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les miraculés

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  • les miraculés

    quand j'y repense, je ne peux m'empêcher d'y voir un miracle, d'autres me diront que ce n’est qu'un heureux concours de circonstances... j'étais très jeune, à l'époque je me souviens, avec une pièce de "zoudj doro" (2 centimes), on pouvait s'acheter un bonbon chez l'épicier du coin, certes, le bonbon n'était pas emballé, mais il était sucré. ma ville à l'époque ne ressemblait pas du tout à celle dans laquelle je me promène de temps en temps le soir, les arbres ont disparus, quelques uns subsistent encore mais beaucoup de leur camarades sont tombés, victimes de la folie de la hache des nouveaux habitants qui pour faire beau, croient au béton.

    jadis, il y avait beaucoup plus d’espace ouverts, avec les copains, on improvisait des matchs de foot là où nous le voulions, il y avait de temps un temps des histoires terrifiantes d'enlèvements, d'incendie, ou même de meurtres, mais c'était très marginal, il était rare que mes yeux aient assisté à un tel spectacle. Je me souviens cependant qu'un jour, mon quartier était devenu très bruyant, il y avait de l'agitation même durant la nuit et tout les espaces ouverts étaient transformés en parking, mon oncle avait passé la nuit chez nous ce soir là, j'appris bien plus tard que c'était un certain Octobre 88, j'avais un peu plus de 04 ans.

    et puis arriva ce jour, à la télévision le ton de la douce présentatrice du journal télévisé était grave, elle s'adressa à mes parents en leur disant de m'envoyer dormir, ma mère mis ses mains sur mes yeux pour m'empêcher de voir, je réussis quand même à voler quelque images furtivement, il y avait des bouts de tissus collés à des morceaux gluants de ce qui était sans doute de la chaire, c'était à l'aéroport.

    c'était la première fois que je voyais la violence se déchainer, ou plutôt, je vis pour la première fois ce qu'elle laissait sur son passage ... étrangement, je ne fus pas hanté par ces images parce que ce que l'écran me montrait n'avait rien d'humain, que des chaussures, des vitres éclatées, beaucoup de sang oui mais rien qui ne ressemblait à un homme mort.

    très vite, cette époque paisible et tranquille fut brutalement enterrée, tout les jours, tout les soirs, des histoires terribles me parvenaient, dans l'école avec les autres camarades, on vantait le courage des militaires algériens qui se battaient contre des créatures de la nuit, assoiffées de sang et de mort, on était certains que leur sors étai scellé, que les militaires que je voyait parfois défiler depuis la vitre du bus, qui avaient l'air si forts, si courageux n'allaient en faire qu'une bouchée... puis arriva ce jour où ma soeur fit éruption dans la cuisine tandis que j'étais à coté de mon père lisant son journal, entrain de jouer avec ma voiture miniature "ils ont tué boudiaf!". il ne fallut pas plus de dix secondes avant que nous nous mîmes tous devant la télé, horrifiés par les larmes du journaliste annonçant la mort du président, rebbi yerahmou. ma mère dit "c'est fini", mon père "je te l'avais bien dit, il ne fera pas long feu".

    un jour au souk pendant un vendredi, je faillit me faire écraser par la foule hystérique paniquée par deux coups de feu, un policier venait de se faire tuer, pendant qu'il se promenait, armé comme à son habitude, deux hommes surgirent de nul part, un sur sa gauche, l'autre sur sa droite, les deux enrôlèrent leur bras sur les sien, il était complétement neutralisé, tandis qu'un troisième fit son apparition en face de lui, braqua son arme sur son front, et lui logea une balle dans la tête, avant de lui en mettre une après qu'il se soit effondré, mon père me souleva comme un jouet et me jeta dans les bras d'un voisin vendeur de légume, il revint plus tard me récupérer et nous courûmes jusqu'à la maison pour retrouver ma mère en larmes et complétement paniquée...

    la perspective d'une victoire propre et rapide, digne des films de rambo que j'imaginais s'éloignait de plus en plus... puis vint la terreur absolue, le spectacle de cet enfant, à la gorge tranché, qui portait un blouson... identique à celui que ma grand-mère m'avait offert, il avait les yeux ouverts ... ses dents étaient enfoncées dans sa langue... je ne ferma plus les yeux pendant plusieurs jours, des réveils en sursaut, des cauchemars... personne ne l'avait protégé, ils a été agrippé, ils ont passé une lame sur sa petite gorge, et ils l'ont tranché... je n'arrivais pas à concevoir cette scène, j'étais incapable de me l'imaginer, a t-il couru?; a t-il pleuré? où était sa maman? pourquoi il ne les a pas mordu?...

    Pendant longtemps, je me suis demandé comment ces monstres pouvaient égorger quelqu'un, en devant plus âgé, plus rationnel ... je trouvais étrange la facilité avec laquelle autant de personnes, de pauvres algériens, qui parlaient ma langue, qui regardaient le même programme télévisé, qui partaient en vacances en même temps que moi, se faisaient couper la gorge.... l’explication vint très tardivement, après que cette sombre et terrifiante époque ne soit révolue, que je l'entendis, je fus de nouveau projeté dans ce cauchemar, jamais trop loin ... un crochet, ils utilisaient un crochet, du file métallique avec deux extrémités et un poignet, ils logeaient les deux extrémités dans les narines des malheureux, et tiraient vers le haut, la douleur était telle que personne ne pouvait s'empêcher de garder la tête baissée, et protéger sa gorge...

    on n'y a été pour rien, on a vécu, des gens sont morts, tout les jours ... on s'y est habitué... aussi difficile à croire que cela puisse paraitre, on a survécu, impuissants ... des gens ont fui, sont parti trouver ailleurs ce qu'ils n'arrivaient pas à avoir ici, la mort n'était plus cette étranger mystérieux et effrayant, elle est resté effrayante, mais n'était plus mystérieuse...

    l'algérien, a vu sa vie s'imprégner de violence, de brutalité ... ils survit.

    nous fêtons l'3id..., vive l'algérie.
    Dernière modification par Risk, 18 juillet 2015, 18h58.
    La Réalité est la Perception, la Perception est Subjective

  • #2
    Bouleversant...

