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Ce que dit Hocine Aït Ahmed du congrès de la Soummam et de Abane Ramdane

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  • Ce que dit Hocine Aït Ahmed du congrès de la Soummam et de Abane Ramdane

    Quelle est l'importance du congrès de la Soummam dans le cheminement de la guerre de libération ? Quid du rôle de Abane Ramdane? Dans cet entretien réalisé en novembre 2002 par K.Selim dans un contexte de vives polémiques en Algérie avec des accusations, choquantes, de trahison, Hocine Aït Ahmed, élève le débat. Un entretien passionnant qui clarifie les enjeux politiques et de mémoires pour les jeunes algériens. Et pour les moins jeunes aussi.
    Que fut réellement le congrès de la Soummam, un renforcement de la révolution ou une déviation ?
    Hocine Aït Ahmed: Le fait de poser cette question près de quarante ans après la tenue de ce congrès me paraît sidérant. Autant soulever la même question sur le rôle du 1er Novembre 1954, au moment même où l'Algérie vient d'en célébrer le 40ème anniversaire.

    Soyons clairs : je ne me suis jamais considéré comme un "historique". J'en ai assez souvent martelé les raisons pour ne pas avoir à les ressasser aujourd'hui.

    Permettez-moi de les résumer en une seule phrase: la guerre de libération n'est en aucune façon réductible à un appareil, à un parti, encore moins à un homme, un complot, où une coterie, quels que soient par ailleurs les rôles des uns et des autres assumés dans des périodes et des étapes données.

    Pas plus que je ne suis spécialiste d'étiologie, terme barbare pour dire philosophie politique. Je vous livre donc un témoignage plus existentiel que théorique.

    En tant que militant de terrain, je m'interroge d'abord sur le sens des évènements que recouvrent les mots. Ces deux tournants politiques ne sont pas des météorites tombées du ciel. Leur restituer leur signification et leur portée exige le rappel – faute d'analyse - des causes et des enchaînements politiques qui les ont créés.

    Le déclenchement de la lutte armée en Algérie, le 1er Novembre 1954, a été, bien sûr, déterminé par la radicalisation des combats patriotiques en Tunisie et au Maroc.

    Le rêve d'un soulèvement maghrébin généralisé était à nos portes. Mais l'annonce de la lutte armée en Algérie est fondamentalement la résultante de la poussée populaire en travail depuis les répressions coloniales sanglantes de mai 1945.

    N'oublions jamais les dynamiques sociales profondes dont les personnalités et les partis ne sont souvent que la face visible de l'iceberg nationaliste.
    C'est vrai que les formations politiques ou religieuse, le PPA-MTLD, l'UDMA, le PCA, les Oulémas, s'étaient coupées des masses, tellement leurs stratégies "légalistes" leur paraissaient dérisoires et sans issue.

    C'est elles qui, de surcroît, en payaient les notes douloureuses, notamment à chacun des "scrutins" grossièrement truqués sous le règne de Naegelen. La formule "élections à l'algérienne" était devenue proverbiale en France même à la moindre anicroche touchant le suffrage universel. Formule ô combien ! Prémonitoire.

    Ce jeu de toboggan piégé et savonné qui ramenait toujours au point de départ avait fini par excéder nos compatriotes: "Ne nous appelez ni à l'abstention ni à la participation électorale ! Donnez-nous des armes !": ce message nous parvenait de partout. C'est à ce message qu'a finalement répondu l'appel du 1er Novembre.

    Pouvons-nous conclure que les dirigeants politiques de l'étape précédente avaient trahi ?
    Pas d'anathèmes ! Accuser à tout bout de champ de trahison, c'est ce genre de retours destructifs au passé qu'il faut éviter. Il y a des mots qui tuent, surtout dans un pays où la vie et l'opinion des gens continuent de perdre de leurs valeurs.

    Le sens de la responsabilité doit inciter à la sérénité et à la prudence quand il s'agit de porter des jugements d'ordre politique. Sauf à ravaler ses propres agressions verbales, lorsque les formations en question deviendront parties prenantes à ces premières assises constitutives du FLN.

    Le sens capital de cet événement réside dans la nature politique et contractuelle d'une stratégie de libération nationale élaborée par le congrès de la Soummam.

