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Point final à la grande saga des terres rares ?

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  • Point final à la grande saga des terres rares ?

    En 2010-2011, les terres rares sont passées de l'ombre à la lumière. Il faut dire que le destin de ces vrais métaux travestis en fausses terres avait tout pour plaire. Je vous le résume : des matières premières mystérieuses, une demande en forte hausse, tout particulièrement sous l'influence de nos smartphones, petites batteries et des énergies renouvelables, une production concentrée (à plus de 90%) dans les mains d'un grand méchant -- la Chine.

    Le grand méchant a en outre parfaitement tenu son rôle en utilisant les terres rares comme un atout non seulement économique mais aussi et surtout politique. Début 2011, dans ses affrontements territoriaux avec le Japon (autour des îles Senkaku/Diaoyu), Pékin n'a pas hésité à couper ses approvisionnements vers le Japon et, le mouvement étant lancé, à renforcer ses quotas d'exportations dans le reste du monde. Les exportations chinoises de terres rares ont ainsi été coupées de 40% en quelques mois.

    Officiellement, cette décision avait été prise pour des raisons écologiques -- l'exploitation des terres rares étant effectivement potentiellement extrêmement polluante surtout dans les conditions de mine pratiquées dans l'empire du Milieu -- mais également pour des raisons économiques et géopolitiques .

    Ces restrictions ont engendré non seulement un fulgurant envol du cours de certaines terres rares (le cours du dysprosium s'est ainsi envolé de 400 $ à plus de 3 400 $ entre janvier et juillet 2011, et celui du néodyme de 100 $ à plus de 500 $ sur la même période) mais aussi déclenché une véritable onde de choc chez les utilisateurs de ces fameuses terres. L'Occident a pris de conscience de sa terrible dépendance à la Chine, et que ce n'était ni agréable, ni stratégiquement valable.

    Face à cette pénurie organisée/flambée des cours, une résistance s'est donc progressivement mise en place. Les terres rares ont été reconnues comme des matières stratégiques dont la sécurité de l'approvisionnement doit, coûte que coûte, être assurée

    Plus concrètement, les principaux consommateurs ont cherché à sécuriser leur approvisionnement et les capitaux ont afflué pour développer une exploitation des terres rares hors de Chine, et non contrôlée par Pékin. Toutes les pistes ont été envisagées : réouverture d'anciennes exploitations, ouverture de nouvelles mines... De la France aux Etats-Unis en passant par l'Alaska, l'Algérie ou l'Australie, tout le monde a cherché des terres rares sous ses pieds.

    Et puis, les matières premières s'étant retournées, le cours des terres rares a progressivement reculé. Je reprends l'exemple, frappant, du dysprosium :



    Derrière cet effondrement des cours se cachent un faisceau de causes. Et tout d'abord la baisse de la demande, mais aussi l'ouverture de nouvelles exploitations hors de l'empire du Milieu, la création de stocks importants ou encore la mise en place progressive d'un système de recyclage de ces si précieuses terres. Enfin, last but not least, sous la pression de l'OMC saisi par les Etats-Unis, l'Union européenne et le Japon (les principaux importateurs de terres rares), la Chine a supprimé ses quotas en janvier dernier.

    Conséquence directe de cet effondrement des cours : les minières spécialisées dans les terres rares subissent depuis deux ans une véritable traversée du désert. L'Américain Molycorp, la seule minière avec l'Australien Lynas à exploiter les terres rares (aussi) hors de Chine, s'est placé en juin dernier sous la protection de la loi américain sur les faillites, et ce après 13 semestres consécutifs de perte et une dette de 1,7 milliard de dollars.

    Une potentielle faillite qui est extrêmement symbolique : en 2011, alors que le cours des terres rares s'envolait, Molycorp avait rouvert la mine de Mountain Pass en Californie, ancienne principale mine de terres rares au monde avant que les exploitations chinoises ne vienne la concurrencer. Cette réouverture signait la reprise en main des terres rares par l'Occident et promettait un avenir dans laquelle la Chine ne serait pas le grand manitou de ces métaux si indispensables. Le rêve a fait long feu.

    Lynas, l'autre grand producteur occidental, a lui aussi du mal à garder la tête hors de l'eau et a bien failli faire faillite. Signe des temps, son cours s'est effondré depuis 2011, passant de 2,55 $ australiens à 0,038.

    L'effondrement des cours remet aujourd'hui en cause les grands projets d'investissements dans les terres rares décidés quand les cours étaient au plus haut.

    Bref, c'est la bérézina dans le petit monde des terres rares. Tant et si bien qu'on a presque failli par oublier les terres rares, voire même les ranger au rang de ces idoles qu'on a trop adoré et que l'on déteste maintenant. Et certains de prédire la fin de ces métaux, trop coûteux, trop risqués stratégiquement, et leur remplacement par des matériaux de substitution.

    Les terres rares sont-elles vraiment complètement définitivement finies mortes et enterrées ? C'est ce que nous verrons dans une toute prochaine Quotidienne.


    Agora
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