Voici une partie d'un entretien avec Edouard-Marie Gallez sur les vrai origines de l'islam et du Coran qui en fait viennent d'hérétiques ex-judéo-chrétiens dit les nazaréens ou judéonazaréens, qui eux niaient la mort et résurrection de Jésus.
Plus encore que les circonstances favorables, ce qui est important, dites-vous, c’est la vision de l’Histoire et du salut qui fit l’unité entre les différents partenaires du projet. Nous n’en avons pas encore beaucoup parlé. Cette vision présente certains aspects intemporels que l’on pourrait retrouver aujourd’hui...
Il faut en dire un peu plus en effet. Dans cette vision, le salut n’est pas spirituel, il ne passe pas par une réforme intérieure que l’on nomme conversion. C’est un salut qui doit se réaliser au niveau de la société. Là où Jésus a parlé (rarement) de l’opposition entre les fils de ténèbre et les fils de lumière, ils imaginent une vision du monde où des appartenances communautaires distinguent et séparent ces deux groupes. D’un côté, il y a le Parti de Dieu, et de l’autre le reste de ceux qui, forcément, sont contre Dieu, ne serait-ce qu’à cause de leur ignorance. Cette manière de voir est toujours fondamentalement celle de l’Islam, qui ne peut concevoir le monde autrement que comme un affrontement du Dâr al-islâm, le domaine où l’Islam est instauré comme loi du pays et où les non musulmans sont soumis, et le Dâr al-harb ou domaine de la guerre c’est-à-dire les pays et institutions à conquérir puisque Dieu les a donnés aux musulmans. Mais ce furent d’abord les judéo-nazaréens qui cultivèrent cette idéologie en nourrissant ces prétentions conformément à ce qu’on lit dans leurs livres, on l’a vu précédemment. Notons que, au temps du communisme, les sectateurs de cette idéologie avaient une vision très semblable du monde, divisé dialectiquement entre monde socialiste et monde à conquérir. Le pire, c’est que tous ces gens croient sincèrement sauver le monde puisqu’ils pensent détenir la recette de son salut. Or, l’importance d’une telle fin justifie les moyens : que vaut la vie d’un homme, ou celle de quelques millions d’hommes, si le salut du monde est en jeu ? C’est là où se trouve la perversion totale de ces idéologies capables de transformer des hommes paisibles et pacifiques en assassins, comme on le voit toujours en de nombreux pays. Cette perversion tire sa force du christianisme. Simplement, celui-ci est contrefait. C’est le petit détail qui change tout, et qui passe parfois inaperçu du plus grand nombre (et parfois aussi de certains intellectuels). On connaît mal les guerres que firent Mahomet et Umar au départ de Yathrib pour soumettre toutes les tribus arabes à leur portée, mais les traditions musulmanes évoquent la ruse, la férocité, les meurtres. Les Arabes sont unis dans le projet de prendre Jérusalem et d’y reconstruire le Temple, qui sera « le Troisième », ainsi qu’il est annoncé dans les apocryphes messianistes des judéo-nazaréens. Ce qu’on appelle « le deuxième Temple » est celui qui avait suivi l’exil et qui, en fait, a été rebâti par Hérode le Grand et détruit en 70 par les Romains de Titus alors même qu’il était enfin terminé.
Vous n’êtes pas en train de me dire que les Arabes ont reconstruit le Temple juif à Jérusalem ?
Les sources que nous possédons s’accordent pour dire que, dès que Jérusalem est prise, « la Maison » est relevée ; et qu’il s’agit d’un cube ! Selon certains témoignages que je reprends dans mon livre, cette reconstruction aurait d’abord été le fait de « juifs » avant d’être celui des Arabes. On peut comprendre que les observateurs non avertis ne comprenaient bien ni ce qui se passait, ni qui exactement tirait les ficelles. En fait, c’est une espérance exprimée dans la sourate II qui, pour ainsi dire, se réalisait là : « Abraham (figurant les juifs et les Arabes unis) relèvera les assises (qui restent) de la Maison avec [l’aide d’]Ismaël. (figurant les Arabes) » (II, 127). Personne ne sera étonné d’apprendre que le cube hâtivement élevé avait les dimensions exactes du cœur du temple d’Hérode - il constitue la véritable « mosquée de Umar », l’octogone que l’on voit aujourd’hui l’ayant remplacée à la fin du VIIe siècle tout en gardant une dimension extérieure égale à celle du cube. Une source dit que Umar fit un sacrifice devant cette Maison relevée, ce qui nous renvoie évidemment aux sacrifices anciens faits au Temple, mais sans doute aussi aux pratiques judéo-nazaréennes dont l’Islam a d’ailleurs hérité vaguement au moins dans le rite du sacrifice du mouton lors de l’aïd el-kébîr ou dans l’interdiction du vin et de l’alcool en général.