    De toute évidence, ce pacte national n'aurait pas pu avoir lieu sans le formidable électrochoc psychologique et politique provoqué par les actions entreprises le 1er Novembre 1954, amplifiées par Saout El-Arab et par la panique qui avait gagné les autorités coloniales.

    Certes, les insuffisances militaires du déclenchement de "La Révolution" s'expliquaient par les improvisations qui ont présidé à son organisation. En prenant, en 1951, la décision de dissoudre l'OS, de démanteler son dispositif et son encadrement, les dirigeants du PPA-MTLD avaient commis une grave faute politique.

    L'absence d'une stratégie politique qui devait accompagner la proclamation du 1er Novembre sur le terrain risquait de couper les groupes armés de la population. Du reste, les stratèges de la guerre coloniale ne tarderont pas à exploiter ce vide politique.
    Quand le gouverneur général Soustelle - jusqu'au-boutiste de l'Algérie française - prendra la mesure de remettre en liberté quelques dirigeants politiques algériens qui avaient été arrêtés, au lendemain de la Toussaint, son intention stratégique était d'engager les nationalistes modérés à remplir le vide politique afin de retarder ou de prévenir la généralisation de la dissidence armée.

    Apparemment, il a été pris de court par Abane Ramdane !
    H.A.A.: Tout à fait. Dès son retour au pays, Abane Ramdane, qui venait de purger des années de prison dans le nord de la France, prit contact avec Ouamrane en Kabylie (Ndlr: responsable de la willaya 4, il se réfugia dans la willaya 3 après avoir dirigé des attaques armées dans la région de Blida pour s'informer).

    Ayant longtemps assumé des responsabilités, d'abord au sein de l'organisation clandestine du PPA, et ensuite à la tête de l'OS pour la région de Sétif, Ramdane était un véritable animal politique et un organisateur expérimenté.

    Il n'avait pas besoin de son intuition de mathématicien pour, en premier lieu, identifier le sens du problème prioritaire et urgent: l'absence de vision et de stratégie politiques, et, en deuxième lieu, pour mettre en place les structures cohérentes destinées à soutenir la dynamique populaire.
    Sans perdre de temps, il se rendit alors au domicile de Rebbah Lakhdar, à Belcourt (Sidi M'hammed). Qui ne connaissait ce personnage hors du commun ? Certes, il était militant chevronné du PPA, mais il était respecté et aimé, y compris par les adversaires politiques, et ce n'est pas peu dire.

    Car, il avait cet art naturel d'un entregent exceptionnel, fait de gentillesse, d'ouverture d'esprit et d'une serviabilité doublée d'humilité. Petit commerçant dynamique, il connaissait l'ensemble de la classe politique algérienne ainsi que les personnalités religieuses et du monde des affaires.

    (Cet homme avait toujours refusé d'assumer des responsabilités publiques. Sauf une fois: contraint et forcé par ses dirigeants, il se porta candidat aux élections à l'Assemblée algérienne d'avril 1948, à Sour El-Ghozlane, sa circonscription d'origine.

    Son tort fut d'être l'enfant du pays idolâtré, puisque c'est là que le coup de force électoral, sous le règne de Naegelen, prit une tournure dramatique avec des "électeurs assassinés à Aumale" et Deschmya. Et ainsi un béni-oui-oui d'une crasse politique fut proclamé représentant du peuple).

    Abane ne pouvait donc pas trouver un intermédiaire plus crédible. De but en blanc, il s'adressa en ces termes à Rebbah: "Je veux rencontrer toutes les personnalités qui comptent dans notre société".

    Pendant des semaines, il squatta l'appartement pour y recevoir ses nombreux interlocuteurs: dirigeants centralistes du PPA-MTLD, de l'UDMA, du PCA, des Oulémas, Aïssat Idir, le futur chef de l'UGTA, Moufdi Zakaria, l'éternel poète symbole d'un Mzab fidèle à lui-même et à l'Algérie, qui sera l'auteur de l'hymne national de notre pays.

    Sans compter quelques figures de la bourgeoisie en formation pour l'aide financière, nerf de la guerre. L'impact de ces contacts est immense dans la perspective de la mobilisation de toutes les catégories sociales.

