03/07/2015 / MAROC Mort d’un migrant lors d’une évacuation à Tanger, la police reste silencieuse
Photo de l'opération de police à Boukhalef transmise par un de nos Observateurs sur place.
Un ressortissant ivoirien de 29 ans est mort mardi matin lors d’une opération d’évacuation de squats de migrants dans le quartier de Boukhalef, à Tanger, au Maroc. Selon ses amis, l’homme aurait chuté du quatrième étage d’un immeuble alors qu’il tentait de s’enfuir. Mais la police ne semble pas vouloir en parler.
Dans la nuit de lundi à mardi, les autorités marocaines ont déployé 2 000 agents de police dans le quartier de Boukhalef pour évacuer les appartements occupés par les migrants. Haroun habitait dans le même appartement que la victime.
"Koné est tombé du balcon de la cuisine alors qu'il tentait d'échapper à la police"
Cissé (pseudonyme) habitait avec la victime dans le même appartement.
La police avait donné un ultimatum de 24 heures aux occupants pour quitter les lieux avant d’intervenir mercredi matin. Nous avions donc quitté l’appartement dans la nuit, avant l’arrivée des forces de l’ordre. Mais à l’aube, certains d’entre nous, six ou sept occupants, y étaient retournés car ils avaient remarqué que les policiers s’étaient mis à l’écart. Koné était parmi eux. Entre 8 h et 9 h, j’ai vu des policiers entrer dans l’immeuble, sis Doha GH lotissement 18. J’étais juste en face. J’ai pris mon téléphone et j’ai appelé Koné pour lui dire de sortir rapidement avec les autres. Tous les occupants ont été arrêtés par la police alors qu’ils descendaient les escaliers. Sauf Koné qui était resté dans l’appartement.
Quelques minutes plus tard, un gars m’a appelé au téléphone pour me dire qu’il venait de voir le corps de Koné gisant dans la cour intérieur de l’immeuble. Il est tombé du balcon de la cuisine qui donne sur cette cour alors qu’il essayait de fuir la police. Je ne connais pas les circonstances exactes de sa chute, je ne sais pas s’il a chuté seul où s’il a été bousculé.
Je me suis précipité là-bas et je l’ai vu étendu sur le sol. Il était encore conscient. J’ai pris mon téléphone et appelé une ambulance.
Serge (pseudonyme), un ami de Koné, a ensuite pris le relais pour l’accompagner dans l’ambulance à l’hôpital Mohamed V.
Koné a été admis aux urgences, à l’unité des soins intensifs. Je suis resté avec lui deux longues heures sans que personne ne vienne l’ausculter. Je le voyais gémir, j’étais tellement en colère. Quand j’ai commencé à crier et à engueuler le personnel, des policiers sont venus et m’ont embarqué au commissariat. Ils m’ont retenu pendant trois heures. Quand je suis sorti, une amie m’a appelé pour me dire que Koné était décédé.
Une évacuation "sans incident" selon les autorités
Ce drame n’a pourtant pas été évoqué par les autorités marocaines. Le ministre de la Communication, Mustapha Kahlfi, a au contraire indiqué dans un point presse que l’évacuation avait eu lieu dans des "conditions normales", précisant qu’"aucun incident n’avait été enregistré".
Le ministère de l’Intérieur a pour sa part fait état du décès d’un migrant ivoirien dans un communiqué, indiquant que la victime est morte suite à une agression avec un "objet tranchant". L’incident se serait selon lui produit dans la "cour d’un immeuble situé loin des lieux de l'intervention".
Nous avons contacté le commissariat central de Tanger, celui du 11e arrondissement dont dépend le quartier de Boukhalef, ainsi que les services de la wilaya, mais n’avons obtenu aucune explication sur les circonstances du décès de Mamadou Koné.
Jointe au téléphone, l’ONG Groupe antiraciste de défense et d’accompagnement des étrangers et migrants (Gadem) a indiqué avoir reçu des témoignages faisant état de deux décès distincts le jour de l’évacuation : la mort de Mamadou Koné à la suite de sa chute de la fenêtre, et puis celle d’un autre migrant ivoirien qui aurait été agressé au couteau par un Marocain en pleine nuit.
Contactés par France 24, d’autres activistes, qui militent pour les droits des migrants au Maroc, ont indiqué qu’il est probable que les autorités aient communiqué uniquement sur le cas du migrant agressé au couteau dans le but de susciter la confusion sur les circonstances de la mort de Koné.
Ce n’est pas la première fois qu’un migrant décède au cours d’une opération de police dans le district de Boukhalef. En décembre 2013, un ressortissant camerounais était mort après avoir chuté du 4e étage de l’immeuble alors que les forces de l’ordre procédaient à son évacuation.
Les migrants sont en outre régulièrement victimes d’expéditions punitives menées par des groupes civils marocains qui n’hésitent pas à les chasser du quartier, parfois à coups de machettes.
