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Promenade dans le palais du Bardo d’Alger : Splendeurs d’une merveille architecturale

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  • Promenade dans le palais du Bardo d’Alger : Splendeurs d’une merveille architecturale

    L’avenue Franklin Roosevelt est plus calme en cette chaude journée d’été. L’artère longe le parc du palais du Peuple à Alger, ancien palais d’été du Dey Hussein (qui a régné de 1818 à 1830), puis palais d’été du gouverneur général français en 1830.


    En contrebas de cette avenue à droite, on retrouve l’entrée du Centre national de la recherche en préhistoire, anthropologie et en histoire. C’est par la verdure que les visiteurs sont accueillis à l’entrée du musée du Bardo. Un jardin luxuriant s’étend jusqu’à la partie supérieure.
    Dans le calme et la paix, on sent un parfum d’exotisme.
    Une beauté sereine qui donne envie d’«explorer» les lieux. A droite, un petit chemin mène vers la villa, dont le nom évoque le palais du Bardo à Tunis. Après avoir escaladé des marches en faïence bleues, et à peine la grande porte massive de bois franchie, on se retrouve dans la cour spacieuse de la belle villa.
    On est déjà fasciné par cet espace, avec son sol en damier de marbre, sa fontaine au centre, le jet d’eau qui rafraîchit l’air, et les colonnades en pierre et en marbre.
    Dans l’aile gauche de la cour, deux lieux attirent la curiosité des visiteurs. En premier, c’est le pavillon de la favorite, accessible par une galerie de cinq arcs outrepassés, avec des murs garnis de faïences.
    Précédée d’un sas, la chambre de la favorite offre un décor de toute beauté avec un très beau plafond. A quelques pas au fond de la cour à gauche, on découvre le fameux Diwan où l’on organisait dans le faste les fêtes et les banquets. Une sorte de salon ouvert, sous des arcades, avec une fontaine au centre, des fenêtres sur jardin et au fond un Madjliss en retrait, surélevé de deux marches où s’installe le maître de la maison pour recevoir ses hôtes.

