Le 22 octobre 2015
L’agitation gronde de plus belle en Palestine avec pour conséquence, des dizaines de morts et de blessés. Qu’est-ce qui motive ces Palestiniens et, cette épuration ethnique « en mode ralenti », peut-elle être enrayée ? Une tentative de réponse par Marc Vandepitte.
En Palestine occupée la situation n’a jamais été calme, mais ces dernières semaines, l’agitation est à son comble. Chaque jour apporte son lot d’incidents et de manifestations avec des dizaines de morts et plus encore de blessés. L’agitation se répand de Jérusalem au reste des territoires palestiniens et des autres villes en Israël.
À l’origine : les tensions autour de la question de la mosquée Al-Aqsa et quelques provocations du côté juif. Les causes ne sont pas vraiment originales et la révolte les palestiniens n’est pas nouvelle non plus.
La première intifada date de décembre 1987 et a duré six ans. La deuxième explosait en 2000 pour se terminer en 2005. Mais qu’est-ce qui, inlassablement, pousse ces palestiniens à la révolte ?
Un pays sans peuple ?
Depuis la fin du XIXème siècle, les sionistes étaient à la recherche d’un “pays sans peuple” pour un “peuple sans pays”. La “Terre promise”, la Palestine était, pourtant, tout sauf un pays sans peuple. Après la seconde guerre mondiale, les Palestiniens représentaient à peu près 70% de la population locale. Pas de bol pour eux. Une guerre sanglante et quelques vagues terroristes en 1948-1949, devaient donner aux juifs d’Europe le Lebensraum dont ils avaient besoin.
Des centaines de villages furent détruits, dépeuplés. Des millions de Palestiniens mis en fuite vivent depuis dans des camps au Liban, en Syrie et en Jordanie. Ils sont aujourd’hui sept millions.
Les populations restées sur place ont été chassées vers deux enclaves : Gaza et la Cisjordanie. Gaza est, en fait, un grand camp de réfugiés hermétiquement fermé, qui compte 1,8 million d’habitants qui vivent agglutinés, sur une superficie d’à peine 150km². La Cisjordanie est complètement morcelée, comme on le voit sur la carte (1), et le territoire est continuellement grignoté par les colons juifs.
Pourquoi LES PALESTINIENS se révoltent ?
Qu’en serait-il si la Belgique était la Terre Promise ?
Il nous est difficile d’imaginer ce que cela signifierait. Pour en donner une idée, j’indique sur une carte de la Belgique, ce qu’il adviendrait de notre pays, si il était élu « Terre Promise ». Les zones en vert sont les territoires ou subsisteraient des enclaves « belges ». Dans le reste de la Belgique, 1,4 million de compatriotes vivraient comme des citoyens de seconde zone.
Notre pays ne posséderait pas d’ouverture portuaire sur la mer, évidemment pas d’aéroport, et la plupart des routes seraient bloquées. Nous n’aurions pas de monnaie propre, pas de contrôle sur notre économie ni sur les revenus fiscaux.
Pas de contrôle non plus sur la gestion de l’eau et des ressources énergétiques et même pas sur le registre de la population.
La militarisation de l’économie
Ces vingt dernières années, la situation des Palestiniens s’est, fondamentalement aggravée. Ceci est la conséquence essentiellement, des modifications de l’orientation économique d’Israël et ensuite, de l’immigration à partir de l’Union-Soviétique.
Dans les années 80 et 90, l’économie israélienne devait connaître des changements fondamentaux : l’effort se déplaçant de l’industrie traditionnelle et de l’agriculture vers les technologies de pointe, les télécommunications, les technologies du web etc (2). « Après l’éclatement de la bulle internet en 2000 et, un an plus tard, le onze septembre, vint une deuxième vague, en fait une militarisation « high-tech » de l’économie.
Un grand nombre d’entreprises se spécialisèrent dans la sécurité intérieure. Au niveau mondial, les entreprises israéliennes prirent la tête et, à ce jour encore, exerçent une position dominante dans ce secteur. Dans ce processus, les forces armées israéliennes ont joué le rôle d’incubateur[3]. »
La chute de l’Union-Soviétique, un véritable bain de sang pour la population, eut pour conséquence, l’émigration dans les années 90 de presque 1 million de juifs vers Israël. Plus d’un cinquième de la population juive de l’époque en Israël. En plus de cela, se marqua une importante immigration en provenance d’Asie et d’Afrique. Cette déferlante migratoire mit le marché du travail sens dessus dessous.
Avant cela, l’économie israélienne dépendait d’une main-d’œuvre ouvrière palestinienne bon marché. Des dizaines de milliers de Palestiniens faisaient quotidiennement la navette à partir des territoires occupés vers Israël où ils exerçaient un certain nombre de jobs peu rémunérateurs.
