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Flux massifs de Marocains vers la Libye Coup de gueule d’Alger face au silence de Rabat

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    Flux massifs de Marocains vers la Libye
    Coup de gueule d’Alger face au silence de Rabat

    L’affaire du transit massif de Marocains par l’Algérie n’est toujours pas classée. Menée par les services de sécurité, l’enquête révèle l’existence d’une filière de recrutement de centaines de «combattants» par les groupes terroristes activant en Libye. Cette exportation de «djihadistes» ne semble pas inquiéter les autorités marocaines, lesquelles ont refusé de prendre les mesures adéquates.


    A la fin du mois de janvier, les autorités algériennes ont renvoyé plus de 270 Marocains sur le point de s’envoler vers la Libye à partir de l’aéroport d’Alger. L’affaire aurait pu être traitée, dans la discrétion la plus totale, entre les deux pays, si ce n’est le nombre important de ces «passagers», la récurrence de ces «voyages» et surtout la réaction passive des autorités marocaines. En effet, la présence d’autant de Marocains à bord de deux vols à destination de Tripoli ne peut que susciter des interrogations.

    Les contacts entrepris avec le royaume chérifien, à travers son ambassade à Alger, pour le rapatriement de ses ressortissants n’ont «abouti à rien», révèlent des sources bien informées, qui ajoutent : «Les Marocains ne semblaient pas inquiétés par la gravité des informations fournies par l’Algérie sur ce flux massif vers la Libye…» Il ne s’agit pas de touristes et encore moins de Marocains résidant en Libye. «L’enquête menée par les services de police a levé un véritable lièvre.

    Il s’avère que l’ensemble des voyageurs, âgés entre 24 et 26 ans, ont embarqué de Casablanca, à destination d’Alger, avec une continuation sur Tripoli. Ils sont tous détenteurs d’un billet sans retour, acquis auprès de la même agence, domiciliée en Libye», expliquent nos interlocuteurs. Ces détails, disent-ils, «ne peuvent que susciter des soupçons, d’autant que quelques jours auparavant, et en une semaine seulement, 600 autres Marocains, avaient rejoint la capitale libyenne, dans les mêmes conditions». Visiblement, ces «expéditions» de Marocains ne sont pas les premières.

    Lors d’une conférence de presse tenue le 8 février, le directeur de la police des frontières a avancé le nombre de 250 ressortissants marocains, âgés entre 24 et 26 ans, interceptés durant le mois de décembre 2015, à l’aéroport d’Alger, alors qu’ils devaient embarquer à destination de Tripoli, avec des billets sans retour. Aucun parmi eux n’a pu justifier les motifs de son voyage, ce qui a poussé à leur expulsion vers leur pays, après que leurs autorités aient été informées, selon le responsable de la police des frontières.

    Durant l’année 2015, plus de 500 Marocains ont rejoint Tripoli, dans les mêmes conditions. Ce flux massif n’a cessé de prendre de l’ampleur au point de faire réagir les autorités algériennes, qui avaient été alertées par les services de sécurité, qui estiment ces «expéditions» comme étant des filières de recrutement pour le compte de Daech, cette organisation criminelle qui a fait de la Libye son troisième territoire après l’Irak et la Syrie.

    Les plus optimistes des experts évaluent à 5000 le nombre de «combattants», en majorité des étrangers, composant ce groupe qui contrôle la partie la plus riche en pétrole de la Libye. Parmi les Maghrébins, les Marocains viennent en seconde position avec 1500 éléments. Certains sont venus directement du Maroc et d’autres étaient déjà enrôlés dans les rangs de Daech en Syrie, avant de rejoindre la Libye. Ce flux massif de Marocains via l’Algérie a suscité la méfiance des autorités algériennes, qui ont commencé à renvoyer chez eux tous les voyageurs à destination de Tripoli sans justificatif. Cela n’a pas empêché ce flux, nous dit-on, puisque quelques semaines après plus de 600 jeunes sont arrivés dans les mêmes conditions.