    Au niveau politique et à la suite de multiples rencontres, Ramdane réussit à arracher aux délégués attitrés qu'ils procèdent à la dissolution de leurs formations politiques respectives et qu'à titre individuel, leurs militants s'intègrent dans le processus de création du FLN en vue de soutenir l'ALN dans tous les domaines.

    Les dirigeants principaux de l'Association des Oulémas se rallieront aussi à cette perspective de rassemblement national. Il restait à transformer l'essai, c'est-à-dire à organiser le Congrès constitutif du FLN.

    C'était une véritable gageure. OU, QUAND et COMMENT. Mission quasi-impossible ? Où se réunir en pleine guerre, mais dans des conditions de sécurité absolues ?

    Quand se réunir et dans l'urgence absolue, l'hystérie des répressions coloniales risquant d'étouffer et de réduire les foyers de résistance armée, et comment acheminer les délégués et surtout les états-majors des willayas, étant donné le redoutable quadrillage du territoire par les forces et les opérations de guerre ?
    dz(0000/1111)dz

  • #2
    Force est de constater que ce quasi-miracle s'est réalisé. Grâce à la réflexion et au savoir-faire du tandem Ben M'hidi Larbi-Abane Ramdane, aux officiers de l'ALN, à celles et ceux qui ont participé aux commissions préparatoires des assises de cet événement, et aussi à ce mur de vigilance patriotique des villageois qui étaient mobilisés par le sens de l'honneur, sans même savoir la nature de l'événement attendu.
    En ce qui concerne les résultats des travaux, je vous renvoie aux textes publiés par nos historiens honnêtes. En résumé, pour la première fois, le FLN se donne une plate-forme politique; on peut en discuter les lacunes et les insuffisances. Mais, une première également, les structures de l'ALN et du FLN ont été précisées.

    Les professions de foi ne sont pas définies seulement par des idéaux mais par la stratégie de mise en application. En effet, juger comme si les moyens ne sont pas partie intégrante d'un programme relève de l'ignorance délibérée ou de la dissimulation. Ce qui explique que le principe de la primauté du politique sur le militaire avait une portée et garde, jusqu'à nos jours, une validité incontestable.

    Des historiques se sont opposés au congrès de la Soummam ?
    Quelques historiques se sont effectivement opposés au congrès de la Soummam. Un congrès antagoniste avait même été prévu, soutenu par Nasser et Bourguiba, qui avait notamment mis la "Garde nationale" à la disposition des tenants de la contestation.

    Une crise extrêmement plus grave que celle qui avait opposé Centralistes et Messalistes par congrès rivaux interposés. Imaginez les engrenages de tueries opposant des hommes, voire des régions ou des wilayas en armes: c'était la guerre fratricide se substituant à la guerre de libération.

    J'étais le seul à la prison de la Santé à reconnaître les décisions du congrès de la Soummam. Pour toutes les raisons indiquées, et surtout en raison du consensus national qui y fut esquissé et qui pouvait servir de support international à la constitution d'un gouvernement provisoire.

    J'avais transmis au CCE - la nouvelle direction élue par le Congrès -, par l'intermédiaire du sénateur Ahmed Boumendjel, notre avocat, un message écrit dans lequel je soulignais l'absurdité d'un conflit de souveraineté, alors que le pouvoir colonial continuait à en être le vrai détenteur au regard de la communauté internationale. Et que je tenais à leur disposition un rapport concernant la constitution urgente d'un gouvernement provisoire.

    Une initiative qui, non seulement pouvait transcender les blocages résultant des luttes de clans et de personnes, mais qui devait principalement créer la dynamique diplomatique et médiatique indispensable à une solution négociée avec la puissance coloniale.

    Quant aux prolongements sur la situation actuelle, que dire sinon que l'Algérie n'en serait pas là, exsangue et dévastée, si Abane n'avait pas été assassiné par les siens et si Ben M'hidi n'avait pas été exécuté par les autres. En d'autres termes, si le principe du primat du politique sur le militaire avait été respecté.