France 24
Photo de l'opération de police à Boukhalef transmise par un de nos Observateurs sur place.
Un ressortissant ivoirien de 29 ans est mort mardi matin lors d’une opération d’évacuation de squats de migrants dans le quartier de Boukhalef, à Tanger, au Maroc. Selon ses amis, l’homme aurait chuté du quatrième étage d’un immeuble alors qu’il tentait de s’enfuir. Mais la police ne semble pas vouloir en parler.
Dans la nuit de lundi à mardi, les autorités marocaines ont déployé 2 000 agents de police dans le quartier de Boukhalef pour évacuer les appartements occupés par les migrants. Haroun habitait dans le même appartement que la victime.
"Koné est tombé du balcon de la cuisine alors qu'il tentait d'échapper à la police"
Cissé (pseudonyme) habitait avec la victime dans le même appartement.
La police avait donné un ultimatum de 24 heures aux occupants pour quitter les lieux avant d’intervenir mercredi matin. Nous avions donc quitté l’appartement dans la nuit, avant l’arrivée des forces de l’ordre. Mais à l’aube, certains d’entre nous, six ou sept occupants, y étaient retournés car ils avaient remarqué que les policiers s’étaient mis à l’écart. Koné était parmi eux. Entre 8 h et 9 h, j’ai vu des policiers entrer dans l’immeuble, sis Doha GH lotissement 18. J’étais juste en face. J’ai pris mon téléphone et j’ai appelé Koné pour lui dire de sortir rapidement avec les autres. Tous les occupants ont été arrêtés par la police alors qu’ils descendaient les escaliers. Sauf Koné qui était resté dans l’appartement.
Quelques minutes plus tard, un gars m’a appelé au téléphone pour me dire qu’il venait de voir le corps de Koné gisant dans la cour intérieur de l’immeuble. Il est tombé du balcon de la cuisine qui donne sur cette cour alors qu’il essayait de fuir la police. Je ne connais pas les circonstances exactes de sa chute, je ne sais pas s’il a chuté seul où s’il a été bousculé.
Je me suis précipité là-bas et je l’ai vu étendu sur le sol. Il était encore conscient. J’ai pris mon téléphone et appelé une ambulance.
Serge (pseudonyme), un ami de Koné, a ensuite pris le relais pour l’accompagner dans l’ambulance à l’hôpital Mohamed V.
Koné a été admis aux urgences, à l’unité des soins intensifs. Je suis resté avec lui deux longues heures sans que personne ne vienne l’ausculter. Je le voyais gémir, j’étais tellement en colère. Quand j’ai commencé à crier et à engueuler le personnel, des policiers sont venus et m’ont embarqué au commissariat. Ils m’ont retenu pendant trois heures. Quand je suis sorti, une amie m’a appelé pour me dire que Koné était décédé.
Une évacuation "sans incident" selon les autorités
Ce drame n’a pourtant pas été évoqué par les autorités marocaines. Le ministre de la Communication, Mustapha Kahlfi, a au contraire indiqué dans un point presse que l’évacuation avait eu lieu dans des "conditions normales", précisant qu’"aucun incident n’avait été enregistré".
Le ministère de l’Intérieur a pour sa part fait état du décès d’un migrant ivoirien dans un communiqué, indiquant que la victime est morte suite à une agression avec un "objet tranchant". L’incident se serait selon lui produit dans la "cour d’un immeuble situé loin des lieux de l'intervention".
Nous avons contacté le commissariat central de Tanger, celui du 11e arrondissement dont dépend le quartier de Boukhalef, ainsi que les services de la wilaya, mais n’avons obtenu aucune explication sur les circonstances du décès de Mamadou Koné.
Jointe au téléphone, l’ONG Groupe antiraciste de défense et d’accompagnement des étrangers et migrants (Gadem) a indiqué avoir reçu des témoignages faisant état de deux décès distincts le jour de l’évacuation : la mort de Mamadou Koné à la suite de sa chute de la fenêtre, et puis celle d’un autre migrant ivoirien qui aurait été agressé au couteau par un Marocain en pleine nuit.
Contactés par France 24, d’autres activistes, qui militent pour les droits des migrants au Maroc, ont indiqué qu’il est probable que les autorités aient communiqué uniquement sur le cas du migrant agressé au couteau dans le but de susciter la confusion sur les circonstances de la mort de Koné.
Ce n’est pas la première fois qu’un migrant décède au cours d’une opération de police dans le district de Boukhalef. En décembre 2013, un ressortissant camerounais était mort après avoir chuté du 4e étage de l’immeuble alors que les forces de l’ordre procédaient à son évacuation.
Les migrants sont en outre régulièrement victimes d’expéditions punitives menées par des groupes civils marocains qui n’hésitent pas à les chasser du quartier, parfois à coups de machettes.
France 24
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