire sur une affaire de corruption. Les cas sont nombreux dans les nations où l’on tient, comme à la prunelle de ses yeux, à l’image des institutions de l’État. La machine judiciaire est actionnée sur tous les justiciables, fussent-ils d’anciens chefs d’État, à l’instar de Jacques Chirac (emplois fictifs à l’Élysée), Nicolas Sarkozy (financement de sa campagne électorale pour la présidentielle de 2012 par l’ex-président libyen Maâmmar Kadhafi), ou encore l’ex-Premier ministre israélien Ehud Olmert (dossier de corruption). En Algérie, il est avéré que la justice n’est pas au-dessus de tous.
    Dès lors, l’instruction du ministre de la Justice, Tayeb Louh, aux parquets généraux de “s’autosaisir lorsqu’il s’agit d’une affaire susceptible d’avoir un impact sur l’opinion publique”, ou la note du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, sur la déclaration obligatoire du patrimoine des cadres de l’État, ne sont que de la poudre aux yeux. Ces injonctions resteront lettre morte ou seront appliquées sur les gens qui dérangent ceux qui ont en main les commandes du pays.

    S. H.
    Liberté du 07/05/2015
    "La chose la plus importante qu'on doit emporter au combat, c'est la raison d'y aller."
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