Justement, existe-t-il des données permettant d’établir, au-delà des similitudes doctrinales entre le proto-islam et le judéo-nazaréisme, le sens de la collaboration de ces deux forces au moment de la prise de Jérusalem en 638 ? Quelle idée peut-on avoir des relations qui avaient existé entre Mahomet et ces judéo-nazaréens nourris de pensée eschatologique et apocalyptique ?
Il est clair que les juifs qui entouraient Mahomet n’étaient pas des Juifs rabbanites. À ce sujet, il suffit d’entendre attentivement ce que les traditions islamiques ont à nous dire sur le personnage de Waraqa. J’en profite pour dire que son rôle a dû être si important qu’il n’a pas pu être effacé, alors que tant de témoignages islamiques anciens, écrits ou non, disparaissaient - en fait tous ceux qui sont antérieurs à la biographie normative de Ibn Hichâm, composée et imposée deux siècles après la mort de Mahomet : c’est seulement par des citations que l’on connaît quelque chose des écrits antérieurs, qui furent systématiquement détruits. Or, ce qui est dit de ce Waraqa est hautement révélateur, comme l’indique le dossier quasiment exhaustif réuni par Joseph Azzi sur ce personnage. On le présente comme un cousin de Khadidja, la première femme de Mahomet, ou parfois comme un cousin de celui-ci. Il pourrait être les deux, ce qui est même très vraisemblable. Il bénit leur mariage, et pour cause : il est dit « prêtre nasraniyy », ce qu’il ne faut pas traduire par prêtre chrétien mais bien par prêtre nazaréen. Nous l’avons vu, les judéo-nazaréens comptaient des prêtres parmi eux, très probablement des descendants de la tribu de Lévi ; et il y avait des consacrés hommes - ceux que le Coran nomme “moines” et qui sont dits se lever la nuit pour réciter des psaumes (III, 113 ; IV, 163 ; V, 82 ; XVII, 55.78 ; LXX, 20) -, ce qui est à comprendre dans une perspective eschatologique et guerrière : le salut du monde vaut que l’on s’y consacre totalement. De Waraqa, le commentateur Al-Buhari (mort en 870) donne la présentation suivante : « Cet homme, qui était cousin de Hadidja du côté de son père avait embrassé le nazaréisme avant l’apparition de l’islam. Il savait écrire l’hébreu et avait copié en hébreu toute la partie de l’Évangile que Dieu avait voulu qu’il transcrivît ». Il est de la tribu arabe des Qoréchites, mais « il est devenu nazaréen ». Il constitue donc un pont entre les deux peuples. Al Buhari a encore cette parole à la fois énigmatique et révélatrice : « Lorsque Waraqa est décédé, la révélation s’est tarie ». À l’époque, il n’est pas question du tout de « révélation », sinon de traductions en arabe des écrits judéo-nazaréens (comme par exemple quand le texte coranique évoque les « feuilles d’Abraham » - celles de Moïse étant tout simplement la Torah c’est-à-dire les cinq premiers livres de la Bible). Les feuillets coraniques les plus anciens seraient-ils de lui ? Pas nécessairement, car les feuillets sont des écrits de circonstance - essentiellement de propagande -, alors qu’il est plutôt dit le traducteur de textes beaucoup plus important. Dans l’avenir, la recherche y verra sans doute plus clair sur ces points. En tout cas, il ne dut pas être le seul à écrire pour les Arabes « devenus nazaréens »... ou à convaincre de le devenir ! Christoph Luxenberg a montré le substrat araméen qu’il fallait quelquefois supposer pour lire correctement - c’est-à-dire en corrigeant parfois le diacritisme - certains versets coraniques particulièrement obscurs ; il n’y a là rien d’étonnant si l’on pense que la langue maternelle du ou des auteurs est le syro-araméen, la langue habituelle des judéonazaréens. Ce qui est dit également dans les traditions islamiques de Zayd, qui aurait appris l’hébreu et l’écriture dans les écoles juives, est également très révélateur, même si c’est approximatif : ce « juif » de Yathrib a joué un certain rôle dans l’élaboration du proto-islam, qui était encore le pendant arabe très peu autonome du judéonazaréisme. Il faudrait mentionner encore les inscriptions qu’on dit, faute de mieux, « judéoarabes » et que l’on a trouvées il y a quelques années dans le désert du Neguev (sud d’Israël) ; Alfred-Louis de Prémare les a finement analysées. Il s’agit d’invocations en arabe adressées par exemple au Dieu de Moïse et de Jésus, et elles datent de l’enfance de Mahomet. Par comparaison, rien de tel n’existe dans la région mecquoise, et d’autant moins que ni cette écriture ni cette langue arabe n’y étaient employées.
