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Géopolitique du terrorisme :l’Occident est coupable

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  • Géopolitique du terrorisme :l’Occident est coupable

    L’analyse de l’islam fondamentaliste ne peut se faire sans revenir aux origines du phénomène et ses multiples formes, ainsi que sur les parcelles géographiques où son implantation cristallisa des enjeux géopolitiques et géostratégiques pour les puissances mondiales. Sous cet angle, l’étude du phénomène permettra de se passer des images de propagande, à savoir celles des massacres, des décapitations, des explosions, des lynchages et de l’impitoyable conduite des dirigeants, pour approcher scientifiquement la réalité des organisations fondamentalistes ainsi que leurs moyens, leur fonctionnement, leurs liens et les possibles enjeux que dégage leur existence sur un territoire donné et à un temps donné.

    Il est capital de revenir sur l’histoire tumultueuse de la relation qu’avait entretenue l’Occident avec les organisations fondamentalistes des années quatre-vingt pour élucider, tout d’abord, l’amalgame que suscite «la guerre contre le terrorisme» et ses différents enjeux géostratégiques, d’une part, et, d’autre part, l’empowerment du fondamentalisme dans les différents conflits au Moyen-Orient. En effet, lors des guerres par procurations que se sont livrées les deux superpuissances URSS et les États-Unis, l’Islam politique, connu pour son rejet catégorique du communisme, jouera le rôle de source incubatrice pour le recrutement des combattants en Afghanistan. Faut-il rappeler que l’essor du djihad pendant la guerre d'Afghanistan est dû en grande partie aux bailleurs de fonds saoudiens, soutenus par la CIA et d’autres services secrets occidentaux ? Cette première vague d’organisations fondamentalistes fut baptisée par l’administration Reagan «combattants de la liberté»… Il s’agissait à l’époque pour les États-Unis d’une opération clandestine, «covert action», consistant à apporter de l’assistance aux opposants du régime prosoviétique et, contrairement à ce que les historiens ont retenu, la décision américaine a été prise bien avant l’intervention de l’ex-URSS en Afghanistan, comme l’avait affirmé dans ses mémoires l’ancien directeur de la CIA, Robert Gates. À ce niveau, Zbigniew Brezinski, conseiller à l’époque de Jimmy Carter, a exprimé lors d’une interview son satisfecit d’avoir écrit au Président que «nous avons maintenant l’occasion de donner à l’ex-URSS sa guerre du Vietnam». Les enjeux de cette instrumentalisation de l’Islamisme radical ont été évoqués à l’époque, mais le machiavélisme politique l’avait alors emporté finalement. Rien n’était plus important pour les Occidentaux que de voir le bloc soviétique s’effondrer, en niant toute dimension mondiale à la menace que peut représenter un jour le fondamentalisme islamique. Ces propos ne peuvent être tolérés par le responsable américain qui les a qualifiés de «sottises» avant d’ajouter : «C’est stupide : il n’y a pas d’islamisme global» («Nouvel Observateur», 20 janvier 1998). Cette alliance de fait, sur le territoire afghan, entre l’impérialisme américain et l’islamisme, fut le fer de lance d’une collaboration stratégique et discrète en matière de guerre, ouverte sur le plan économique à travers l’Arabie saoudite (groupe Ben Laden et consorts). Les résultats spectaculaires de cette collaboration ont entrainé une concentration occidentale remarquable sur ces organisations, leurs structures, leurs idéologies pour mesurer la quintessence d’une possible instrumentalisation à grande échelle, à travers leur implantation dans le monde arabe, principalement pour faire face au nationalisme de certains régimes et aux formations de gauche en plein essor.

    -Cela explique le soutien apporté par les régimes arabes vassaux des États-Unis aux différentes formations des frères musulmans, dans le but d’affaiblir la gauche et les partis nationalistes. Ainsi, partout dans le monde arabe, des autorisations furent accordées sans aucun contrôle, pour la création d'associations religieuses ou de bienfaisance, de collecte de fonds. Les services ont fermé les yeux sur leurs réseaux de financement en provenance du Golfe. Les mosquées sont devenues le fief de l’islam politique où la prédication et l’enseignement des préceptes du radicalisme connurent une promotion sans précédent, aidés et assistés en cela par le renforcement des études islamiques dans le programme de l’enseignement, au détriment de la philosophie, la sociologie, la psychologie et les matières scientifiques jugées comme une menace pour l’ordre établi.

