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Stéréotypes sexistes: des manuels scolaires loin d'être innocents

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  • Stéréotypes sexistes: des manuels scolaires loin d'être innocents

    Une étude sur les représentations des hommes et des femmes dans les manuels d'apprentissage de la lecture révèle la vision particulièrement stétérotypée et sexiste de la société que cultivent les éditeurs scolaires.

    Elles sont moins nombreuses que les garçons, plus souvent reléguées à des rôles secondaires, quand elles ne servent pas uniquement de faire valoir... Difficile de faire plus stéréotypée que la vision des filles exposée dans les manuels scolaires des élèves de CP. C'est ce que révèle une étude du Centre Hubertine Auclert, centre francilien de ressources pour l'égalité femmes-hommes, publié mardi, et dont L'Express vous révèle le contenu en exclusivité.

    Depuis 2011, le Centre Hubertine Auclert publie chaque année une étude sur les livres scolaires. Après les manuels du lycée, il a décidé cette année de plancher sur les manuels de Cours préparatoire. Des messages et une vision de la société importants pour la construction de l'identité de ces enfants de 5 ou 6 ans. "Les manuels d'apprentissage de la lecture sont, pour beaucoup d'entre eux, le premier véritable livre qu'ils tiennent dans leur main, celui qui va les ouvrir au monde", explique Amandine Berton-Schmitt, co-auteure de cette étude avec Fiona Maury .

    Vingt-deux manuels, édités entre 2008 et 2015, par dix maisons d'éditions différentes ont été épluchées par les deux auteures. Pour chacun de ces manuels a été identifiée la fréquence à laquelle femmes hommes y sont présents, et de quelle façon: statut, âge, apparence physique, traits psychologiques, domaines d'activités et d'expertises, etc. Soit une approche à la fois quantitative et qualitative.

    Des femmes minoritaires

    Premier élément de cette étude: dans les manuels de CP, les figures féminines adultes sont sous-représentées. Ainsi, sur les 13 025 personnages sexués présents dans les manuels épluchés par les deux auteures du rapport, seuls 36,1% sont des femmes. La parité n'est pas atteinte n'ont plus chez les personnages enfantins: 39% de filles, pour 61% de garçons. Pas mieux non plus quand il s'agit de personnages réels: seuls 33,8% d'entre eux sont des femmes.

    Quelques chiffres tirés de l'étude:

    45,5% de femmes parmi les personnages travaillant dans l'enseignement, et 31,1% des personnages travaillant dans les services,
    96,6% d'hommes parmi les personnages exerçant des métiers scientifiques
    33,2% de sportives vs 66,8% de sportifs
    33,2% de reines vs 66,8% de rois
    97,7% de sorcières vs 2,3% de sorciers

    Les auteures de l'étude ont également remarqué que les enseignants qui rédigent ces manuels (très souvent, des femmes) résistent encore fortement à la féminisation des mots, qu'il s'agisse des noms de métiers ou autre. Point de "professeure" ou d' "auteure" dans les manuels de CP, même quand la professeure est une femme -comme dans plus de 82% des écoles françaises. De même, certains manuels aiment à mettre en scène, à travers les consignes "le maître", mais jamais "la maîtresse", pas plus que "le maître ou la maîtresse"

    Des répartitions des rôles très stéréotypées

    Que les manuels s'appuient sur des mondes imaginaires ou réels, avec ou sans personnages récurrents, leur objectif est toujours de permettre une identification entre les petits apprentis lecteurs et le héros ou l'héroïne. Problème, dans les 22 manuels les femmes et les filles sont le plus souvent assignées à la sphère privée, dans des activités familiales ou domestiques, et beaucoup plus rarement dans le monde du travail, contrairement aux hommes et aux garçons

    "Les filles dedans, les garçons dehors", résume Amandine Berton-Schmitt. Et de détailler les textes et les images reproduites dans les manuels: "Une fille joue au foot? Elle a peur du ballon, "forcément". Les deux héros jouent au Papa et à la Maman? La fille garde le bébé et le garçon part à la chasse au phoque. Nous avons même repéré des illustrations où la maman et la fille débarrassent la table pendant que le papa et le fils regardent le foot ou lisent le journal. Difficile de trouver une vision plus stéréotypée de la répartition des tâches en fonction du sexe!".

    Un papa, une maman

    On pourrait rétorquer que les images ainsi dénoncées représentent tout de même une certaine réalité: car selon toutes les études sur le sujet, les femmes de 2015 continuent d'assumer les deux tiers des tâches domestiques... "Sauf que cette répartition n'apparaît même pas dans les manuels scolaires rétorque Amandine Berton-Schmitt. Dans ces livres, les femmes font tout, et quand les papas s'occupent des enfants, ils sont présentés comme dépassés, ou incompétents. Les familles monoparentales, homoparentales ou avec un enfant unique sont totalement absentes. Et je ne parle même pas de la question de la couleur de la peau: 99% des personnages étudiés sont blancs. Et tout le monde est mince."

    A la lecture de leurs manuels de CP, les petits élèves pourraient donc vite conclure que la famille "normale" est blanche, avec un papa qui travaille, une maman qui fait la cuisine, et deux enfants -un fils aîné et une petite dernière. Et tant pis pour eux si leur famille ne rentre pas dans les cases. "Les manuels scolaires sont des vecteurs de savoirs, mais aussi de valeurs résume Amandine Berton-Schmitt. Avec cette étude, nous souhaitons interpeller les auteurs de manuels, les éditeurs, mais aussi les enseignants: quelles valeurs souhaitent-ils transmettre aux élèves?".

    l'express fr
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