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La désertification n'est plus une fatalité

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  • La désertification n'est plus une fatalité

    Agronomes, climatologues et écologues multiplient les recherches sur les franges désertiques. Au prix d'investissements importants, les sols savent se régénérer.
    Si, pour tous les spécialistes, la désertification est la conjonction de conditions climatiques difficiles et du développement démographique, pour les écologues, la désertification est le produit de la diminution ou de la destruction du potentiel biologique des terres. Une cause réversible.

    La désertification forme un cercle vicieux avec la pauvreté. Plus on est indigent, plus on surexploite l'environnement et moins les économies de subsistance des zones désertiques fonctionnent. » Pour Mélanie Requier-Desjardin, économiste au CNRS spécialiste du sujet, il est possible de briser cette lente progression du désert, à condition de réintégrer certaines sciences dans les analyses économiques. C'est précisément le sujet d'une remarquable exposition (*) organisée par le CNRS à l'occasion de la Fête de la science 2006 et dehttp://www.algerie-dz.com/forums/newthread.php?do=newthread&f=21#
    Decrease Size l'année de la désertification décrétée par l'ONU. L'occasion de souligner la palette des disciplines scientifiques engagées contre ce phénomène qui touche 40 % des terres disponibles. Et pas seulement en Afrique, puisque l'Asie contient un tiers des déserts du monde.

    Pour tous les spécialistes, la désertification est essentiellement la conjonction de conditions climatiques difficiles et du développement démographique. C'est aux franges des déserts que ce phénomène doit être étudié. « L'homme a longtemps su bien vivre sur ces marges », rappelle Mélanie Requier-Desjardin.

    Les terres concernées sont à 80 % des zones pastorales et agricoles très dépendantes de la météorologie, de l'eau. « Les sécheresses des années 1970 et 1980 ont forcé les bergers à vendre leur bétail pour rejoindre les villes. Or ce sont précisément ces populations qui détiennent le savoir de la bonne gestion des ressources naturelles », regrette l'économiste. Pour elle, il y a malheureusement encore trop peu d'études faites sur le lien entre migration et désertification.

    Pour les écologues, la désertification, c'est la diminution ou la destruction du potentiel biologique des terres. James Aronson, du Missouri Botanical Garden, explique qu'à partir d'un certain seuil de dégradation, le mécanisme est irréversible, le sol ne contient plus un stock suffisant de graines, par exemple. Il faut alors employer la manière forte et la restauration devient très coûteuse. Plusieurs exemples montrent pourtant que c'est possible. Dans les pays tempérés, une ancienne mine de phosphate en Floride est devenue une exubérante forêt en vingt ans. James Aronson, qui travaille aussi à Montpellier, se souvient qu'une partie des Alpes du Sud était devenue désertique. Un plan d'action énergique de l'ONF a permis à la forêt d'y reprendre.

    Actuellement, quelques chantiers font figure d'exemple en Afrique. Des chercheurs allemands au Burkina Faso ont évité des migrations dans la plaine centrale qui nourrit 800 villages. Un projet italien au Niger est aussi salué pour son efficacité. Parfois, certaines populations ont elles-mêmes développé des techniques agronomiques efficaces comme celle du zaï au Sahel. Elle consiste à creuser 4.000 trous par hectare et à y ajouter de la matière organique.

    Les agronomes occidentaux ont d'ailleurs dépassé depuis longtemps leur première approche productiviste des zones semi-désertiques. La révolution verte n'a pas fonctionné, estime Jean-Philippe Tonneau, du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad).

    Désormais, la priorité n'est pas de changer le milieu aride, mais d'adapter les cultures et leurs pratiques. Le satellite Spot sert ainsi aux chercheurs à étudier l'impact des irrigations sur le niveau d'eau de la plaine du Haouz au Maroc. Les données sont corrélées à l'expérience du terrain : on sait que l'eau des oasis doit être gérée comme une ressource rare. Le Cirad étudie aussi la régénération naturelle des plantes semi-désertiques dont la reproduction sexuée est souvent impossible, menant à des stratégies originales qui pourraient servir pour l'agriculture.

    Etudier la mousson

    Les climatologues proposent un autre angle d'attaque contre le désert. « A Niamey au Niger, il pleut autant qu'à Paris sur un an mais en seulement trois mois », rappelle Jan Polcher, de l'Institut Pierre-Simon-Laplace, qui poursuit : « C'est donc ce que l'on appelle une agriculture sans deuxième chance. Depuis trente ans, on mesure de fortes fluctuations des pluies africaines dont l'imprévisibilité complique la vie des paysans. » C'est pourquoi plusieurs instituts de climatologues ont lancé le programme d'étude de la mousson africaine Amma. Les paysans ne savent jamais quand planter leurs graines qui ont ensuite besoin d'eau pour pousser. Si la pluie arrive tard, le semis se développe mal, si la mousson part trop tôt, les plantes n'atteignent pas la maturité. Si les pluies marquent une pause, les cultures se dessèchent. Cette année a été particulièrement pénible pour l'Afrique subsahélienne. La mousson était anticipée pour le 23 juin, les paysans ont semé en avance mais les semis n'ont pas reçu l'eau attendue. Un autre faux départ a eu lieu et ce n'est que la troisième plantation qui a profité des pluies du 15 juillet.

    Jusqu'ici les prévisions météorologiques ont échoué à renseigner les populations. « On ne peut pas anticiper la saison des pluies à plus de vingt-quatre heures. Les grands systèmes convectifs de la mousson arrivent de façon spontanée », déplore le chercheur. D'ici à 2010, les 500 chercheurs du programme espèrent porter à quelques jours la visibilité des modèles. Initialement constitué de trois stations météo, le réseau d'observation en compte aujourd'hui une vingtaine. Cet été, cinq avions de recherche, trois navires et 300 chercheurs ont été déployés sur le terrain. La science prêche enfin dans le désert.

    MATTHIEU QUIRET

    Les echos
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