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L'Arabie saoudite victime de sa politique pétrolière

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  • L'Arabie saoudite victime de sa politique pétrolière

    Il y a une dizaine de jours, Adel al-Joubeir, ministre des Affaires étrangères saoudien, est devenu le dernier représentant officiel en date à tenter de calmer les inquiétudes liées au déficit grandissant du royaume. Lors d'une conférence à Manama, la capitale du Bahreïn voisin, le ministre a soutenu que la situation actuelle était gérable.

    La situation en question, bien sûr, a été provoquée par deux décisions prises par l'OPEP à l'initiative de l'Arabie saoudite. La première visait à défendre sa part de marché mondiale en maintenant un rythme de production élevé (une stratégie décidée l'an dernier, pendant que les Américains s'asseyaient devant leur dinde le soir de Thanksgiving).

    Celle-ci a provoqué un glissement des cours du pétrole dans le monde -- glissement encore accentué par une seconde mesure.

    La décision suivante impliquait que Riyad ouvre grand les robinets de production, ce qui a exacerbé encore le déclin des prix. A l'époque, j'avais noté que les Saoudiens n'avaient pas eu le choix, étant donné ce qui était en train de se passer ailleurs dans les pays de l'OPEP.

    L'Arabie saoudite, même avec ses richesses en matières premières et ses réserves de devises, a exposé une bonne partie de ses recettes monétaires dans des échanges commerciaux en dehors de ses frontières. Dans un environnement où les prix sont bas, les revenus des exportations vers l'étranger seront constamment diminués, alors même que le coût de ses importations augmentera de manière disproportionnée.

    Pourquoi le pays le plus riche de l'OPEP rencontre-t-il de tels problèmes, et jusqu'à quel point la situation peut-elle empirer ?

    Tous les membres de l'OPEP ont souffert
    Etant donné que les membres du cartel dépendent tous des ventes de pétrole et que leurs économies ne sont pas diversifiées, l'effondrement de près de 60% des cours les a tous durement touchés. Défendre sa part de marché, c'est une chose, mais rendre les budgets inopérables en est une autre.

    Certes, ces pays couvrent, par leurs ventes, 40% des besoins mondiaux en pétrole. Mais ils doivent aussi importer à peu près toutes les autres marchandises dont ils ont besoin au niveau national. Cela nécessite une quantité croissante de devises (et de préférence fortes), étant donné que leur population augmente rapidement (alors que l'âge moyen baisse, aux alentours de 20 ans ou parfois même moins).

    Par conséquent, les pays les plus fragiles face à la baisse des cours du pétrole se sont contentés d'en vendre toujours plus, ce qui a fait à nouveau chuter le cours du brut et étiré le cycle de baisse.

    Des membres de l'OPEP comme le Venezuela, le Nigéria, la Lybie, l'Equateur et l'Iran connaissent un resserrement financier significatif.

    Chacun de ses pays a besoin d'un prix du brut nettement supérieur à 120 $ le baril pour mettre un terme à une paralysie fiscale grandissante.

    Mais actuellement, ce matin, le Brent cote 48 $ et le WTI 44 $...

    L'Arabie saoudite perd des milliards chaque semaine
    En perdant, de fait, le contrôle du mécanisme de fixation des prix au sein de l'OPEP, l'Arabie saoudite a tiré une leçon importante : "si vous ne parvenez pas à battre vos ennemis, rejoignez leur camp".

    Si l'Arabie saoudite, le Koweït et les Emirats Arabes Unis (EAU) sont les producteurs de l'OPEP les plus solvables, même eux connaissent des déficits budgétaires. Souvenez-vous : ils doivent importer la majorité de leurs produits de grande consommation. La rumeur affirme que les Saoudiens perdent chaque semaine des milliards de dollars dans des échanges monétaires.

    Reste qu'ils sont loin d'être obligés d'organiser des ventes de petits gâteaux. Comme l'affirment les représentants officiels, ils sont capables de supporter un déficit pendant plusieurs décennies.