    Le congrès de la Soummam donne lieu à des lectures idéologiques contradictoires...
    Aucune autre lecture idéologique ou partisane ne pouvait être faite de ce congrès. La plate-forme de la Soummam a été, je le répète, le premier pacte politique contractuel, donc fondé sur le respect du pluralisme et non pas sur un consensus populiste. Sauf qu'on n'empêchera pas les racontars d'aujourd'hui – à l'exemple des racontars d'hier - de tenter d'asservir l'histoire à des fins de légitimation et de propagande
    Vous avez connu Abane Ramdane. Pouvez-vous nous parler de l'individu, de l'homme qu'il fut ?
    J'ai connu Ramdane au cours de cet été 1945, le plus chaud et le plus surréaliste. Il venait de Châteaudun - Chelghoum Laïd - où il travaillait comme secrétaire dans l'administration. Il était profondément marqué, malgré sa froideur apparente, par les répressions et la chasse à "l'arabe" qu'il avait vécues de très près.

    Je préfère vous parler de l'homme avant de vous donner quelques repères sur son itinéraire. Quelques semaines avant de passer l'examen du baccalauréat 2ème partie au lycée de Blida, il avait sollicité de l'administration d'être dispensé des heures de gymnastique pour mieux se préparer aux examens, car, en plus au lieu de choisir entre le bac philo et le bac mathématiques, il tenait à se présenter aux deux examens.

    La dispense lui ayant été refusée, il se mit en colère et alla se briser le bras contre un rempart de fer ou de marbre. Ce qui ne l'empêcha pas de bouder les exercices physiques pour mieux se préparer et réussir brillamment le double examen.

    Autre anecdote sans commentaire: arrêté par la PRG, alors qu'il était le responsable de l'OS dans la région de Sétif, il n'avait pas fait le moindre aveu malgré toutes les formes de torture utilisées pour le faire parler.

    Combien de fois il fut transféré d'une prison à une autre, à force de faire des grèves de la faim ou d'inciter les droits communs à l'agitation ou à la violence. Pour se débarrasser de Abane, les services pénitenciers d'Algérie durent l'envoyer en relégation dans le nord de la France. Quel tempérament !

    Son identité, c'est ce qu'il a fait de lui-même dans les pires épreuves. Ceci dit, qui n'a pas de défaut ? Il était autoritaire et jacobin. Son franc-parler le desservait terriblement. Par contre, il savait aussi écouter et exécuter les décisions prises démocratiquement.
    Quels commentaires vous inspire notre rapport à l'histoire ?
    Pour les Algériens informés, le 20 Août 1956 est inséparable du 1er Novembre 54. Et par-dessus les déclarations officielles, par-dessus les rituels aussi insipides qu'hypocrites, ces deux dates de notre passé suscitent chaque année un engouement de plus en plus réconfortant au sein de notre jeunesse et de ses élites locales et régionales.

    Et cela, en dépit du délabrement planifié de la mémoire historique et peut-être à cause de ce délabrement. Chez ces exclus, cette avidité naturelle ressemble fort à une volonté de réintégration et d'enracinement profond dans le présent et l'avenir de leur nation.

    Ce ne sont pas les retours en arrière, à la recherche nostalgique de faits glorieux, qui les intéressent. Ils attendent de l'histoire, en tant que discipline, qu'elle leur livre des leçons et des enseignements. Leur rêve est de participer pleinement et efficacement à l'histoire comme dynamique populaire qui se construit dans les luttes quotidiennes pour une vie de liberté, de dignité et de justice pour tous et toutes.

    16 août 2015 Huffpost Algeria
    dz(0000/1111)dz

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    • #3
      Salam,

      Merci kariaret pour cet article.. je ne connaissais pas cet interview.. Lorsque cet homme parle, on ressent les dimensions espace-temps (national-historique) dans ces propos.. alors qu'il explique clairement l'enjeu d'un tel congrès à cette période très sensible de l'histoire de la révolution.. certains médiocres s'indignent au sujet de la langue amazigh absente du communiqué de la soummam.

      Cette phrase est magistrale :
      Ce ne sont pas les retours en arrière, à la recherche nostalgique de faits glorieux, qui les intéressent. Ils attendent de l'histoire, en tant que discipline, qu'elle leur livre des leçons et des enseignements.
      Espérons que l'opposition s'inspire de cette leçon du passé pour refaire un congrès similaire capable de réunir les forces sur le terrain.. ayant pour objectif final de libérer le pays de l'occupation mafieuses..

