Ariane Salem- Media24 -Lundi 7 Septembre 2015.
Le Maroc s'achemine, s'il n'y est déjà, vers une position excédentaire à l’égard de ses deux plus gros partenaires commerciaux. Une inversion historique de tendance.
Derrière les grands bouleversements des comptes extérieurs induit par la baisse du pétrole et le renchérissement des phosphates, on assiste à un rééquilibrage des échanges bilatéraux avec les plus gros partenaires du Maroc: la France et l’Espagne.
Si le taux de couverture global de la balance commerciale en 2015 a atteint 60% au 1er trimestre, contre 51% pour 2014, les taux de couverture avec l’Espagne et la France avoisinent les 95% (93% et 97% respectivement) au 1er trimestre 2015, contre 85 et 80% en 2014 respectivement.
Les données sur les échanges bilatéraux de biens sont publiés par l’Office des Changes jusqu’au 1er trimestre 2015. L'évolution est claire. Et selon des sources non-officielles, la tendance s'est déjà renversée au cours du second trimestre 2015. Pour cette dernière période, les échanges commerciaux par pays ne sont pas disponibles.
>Les échanges commerciaux avec l’Espagne dopés par l’automobile et la baisse des cours pétroliers
Son premier partenaire commercial, l’Espagne, avec qui le Maroc enregistrait un déficit de 8 MMDH en 2014, et 16 MMDH en 2013, est en passe de devenir déficitaire vis-à-vis de sa balance des biens avec le Maroc. A fin mars 2015, l’Espagne conservait une petite avance de 800 millions de dirhams.
Les exportations d’automobiles gonflent les flux marocains vers l’Espagne. Avec 1,1 MMDH en valeur d’exportations automobiles à fin mars 2015, les flux dépassent les niveaux d’avant 2013, et représentent 40% des exportations de toute l’année 2014.
Les exportations de fruits et légumes ont affiché une performance remarquable participant au rééquilibrage de la balance.
L’effet de la baisse du pétrole se fait également ressentir sur les échanges maroco-espagnols. Ces deux pays qui s’échangent des produits pétroliers raffinés ont réduit leurs flux entrants et sortants: le Maroc n’exporte plus vers l’Espagne et les importations d’Espagne ont baissé en valeur.
>La campagne céréalière et Renault oeuvrent en faveur de la balance franco-marocaine
Les données du commerce extérieur établissent également un léger déficit commercial avec la France de 300 millions de dirhams en défaveur du Maroc à fin mars 2015, avec 11,5 MMDH d’importations contre 11,2 MMDH d’exportations.
Or, la position extérieure vis-à-vis de la France a toujours gravité autour d’un déficit annuel de 10 MMDH. Si les périodes d’observation ne sont pas les mêmes, puisque nous comparons un trimestre de 2015 avec les années 2011 à 2014, on peut néanmoins tracer des tendances et poser quelques scénarios.
En mars 2015, les importations céréalières représentaient une valeur d’à peu près 800 millions de dirhams. Selon les campagnes céréalières nationales, les importations peuvent varier entre 3 et 7 milliards de dirhams (depuis 2011), et demeurent l’un des postes d’importation les plus lourds.
La campagne 2014/2015 étant abondante cette année (115 millions de quintaux de blé), les droits d’importation ont été élevés à des niveaux prohibitifs du 1er mai jusqu’au 31 octobre. Le niveau des importations devrait donc demeurer un peu au dessus de son niveau de fin mars. Par rapport à 2014, c’est une économie de 5 milliards de dirhams, soit la moitié du déficit commercial enregistré l’année dernière avec la France.
De plus, il semble que les importateurs ou négociants marocains de blé préfèrent désormais d'autres fournisseurs, non français.
Par ailleurs, les échanges de biens automobiles se rééquilibrent, et cette tendance devrait s’accentuer avec l’arrivée de PSA et l’ambition de construire 1 million de véhicules d’ici 2020. Au premier trimestre 2015, les échanges d’automobiles entre les deux pays présentaient un très léger déficit côté marocain, de 120 millions d’euros.