    Plus de 600 marocains ont rejoint la Libye en une semaine

    Les autorités algériennes ont décidé de ne plus permettre de telles expéditions. Avec l’interception des 273 autres Marocains vers la fin du mois de janvier dernier, l’Algérie a décidé de suspendre la ligne aérienne Alger-Tripoli. L’ambassadeur du Maroc à Alger a été saisi pour qu’il informe ses autorités de ce flux massif de ses ressortissants et surtout pour rapatrier les 273 Marocains bloqués à l’aéroport d’Alger, parce qu’ils n’avaient pas de billet de retour. N’ayant pas reçu de réponse du royaume chérifien, l’Algérie a pris la décision d’assurer, à ses frais, leur rapatriement par voie aérienne.

    Selon des sources sécuritaires, la suspension de la ligne aérienne Alger-Tripoli «était inévitable» parce qu’elle était utilisée également par des ressortissants tunisiens, mais avec un nombre moins important que celui des Marocains.
    «Ce sont les conditions dans lesquelles ces derniers rejoignent Tripoli, qui laissent planer le doute quant à l’objectif de ces flux, mais aussi la responsabilité directe ou indirecte des autorités marocaines.

    De tels déplacements en nombre aussi important ne peuvent passer inaperçus par les services marocains, qui sont en état d’alerte depuis plus d’une année en raison des craintes de voir les 3000 de leurs ressortissants, qui étaient en Syrie et en Irak, retourner chez eux. Il est clair qu’il s’agit de filières bien organisées ayant les moyens de recrutement», expliquent nos sources. Celles-ci insistent beaucoup sur «le danger de la propagation de Daech qui est à nos portes.

    Laisser des flux aussi massifs renflouer les rangs de cette organisation, c’est prendre le risque de voir ces derniers revenir par la voie terrestre pour frapper l’Algérie. L’attaque contre le site gazier de Tiguentourine à In Aménas est encore vivace dans les esprits. Aucune armée au monde, aussi bien équipée soit-elle, ne peut rendre ses frontières hermétiques, surtout lorsqu’elles sont longues de plus de 9000 km et partagées avec des pays en déconfiture», avertit une source militaire.

    Le danger est vu aussi sous un autre angle. «Ces flux massifs inquiètent parce qu’ils démontrent les capacités de recrutement de Daech, mais aussi les moyens lui permettant de ramener de la chair à canon de contrées de plus en plus lointaines. L’Algérie n’est vraiment pas à l’abri d’une incursion terroriste», note un autre interlocuteur. Toutes les sources sécuritaires avec lesquelles nous avons discuté ont exprimé leur crainte de voir la Libye se transformer en un Irak ou une Syrie, avec un regroupement de plus en plus important d’individus étrangers enrôlés par le groupe terroriste.

    Tous craignent également une intervention étrangère qui, selon eux, «va aggraver terriblement la situation et mettra l’Algérie dans une position des plus dangereuses». Des craintes qui ont poussé les autorités à interdire l’utilisation de l’Algérie comme transit, pour ceux qui veulent rejoindre la Libye, à travers la suspension de la ligne aérienne qui la relie à Tripoli. Officiellement, le Maroc ne cesse de réaffirmer son engagement à lutter contre le terrorisme, notamment international. C’est d’ailleurs à ce titre que sa législation a été revue en 2015, pour introduire des peines de prison contre les Marocains auteurs d’actes ou de tentatives de ralliement d’un foyer de tension où activent des organisations terroristes.

    Cette révision est intervenue après les informations fournies par les Nations unies et quelques pays occidentaux, faisant état du retour de combattants étrangers enrôlés dans les rangs de Daech en Syrie et en Irak, vers leur pays d’origine, mais aussi la convergence d’importants contingents vers la Libye, favorisée par la situation chaotique qui prévaut sur le terrain. Reste néanmoins, cette réaction des autorités marocaines, assez troublante qui s’apparente à de la passivité, face aux flux massifs de leurs ressortissants vers la Libye via l’Algérie.

    L’on comprend cette déclaration de Abdelkader Messahel, ministre des Affaires maghrébines, déclarant à la suite du rapatriement des 273 Marocains : «Le contexte sécuritaire actuel particulièrement sensible impose la plus grande vigilance et exige le renforcement de la coopération entre les pays de la sous-région.» Une manière d’attirer, publiquement, l’attention des autorités marocaines et de les mettre en garde contre toute «négligence», pour ne pas dire manipulation.

    Salima Tlemçani-el watan-
    Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre.
    (Paul Eluard)
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