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Quand l'Afrique se prend en main

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  • Quand l'Afrique se prend en main

    Le paysage politique du continent noir évolue. Au Sénégal, au Burkina Faso, en RDC, la contestation et les attentes démocratiques prennent de l'ampleur.

    Il fut une époque où la récente tentative de putsch du régiment de sécurité présidentielle (RSP), la garde prétorienne de l'ancien président burkinabé Blaise Compaoré, serait probablement allée à son terme. Chassé par la rue en octobre 2014, et depuis réfugié entre le Maroc et la Côte-d'Ivoire, le beau Blaise aurait alors certainement pris le chemin du retour sans que l'Union africaine (UA) ne manifeste plus qu'un courroux poli. Mais, en Afrique, les temps changent. Les sombres requiem des prophètes de malheur y ont cédé la place aux allègres symphonies des afro-optimistes. Non sans quelque raison : une croissance continue depuis deux décennies, entre 5 et 6 % sur l'ensemble du continent, le boom de la démographie (un quart de la population mondiale d'ici à 2050), le désendettement progressif et l'émergence d'une véritable classe moyenne regroupant désormais près d'un Africain sur trois. Tout irait bien en somme si les « transitions démocratiques » amorcées au milieu des années 80 n'y subissaient régulièrement de terribles crises aux visages multiples : ici la résistance acharnée des oligarchies corrompues nées des indépendances ratées, là l'installation durable d'un wahhabisme belliqueux et armé, tout à la fois facteur de chaos sécuritaire et, par contrecoup, d'immobilisme politique.

    VERS UN MODÈLE VIABLE ?

    L'idée même des acquis démocratiques peinerait d'ailleurs à s'imposer tant en maints pays du continent elle semble impuissante, ou à l'inverse inutile, pour impulser égalité et développement. Des exemples ? Ils foisonnent, du Rwanda de Paul Kagamé à la République démocratique du Congo (RDC) de Joseph Kabila. Ailleurs, les processus électoraux tiennent souvent du miroir aux alouettes, purement et simplement truqués ou objets de savants marchandages ethnico-claniques dont il ne sort jamais rien de bon. Et quelquefois le pire quand ils se greffent sur les antiques querelles foncières des populations, comme en Centrafrique. Ainsi se bâtirait cahin-caha la nouvelle Afrique : un miracle économique sans « révélation » démocratique. Spécialiste de la pensée sociopolitique africaine, le chercheur néerlandais Pieter Boele Van Hensbroek récuse ce schéma. « Et d'abord parce que ce sont les électeurs potentiels eux-mêmes qui dans de nombreux pays africains ont revendiqué des élections pluralistes. Beaucoup peuvent bien être déçus, mais bien peu suggéreraient qu'il faille en finir avec les fondamentaux de la démocratie libérale. »

    Qu'ont donc réclamé les milliers de manifestants descendus dans les rues d'Ouagadougou pour s'opposer à l'opération de restauration conduite par le général Gilbert Diendéré, l'âme damnée de Blaise Compaoré ? Ce dernier n'était pas n'importe quel despote. Pas le plus sanguinaire, ni le moins « social ». D'ailleurs son parti, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), reste ancré dans plusieurs provinces du pays, où il a tissé au fil du temps un étroit et très efficace réseau clientéliste. De surcroît, celui qui fut le médiateur attitré des conflits en Afrique de l'Ouest avait face à lui des opposants faibles, voire pour certains aussi peu crédibles que son propre régime. Mais, en voulant modifier la Constitution afin de briguer un nouveau mandat en 2015, Compaoré a commis la faute de trop. Celle que ne supportent plus des fractions grandissantes de la jeunesse urbaine africaine et de la société civile, connectées sur les réseaux sociaux planétaires, picorant ce qui leur sert dans les grands systèmes de pensée afin de construire un modèle viable à l'échelle de tout le continent.

