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Sofiene Ben Hamida : Sauvons la Tunisie, ses ailes prennent du plomb

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  • Sofiene Ben Hamida : Sauvons la Tunisie, ses ailes prennent du plomb

    publié le 10/01/2016 15:59

    Par Sofiene Ben Hamida




    L’invité vedette du congrès du Nidaa est incontestablement le leader du parti Ennahdha, Rached Ghannouchi, hué naturellement, presque par instinct, au début de son intervention pour être applaudi à la fin par calculs, tant personnels que politiques. Dans son intervention, le chef des islamistes a estimé que Ennahdha et Nidaa sont les deux ailes de la démocratie tunisienne. Il se voulait conciliant, rassurant et amical. Mais pour beaucoup, ces affirmations font peur et expliquent à elles seules les ratés du système politique tunisien basé sur une alliance hypocrite et contre nature. Un avion peut-il prendre de l’altitude quand l’un de ses moteurs est en feu et que son autre moteur veut imposer son propre rythme ? Un oiseau peut-il voler quand ses ailes prennent du plomb ?

    Il est vrai que les dirigeants de Ennahdha ont développé un nouveau discours depuis quelques mois, plus moderne et plus démocratique. Cela faisait suite à leur coalition gouvernementale avec Nidaa en février dernier. Mais ce nouveau discours traduit-il une conviction réelle et définitive chez les islamistes ? Est-il une renonciation au projet de l’Etat théocratique prôné par les islamistes depuis toujours et qui continue à être porté par leurs bases aujourd’hui ? Le leader islamiste Rached Ghannouchi lui-même, qui invoque et s’approprie le mouvement réformateur tunisien et qui n’hésite pas à embrasser en public le fondateur du Nidaa, Béji Caïd Essebsi, avait déclaré auparavant que Essebsi était le représentant de la corruption et du despotisme. Son parti avait décidé et annoncé publiquement en 2012 qu’il refuse de participer à des rencontres politiques ou à des émissions télés à côté de représentants du Nidaa. Il a fallu du temps pour convaincre les islamistes, arrimés aujourd’hui au consensus national, de participer au processus du dialogue national.

    Certains diront que les islamistes peuvent, comme tous les autres partis politiques, changer de positions et de discours s’ils décident de changer de ligne politique. C’est totalement vrai. Sauf que les islamistes nous ont habitués au double discours sans jamais renier leur projet d’islamisation de l’Etat. Il y a quelques années, en 2005, un certain 18 octobre, ils se sont ralliés aux différentes formations de gauche pour défendre la démocratie et les libertés individuelles et publiques, avant de se retourner farouchement contre cette même gauche, la traitant d’apostate et de mécréante. Néjib Chebbi, Hamma Hammami et autres, en gardent sûrement encore quelques souvenirs, et même quelques séquelles.

    Quant au Nidaa, il avait été créé en 2012 pour équilibrer le paysage politique tunisien suite aux élections du 23 octobre 2011. Le succès foudroyant qu’il a rencontré auprès d’une large frange de Tunisiens est dû à son attachement aux valeurs du bourguibisme, que Ghannouchi a refusé de lui souhaiter la paix à son âme, de la modernité, de la liberté et de la démocratie. Béji Caïd Essebsi, lui-même avait déclaré que « le Nidaa et Ennahdha sont deux lignes parallèles qui ne se rencontrent jamais ». C’était, parait-il, uniquement pour les besoins de la campagne électorale car tout de suite après son élection à Carthage, il décide de s’allier contre toute attente au parti Ennahdha et de tourner le dos à ses engagements précédents.

    La déception des Tunisiens qui ont voté pour Nidaa, mais surtout celle de ses partisans, ne va pas s’arrêter là. Les querelles fratricides au sein du Nidaa, l’absence d’une gestion démocratique de ses affaires, la volonté d’imposer le fils du fondateur du parti à la tête de sa direction, les dérives opportunistes et affairistes chez certains de ses dirigeants finiront par consacrer la déception générale et dénuder le Nidaa de son aura de départ. Désormais, Nidaa ne semble plus porter de projet autre que celui de se maintenir au pouvoir et de servir les intérêts d’une frange de sa direction.

    Il y a plus de quatre décennies, Béji Caïd Essebsi avait estimé, en claquant la porte de son parti destourien, qu’un parti incapable d’appliquer les règles de la démocratie interne est incapable de promouvoir la démocratie dans le pays. A-t-il tiré les leçons depuis ?
    Dernière modification par jawzia, 10 janvier 2016, 20h50.
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