Avec la nouvelle vague d’arrivants, ceci ne fut plus nécessaire, les places étant prises par des immigrés soviétiques ou asiatiques. D’autant que parmi les centaines de milliers d’ex-Soviétiques se trouvaient des scientifiques de haut niveau qui trouvèrent tout naturellement leur place dans l’industrie israélienne de pointe. Du statut de travailleur à celui de cobaye pour l’industrie de la sécurité
Soudain, Israël n’avait plus besoin (ou alors beaucoup moins), des travailleurs palestiniens, bon marchés mais « encombrants », et ceux-ci furent dégradés jusqu’à ne plus faire partie que d’une population en surplus, marginalisée[4]. Ceci devait se traduire par une politique de « fermeture » : À partir de 1993, Israël verrouilla régulièrement, les territoires occupés, empêchant les Palestiniens de rejoindre leur lieu de travail.
À partir de 2002, cette « fermeture » se mua en un mur véritable de presque dix mètres de haut, à propos duquel s’éleva, mondialement, une vague de protestation qui rencontra l’indifférence du capital israélien dans la mesure où ce remue-ménage n’était que publicité gratuite pour l’industrie de la sécurité, à en croire Naomi Klein[5].
A la suite de cette politique de fermeture, l’économie de la Palestine s’effondra tandis que le chômage atteignait des sommets astronomiques. Aujourd’hui, 40% des jeunes palestiniens se retrouvent sans travail et sans perspective de travail pour l’avenir.[6]
Si les Palestiniens ne sont plus utiles en tant que main d’œuvre à bon marché, ils fournissent, par contre, un merveilleux terrain d’expérimentation pour l’industrie de la sécurité. Les dernières trouvailles en matière de sécurité ou les nouvelles techniques d’attaque sont testées sur la population palestinienne.
Les dernières guerres menées contre Gaza ont donc représenté de magnifiques « travaux pratiques » pour les nouvelles armes et pour les drones du complexe industriel militaire Israélien. Qui plus est, ils ont servi à ces entreprises pour engranger de nouveaux contrats [7]. Les grandes entreprises israéliennes sont devenues de plus en plus dépendantes des guerres et conflits en Palestine et dans la région. Le malheur des uns…
Vers une solution finale ?
L’agitation gronde de plus belle en Palestine avec pour conséquence, des dizaines de morts et de blessés. Qu’est-ce qui motive ces Palestiniens et, cette épuration ethnique « en mode ralenti », peut-elle être enrayée ? Une tentative de réponse par Marc Vandepitte.
En Palestine occupée la situation n’a jamais été calme, mais ces dernières semaines, l’agitation est à son comble. Chaque jour apporte son lot d’incidents et de manifestations avec des dizaines de morts et plus encore de blessés. L’agitation se répand de Jérusalem au reste des territoires palestiniens et des autres villes en Israël.
À l’origine : les tensions autour de la question de la mosquée Al-Aqsa et quelques provocations du côté juif. Les causes ne sont pas vraiment originales et la révolte les palestiniens n’est pas nouvelle non plus.
La première intifada date de décembre 1987 et a duré six ans. La deuxième explosait en 2000 pour se terminer en 2005. Mais qu’est-ce qui, inlassablement, pousse ces palestiniens à la révolte ?
Un pays sans peuple ?
Depuis la fin du XIXème siècle, les sionistes étaient à la recherche d’un “pays sans peuple” pour un “peuple sans pays”. La “Terre promise”, la Palestine était, pourtant, tout sauf un pays sans peuple. Après la seconde guerre mondiale, les Palestiniens représentaient à peu près 70% de la population locale. Pas de bol pour eux. Une guerre sanglante et quelques vagues terroristes en 1948-1949, devaient donner aux juifs d’Europe le Lebensraum dont ils avaient besoin.
Des centaines de villages furent détruits, dépeuplés. Des millions de Palestiniens mis en fuite vivent depuis dans des camps au Liban, en Syrie et en Jordanie. Ils sont aujourd’hui sept millions.
Les populations restées sur place ont été chassées vers deux enclaves : Gaza et la Cisjordanie. Gaza est, en fait, un grand camp de réfugiés hermétiquement fermé, qui compte 1,8 million d’habitants qui vivent agglutinés, sur une superficie d’à peine 150km². La Cisjordanie est complètement morcelée, comme on le voit sur la carte (1), et le territoire est continuellement grignoté par les colons juifs.
Pourquoi LES PALESTINIENS se révoltent ?
Qu’en serait-il si la Belgique était la Terre Promise ?
