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Les comptes faramineux de la nouvelle criminalité

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  • Les comptes faramineux de la nouvelle criminalité

    Drogue, blanchiment d’argent, corruption et détournement

    Faut-il chercher dans ce qu’il est convenu de désigner comme marginal, souvent hauts lieux des nuits d’Alger avant d’occuper les unes de la presse, les vérités de l’Algérie d’aujourd’hui ?

    On sait, de longue main, l’intérêt qu’avaient porté les recherches en sciences sociales aux faits divers quand ce n’était pas à l’aspect structurel de la grande criminalité qui, des réseaux internationaux de la drogue aux mécanismes de blanchiment de l’argent sale, portent aussi en eux, au moins en partie, le sens des évolutions des sociétés.

    Que des faits de cette nature et de plus en plus d’une ampleur à peine imaginable en viennent à quasiment se confondre avec les préoccupations politiques informe sur le fait que l’Algérie n’a pas, en réalité, échappé aux effets collatéraux du délitement de l’autorité de l’Etat, d’une part, et des valeurs morales trop facilement portées en bannière, d’autre part, induits par le terrorisme islamiste.

    Et sur ce registre précis et au regard de la morgue volontiers affichée par les anciens repentis de l’ex-AIS ou encore par les bénéficiaires de la Charte pour la paix et la réconciliation -qui au passage ne sont visiblement pas tous revenus bredouilles d’un djihad finalement juteux- est-ce encore le sentiment que l’impunité a encore de beaux jours devant elle qui peut prévaloir ? Ainsi, les affaires, souvent plus scabreuses les unes que les autres, en sont venues à le disputer, dans la presse nationale y compris, aux échéances politiques mettant expressément en cause le fonctionnement d’institutions dites de souveraineté comme la police et la justice, et ce n’est justement en rien négligeable, le système bancaire national.

    Le procès en cours de l’affaire dite de la BCIA, les dernières révélations sur les détournements au sein de la BNA, l’incroyable scénario d’un Ouest algérien soumis à la botte des réseaux internationaux de drogue et de la corruption –et on peut au moins être surpris que l’implication réelle ou infondée de très hauts commis de l’Etat et ici à des postes particulièrement sensibles n’ait appelé à aucune mise au point ou clarification au moins officieuse- et cela sans compter avec la nébuleuse affaire Khalifa dont le ministre de la Justice a confirmé le jugement avant la fin de l’année, tout cela se chiffre désormais en milliards de dinars distraits, est-il besoin de le préciser, par mille et une voies du Trésor public.
    Et si l’on se reporte aux mesures ayant frappé, tour à tour, en moins d’un an, le wali de Blida et tout récemment celui d’El Tarf, la seule certitude demeure que l’on sait que l’on ne sait pas tout sinon que les chiffres de cette nouvelle criminalité donnent le tournis et on n’est même plus surpris d’apprendre qu’une responsable -même elles hélas- d’une coopérative est sur le point d’être extradée du Maroc après avoir piqué quelque vingt-six milliards dans la caisse.

    On ne peut se satisfaire, sur ce registre, de l’idée que somme toute, cette évolution est en quelque sorte l’hommage conséquent du vice à la nouvelle vertu financière du pays et qu’à l’image de tous les plénipotentiaires qui se bousculent ostensiblement à Alger depuis quelque temps, les criminels de chez nous veulent aussi -et prennent- leur part de la divine manne du pétrole. La corruption constitue l’un des plus complexes chantiers politiques qui soit et cela d’autant plus que l’ampleur des enveloppes consacrées ces dernières années à la relance économique n’avait jamais eu d’égale et qu’en dépit du formalisme des normes régissant les passations de marché, il n’est pas dit que partout la transparence et l’équité en soient garanties.

    Les procédures judiciaires engagées à la suite de la mise en congé du wali d'El Tarf impliquant opérateurs et des élus indiquent de manière quasi exemplaire la réalité des risques. Il est, à ce sujet, remarquable que si le président de la République n’avait pas fait, dans son discours d’ouverture de l’année judiciaire, les annonces attendues -celles notamment relatives à la révision de la Constitution- il n’avait pas manqué de fustiger, comme cela avait été d’ailleurs relevé, les retards enregistrés en matière de lutte contre la corruption et particulièrement celui de la publication des décrets d’application de la loi adoptée cette année. Pour qui suit les réquisitions et les verdicts prononcés dans nos prétoires, la question se pose à peine et mieux vaut figurer au registre de la grande criminalité qu’à celui de la petite délinquance et mieux vaut voler grand que petit.

    Quand bien même il convient de rester nuancé, il ressort de ce que rapportent les chroniques judiciaires qu’il ne fait pas bon se faire prendre un shit à la main et le fait est que la sanction, souvent lourde, arrive bien plus vite que pour ceux qui ont conçu, monté et fait protéger un véritable marché algérien de la drogue. Entre impunité et sélectivité, clientélisme et protections, les chiffres d’affaires des entreprises criminelles n’ont plus rien à envier aux plus solides établissements économiques. On sait que la tentation, franchement politique, a existé de dépolitiser l’islamisme armé en le disqualifiant, par un assez grossier glissement sémantique, en forme de criminalité même s’il est vrai que les enseignements -notamment en termes de formation de revenus et de constitution d’une épargne aussi exceptionnelle qu’inédite dont témoignent aujourd’hui les investissements d’ex-émirs repentis- n’ont guère été tirés sur l’impact des rackets, des faux barrages et autres enlèvements sur l’émergence d’une nouvelle criminalité, bien loin de la petite bande de délinquants et qu’avait annoncé l’énigmatique kidnapping d’un sénateur de l’extrême Est algérien. Là encore l’opacité ou au mieux le déficit flagrant de communication peut nourrir autant les appréhensions que de légitimes interrogations.

    Et franchement la question n’est plus de savoir ce que fait la police, pour reprendre une formule qui avait fait florès mais bien que font les politiques dès lors que la suspicion n’épargne, visiblement plus, les institutions de l’Etat.

    Par la Tribune
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