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    • #3
      Risk bonjour
      le cauchemar continue, comme dirait l'autre.
      certains restent éveillés, d'autres préfèrent la marie-jeanne pour oublier.

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      • #4
        une période noire, les victimes des outils de tortures comme du métal de canette de soda on du prier pour mourir plus rapidement, nous avons essayer d'oublier pour avoir moins mal, combien de cauchemar a t on fait, combien de fois on est mort quand on a été proche d'une explosion, proche d'un barrage, entre des tires de terroriste et militaire.

        vive l'Algerie, allah yar'ham ceux qui sont morts entre les mains de ces ordures ..

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        • #5
          Salam Risk,

          Tu sais kho cette génération n'a vraiment rien vu en Algérie !!!

          les années 80 : crise économique
          les années 90 : crise sécuritaire
          les années 00 : crise psychologique
          et depuis ... : crise culturelle et éducationnelle ..


          3ich ya menhouss fi bled n'houss
          Even if

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          • #6
            "drole" d'epoque ..je me demande si un jour la lumiere sera mise sur tout ce qui c'est passé pendant cette periode .. a commencé par l'assasina de boudiaf ..

            saha 3idek Risk ..
            petite remarque bebete .. zoudj dourou = 10 centimes ..

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            • #7
              Le lendemain de l'explosion à l'aéroport je devais rentrer en France...
              C'était une désolation,de barrières partout, le plafond déchiqueté, il y régnait un atmosphère lourde... et nous rentrions un par un et seulement les voyageurs.

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              • #8
                bonjour tout le monde, 3idkoum moubarak ou syam'koum ma9boul inchallah

                @makhlou9a: b'jour makhlou9a
                exact, le cauchemar continu ...

                @Tommy: hadi ghiba khô! yak rak b'khir?
                je le pense aussi (que la génération actuelle n'a pas connu toute ces horreurs), mais je pense aussi que les générations s'influencent les unes les autres.

                @Discus: maintenant que tu le dis, ca a du sens, puisque la pièce que je tendais à l'épicier était celle avec la tête de mouton, je pense que c'atait reb3a doro en effet.

                @jasmyne: je ne connaissais pas cet aspect là du drame de l'aéroport... je ne l'ai vu qu'à la télé, et pour tout te dire, je n'ai presque plus d'image dans ma memoire.

                tu peux m'en dire plus si tu le souhaite.
                La Réalité est la Perception, la Perception est Subjective

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                • #9
                  Risk ..
                  akhir ..
                  on en croisent plus s'etait l'epoque ou dorou et le centimes avait de la valeur ..
                  depuis le temps d'autre choses on fini par ne plus en avoir ..

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                  • #10
                    @discus: Akhir khô

                    comme disait l'autre, "nous assistons à la mise en ruine de notre univers, impuissants"
                    La Réalité est la Perception, la Perception est Subjective

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                    • #11
                      Poignant, et comme c est pas encore fini -ou je sais plus- se reproduit.. C est encore trop de peine, on essaye de survivre mais ca nous ramene youjours vers ce qu ils veulent faire de nous, un peuple tromatisé qui attend la mort dans tous les coins.

                      Allah yerham li matou, mon coeur se dechir surtout apres la mort de nos soldats hier.
                      ..... ish.

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                      • #12
                        Bonjour

                        C'était une période de terreur.. tout le temps la peur au ventre ..
                        J'ai toujours en mémoire les images de l'aéroport.. des tables et sang .. le commissariat central d'Alger.. et des petits kechafa ..pauvres petits c'était terrible .. et beaucoup d'autres images qui sont gravées dans ma mémoire visuelle.. et aussi la période de moussalaha et les images des terroristes avec leurs tenues Bizarres! . zaama pour faire la paix
                        C'est vrai le cauchemar continue.. ce matin j'ai vu les images des soldats tués .. sont tous des jeunes .. c'est déchirant!.. Allah yarhamhom ncha Allah ..

                        On veut la paix dans le monde !..
                        PEACE

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                        • #13
                          saha aidkom ,kol 3am antou bkhir


                          un texte que j'aurais pu écrire ,des images du plafond de l’aéroport dégoulinant de sang ,de la mort de boudiaf ,de l'enfant égorgé (pour moi c'était un homme criblé de balles ) jusqu'aux 4 doro (le pot de yaourt liquide à 60 dorou m'a beaucoup marqué lol).


                          nos parents et grands parents nous ont transmis le traumatisme de la colonisation et on transmettra aux générations futures le traumatisme du terrorisme...

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                          • #14
                            Trop trop de peine, impuissant que nous sommes, matraqués par la violence verbale et physique en continue, des dirigeants au sang froid et sans âmes continuent à nous pomper l'air d'une façon sadique poussant au suicide et au départ suicidaire...Que Dieu nous vienne en aide, Dieu ai pitié de nous et de ce pays.

                            Saha Aidek Risk et à tous les gens de F.A. Le "Doro", le "Rial" et le "Frak" j'ai connu.
                            " C’est la rivière qui apporte dans son cours l’espoir aux chercheurs d’or…Elle n’attends jamais de ces derniers qu’ils en remettent dans le sien" (r.b)

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