Il est impossible d’évoquer tout ce que l’on trouve dans votre livre. Il révèle la figure historique de Mahomet, il montre qu’il faut le considérer surtout comme celui qui a réussi à unir plusieurs tribus arabes autour du projet judéo-nazaréen de la « conquête de la terre ». Pouvez-vous préciser davantage encore quelle était la croyance de ces judéo-nazaréens ?
Les judéo-nazaréens reconnaissaient Jésus non pas comme le Fils de Dieu venu visiter son peuple - pour reprendre une manière de parler très primitive -, mais seulement comme le Messie suscité par Dieu. Ce n’est pas de sa faute si ce dernier n’a pu établir le Royaume de Dieu : les Grands-Prêtres se sont opposés à lui et vont même vouloir le tuer. Mais Dieu ne pouvait permettre que son Messie fût crucifié, Il l’enlève donc à temps au Ciel, et c’est une apparence - un autre homme ou une illusion - qui est clouée sur la croix à sa place. Divers textes apocryphes disent cela bien avant le Coran (IV, 157), et certains imaginent même que c’est Simon de Cyrène, celui qui avait aidé Jésus à porter sa croix, qui se retrouve dessus par erreur. L’important, c’est que Jésus, lui, soit gardé “en réserve” au Ciel. Mais il ne peut redescendre que lorsque le Pays sera débarrassé de la présence étrangère et que le Temple sera rebâti par les vrais croyants. Pour que le salut du monde advienne, la recette est donc évidente : il suffira de prendre Jérusalem - qui doit devenir la capitale du monde - et de reconstruire le Temple. Le « Messie-Jésus » - une expression gardée dans le Coran que nous avons - imposera alors le Royaume de Dieu sur toute la terre. Là, on est loin des messianismes antérieurs à notre ère, qui étaient simplement nationalistes et religieux.
Plus encore que les circonstances favorables, ce qui est important, dites-vous, c’est la vision de l’Histoire et du salut qui fit l’unité entre les différents partenaires du projet. Nous n’en avons pas encore beaucoup parlé. Cette vision présente certains aspects intemporels que l’on pourrait retrouver aujourd’hui...
Il faut en dire un peu plus en effet. Dans cette vision, le salut n’est pas spirituel, il ne passe pas par une réforme intérieure que l’on nomme conversion. C’est un salut qui doit se réaliser au niveau de la société. Là où Jésus a parlé (rarement) de l’opposition entre les fils de ténèbre et les fils de lumière, ils imaginent une vision du monde où des appartenances communautaires distinguent et séparent ces deux groupes. D’un côté, il y a le Parti de Dieu, et de l’autre le reste de ceux qui, forcément, sont contre Dieu, ne serait-ce qu’à cause de leur ignorance. Cette manière de voir est toujours fondamentalement celle de l’Islam, qui ne peut concevoir le monde autrement que comme un affrontement du Dâr al-islâm, le domaine où l’Islam est instauré comme loi du pays et où les non musulmans sont soumis, et le Dâr al-harb ou domaine de la guerre c’est-à-dire les pays et institutions à conquérir puisque Dieu les a donnés aux musulmans. Mais ce furent d’abord les judéo-nazaréens qui cultivèrent cette idéologie en nourrissant ces prétentions conformément à ce qu’on lit dans leurs livres, on l’a vu précédemment. Notons que, au temps du communisme, les sectateurs de cette idéologie avaient une vision très semblable du monde, divisé dialectiquement entre monde socialiste et monde à conquérir. Le pire, c’est que tous ces gens croient sincèrement sauver le monde puisqu’ils pensent détenir la recette de son salut. Or, l’importance d’une telle fin justifie les moyens : que vaut la vie d’un homme, ou celle de quelques millions d’hommes, si le salut du monde est en jeu ? C’est là où se trouve la perversion totale de ces idéologies capables de transformer des hommes paisibles et pacifiques en assassins, comme on le voit toujours en de nombreux pays. Cette perversion tire sa force du christianisme. Simplement, celui-ci est contrefait. C’est le petit détail qui change tout, et qui passe parfois inaperçu du plus grand nombre (et parfois aussi de certains intellectuels). On connaît mal les guerres que firent Mahomet et Umar au départ de Yathrib pour soumettre toutes les tribus arabes à leur portée, mais les traditions musulmanes évoquent la ruse, la férocité, les meurtres. Les Arabes sont unis dans le projet de prendre Jérusalem et d’y reconstruire le Temple, qui sera « le Troisième », ainsi qu’il est annoncé dans les apocryphes messianistes des judéo-nazaréens. Ce qu’on appelle « le deuxième Temple » est celui qui avait suivi l’exil et qui, en fait, a été rebâti par Hérode le Grand et détruit en 70 par les Romains de Titus alors même qu’il était enfin terminé.
