À peine une heure après avoir fait subir à l'estomac la charge d'un f'tour trop copieux, bon nombre de citoyens se ruent sur ces pseudo rôtisseries.
Depuis quelques années le mois de Ramadhan, s'accompagne d'un phénomène nouveau dans les us et coutumes des Algériens. Comme une traînée de poudre, cette nouvelle mode culinaire s'est propagée à travers tout le pays, manger un sandwich grillade après l'ftour, est devenu une pratique très courante. Il faut dire que tout est mis en oeuvre pour susciter ce besoin chez les citoyens.
Des centaines de minuscules gargotes envahissent les trottoirs de nos villes. Les préparatifs se font bien avant la rupture du jeûne et ne nécessitent pas beaucoup d'efforts. Il faut juste installer un barbecue, et un petit présentoir pour la viande. Le seul fait d'allumer le feu et de mettre dessus quelques brochettes, suffit pour en faire saliver plus d'un. Il est déconcertant d'assister au festival d'insalubrité et de risque sanitaire qui suit durant la soirée «ramadhanesque». A peine une heure après avoir fait subir à l'estomac la charge d'un ftour riche et copieux, bon nombre de citoyens se ruent sur ces pseudo rôtisseries, pour y consommer sans retenue et surtout sans conscience. Les commandes fusent dans tous les sens, du sandwich merguez, au sandwich de foie, passant par la viande ou la dinde, alors que déjà le menu du f'tour est hautement riche, ils exposent leurs corps à une agression violente qui dans la plupart des cas, génère des conséquences parfois tragiques. Alors que ce mois sacré est destiné dans un premier temps à purifier notre corps, des méfaits de mauvais comportement observés durant toute l'année.
On est censé durant ce mois de jeûne, apprendre à se maîtriser et contrôler ses tentations. Cela ne sert pas à grand-chose de jeûner durant 18 heures, si en l'espace d'une heure on réussit à s'intoxiquer. Selon les médecins, il s'agit durant la rupture du jeûne, d'habituer notre corps progressivement à assimiler de la nourriture. Ils parlent de centaines de cas graves enregistrés aux urgences et ce, à deux heures à peine après le f'tour, les urgences se remplissent à une vitesse incroyables et, dans la majorité des cas, ce sont des patients qui souffrent de problèmes gastriques. Inconscients, victimes de leurs envies, ces patients oublient souvent la quantité et la richesse des repas de Ramadhan. En plus de la table hypergarnie du f'tour, la soirée s'accompagne généralement d'une grosse quantité de sucreries et de boissons en tout genre.
Suite à quoi, arrive le s'hour qui à lui seul représente un repas aussi riche que le f'tour. Si en plus, entre les deux on s'amuse à ingurgiter des grillades, il va sans dire, qu'il existe un réel danger pour notre santé.
Ceci étant, l'aspect hygiénique demeure le point noir de cette pratique. Sans aucune autorisation, ni contrôle sanitaire, les viandes sont exposées depuis des heures sur la chaussée, à l'air libre. Ce qui ne fait qu'aggraver lourdement la situation.
D'un autre côté, l'aspect civique de la chose suscite beaucoup d'interrogations. Comment cette situation a-t-elle pris une telle ampleur? Comment ces petits commerces peuvent exercer sans autorisation, ni statut légal? Et pourquoi cette activité clandestine est si tolérée? En se rapprochant des structures susceptibles de nous fournir quelques explications, nous ne sommes arrivés à aucun résultat.
Par contre, auprès des citoyens les réactions sont vives, ils dénoncent la grande gêne des familles à emprunter normalement les trottoirs, squattés par un nombre important de rôtisseurs, du mauvais comportement de ces vendeurs: «On ne peut plus circuler normalement, à chaque coin de rue on tombe sur un feu allumé et du monde autour, alors qu'on sort pour marcher un peu après l'ftour», nous dit Réda, un citoyen exaspéré.
Pour sa part Hichem nous fait part d'une réelle mésaventure qui a presque tourné au drame et qu'il a vécue en famille: «Je voulait juste me garer pour cinq minutes. Après que l'agent de la circulation m'ait permis de le faire et sur le point de sortir de mon véhicule, je vois l'homme qui se tenait derrière son barbecue se diriger vers moi en criant et en m'insultant. Il ne voulait pas que je stationne devant son 'commerce''. Il ne voulait rien savoir, et s'apprêter carrément à me frapper. Une grosse bagarre à éclaté, j'étais obligé de me défendre, et j'ai fini la soirée au commissariat de police, et lui fuyant dans la nature.»
En somme, cette pratique demeure d'un point de vue médical, très dangereuse pour notre santé. De plus, elle s'avère tout aussi dangereuse d'un point de vue civique. Il est inutile de rappeler que l'action des autorités reste des plus requises dans de telles dérives de la société. Au même titre que celle des citoyens, appelés en ce mois à observer le respect de l'Autre, le partage, le pardon et un esprit orienté plutôt vers le spirituel que vers le matériel.
Par Ali AMZAL
L'Expression dz
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