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      • #4
        Baraka allah fik katiaret pour cet interview lucide d'une des icônes de notre révolution!

        Merci beaucoup pour cette remise à l'ordre !
        Lorsque vous changez votre manière de voir les choses, les choses que vous voyez changent !

        Ne cédez donc plus à la tentation de victimisation, si vous voulez êtes l’acteur principal de votre vie.

        Commentaire


        • #5
          Magnifique interview, merci katiaret.

          Des historiques se sont opposés au congrès de la Soummam ?
          Quelques historiques se sont effectivement opposés au congrès de la Soummam. Un congrès antagoniste avait même été prévu, soutenu par Nasser et Bourguiba, qui avait notamment mis la "Garde nationale" à la disposition des tenants de la contestation
          Je suis curieux de connaitre les noms de ces historiques qui auraient prévu un congrès anagoniste?!

          Quelqu'un aurait la réponse?
          Dernière modification par WorldCitizen, 16 août 2015, 15h16.

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          • #6
            Je suis curieux de connaitre les noms de ces historiques qui auraient prévu un congrès anagoniste?!
            Tous les historiques étaient à l'exterieur, et voyaient d'un très mauvais oeuil le putch opéré par Abane contre eux, et la primauté de l'intérieur sur l'extérieur, un des éléments qui a accentué les schismes déjà bien présents, au sein du mouvement national. Il est allé jsuqu'à interdir l'égorgement des moutons, au nom du modernisme, selon certains témoignages. Il a été désavoué par le CNRA, et a essayé de remplacer les chefs de la délégation extérieur, aprsè avoir ordonné la liquidation physique des Messalistes dès mai 1955, ce qui lui a probablement coûté la vie...
            Dernière modification par ott, 16 août 2015, 16h03.
            Othmane BENZAGHOU

            Commentaire


            • #7
              Sans perdre de temps, il se rendit alors au domicile de Rebbah Lakhdar, à Belcourt (Sidi M'hammed). Qui ne connaissait ce personnage hors du commun ? Certes, il était militant chevronné du PPA, mais il était respecté et aimé, y compris par les adversaires politiques, et ce n'est pas peu dire.

              Car, il avait cet art naturel d'un entregent exceptionnel, fait de gentillesse, d'ouverture d'esprit et d'une serviabilité doublée d'humilité. Petit commerçant dynamique, il connaissait l'ensemble de la classe politique algérienne ainsi que les personnalités religieuses et du monde des affaires.

              (Cet homme avait toujours refusé d'assumer des responsabilités publiques. Sauf une fois: contraint et forcé par ses dirigeants, il se porta candidat aux élections à l'Assemblée algérienne d'avril 1948, à Sour El-Ghozlane, sa circonscription d'origine.

              Son tort fut d'être l'enfant du pays idolâtré, puisque c'est là que le coup de force électoral, sous le règne de Naegelen, prit une tournure dramatique avec des "électeurs assassinés à Aumale" et Deschmya. Et ainsi un béni-oui-oui d'une crasse politique fut proclamé représentant du peuple).

              Abane ne pouvait donc pas trouver un intermédiaire plus crédible. De but en blanc, il s'adressa en ces termes à Rebbah: "Je veux rencontrer toutes les personnalités qui comptent dans notre société".

              Pendant des semaines, il squatta l'appartement pour y recevoir ses nombreux interlocuteurs: dirigeants centralistes du PPA-MTLD, de l'UDMA, du PCA, des Oulémas, Aïssat Idir, le futur chef de l'UGTA, Moufdi Zakaria, l'éternel poète symbole d'un Mzab fidèle à lui-même et à l'Algérie, qui sera l'auteur de l'hymne national de notre pays.

              Sans compter quelques figures de la bourgeoisie en formation pour l'aide financière, nerf de la guerre. L'impact de ces contacts est immense dans la perspective de la mobilisation de toutes les catégories sociales.

              Rebbah Lakhdar, un nationaliste et militant algérien, peu connu !

              mar 01, 2015
              Le nationalisme algérien (1900 à 1954)

              Son nom est peu connu, pourtant, ce militant a joué un grand rôle dans la réalisation de l’hymne national Qassamen, ainsi que de nombreuses missions délicates.