    Mais pas aux taux prévus actuellement.

    Les déficits supportés par des Etats rentiers (qui récupèrent des profits grâce à leurs matières premières mais ne fournissent pas grand-chose en termes de développement à valeur ajoutée) tendent à se creuser, même si les pays sont en mesure de les compenser grâce à des stratégies liées au Forex. Un cercle vicieux émerge alors longtemps avant un éventuel défaut de paiement ou effondrement monétaire.

    L'Arabie saoudite se retire de ses investissements étrangers
    Deux décisions prises récemment par Riyad accentuent le dilemme du royaume coincé entre sa politique pétrolière et ses finances qui se dégradent.

    Tout d'abord, Riyad a commencé à retirer certains investissements de fonds d'investissement à l'étranger.

    Les ventes de pétrole dans le monde se font en dollar. Un producteur comme l'Arabie saoudite doit réguler ce qui pourrait devenir un afflux trop important de monnaie afin d'éviter une crise inflationniste. Il y parvient en investissant son argent en dehors du pays, avant de rapatrier les résultats de ces investissements au fil du temps, ou de les utiliser pour acheter de l'équipement ou d'autres produits d'importation clés en dehors du pays (ce qui limite la circulation de monnaie forte à l'intérieur du pays, et donc l'impact sur l'inflation).

    D'un autre côté, retirer les fonds investis à l'étranger ne signifie qu'une seule chose : cette monnaie forte est nécessaire pour faire face à des inquiétudes liées au change.

    S&P abaisse la note de Riyad
    Ensuite, Riyad a fait son retour sur les marchés obligataires en lançant une émission obligataire après des années d'absence. Les Saoudiens montraient les muscles de leur économie en refusant de faire appel au marché de dette. Ce n'est plus le cas.

    Une autre indication que le leader de l'OPEP, habituellement doté de beaux revenus, a été obligé de surveiller de près la balance des échanges monétaires... Ce qui n'est pas passé inaperçu sur le marché.

    Standard &Poor's a abaissé la note de l'Arabie saoudite de "AA-" à "A+" la semaine dernière, en disant également que les prévisions n'étaient pas bonnes. Comme prévu, le ministère des Finances saoudien a rapidement réagi, et dans des termes très vifs, qualifiant la décision de S&P de "réactionnaire" et affirmant qu'elle est liée à "des conditions fluides sur le marché plutôt qu'à des fondamentaux économiques."

    Personne n'est dupe. Les perspectives "économiques" de l'Arabie saoudite sont peu encourageantes en dehors de la vente de pétrole. Le pays ne produit quasiment rien d'autre, et l'industrie des services est largement fournie par des travailleurs étrangers.

    Le problème saoudien s'inscrit sur le long terme
    Jusqu'à ce qu'un plancher plus élevé (et plus solide) soit atteint par le brut, la situation saoudienne ne s'améliorera pas.

    Il faut dire que l'environnement n'est pas plus positif pour les producteurs de pétrole non-OPEP, comme la Russie, où des problèmes similaires ont durement atteint le rouble.

    Aux Etats-Unis, où la production croissante de pétrole de schiste a profondément modifié les attentes liées aux réserves disponibles dans le monde, la situation n'est pas la même. Le marché américain est peuplé par des producteurs privés et non par des entreprises contrôlées par l'Etat. Ici, un marché peut vraiment se développer et réguler les échanges.

    L'Arabie saoudite n'est certainement pas finie, et le pétrole continuera à lui procurer d'importants revenus. Mais sa tentative de diversifier l'économie n'est toujours pas couronnée de succès, et plus les prix du pétrole resteront bas longtemps, plus ses problèmes seront graves.

    Un brut est à moins de 50 $ le baril est un souci de court terme. On ne peut pas en dire autant du problème fondamental de l'économie saoudienne. Je vais garder un oeil sur la situation et vous donner d'avantage d'informations à mesure que cette situation suivra son cours.

    la quotidienne de la croissance
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