Le dynamisme des exportations automobiles et l’arrêt des importations céréalières suffisent à placer le Maroc en position excédentaire par rapport à la France sur les échanges de biens.
Les données de l’office des changes du deuxième trimestre 2015 viendront confirmer ou non l’inversion de la balance.
Ce qui est déjà acté, c’est que le Maroc talonne désormais ses principaux partenaires commerciaux européens, ce qui le met dans une position plus confortable en termes de réserves de devises mais également de négociations commerciales.
>Des enseignements ambigus
Reste à savoir si ces rééquilibrages vont s’inscrire en tendance ou s’ils correspondent à des effets conjoncturels.
Côté espagnol, une partie du rééquilibrage provient de la balance énergétique, qui pourrait n’être que conjoncturelle.
En touts cas, la configuration de l’économie mondiale avec un prix du pétrole bas est amené à rester bas quelques temps.
Côté français, c’est l’arrêt des importations céréalières qui pèse principalement à la baisse sur la balance franco-marocaine. La campagne 2014-2015 a été exceptionnelle. Rien ne permet de dire aujourd’hui qu’elle se reproduira l’année prochaine.
En revanche, ce qui se confirme, c’est le poids de l’industrie automobile marocaine, qui est en train de parvenir à inverser le sens des échanges sur cette catégorie de produits.
La deuxième question importante demeure celle des vertus de ce rééquilibrage sur l’économie. La meilleure couverture des échanges marocains avec le reste du Monde est-elle synonyme de gains de valeur ajoutée et de points de PIB?
L’attractivité qu’exercent les industries automobiles, aéronautiques du Maroc pour les IDE est-elle créatrice d’emplois qualifiés et provoque-t-elle la montée en gamme des capacités productives? Si ce cercle vertueux ne s’installe pas, le Maroc s’expose à la volatilité des flux financiers toujours en recherche de compétitivité-prix.
Le Maroc s'achemine, s'il n'y est déjà, vers une position excédentaire à l’égard de ses deux plus gros partenaires commerciaux. Une inversion historique de tendance.
Derrière les grands bouleversements des comptes extérieurs induit par la baisse du pétrole et le renchérissement des phosphates, on assiste à un rééquilibrage des échanges bilatéraux avec les plus gros partenaires du Maroc: la France et l’Espagne.
Si le taux de couverture global de la balance commerciale en 2015 a atteint 60% au 1er trimestre, contre 51% pour 2014, les taux de couverture avec l’Espagne et la France avoisinent les 95% (93% et 97% respectivement) au 1er trimestre 2015, contre 85 et 80% en 2014 respectivement.
Les données sur les échanges bilatéraux de biens sont publiés par l’Office des Changes jusqu’au 1er trimestre 2015. L'évolution est claire. Et selon des sources non-officielles, la tendance s'est déjà renversée au cours du second trimestre 2015. Pour cette dernière période, les échanges commerciaux par pays ne sont pas disponibles.
>Les échanges commerciaux avec l’Espagne dopés par l’automobile et la baisse des cours pétroliers
Son premier partenaire commercial, l’Espagne, avec qui le Maroc enregistrait un déficit de 8 MMDH en 2014, et 16 MMDH en 2013, est en passe de devenir déficitaire vis-à-vis de sa balance des biens avec le Maroc. A fin mars 2015, l’Espagne conservait une petite avance de 800 millions de dirhams.
Les exportations d’automobiles gonflent les flux marocains vers l’Espagne. Avec 1,1 MMDH en valeur d’exportations automobiles à fin mars 2015, les flux dépassent les niveaux d’avant 2013, et représentent 40% des exportations de toute l’année 2014.
Les exportations de fruits et légumes ont affiché une performance remarquable participant au rééquilibrage de la balance.