    Au Sénégal, après deux mandats, Abdoulaye Wade voulut aussi passer en force pour un troisième qui ne semblait guère correspondre aux critères du droit. Le Conseil constitutionnel lui en donna quitus, mais la contestation conduite pendant des mois par le mouvement M23 et les rappeurs engagés de Y en a marre sapera progressivement sa légitimité et son image de vieux sage. Même si le parcours, passé et présent, de son tombeur (et ancien Premier ministre) Macky Sall suscite bien des réserves, la chute, sans trop de casse, de la maison Wade a requinqué l'espoir des alternances possibles dans une Afrique de l'Ouest longtemps perçue, à tort ou à raison, comme empêtrée dans les problèmes.

    Malgré la répression, les activistes du Balai citoyen d'Ouagadougou ont tenu bon leur pari de faire céder la soldatesque. Mais ils n'y sont parvenus qu'avec l'intervention décisive de la plupart des garnisons régulières, loyales au président de transition, Michel Kafando. Bonne nouvelle ? De prime abord, oui, car depuis les années 60, les armées nationales, se sont rarement portées au secours des revendications populaires. Si aujourd'hui les Burkinabés remercient leurs galonnés, leurs voisins ivoiriens ne savent, eux, à quel saint gradé se vouer. Réputée inféodée à Laurent Gbagbo du temps où celui-ci dirigeait le pays, l'armée ivoirienne passe désormais pour être entièrement sous la coupe du camp ouattariste.

    Bien que divisée, celle du Burundi semble avoir provisoirement maté la rue qui contestait au président Pierre Nkurunziza le droit de se présenter, lui aussi, à un troisième mandat tout aussi inconstitutionnel. Boycottée par l'opposition, jugée peu crédible par nombre d'observateurs, l'élection s'est néanmoins tenue en juillet et Nkurunziza l'a emporté avec un score sans grande signification. Depuis, les violences ont repris. Qu'en sera-t-il ailleurs ? L'obsession du troisième mandat, au prétexte que la stabilité n'a pas de prix en Afrique, semble ces jours-ci une maladie très répandue. Deux chefs d'Etat voisins, dont les pays forment le cœur de l'Afrique centrale, ne semblent visiblement pas décidés à en guérir. Au Congo Kinshasa (RDC), Joseph Kabila laisse planer le flou sur ses projets de révision constitutionnelle, ouvrant naturellement à une nouvelle candidature en 2016.

    De l'autre côté du fleuve, à Brazzaville, l'inexpugnable Denis Sassou Nguesso, 72 ans, au pouvoir depuis trente ans, a présenté un calendrier plus clair en annonçant la tenue d'un référendum le 25 octobre portant sur les mêmes objectifs. Dans les deux cas, prenant peu à peu le pas sur des oppositions usées, des mouvements citoyens appellent pareillement à la résistance. Certains attendent de l'ancienne puissance coloniale, sinon un soutien stratégique, du moins une neutralité bienveillante, misant notamment sur la prudence légendaire de François Hollande pour tout ce qui touche à l'Afrique, « où il n'y a que des coups à prendre ». Or, comme le souligne le journaliste de RFI Christophe Boisbouvier dans un ouvrage tout juste paru*, « si le chef de l'Etat a rompu avec une certaine Françafrique, celle du clientélisme et de l'affairisme, il n'a absolument pas coupé les ponts avec la Françafrique institutionnelle ».

    Et, comme en toute chose, il se montre avant tout pragmatique, voire opportuniste. Denis Sassou Nguesso a été reçu en grande pompe à l'Elysée et bénéficie, semble-t-il, de beaucoup d'attentions à Matignon. Les Y en a marre ou le Balai citoyen de Brazzaville sont prévenus. Le bouillonnement démocratique, c'est bien. Mais les intérêts nationaux, du moins tels qu'une certaine élite française est incapable de les penser différemment, c'est bien autre chose.


    marianne

  • #2
    Ils se prenderont en main lorsqu'ils dependeront moins de l'occident
    Il faut dans ce cas avoir son agriculture, son industrie et etre trés independants
    et surtout importer trés peu de l'occident, ça sera le plus important

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