    Un jeu des espaces
    Juste en face du pavillon de la favorite et en traversant la cour, on s’arrête devant une porte en bois sculpté. On accède à l’intérieur par une «skifa» (courette). C’est là que les invités attendent avant d’entrer chez le maître des lieux. Juste à côté, un des propriétaires de la villa a aménagé un café maure comme à la belle époque.
    Par un arc en pierre, on monte des escaliers au dallage marron foncé, et des murs décorés en belle faïence. En haut, on accède à une pièce qui donne sur une petite cour avec fontaine.
    Quatre marches à gauche, on se retrouve dans un couloir surmonté d’une voûte. Tout au fond du couloir, se trouve le patio couvert avec ses huit colonnes, entouré de trois pièces rectangulaires. C’était dans cet espace que l’on organisait des concerts de musique. L’un des propriétaires (Pierre Joret) avait même fait venir Camille Saint-Saëns pour y jouer. Par un autre couloir étroit on quitte le patio vers l’aile du harem. A partir de la petite cour, on peut voir le four à bois pour chauffer l’eau de la pièce chaude du hammam se trouvant en haut avec la salle de repos.
    En descendant quelques marches, on pénètre dans une pièce avec puits, c’est la cuisine ou la «khiama». Le visiteur est fasciné par la beauté des espaces, les faïences d’une riche variété, illustrées en fleurs, animaux et formes géométriques, mais aussi par la richesse architecturale des lieux avec pavillons, arcades, petites portes et encorbellements. Il se trouve aussi désorienté par cet enchevêtrement d’escaliers, de couloirs et de pièces qui donnent les unes sur les autres.
    «Le fait même que, dans la promenade que nous y faisons, nous ne puissions comprendre exactement l’organisation domestique qui dut évoluer de nombreuses fois, stimule notre imagination et nous rend essentiellement sensibles au jeu des espaces, à ce que Le Corbusier appelait à propos de la ville Savoye la promenade architecturale», notera Jean-Jacques Deluz dans son livre Alger, chronique urbaine, (Editions Bouchène 2001). «Il faut se laisser aller au plaisir du plan libre, au désordre ordonné des espaces, la magie des passages, des escaliers, des chicanes, des surprises, à la musique des carreaux en couleurs», décrit le même auteur.
    Fascinée par ces lieux, la romancière française Marie Cardinal (née à Alger en 1928), citée par Jean-Jacques Deluz, note dans son livre Au pays de mes racines (Editions Grasset
    1980) : «Pour commencer, la fraîcheur, l’ombre, l’obscurité presque. Il ne faut pas encore révéler au visiteur, éventuellement importun ou avide, la beauté du trésor.
    Vastes pièces vides faites pour les rencontres officielles, les marchés, les tractations. Au fond, un escalier inattendu, étroit, aux marches noires, conduit au cœur du palais : un jardin, un bassin avec de l’eau courante, des arcades, des fenêtres qui sont des regards indiscrets : on les voit, mais on ne voit pas ce qu’elles cachent. La véritable maison se trouve là, donnant sur des verdures privées.
    Dédales de pièces longues enroulées autour de patios couverts ou de jardinets odorants. Chambres bonnes pour dormir, se reposer, jacasser, faire l’amour, manger des sucreries.»
    Une histoire surprenante
    Le palais du Bardo demeure l’une des très belles demeures des coteaux de Mustapha, situés autrefois en dehors de la ville d’Alger, et qui avaient enchanté Eugène Fromentin.
    Par manque de sources et insuffisance des renseignements, on ne sait pas grand-chose sur sa propre histoire. Dans son livre Alger, chronique urbaine (Editions Bouchène 2001), Jean-Jacques Deluz donne de précieuses références sur l’histoire du palais du Bardo.
    Il cite l’étude réalisée par Lucien Golvin intitulée Palais et demeures d’Alger à la période ottomane, (Edisud, Aix-en-Provence, 1988) dans laquelle il avance que le palais du Bardo a été construit au XVIIIe siècle (probablement entre 1780 et 1790) par un riche notable tunisien exilé, Mustapha Ben Omar, ou le prince Omar dont on ne sait pas trop de choses sur son histoire, ni les circonstances qui l’ont poussé à construire cette merveille architecturale.
    Selon les archives du musée du Bardo, l’historique de la villa révèle qu’elle a été tour à tour propriété de plusieurs personnes, dont MM. Lichetlin en 1846, Baccuet en 1851, Grauby en 1868, puis Madame Aziza Fao, fille de Bacri en 1874.
    En 1875, la villa devient la propriété d’Ali Bey, Agha de Biskra. Homme fortuné au goût très raffiné, il réalisa des transformations marquantes dans la bâtisse, sans toucher à son originalité. Il agrémenta les lieux de fresques de toute beauté et de faïences d’une très grande qualité importées de Delft en Hollande, de Tunisie, du Maroc, d’Iran et de Turquie.
    Ali Bey apporta aussi sa touche dans les jardins qu’il enrichit de plantes tropicales et d’arbres familiers, et réalisa des aménagements dans la partie basse de la villa. En 1879, Ali Bey vendit la villa à Pierre Joret dans des circonstances qui demeurent encore inconnues.
    Le nouveau propriétaire des lieux est connu pour être un passionné de musique et d’arts. La grande salle d’ethnographie située au premier étage de la villa a abrité des concerts où jouera Camille Saint-Saën. Joret, qui enrichit la villa du Bardo de collections précieuses, a réalisé lui aussi des modifications pour les besoins de ses passions.
    On lui attribue des passages taillés dans les murs dans la partie basse, ainsi qu’une salle donnant sur la cour supérieure. Toutes les modifications apportées à la villa par ses différents propriétaires n’ont pas affecté l’homogénéité des lieux.
    A la mort de Joret, la villa revenait à Mme Fremont, sa sœur et seule héritière. La villa sera acquise finalement en 1926 par l’Etat français, qui en fera un musée d’ethnographie et de préhistoire en 1930, après la construction d’une extension en contrebas du jardin. Le musée national du Bardo sera classé monument historique le 1er septembre en 1985.
    Chaque année, la villa ou palais du Bardo attire des milliers de visiteurs, dont des touristes étrangers. Des visiteurs curieux qui viennent explorer les moindres détails de ce précieux héritage, découvrir le charme d’une perfection esthétique et vivre l’impression d’avoir voyagé dans une autre époque. 


    Arslan Selmane

    el watan
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