La japonaise ne viendra pas en Suisse de sitôt, faute de station-service où faire le plein d’hydrogène. Pourtant, cette solution pourrait bien être celle de l’avenir.
Lundi commence la Conférence de Paris sur les changements climatiques (COP21). Et si l’hydrogène pouvait participer à la limitation à 2 degrés de la hausse des températures? Toyota a présenté sa Mirai comme une «vraie» voiture, entendez une de celles que l’on peut acheter. Ce ne sera pas le cas n’importe où. Et en particulier pas en Suisse où il faudra faire une commande spéciale, car il n’existe aucun réseau de distribution. Du côté de Hambourg, il en va tout autrement. La ville a décidé de se débarrasser autant que possible des énergies fossiles. Sur le flanc des bus assurant les transports publics figure un énorme «H2», symbole de l’hydrogène. Si une collectivité publique suisse le voulait, une flotte de véhicules à hydrogène pourrait lui être livrée: la Toyota, mais aussi la FX Clarity de Honda ou la ix35 FuelCell de Hyundai, déjà présente dans le pays.
Miser sur le renouvelable
Le raisonnement qu’ont fait les autorités de Hambourg est simple: produire de l’électricité écologique ne sert à rien sans stockage. Le recours à des batteries exige des investissements énormes et pose un sérieux problème de recyclage. La seule autre manière de conserver efficacement l’énergie électrique s’appelle l’hydrogène. Près de Hambourg, d’immenses champs d’éoliennes marines bénéficient des vents constants du bord mer. Or, la demande d’électricité étant sujette à des hauts et des bas, il serait normal de stopper ces hélices lorsque le besoin est faible. Coûteux et compliqué. Alors qu’en les laissant tourner et en profitant du courant pour la catalyse, on produit de l’hydrogène, on stocke ce vecteur d’énergie afin de l’utiliser quand on en a besoin. Les transports publics ont été convertis, les collectivités et même les privés peuvent s’y mettre.
En testant la Toyota Mirai à Hambourg, nous avons eu l’occasion de faire le plein. La station-service ressemble à n’importe quelle autre. Ceux qui ont déjà vu une pompe distribuant du gaz naturel ne seront pas surpris. Pour l’hydrogène, les précautions sont un peu les mêmes. Les concepteurs sont allés jusqu’à imaginer l’automobiliste distrait tentant de partir avec le pistolet attaché à sa voiture. Impossible avec la Toyota, et même si c’était le cas, les valves dans le flexible empêchent toute fuite. Sur le plan de la sécurité, il n’y a absolument aucune dangerosité à craindre de cette technologie. Actuellement, plus de 600 millions de véhicules remplis d’un liquide inflammable, et dont les gaz sont explosifs, circulent dans le monde. Les incidents sont extrêmement rares. Avec l’hydrogène, le souci ne sera pas plus grand: il peut brûler, mais n’explose pas.
Au volant de la Mirai
La nouveauté de Toyota se présente sous des atours pour le moins inédits. Les commentaires vont de «original» à «affreux», le design a des audaces inconnues sur la planète automobile actuelle. Peu importe, en fait, puisque le nombre de Mirai ne devrait pas dépasser quelques milliers d’exemplaires; aux Etats-Unis, l’objectif est d’en vendre 3000 jusqu’en 2017. En Europe, cela dépendra précisément des flottes de collectivités ou d’entreprises. A l’intérieur, les commandes et les différents affichages sont clairs et ne tombent pas inutilement dans le gadget. Les sons que l’on perçoit sont pratiquement tous artificiels, afin de ne pas trop déstabiliser les occupants, à l’extérieur un léger chuintement est censé éviter de surprendre les piétons.
Le couple du moteur arrache la voiture de sa position arrêtée sans délai. Les accélérations sont franches, plus fortes à basse vitesse que sur route ou autoroute. La Mirai n’est pas légère, mais le centre de gravité est très bas, favorisant une tenue de route plate et tranquille.
La voiture à hydrogène existe, elle fonctionne parfaitement, des concurrentes sont prêtes aussi. Qui, en Suisse, se lancera, en amorçant la construction d’un réseau de distribution? Ce serait un pas majeur pour la protection du climat.
(Le Matin) ch
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