Vous n’êtes pas en train de me dire que les Arabes ont reconstruit le Temple juif à Jérusalem ?
Les sources que nous possédons s’accordent pour dire que, dès que Jérusalem est prise, « la Maison » est relevée ; et qu’il s’agit d’un cube ! Selon certains témoignages que je reprends dans mon livre, cette reconstruction aurait d’abord été le fait de « juifs » avant d’être celui des Arabes. On peut comprendre que les observateurs non avertis ne comprenaient bien ni ce qui se passait, ni qui exactement tirait les ficelles. En fait, c’est une espérance exprimée dans la sourate II qui, pour ainsi dire, se réalisait là : « Abraham (figurant les juifs et les Arabes unis) relèvera les assises (qui restent) de la Maison avec [l’aide d’]Ismaël. (figurant les Arabes) » (II, 127). Personne ne sera étonné d’apprendre que le cube hâtivement élevé avait les dimensions exactes du cœur du temple d’Hérode - il constitue la véritable « mosquée de Umar », l’octogone que l’on voit aujourd’hui l’ayant remplacée à la fin du VIIe siècle tout en gardant une dimension extérieure égale à celle du cube. Une source dit que Umar fit un sacrifice devant cette Maison relevée, ce qui nous renvoie évidemment aux sacrifices anciens faits au Temple, mais sans doute aussi aux pratiques judéo-nazaréennes dont l’Islam a d’ailleurs hérité vaguement au moins dans le rite du sacrifice du mouton lors de l’aïd el-kébîr ou dans l’interdiction du vin et de l’alcool en général.
Justement, existe-t-il des données permettant d’établir, au-delà des similitudes doctrinales entre le proto-islam et le judéo-nazaréisme, le sens de la collaboration de ces deux forces au moment de la prise de Jérusalem en 638 ? Quelle idée peut-on avoir des relations qui avaient existé entre Mahomet et ces judéo-nazaréens nourris de pensée eschatologique et apocalyptique ?
Il est clair que les juifs qui entouraient Mahomet n’étaient pas des Juifs rabbanites. À ce sujet, il suffit d’entendre attentivement ce que les traditions islamiques ont à nous dire sur le personnage de Waraqa. J’en profite pour dire que son rôle a dû être si important qu’il n’a pas pu être effacé, alors que tant de témoignages islamiques anciens, écrits ou non, disparaissaient - en fait tous ceux qui sont antérieurs à la biographie normative de Ibn Hichâm, composée et imposée deux siècles après la mort de Mahomet : c’est seulement par des citations que l’on connaît quelque chose des écrits antérieurs, qui furent systématiquement détruits. Or, ce qui est dit de ce Waraqa est hautement révélateur, comme l’indique le dossier quasiment exhaustif réuni par Joseph Azzi sur ce personnage. On le présente comme un cousin de Khadidja, la première femme de Mahomet, ou parfois comme un cousin de celui-ci. Il pourrait être les deux, ce qui est même très vraisemblable. Il bénit leur mariage, et pour cause : il est dit « prêtre nasraniyy », ce qu’il ne faut pas traduire par prêtre chrétien mais bien par prêtre nazaréen. Nous l’avons vu, les judéo-nazaréens comptaient des prêtres parmi eux, très probablement des descendants de la tribu de Lévi ; et il y avait des consacrés hommes - ceux que le Coran nomme “moines” et qui sont dits se lever la nuit pour réciter des psaumes (III, 113 ; IV, 163 ; V, 82 ; XVII, 55.78 ; LXX, 20) -, ce qui est à comprendre dans une perspective eschatologique et guerrière : le salut du monde vaut que l’on s’y consacre totalement. De Waraqa, le commentateur Al-Buhari (mort en 870) donne la présentation suivante : « Cet homme, qui était cousin de Hadidja du côté de son père avait embrassé le nazaréisme avant l’apparition de l’islam. Il savait écrire l’hébreu et avait copié en hébreu toute la partie de l’Évangile que Dieu avait voulu qu’il transcrivît ». Il est de la tribu arabe des Qoréchites, mais « il est devenu nazaréen ». Il constitue donc un pont entre