Il nous est difficile d’imaginer ce que cela signifierait. Pour en donner une idée, j’indique sur une carte de la Belgique, ce qu’il adviendrait de notre pays, si il était élu « Terre Promise ». Les zones en vert sont les territoires ou subsisteraient des enclaves « belges ». Dans le reste de la Belgique, 1,4 million de compatriotes vivraient comme des citoyens de seconde zone.
Notre pays ne posséderait pas d’ouverture portuaire sur la mer, évidemment pas d’aéroport, et la plupart des routes seraient bloquées. Nous n’aurions pas de monnaie propre, pas de contrôle sur notre économie ni sur les revenus fiscaux.
Pas de contrôle non plus sur la gestion de l’eau et des ressources énergétiques et même pas sur le registre de la population.
La militarisation de l’économie
Ces vingt dernières années, la situation des Palestiniens s’est, fondamentalement aggravée. Ceci est la conséquence essentiellement, des modifications de l’orientation économique d’Israël et ensuite, de l’immigration à partir de l’Union-Soviétique.
Dans les années 80 et 90, l’économie israélienne devait connaître des changements fondamentaux : l’effort se déplaçant de l’industrie traditionnelle et de l’agriculture vers les technologies de pointe, les télécommunications, les technologies du web etc (2). « Après l’éclatement de la bulle internet en 2000 et, un an plus tard, le onze septembre, vint une deuxième vague, en fait une militarisation « high-tech » de l’économie.
Un grand nombre d’entreprises se spécialisèrent dans la sécurité intérieure. Au niveau mondial, les entreprises israéliennes prirent la tête et, à ce jour encore, exerçent une position dominante dans ce secteur. Dans ce processus, les forces armées israéliennes ont joué le rôle d’incubateur[3]. »
La chute de l’Union-Soviétique, un véritable bain de sang pour la population, eut pour conséquence, l’émigration dans les années 90 de presque 1 million de juifs vers Israël. Plus d’un cinquième de la population juive de l’époque en Israël. En plus de cela, se marqua une importante immigration en provenance d’Asie et d’Afrique. Cette déferlante migratoire mit le marché du travail sens dessus dessous.
Avant cela, l’économie israélienne dépendait d’une main-d’œuvre ouvrière palestinienne bon marché. Des dizaines de milliers de Palestiniens faisaient quotidiennement la navette à partir des territoires occupés vers Israël où ils exerçaient un certain nombre de jobs peu rémunérateurs.
Avec la nouvelle vague d’arrivants, ceci ne fut plus nécessaire, les places étant prises par des immigrés soviétiques ou asiatiques. D’autant que parmi les centaines de milliers d’ex-Soviétiques se trouvaient des scientifiques de haut niveau qui trouvèrent tout naturellement leur place dans l’industrie israélienne de pointe. Du statut de travailleur à celui de cobaye pour l’industrie de la sécurité
Soudain, Israël n’avait plus besoin (ou alors beaucoup moins), des travailleurs palestiniens, bon marchés mais « encombrants », et ceux-ci furent dégradés jusqu’à ne plus faire partie que d’une population en surplus, marginalisée[4]. Ceci devait se traduire par une politique de « fermeture » : À partir de 1993, Israël verrouilla régulièrement, les territoires occupés, empêchant les Palestiniens de rejoindre leur lieu de travail.
À partir de 2002, cette « fermeture » se mua en un mur véritable de presque dix mètres de haut, à propos duquel s’éleva, mondialement, une vague de protestation qui rencontra l’indifférence du capital israélien dans la mesure où ce remue-ménage n’était que publicité gratuite pour l’industrie de la sécurité, à en croire Naomi Klein[5].
A la suite de cette politique de fermeture, l’économie de la Palestine s’effondra tandis que le chômage atteignait des sommets astronomiques. Aujourd’hui, 40% des jeunes palestiniens se retrouvent sans travail et sans perspective de travail pour l’avenir.[6]
Si les Palestiniens ne sont plus utiles en tant que main d’œuvre à bon marché, ils fournissent, par contre, un merveilleux terrain d’expérimentation pour l’industrie de la sécurité. Les dernières trouvailles en matière de sécurité ou les nouvelles techniques d’attaque sont testées sur la population palestinienne.
Les dernières guerres menées contre Gaza ont donc représenté de magnifiques « travaux pratiques » pour les nouvelles armes et pour les drones du complexe industriel militaire Israélien. Qui plus est, ils ont servi à ces entreprises pour engranger de nouveaux contrats [7]. Les grandes entreprises israéliennes sont devenues de plus en plus dépendantes des guerres et conflits en Palestine et dans la région. Le malheur des uns…
Vers une solution finale ?
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