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Du DRS à la robe noire

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  • Du DRS à la robe noire

    Écrit par Nordine Azzouz

    Les avocats du général Hassan ont fermé leurs téléphones portables. S’ils ont agi ainsi et s’ils se sont abstenus de répondre aux sollicitations de la presse, c’est parce qu’ils ont compris qu’il n’y a pas eu jusqu’ici dans l’affaire de l’ex-patron du contreterrorisme, qui a écopé d’une peine de cinq années de prison, meilleure défense que celle qui a été livrée avant-hier soir par le général Toufik.
    La lettre que l’ancien patron du DRS a publiée dans la presse bat à plate couture tous les systèmes de défense que le général Hassan peut avoir après sa condamnation par le tribunal d’Oran. Elle respire de la volonté obstinée du chef militaire qui n’entend pas abandonner en rase campagne l’un de ses hommes à genoux et le sachant innocent des charges qui sont portées contre lui.
    Cette lettre-là transpire surtout d’une connotation presque dreyfusarde et du sentiment d’être écrite par un grand officier qui vole au secours d’un autre grand officier dont l’honneur est bafoué. Elle est l’exemple du premier «J’accuse» des annales politico-militaires algériennes dont l’auteur, un ex-maître espion, davantage à l’aise dans l’ombre, se met en lumière et se drape de la robe noire pour demander que le général Hassan soit rendu à sa liberté.
    En prenant sa plume et en signant sa plaidoirie, le général Toufik a pressenti le trop-plein d’interprétations que ses mots allaient provoquer dans une Algérie politico-médiatique très friande de supputations et de spéculations. Il a prévenu du mal auquel cette réaction peut conduire et de l’effet désastreux qu’elle peut avoir sur le sort de son frère d’armes, mais en vain.
    On se demande d’ailleurs s’il l’a fait de bon cœur, car lorsqu’on se présente comme lui comme un grand témoin entravé et rejeté par le tribunal militaire d’Oran, qui a usé de «toutes les voies réglementaires et officielles» avant de recourir à la presse pour faire connaître ses «appréciations» sur le dossier du général Hassan, il y a des hypothèses dont il est malheureusement, et paradoxalement, très difficile d’en faire l’économie. En dépit d’avoir prévenu...
    A voir et entendre ce qui a circulé hier et avant-hier dans le tout Alger politico-médiatique, il y a celle de la pression sur les magistrats qui vont à nouveau juger en appel le général Hassan. Il y a celle de l’avertissement adressé au chef de l’Etat et au chef d’état-major de l’ANP, supposés pouvoir faire quelque chose pour sortir de sa prison son ancien adjoint et ex-patron du contre-terrorisme, d’une mauvaise et peu souhaitable crispation au sein de l’armée. Peut-être...
    Mais en attendant que tout cela se confirme ou pas – et il y a de fortes chances que ce ne soit là que de faillibles probabilités, il y a tout de même une vérité indiscutable : le général Toufik, par sa lettre, a montré qu’il est bel bien à la retraite et que ce temps est, pour lui, celui de la différence entre ce qu’il était - un chef du renseignement craint par tout ce qui bouge dans ce vieux et turbulent pays – et ce qu’il est aujourd’hui : un homme sorti de la profession et du mythe du secret pour rejoindre celui des colonnes brouillonnes des journaux...
    Certes pour la bonne cause puisqu’il défend, selon lui, un vaillant soldat qui a payé de son corps et de ses hommes durant les années rouges du terrorisme islamiste, mais pour signaler aussi, encore une fois, la fin d’une époque : celle dite des généraux janviéristes et celle d’une certaine Algérie où le pouvoir était considéré comme prétorien. La grande leçon de la lettre du général Toufik, en fait, est de montrer que l’Algérie est enceinte d’une nouvelle ère et d’un nouveau paradigme, mais dont on ne voit pas nettement quels vont en être les véritables acteurs historiques et comment vont-ils l’assumer. Une époque se meurt, une autre peine à s’affirmer. Cela s’appelle la crise, disait Gramsci.

    reporters.dz
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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