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Géopolitique. Le Caucase du Sud otage du conflit russo-turc

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  • Géopolitique. Le Caucase du Sud otage du conflit russo-turc

    Arène historique des confrontations entre la Russie et la Turquie, l’Arménie, la Géorgie et l’Azerbaïdjan se retrouvent dans une situation inattendue et complexe, où chaque initiative politique peut être lourde de conséquences.

    Deux semaines après qu’un avion russe a été abattu par l’armée turque, les tensions entre les deux pays ne donnent aucun signe d’apaisement. La rencontre du 3 décembre entre les ministres des Affaires étrangères russe et turc n’a débouché sur aucun progrès, et Vladimir Poutine, le même jour, dans son allocution annuelle au Conseil de la Fédération, n’a envisagé aucune réconciliation à court terme avec Recep Tayyip Erdogan.

    Coincés entre les deux, les pays du Caucase du Sud – Géorgie, Arménie, Azerbaïdjan – s’inquiètent.

    L’Arménie, alliée de Moscou

    “Nous sommes à un tournant de l’histoire”, titre par exemple le quotidien arménien Golos Armenii. Il explique que “les tensions entre la Russie et la Turquie concernent directement l’Arménie” et qu’elles remettent sur le tapis la “question arménienne” – un ensemble de revendications historiques liées au génocide de 1916 et à la conquête de terriroires arméniens par le régime turc au début du XXe siècle.

    Certains parlent même d’une partition de la Turquie, avec la création d’un Etat kurde et le retour au sein de l’Arménie de ses territoires occidentaux, ce qui ne deviendrait possible qu’en cas de grande guerre russo-turque.”

    Cette guerre n’aura pas lieu, explique Golos Armenii, car l’objectif de Moscou n’est pas de faire la guerre, mais de “revenir durablement dans cette région”. Néanmoins, si la “désintégration” de la Turquie ne paraît pas être à l’ordre du jour, “les fissures s’approfondissent et, dans vingt ans, la carte politique de la Turquie aura peut-être changé”.



    L’Arménie est au côté de la Russie, poursuit le journal : forte de sa “riche expérience historique d’avant-poste de la civilisation chrétienne, et appelée à défendre ses frontières depuis des siècles”, elle fait donc partie de cette civilisation “contre laquelle une guerre est menée”. Elle héberge sur son territoire une base militaire russe, et doit avant tout “focaliser son attention sur le bon entretien de son armée”, car, dans une situation critique, la Turquie n’hésitera pas à “jouer la carte du Haut-Karabakh” – c’est-à-dire à relancer le conflit autour de cette enclave arménienne séparatiste sur le territoire azerbaïdjanais, indépendante de fait depuis 1994. Le Haut-Karabakh est l’épicentre d’un conflit gelé entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, ces deux pays étant tacitement soutenus – l’un par la Russie, l’autre par la Turquie.

    Enfin, Golos Armenii rappelle que l’Arménie est entourée de deux pays ennemis, la Turquie et l’Azerbaïdjan (ce dernier “étant un prolongement de la civilisation turque” ). Il faut donc que le “réveil” soudain de la Russie au sujet de la Turquie entraîne un “réveil au sujet de l’Azerbaïdjan”, pays en proie “au salafisme, véritable bombe à retardement dans le Caucase du Sud”.

    Bakou se propose comme médiateur

    De son côté, l’Azerbaïdjan, situé entre Ankara et Moscou, se trouve “dans une situation difficile”. En effet, “sur fond de difficultés économiques et de prix bas du pétrole, ce pays [pétro-gazier] a besoin de coopérer avec la Turquie comme avec la Russie” pour maintenir une relative stabilité, observe le site EurasiaNet.

    Pour l’instant, Bakou, adepte d’une politique étrangère multivectorielle, reste “prudent” : il s’est proposé comme médiateur entre les deux pays. La Russie possède en effet “des leviers de pression politique et économique” sur son voisin du Sud. Lequel craint la contamination islamiste qui pourrait venir de Syrie et de Turquie. Enfin, s’il s’aventurait à adopter une position “pro-Turquie agressive”, l’Azerbaïdjan devrait aussi faire face à l’Iran voisin, allié de Moscou sur la question syrienne.

    La Géorgie devra choisir son camp

    Quant à la Géorgie, partenaire privilégiée de la Turquie, ouvertement pro-américaine, candidate à l’entrée dans l’Otan et en froid avec Moscou depuis une dizaine d’années, elle se trouve dans une position des plus délicates. “Le centre de gravité du conflit pourrait se retrouver sur notre territoire”, présage le quotidien de Tbilissi Sakartvelo da Msoplio, qui souligne le “facteur de l’Adjarie”, une république autonome du sud du pays, peuplée de Géorgiens musulmans et subissant une forte influence économique et politique de la Turquie. “Sur notre territoire, s’inquiète le journal, œuvrent des représentants des organisations turques radicales.”

    Autre menace pour Tbilissi : en cas de fermeture des détroits du Bosphore et des Dardanelles par la Turquie, la Russie pourrait lui demander de lui ouvrir un corridor vers la Syrie. Il faudra alors “prévoir les réactions des Etats-Unis et de la Turquie”. Rester “mesuré” avec Moscou comme avec Ankara est la bonne “réaction”, mais “seulement à court terme”. A plus long terme, la Géorgie “devra choisir son camp”.

    le courrier international
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