- La croissance s’essouffle 2,6% en 2016 contre 4,3% en 2015, pronostique le HCP
- Petite reprise dans le BTP et baisse de la valeur ajoutée du tourisme
- Retraite, administration publique, réformes… les avertissements de Lahlimi
Depuis 2008, la croissance s’est inscrite sur une tendance baissière.
L’industrie et les services ont du mal à consolider les performances d’avant la crise économique internationale. La croissance du PIB non agricole est passée de 5%, entre 2000 et 2007, à 3,2% depuis 2008 et à 2,1% au cours des trois dernières années. De son côté, le secteur agricole n’arrive pas à compenser le fléchissement de l’activité non agricole. Même si sa croissance est en amélioration, sa part totale dans le PIB est en baisse passant de 13% avant 2007 à 10% aujourd’hui.
C’est une sorte de mise en garde que Ahmed Lahlimi, haut commissaire au Plan, adresse au gouvernement. La croissance sera certes au rendez-vous cette année, mais elle s’essoufflera dès 2016. Pour 2015, le HCP prévoit une croissance de 4,3%, tirée principalement par la consommation des ménages, laquelle a connu un ralentissement par rapport aux années précédentes. Pour l’année prochaine, et en attendant les hypothèses de la loi de finances 2016, le HCP anticipe une croissance à 2,6%. Il est moins optimiste que le FMI qui prévoit 5% et la Banque mondiale (4,8%) et rejoint les prévisions du Centre marocain de conjoncture (2,8% de croissance en 2016).
Le HCP se base sur la reconduction de la politique budgétaire en vigueur en 2015, et une production céréalière moyenne. L’année prochaine, le secteur des services devrait s’accroître de 3,4% contre une évolution modérée à 2,3% pour l’industrie.
Le taux d’endettement public global est en hausse, passant de 78,2% en 2014 à 79,6% du PIB en 2015 et à 81,2% en 2016. Celui du Trésor passerait à 63,8% en 2015 et à 64,9% en 2016. «Nous sommes dans une zone dangereuse», avertit Ahmed Lahlimi, haut-commissaire au plan.
«Faute de réformes structurelles de nature à engager le pays dans un processus profond de diversification du tissu productif, nous risquons de réduire les profits que nous offre la conjoncture internationale actuelle», prévient Lahlimi. Dans le meilleur des cas, la croissance ne dépassera guère 4,5 à 5% et 3% dans l’hypothèse d’une année agricole moyenne.
Lors de sa conférence de presse annuelle sur les prévisions de croissance et le budget exploratoire, le HCP a expliqué que la modeste reprise des activités non agricoles en 2015 est due à l’environnement international jugé peu favorable et la demande intérieure moins soutenue. Ces activités bénéficient surtout de la baisse du cours de pétrole et devraient enregistrer une croissance de 2,5% contre 2% en 2014. Un niveau inférieur à la moyenne de 4,2% enregistrée sur la période 2007-2014.
La reprise des industries de transformation, notamment l’agroalimentaire, l’automobile et la chimie-parachimie, se poursuivra. Cette année, le BTP connaîtra une amélioration alors que l’activité minière va continuer à ralentir.
Dans les services, le HCP table sur un raffermissement du secteur des télécommunications de près de 6,5%, et la consolidation des activités sociales avec un accroissement de 5,5%. En revanche, pour la première fois le tourisme verra baisser sa valeur ajoutée de 2,7%. Sur la période 2007-2014, les activités touristiques ont contribué à la croissance du PIB à des taux annuels moyens de 5%.
La croissance en 2015 continuerait à être soutenue par la demande intérieure et la contribution de la demande extérieure nette devrait rester positive en raison d’une hausse des exportations plus importantes que celle des importations.
Au risque d’essuyer encore une fois les critiques, le numéro un du HCP appelle le gouvernement à consolider la réforme de la Caisse de compensation et à prendre des mesures d’urgence sur la réforme des retraites. Une réforme sur laquelle «le consensus» de toutes les parties n’est pas jugé obligatoire. Le mode de gestion de l’administration publique est également à revoir en profondeur. Surtout qu’elle absorbe 20% du PIB en charges de fonctionnement, soit quatre fois plus que le coût de la Caisse de compensation au plus fort de la flambée des cours du pétrole!
A la veille de la préparation de la loi de finances 2016, le haut-commissaire au plan insiste sur la nécessaire amélioration du climat des affaires, l’encouragement de l’investissement et une réforme durable et profonde du système fiscal. Ce dernier est jugé peu favorable à l’investissement. Le HCP explique que malgré la manne de la baisse du cours du pétrole et des autres matières premières, le rétablissement des équilibres en 2015 s’est opéré au détriment de la consommation et de l’investissement.
Le taux d’accroissement de la demande intérieure est passé de 6% par an sur la période 2000 à 2009 à 3,3% au cours des cinq dernières années. Quant au taux d’accroissement de l’investissement, il est négatif depuis 2013 et devrait se redresser en 2015 et 2016.
Khadija MASMOUDI
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