              Rebbah Lakhdar est né le 26 février 1917 à Aumale, dans l’Algérois, d’un père fellah décédé en 1929. Il obtient son certificat d’études et travaille comme receveur de tramway à Alger. En parallèle, il est ailier gauche dans l’équipe de l’A.S. Saint-Eugène. Il adhère au PPA en mars 1937 et se retrouve très vite cadre de l’organisation à Belcourt (Belouizdad).
              Entre 1943 et 1945, Lakhdar Rebbah accomplit son service militaire dans le Génie/Sapeur-pompier. Après la guerre, il ouvre un café à Alger, puis un magasin de poste radio.
              En 1947, il est élut conseiller municipal MTLD d’Alger et délégué au congrès du PPA. Parallèlement, il anime un club sportif d’athlétisme.
              Alors qu’il se porte candidat à l’Assemblée algérienne, il est arrêté en 1948 et emprisonné à Barberousse. A sa libération, il reprend ses activités militantes. Son domicile, rue El Ghazi, à Belcourt, sert de lieu de réunions politiques, dont celle célébrant l’anniversaire de la mort de Kehal Arezki ou Mohamed Douar. Il héberge également les militants clandestins de l’OS, recherchés par la police et se tient à l’écart lorsque commence la crise entre messalistes et centralistes.
              Dès novembre 1954, il rejoint le FLN et son domicile sert de dépôt aux armes servant au déclenchement de l’insurrection dans la capitale.
              Son premier contacte avec Abane Ramdane, est daté de février 1955. Ce dernier récemment libéré, lui demande de rencontrer les formations et personnalités politiques.
              Lors de l’une des réunions tenues chez lui, en juin 1955, avec Abane, Ben Khedda, Amara et Hanafi, la décision est prise de composer un nouvel hymne national. Lakhdar Rebbah rencontre, le lendemain, Moufdi Zakaria à la rue d’Isly, au niveau du café L’Express. Le poète accepte et s’atèle de suite à sa mission, au 2 rue Blandon, non loin de la place Chartes, et remet le lendemain le texte qui deviendra l’hymne de l’Algérie.
              En parallèle, Rabbah prend contacte avec Aïssat Idir pour la création d’un syndicat algérien. Il fabrique aussi le premier poste émetteur du FLN vers la fin de l’année 1955, au 9 rue Médée.
              En 1956, il crée et anime l’Union Générale des Commerçants Algériens, sous l’égide du FLN. Il est arrêté le 11 avril de la même année, à Kouba, dans dans la maison de Moufdi Zakaria. Déplacé d’un commissariat à un autre, il est torturé entre le 11 et le 27 avril, puis interné successivement à Barberousse, Maison-Carrée, Lambèze et enfin à Loos-lès-Lille.
              Après l’indépendance de l’Algérie, Rabbah est élu député en septembre 1964. Par la suite, il se retire de la vie politique et se consacre à ses activités personnelles, jusqu’à son décès en 1989, à Alger où il est inhumé.
              Synthèse K.T.

              Sources :
              « Dictionnaire biographique de militants nationalistes algériens. 1926-1954 », par Benjamin Stora. L’Harmattan, 1985.
              http://www.lexpressiondz.com
              Othmane BENZAGHOU

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              • #8
                Abane Ramdane a été pour beaucoup dans le congrès de la Soummam

                RACHID ADJAOUD, AUTEUR DU LIVRE LE DERNIER TÉMOIN, À L'EXPRESSION
                "Abane Ramdane a été pour beaucoup dans le congrès de la Soummam"


                L'auteur du livre intitulé Le Dernier témoin, Rachid Adjaoud, ayant fait partie du groupe du secrétariat du congrès de la Soummam, revient sur la réunion historique du 20-Août 1956 qui a jalonné l'avenir du FLN/ALN et celui de l'Algérie.

