En avril 2015, deux détenus se sont suicidés en France, l’un le 5 avril en s’immolant par le feu et l’autre le 17 par pendaison. Ces événements, devenus tellement anodins qu’ils sont traités en quelques lignes dans la rubrique « faits divers », sont la partie visible d’un phénomène bien plus inquiétant : deux tiers des détenus souffrent de désordres psychiatriques. Un chiffre qui amène Didier Fassin, anthropologue à l’EHESS, à s’interroger : la prison rend-elle fou ou enferme-t-on des personnes atteintes de problèmes psychiatriques ?
À l’origine de la question, un constat : le taux de personnes incarcérées augmente considérablement, faisant plus que doubler entre 1950 et 2000, tandis que le taux de personnes internées dans des services psychiatriques est divisé par trois sur la même période. Or, si les deux phénomènes ont été étudiés indépendamment, aucune étude n’a été menée pour les mettre en relation. D. Fassin avance l’hypothèse qu’il existerait un phénomène de vases communicants entre les deux institutions. Mais en fonction de la nature du trouble, les explications diffèrent : les troubles de l’humeur et de l’anxiété seraient plutôt déclenchés par l’incarcération de l’individu, alors que les troubles psychotiques et de personnalité seraient antérieurs à la détention mais se trouveraient aggravés par celle-ci. Les logiques qui amènent à cette situation sont inhérentes au durcissement du système judiciaire contre la petite délinquance, entraînant des peines de prison ferme pour des personnes vulnérables. La tolérance de plus en plus grande à l’égard de la maladie mentale peut aussi avoir des effets pervers, en laissant des personnes souffrantes hors des établissements de prise en charge psychiatrique. Ces individus, souvent précaires, sont plus enclins à commettre des délits qui les mènent en prison. Autre facteur avancé par Laurence Guignard et Hervé Guillemain, historiens : le changement de Code pénal de 1994 qui diminue les cas d’irresponsabilité.
La prison ne rend donc pas fou, mais aggrave des situations déjà sensibles. Les politiques pénales, qui enferment de nombreuses personnes fragiles, accroissent leur mal-être. Quant aux politiques pénitentiaires, elles n’offrent pas des conditions de détention permettant le maintien de la santé mentale des prisonniers. Face à cette situation, les prisonniers ne sont pas les seuls à perdre les pédales. À la prison d’Esisheim, dans le Haut-Rhin, un détenu malade a été transféré 87 fois depuis 1997. Il jette ses excréments sur le personnel pénitentiaire, rendant fous… les gardiens.
sciences humaines
À l’origine de la question, un constat : le taux de personnes incarcérées augmente considérablement, faisant plus que doubler entre 1950 et 2000, tandis que le taux de personnes internées dans des services psychiatriques est divisé par trois sur la même période. Or, si les deux phénomènes ont été étudiés indépendamment, aucune étude n’a été menée pour les mettre en relation. D. Fassin avance l’hypothèse qu’il existerait un phénomène de vases communicants entre les deux institutions. Mais en fonction de la nature du trouble, les explications diffèrent : les troubles de l’humeur et de l’anxiété seraient plutôt déclenchés par l’incarcération de l’individu, alors que les troubles psychotiques et de personnalité seraient antérieurs à la détention mais se trouveraient aggravés par celle-ci. Les logiques qui amènent à cette situation sont inhérentes au durcissement du système judiciaire contre la petite délinquance, entraînant des peines de prison ferme pour des personnes vulnérables. La tolérance de plus en plus grande à l’égard de la maladie mentale peut aussi avoir des effets pervers, en laissant des personnes souffrantes hors des établissements de prise en charge psychiatrique. Ces individus, souvent précaires, sont plus enclins à commettre des délits qui les mènent en prison. Autre facteur avancé par Laurence Guignard et Hervé Guillemain, historiens : le changement de Code pénal de 1994 qui diminue les cas d’irresponsabilité.
La prison ne rend donc pas fou, mais aggrave des situations déjà sensibles. Les politiques pénales, qui enferment de nombreuses personnes fragiles, accroissent leur mal-être. Quant aux politiques pénitentiaires, elles n’offrent pas des conditions de détention permettant le maintien de la santé mentale des prisonniers. Face à cette situation, les prisonniers ne sont pas les seuls à perdre les pédales. À la prison d’Esisheim, dans le Haut-Rhin, un détenu malade a été transféré 87 fois depuis 1997. Il jette ses excréments sur le personnel pénitentiaire, rendant fous… les gardiens.
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