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Comprendre l’affaire des « miliciens » de l’Oregon en 4 questions

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  • Comprendre l’affaire des « miliciens » de l’Oregon en 4 questions

    Le Monde | 04.01.2016

    Une manifestation qui se voulait pacifiste, en soutien à deux exploitants d’un ranch incarcérés, s’est transformée, en quelques jours, en une confrontation entre des « miliciens » armés et le gouvernement fédéral américain autour du quartier général du refuge faunique national de Malheur, dans un coin reculé et enneigé de l’Oregon.

    Comment en est-on arrivé là ?

    Manifestation de soutien à Dwight et Steven Hammond, à Burns, dans l’Oregon, le 2 janvier.
    Une manifestation rassemble près de trois cents personnes, le 2 janvier, à Burns, petite ville du comté de Harney, dans l’Oregon. Ces hommes, pour la plupart exploitants de ranch ou paysans de l’Oregon et d’Etats voisins, viennent soutenir deux des leurs : Dwight Hammond, 73 ans, et son fils de 46 ans, Steven.

    Un juge a ordonné récemment que les deux hommes, qui ont déjà fait de la prison en 2013 pour avoir incendié volontairement des terres fédérales, retournent derrière les barreaux pour quatre années supplémentaires, car il estime que la peine initiale (un an pour le fils, trois mois pour le père) était trop clémente.

    Une décision que les manifestants ont considéré comme une injustice flagrante envers les accusés, et au bénéfice du gouvernement fédéral américain, contre qui ils se battent depuis plusieurs décennies à propos de l’utilisation des terres gouvernementales dans cette région.

    Survivance de la conquête de l’Ouest, le gouvernement est propriétaire de gigantesques espaces de territoire dans les onze Etats de l’Ouest – 81 % dans le Nevada, 53 % dans l’Oregon, 28,5 % dans l’Etat de Washington –, contre 4 % en moyenne pour le reste des Etats-Unis.

    Qui sont les miliciens qui occupent le bâtiment ?

    C’est un groupe disparate d’exploitants agricoles, d’éleveurs aux idées antigouvernementales et d’hommes armés se définissant eux-mêmes comme des miliciens qui se détache de la manifestation pour se rendre au refuge de Malheur, à 50 kilomètres de la ville de Burns.

    Ils entrent par effraction dans le principal bâtiment du parc, alors que celui-ci était fermé et qu’aucun fonctionnaire n’était présent. Depuis, ils occupent le bâtiment, fermant de fait l’accès à un parc où vivent notamment des chevaux sauvages et des antilopes. L’entrée était gardée par des hommes à bord de véhicules, d’autres montant la garde sur une tour. La police locale et le FBI étaient présents, mais pas aux abords du parc.

    On ne connaît pas le nombre exact de miliciens dans l’enceinte du parc. La presse américaine parle de plusieurs dizaines, tandis que certains miliciens évoquent le chiffre de cent cinquante. Selon OPB, une chaîne locale de l’Oregon, les occupants viennent de l’Utah, du Nevada, de l’Idaho ou du Texas.

    Parmi eux figurent Ammon et Ryan Bundy, fils de Cliven Bundy, exploitant de ranch du Nevada qui avait pris les armes et menaçait d’affronter la police en 2014, refusant de s’acquitter d’une taxe pour laisser ses bovins paître sur des terres dont l’Etat est propriétaire.

    A l’époque, des dizaines de personnes s’étaient aussi rendues dans les ranchs des Bundy, un mélange d’antifédéralistes, de complotistes, d’adorateurs de Dieu et d’opposants à Barack Obama que l’on retrouve dans l’Oregon. A leur tête, les fils Bundy, principaux communicants qui répondent aux journalistes et diffusent des vidéos sur leurs pages Facebook.

    Quelles sont leurs revendications ?

    Standing for the rights of men & women
    BREAKING! SHARE! Standing for the rights of Men & Women. Calling all freedom loving people to come to Harney County Oregon, come to the Malhuer Wildlife Refuge. The people are finally getting some good use out of a federal facility.

    Posted by Bundy Ranch on Saturday, January 2, 2016
    Ainsi qu’ils le formulent dans leurs vidéos et à travers les médias, Ammon et Ryan Bundy exigent la privatisation des terres dont le gouvernement fédéral est propriétaire, et notamment du refuge de Malheur, qui, selon eux, prend l’espace de cent ranchs depuis le début du XXe siècle.

    « Ils continuent d’augmenter sa taille aux dépens des propriétaires de ranch et des mineurs. »
    Dans des propos rapportés par CNN, ils appellent les habitants du comté de Harney, et au-delà, à rejoindre leur mouvement, pour que soient rétablis « les droits constitutionnels du peuple » contre la « tyrannie » du gouvernement.

    « Ce n’est pas une décision que nous avons prise à la dernière minute. Les gens doivent savoir que nous sommes dans un système où le gouvernement se targue de défendre les droits des citoyens, mais où ils les retournent contre nous. (…) Nous sommes ici parce que les citoyens se sont fait malmener depuis trop longtemps. »
    En réalité, le groupe de miliciens, qui n’en est pas à sa première action médiatique contre les méfaits de l’Etat fédéral, est avant tout en train d’utiliser les condamnations judiciaires contre les Hammond à leur profit. Comme le rappelle Vox :

    « Il s’agit d’un petit groupe d’individus qui voyagent à travers le pays en se mêlant à diverses controverses locales contre le gouvernement fédéral, souvent à propos de l’utilisation des terres. Cette fois-ci, ils se sont attachés à la cause de Dwight et Steven Hammond. »

    Or les deux intéressés ont rapidement pris leurs distances avec leurs défenseurs supposés. Selon Alan Schroeder, un de leurs avocats, aucune des personnes impliquées dans la prise du refuge de Malheur ne parle au nom de ses clients. Ces derniers sont en route vers la Californie pour se rendre aux autorités.

    Dave Ward, shérif du comté de Harney, voit dans cette action très médiatique une réalité bien plus politique qu’humanitaire :

    « Ces hommes du comté de Harney, qui revendiquent leur appartenance à une milice soutenant les éleveurs locaux, ont en réalité des motivations tout à fait différentes qui sont de tenter de renverser le gouvernement local et fédéral dans l’espoir de lancer un mouvement à travers les Etats-Unis ».
    Combien de temps cette situation peut-elle durer ?

    Ammon Bundy l’a assuré dans une interview à The Oregonian : « Nous prévoyons de rester des années. » Les miliciens ont répété qu’ils n’envisageaient aucune violence, n’hésitant pas dans le même temps à user de menaces. Selon un journaliste de The Oregonian qui s’est rendu sur place, Ryan Bundy s’est dit prêt « à tuer et à être tué si nécessaire pour défendre son combat contre l’Etat ».

    I talked to Ryan Bundy on the phone again. He said they're willing to kill and be killed if necessary. #OregonUnderAttack

    — IanKullgren (@Ian Kullgren)
    En attendant de pouvoir « résoudre pacifiquement la situation », la police de l’Oregon, en liaison avec le FBI, est présente autour du refuge, mais ne s’en approche pas trop. Les autorités refusent de donner davantage de détail, « pour des raisons de sécurité », et demandent aux gens de se tenir à l’écart de la zone. Les miliciens, eux, doivent donner une conférence de presse dans la soirée de lundi.
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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