    Après la chute du bloc soviétique et les mutations géostratégiques qui s’ensuivirent, une nouvelle ère géopolitique s’imposa. L’Amérique ayant soldé la guerre froide à son compte, ses idéologues et théoriciens, ainsi que ses centres d’études stratégiques n’ont pas tardé à mettre en œuvre une nouvelle doctrine des relations internationales, à la mesure de sa superpuissance. Ainsi, et comme l’histoire en témoigne, l’empire ne peut rester «sans ennemi» et comme les États-Unis ont eu recours historiquement au concept de l’«ennemi utile» pour évoquer «les raisons d’État», que ce soit sur le plan interne, à des fins de construction d’opinion publique ou pour justifier les expéditions militaires ou l’emploi de la force à travers la planète, il n'est pas question de se départir de cette industrie de la «fabrication de l’ennemi» que l’Amérique à habilement développée au fil des années.

    La «menace islamique» décolle dans la conscience collective de l’Occident, comme d’ailleurs celle du «péril jaune», que cette génération d’avatars-culturalistes – avec à leur tête Samuel Huntington et Francis Fukuyama – a présentée comme un danger pour la sécurité nationale. Le génie des initiateurs de cette stratégie consiste, dans les faits, à fouiller dans les ténèbres du passé noir des musulmans pour découvrir le secret de l’obscurantisme dans lequel est plongée la société musulmane, à travers le rejet de l’universalisme et l’égocentrisme culturel des élites. L’objectif que se sont fixé ces théoriciens est de nourrir le fondamentalisme sur les deux rives, à travers la haine et le mépris de l’autre.

    - Ainsi, l’arsenal médiatique mondial a contribué à la montée au créneau du fondamentalisme. L’opinion internationale, autrefois attirée par les questions tiers-mondistes, les combats des peuples pour la récupération des richesses de leurs pays et les conflits de puissances, ne repère plus la réalité à travers les images et du fait du choix sélectif grandissant des informations. Depuis lors, les guerres ne sont plus appréhendées sous l’angle des intérêts, mais sont présentées plutôt sous forme de conflits d’ethnies, de races, de religions, de couleurs, de confessions, bref de chocs de civilisations. Les guerres de l’ex-Yougoslavie, en passant par les guerres africaines, pour arriver aux guerres moyen-orientales, à savoir l’Irak, la Syrie et le Yémen, ne sont plus la conséquence de combats classiques pour le contrôle des richesses, mais sont plutôt interprétées dans le cadre préétabli par l’Occident, celui de la nouvelle doctrine des relations internationales, dont l’objectif est de détourner les peuples de leurs causes légitimes. L’image est devenue une arme de destruction massive, capable de déclencher les tensions ethniques et religieuses entre les peuples sur des bases sectaires nourrissant la haine et qui mènent vers la déstabilisation politique des États. La «lutte contre le terrorisme» n’a fait que renforcer ce dernier, dans la mesure où les États-Unis et ses alliés se sont servis de l’épouvantail du terrorisme pour mener leurs expéditions militaires en Afghanistan et en Irak à des fins d’hégémonie politique et de contrôle des zones pétrolières du Moyen-Orient et de l’Eurasie. Le combat pour l'éradication du terrorisme, voire celle d’Al-Qaïda et ses sœurs, promu par le Président américain G.W. Bush suite aux attentats du 11 septembre, s’est transformé avec Obama en une «guerre de contrôle», surtout en Irak et en Syrie. Les intérêts géostratégiques font qu'une éventuelle défaite de l’armée syrienne s’avère souhaitable et souhaitée par l’administration américaine afin de renforcer ses alliés dans la région.

    Ainsi, pour une belle prise stratégique, les États-Unis reportent leur bataille promise face à Daech, dans l’objectif d’affaiblir le régime de Bachar Al Assad. Cette stratégie d’Empowerment s’est renforcée discrètement au début du déclenchement de la crise syrienne, puis ouvertement après les défaites successives de «l’armée syrienne libre». En effet, les États-Unis ont calqué l’expérience de l’Afghanistan, tout d’abord, à travers une politique de partage des rôles entre ses alliés, puis à travers l’endiguement du régime au sein des organisations internationales. Ainsi, la Turquie fut le pays du rassemblement des combattants en provenance des quatre coins de la planète, à l’aide de plusieurs services secrets et délégations diplomatiques étrangères. Quant aux financements, le Qatar et l’Arabie saoudite assurent ouvertement le ravitaillement et la logistique aux différentes organisations combattant le régime. Les liens idéologiques rattachant ces organisations à l’Arabie saoudite constituent une courroie de transmission du Wahhabisme transatlantique. Ne s’agit-il pas là d’une grande interrogation sur le rôle admis par l’Occident à l’Arabie saoudite en tant que parrain historique du fondamentalisme, ou simplement d’une stratégie d’influence à géométrie
    variable ?


    le matin
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