L’effet de la baisse du pétrole se fait également ressentir sur les échanges maroco-espagnols. Ces deux pays qui s’échangent des produits pétroliers raffinés ont réduit leurs flux entrants et sortants: le Maroc n’exporte plus vers l’Espagne et les importations d’Espagne ont baissé en valeur.
>La campagne céréalière et Renault oeuvrent en faveur de la balance franco-marocaine
Les données du commerce extérieur établissent également un léger déficit commercial avec la France de 300 millions de dirhams en défaveur du Maroc à fin mars 2015, avec 11,5 MMDH d’importations contre 11,2 MMDH d’exportations.
Or, la position extérieure vis-à-vis de la France a toujours gravité autour d’un déficit annuel de 10 MMDH. Si les périodes d’observation ne sont pas les mêmes, puisque nous comparons un trimestre de 2015 avec les années 2011 à 2014, on peut néanmoins tracer des tendances et poser quelques scénarios.
En mars 2015, les importations céréalières représentaient une valeur d’à peu près 800 millions de dirhams. Selon les campagnes céréalières nationales, les importations peuvent varier entre 3 et 7 milliards de dirhams (depuis 2011), et demeurent l’un des postes d’importation les plus lourds.
La campagne 2014/2015 étant abondante cette année (115 millions de quintaux de blé), les droits d’importation ont été élevés à des niveaux prohibitifs du 1er mai jusqu’au 31 octobre. Le niveau des importations devrait donc demeurer un peu au dessus de son niveau de fin mars. Par rapport à 2014, c’est une économie de 5 milliards de dirhams, soit la moitié du déficit commercial enregistré l’année dernière avec la France.
De plus, il semble que les importateurs ou négociants marocains de blé préfèrent désormais d'autres fournisseurs, non français.
Par ailleurs, les échanges de biens automobiles se rééquilibrent, et cette tendance devrait s’accentuer avec l’arrivée de PSA et l’ambition de construire 1 million de véhicules d’ici 2020. Au premier trimestre 2015, les échanges d’automobiles entre les deux pays présentaient un très léger déficit côté marocain, de 120 millions d’euros.
Le dynamisme des exportations automobiles et l’arrêt des importations céréalières suffisent à placer le Maroc en position excédentaire par rapport à la France sur les échanges de biens.
Les données de l’office des changes du deuxième trimestre 2015 viendront confirmer ou non l’inversion de la balance.
Ce qui est déjà acté, c’est que le Maroc talonne désormais ses principaux partenaires commerciaux européens, ce qui le met dans une position plus confortable en termes de réserves de devises mais également de négociations commerciales.
>Des enseignements ambigus
Reste à savoir si ces rééquilibrages vont s’inscrire en tendance ou s’ils correspondent à des effets conjoncturels.
Côté espagnol, une partie du rééquilibrage provient de la balance énergétique, qui pourrait n’être que conjoncturelle.
En touts cas, la configuration de l’économie mondiale avec un prix du pétrole bas est amené à rester bas quelques temps.
Côté français, c’est l’arrêt des importations céréalières qui pèse principalement à la baisse sur la balance franco-marocaine. La campagne 2014-2015 a été exceptionnelle. Rien ne permet de dire aujourd’hui qu’elle se reproduira l’année prochaine.
En revanche, ce qui se confirme, c’est le poids de l’industrie automobile marocaine, qui est en train de parvenir à inverser le sens des échanges sur cette catégorie de produits.
La deuxième question importante demeure celle des vertus de ce rééquilibrage sur l’économie. La meilleure couverture des échanges marocains avec le reste du Monde est-elle synonyme de gains de valeur ajoutée et de points de PIB?
L’attractivité qu’exercent les industries automobiles, aéronautiques du Maroc pour les IDE est-elle créatrice d’emplois qualifiés et provoque-t-elle la montée en gamme des capacités productives? Si ce cercle vertueux ne s’installe pas, le Maroc s’expose à la volatilité des flux financiers toujours en recherche de compétitivité-prix.
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