                L'Expression: Pourquoi avoir opté pour la tenue du congrès à Ifri?Rachid Adjaoud: Le congrès devait se tenir au départ à la Qalaâ N'Ath Abbès, choisie pour son relief stratégique, sa sécurité et son côté historique. La Qalaâ, située sur une falaise, était le fief d'El Mokrani. La délégation venue d'Alger, comprenant Abane Ramdane, Youcef Benkhedda, Krim Belkacem, est tombée dans une embuscade en arrivant à Allaghen. La mule transportant des documents s'est sauvée en regagnant une ferme appartenant à un colon. Les chargés de la tenue du congrès étaient pris de panique. Le changement du lieu du congrès fut alors décidé.
                Amirouche, qui était le bras droit de Krim Belkacem, a proposé Ifri. Au départ, il y a eu beaucoup d'hésitations quant à abriter le congrès à Ifri vu que cette région, qui était proche de la route nationale, était entourée de postes militaires. Connaissant la région et ses populations acquises à la cause nationale, Amirouche Aït Hamouda, soutenu par Abderrahmane Mira et Hmimi Oufadel, s'est porté garant en rassurant Krim Belkacem tout en présentant les atouts sécuritaires que recèle la région.

                Y a-t-il eu des hésitations pour d'autres régions?
                Ce sont les responsables qui ont décidé de la tenue du congrès à Ifri et non pas des régions, celles-ci n'existaient pas avant le congrès de la Soummam. Aussi, un sujet pareil n'a pas besoin de 50 personnes pour une décision vu la discrétion exigée.

                Vous étiez directement impliqués dans la rédaction du déroulement du congrès?Toute réunion a besoin d'un secrétariat. Il fallait donc trouver des moudjahidine pour se charger de cette mission. Amirouche s'est démené pour ramener des jeunes. J'ai été contacté par Hmimi Oufadel et Mohand Akli Naït Kabache m'expliquant qu'ils étaient dans le besoin de mes services, sans plus de détails. Au début août 1956, ils m'ont conduit vers la région d'Ouzellaguen. Sur les lieux du congrès, je me suis retrouvé avec trois jeunes, en l'occurrence Tahar Amirouchène, Hocine Salhi et Abdelhafid Amokrane.
                Pour la rédaction, nous n'avons rien rédigé. Les résolutions ont été préparées et rédigées à Alger. Abane Ramdane, Youcef Benkhedda et Salah Louanchi ont beaucoup travaillé sur les résolutions du congrès. Au cours de la réunion, ils ont soumis tout leur travail à l'assemblée générale à laquelle ont pris part les responsables des wilayas. On portait des modifications en saisissant les points d'accord que les congressistes ont amendés.
                Une copie de la plate-forme du congrès a été remise à chacun des congressistes. Nous ne savions alors rien de la rencontre. En sortant chaque matin de notre chambre - secrétariat, nous rencontrions Amirouche, Zirout Youcef, Bentobbal, Krim Belkacem, Benaouda, mais sans pour autant savoir qui étaient ces hommes, alors que nous étions dans un congrès d'envergure.

                Vous avez tout de même senti que la rencontre était très importante?Oui, on sentait la lourdeur de la responsabilité en lisant les résolutions qu'on saisissait. Sinon, les débats se sont tenus sereinement. La garde a été assurée sur l'ensemble des régions d'Ouzellaguen, Chellata, Ath Waghlis. La population locale a assuré toute la logistique à commencer par la sécurité jusqu'à la nourriture etc. Les moudjahidine de Béni Ourtilane, Béni Chebana, Aokas, Bgayet, La Fayette (Seddouk et ses environs), harcelaient tout le temps l'armée coloniale en faisant diversion.
                Le congrès s'est tenu dans de parfaites conditions sans aucune mésentente apparente. Les délégations, représentant toutes les régions du pays, sont reparties après présentation des armes et honneurs.

                Quel a été l'apport organisationnel d'Abane Ramdane durant le congrès?Sur le plan organisationnel, Abane Ramdane, a été pour beaucoup. En plus de sa présence très remarquée parmi les congressistes, il venait souvent dans le secrétariat voir la frappe et corriger ce qu'on rédigeait en formulant des petites observations. Abane assurait la coordination même au niveau d'Alger.
                Je rejoins l'aveu de Hocine Aït Ahmed qualifiant Abane Ramdane d'homme politique expérimenté et organisé sur tous les plans.

                Par Wahib AïT OUAKLI
                L'Expression dz
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