les deux peuples. Al Buhari a encore cette parole à la fois énigmatique et révélatrice : « Lorsque Waraqa est décédé, la révélation s’est tarie ». À l’époque, il n’est pas question du tout de « révélation », sinon de traductions en arabe des écrits judéo-nazaréens (comme par exemple quand le texte coranique évoque les « feuilles d’Abraham » - celles de Moïse étant tout simplement la Torah c’est-à-dire les cinq premiers livres de la Bible). Les feuillets coraniques les plus anciens seraient-ils de lui ? Pas nécessairement, car les feuillets sont des écrits de circonstance - essentiellement de propagande -, alors qu’il est plutôt dit le traducteur de textes beaucoup plus important. Dans l’avenir, la recherche y verra sans doute plus clair sur ces points. En tout cas, il ne dut pas être le seul à écrire pour les Arabes « devenus nazaréens »... ou à convaincre de le devenir ! Christoph Luxenberg a montré le substrat araméen qu’il fallait quelquefois supposer pour lire correctement - c’est-à-dire en corrigeant parfois le diacritisme - certains versets coraniques particulièrement obscurs ; il n’y a là rien d’étonnant si l’on pense que la langue maternelle du ou des auteurs est le syro-araméen, la langue habituelle des judéonazaréens. Ce qui est dit également dans les traditions islamiques de Zayd, qui aurait appris l’hébreu et l’écriture dans les écoles juives, est également très révélateur, même si c’est approximatif : ce « juif » de Yathrib a joué un certain rôle dans l’élaboration du proto-islam, qui était encore le pendant arabe très peu autonome du judéonazaréisme. Il faudrait mentionner encore les inscriptions qu’on dit, faute de mieux, « judéoarabes » et que l’on a trouvées il y a quelques années dans le désert du Neguev (sud d’Israël) ; Alfred-Louis de Prémare les a finement analysées. Il s’agit d’invocations en arabe adressées par exemple au Dieu de Moïse et de Jésus, et elles datent de l’enfance de Mahomet. Par comparaison, rien de tel n’existe dans la région mecquoise, et d’autant moins que ni cette écriture ni cette langue arabe n’y étaient employées.
Il est impossible d’évoquer tout ce que l’on trouve dans votre livre. Il révèle la figure historique de Mahomet, il montre qu’il faut le considérer surtout comme celui qui a réussi à unir plusieurs tribus arabes autour du projet judéo-nazaréen de la « conquête de la terre ». Pouvez-vous préciser davantage encore quelle était la croyance de ces judéo-nazaréens ?
Les judéo-nazaréens reconnaissaient Jésus non pas comme le Fils de Dieu venu visiter son peuple - pour reprendre une manière de parler très primitive -, mais seulement comme le Messie suscité par Dieu. Ce n’est pas de sa faute si ce dernier n’a pu établir le Royaume de Dieu : les Grands-Prêtres se sont opposés à lui et vont même vouloir le tuer. Mais Dieu ne pouvait permettre que son Messie fût crucifié, Il l’enlève donc à temps au Ciel, et c’est une apparence - un autre homme ou une illusion - qui est clouée sur la croix à sa place. Divers textes apocryphes disent cela bien avant le Coran (IV, 157), et certains imaginent même que c’est Simon de Cyrène, celui qui avait aidé Jésus à porter sa croix, qui se retrouve dessus par erreur. L’important, c’est que Jésus, lui, soit gardé “en réserve” au Ciel. Mais il ne peut redescendre que lorsque le Pays sera débarrassé de la présence étrangère et que le Temple sera rebâti par les vrais croyants. Pour que le salut du monde advienne, la recette est donc évidente : il suffira de prendre Jérusalem - qui doit devenir la capitale du monde - et de reconstruire le Temple. Le « Messie-Jésus » - une expression gardée dans le Coran que nous avons - imposera alors le Royaume de Dieu sur toute la terre. Là, on est loin des messianismes antérieurs à notre ère, qui étaient simplement nationalistes et religieux.
Commentaire