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La mentalité karsan
par Moncef Wafi
Scène vécue à l'aéroport d'Alger Houari-Boumediène. Une policière vérifiant les billets d'accès clashe une passagère qui s'est présentée devant elle, un téléphone portable à l'oreille. L'uniforme en service y voit un outrage alors que la situation aurait pu être dégoupillée avec un simple sourire. Denrée rare dans un pays aussi triste qu'un clown CCP. La scène dure une dizaine de minutes, le temps de retarder un peu plus le vol vers Oran. Une fois à bord de l'ATR 72-50, les premiers arrivés choisissent leur siège, l'emplacement porté sur le billet d'accès comptant pour du beurre. Ainsi, si le coucou s'écrase, on pourra toujours deviner qui est qui. Le vol prendra encore du retard à cause d'une question d'autorisation de vol et au final, ce sont 35 minutes de perdues dans la vie d'un Algérien pour rien. Mais qu'est-ce que 35 minutes lorsqu'on a perdu toute une vie à attendre que les choses évoluent dans le bon sens ? A vrai dire, le chemin est long et tortueux pour en finir avec cette mentalité karsan qui régit les destinées d'un pays schizophrène souvent en conflit avec sa propre ombre. En fait, c'est quoi la mentalité karsan ? C'est qu'un ministre, hier encore, à la tête du département de la pomme de terre se retrouve au ministère de la Recherche nucléaire sans que cela pose problème de compétence. Qu'un responsable cité dans une affaire de corruption ne soit inquiété par sa hiérarchie et qu'on lui demande de rendre compte. Que le passe-droit remplace les critères d'excellence lors d'une nomination et que les liens du sang ceux d'une promotion. Que l'à-plat-ventrisme devienne le premier citoyen de l'Algérie de l'indépendance. Que le clientélisme s'érige en mode de gouvernance et que l'argent sale et celui des autres achètent les bonnes consciences. Que les hommes de paille et les marionnettes déglinguées parlent au nom de tout un peuple et que ce même peuple attend, la main tendue et la bouche avide et ouverte, sa pension de fin du mois. La mentalité karsan, c'est lorsqu'un pays avec un passé riche joue les amnésiques en détresse, roule en lisière de son histoire et ne respecte pas le code de la démocratie. La mentalité karsan, c'est quand le receveur, recruté par le peuple avec l'argent du peuple, fait payer au prix fort une place de misère, sale et poussiéreuse. Quand on entasse 39 millions de fantômes dans un réduit pour chaussures. Quand le chauffeur, devenu propriétaire des lieux, déserte son poste et refile le volant au receveur qui conduit alors tout un pays vers le fossé. C'est quand le karsan tombe en panne, ses propriétaires le laissent au bord de la route, lui et leurs passagers, appellent Air Algérie et quittent le pays. La mentalité karsan, c'est quand on se retrouve en rade et qu'on s'assoit à lorgner ce que va faire le voisin, en attendant un mécanicien qu'on a oublié de solliciter. La mentalité karsan, c'est tout ça et beaucoup d'autres choses encore que la justice de Bouteflika interdit d'évoquer.
par Moncef Wafi
Le Quotidien d'Oran
par Moncef Wafi
Scène vécue à l'aéroport d'Alger Houari-Boumediène. Une policière vérifiant les billets d'accès clashe une passagère qui s'est présentée devant elle, un téléphone portable à l'oreille. L'uniforme en service y voit un outrage alors que la situation aurait pu être dégoupillée avec un simple sourire. Denrée rare dans un pays aussi triste qu'un clown CCP. La scène dure une dizaine de minutes, le temps de retarder un peu plus le vol vers Oran. Une fois à bord de l'ATR 72-50, les premiers arrivés choisissent leur siège, l'emplacement porté sur le billet d'accès comptant pour du beurre. Ainsi, si le coucou s'écrase, on pourra toujours deviner qui est qui. Le vol prendra encore du retard à cause d'une question d'autorisation de vol et au final, ce sont 35 minutes de perdues dans la vie d'un Algérien pour rien. Mais qu'est-ce que 35 minutes lorsqu'on a perdu toute une vie à attendre que les choses évoluent dans le bon sens ? A vrai dire, le chemin est long et tortueux pour en finir avec cette mentalité karsan qui régit les destinées d'un pays schizophrène souvent en conflit avec sa propre ombre. En fait, c'est quoi la mentalité karsan ? C'est qu'un ministre, hier encore, à la tête du département de la pomme de terre se retrouve au ministère de la Recherche nucléaire sans que cela pose problème de compétence. Qu'un responsable cité dans une affaire de corruption ne soit inquiété par sa hiérarchie et qu'on lui demande de rendre compte. Que le passe-droit remplace les critères d'excellence lors d'une nomination et que les liens du sang ceux d'une promotion. Que l'à-plat-ventrisme devienne le premier citoyen de l'Algérie de l'indépendance. Que le clientélisme s'érige en mode de gouvernance et que l'argent sale et celui des autres achètent les bonnes consciences. Que les hommes de paille et les marionnettes déglinguées parlent au nom de tout un peuple et que ce même peuple attend, la main tendue et la bouche avide et ouverte, sa pension de fin du mois. La mentalité karsan, c'est lorsqu'un pays avec un passé riche joue les amnésiques en détresse, roule en lisière de son histoire et ne respecte pas le code de la démocratie. La mentalité karsan, c'est quand le receveur, recruté par le peuple avec l'argent du peuple, fait payer au prix fort une place de misère, sale et poussiéreuse. Quand on entasse 39 millions de fantômes dans un réduit pour chaussures. Quand le chauffeur, devenu propriétaire des lieux, déserte son poste et refile le volant au receveur qui conduit alors tout un pays vers le fossé. C'est quand le karsan tombe en panne, ses propriétaires le laissent au bord de la route, lui et leurs passagers, appellent Air Algérie et quittent le pays. La mentalité karsan, c'est quand on se retrouve en rade et qu'on s'assoit à lorgner ce que va faire le voisin, en attendant un mécanicien qu'on a oublié de solliciter. La mentalité karsan, c'est tout ça et beaucoup d'autres choses encore que la justice de Bouteflika interdit d'évoquer.
par Moncef Wafi
Le Quotidien d'Oran