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Mauritanie : la démocratie au bout du fusil

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  • Mauritanie : la démocratie au bout du fusil

    Moins de deux ans après avoir pris le pouvoir par les armes, le colonel Vall, qui s'oppose à toute utilisation de l'islam en politique, va le rendre, doté d'une Constitution et d'un Parlement issu d'élections libres.


    En Afrique, le pouvoir ne réserve pas que de mauvaises surprises. La Mauritanie, Etat charnière de 2 millions de kilomètres carrés entre le Maghreb et le «continent noir», peuplé de 3 millions d'habitants seulement, vient de vivre un automne démocratique que le printemps 2007 ne devrait pas ternir, bien au contraire. Des élections législatives s'y sont tenues les 19 novembre et 3 décembre derniers. Leur régularité a été unanimement saluée par les observateurs étrangers, aussi bien européens qu'américains. Ce scrutin a mis sens dessus dessous un système monopolistique et sclérosé et favorisé une vague d'élus indépendants et... de femmes. En mars prochain, une élection présidentielle devrait apporter la dernière pierre à un édifice que l'on pourrait citer en exemple dans la région. Car cette révolution par les urnes se produit sous l'égide d'une junte qui a pris le pouvoir grâce à un putsch le 3 août 2005. A l'époque, les militaires avaient chassé, sous les bravos de la foule, le président Maaouya Ould Sid Ahmed Taya, au pouvoir depuis vingt et un ans.

    Le chef des putschistes, le colonel Ely Ould Mohamed Vall, président du Comité militaire pour la justice et la démocratie (CMJD), a fait mentir tous ceux qui ne croyaient pas à la «transition» vers la démocratie qu'il proclamait à son arrivée. Il s'était donné deux ans : le contrat devrait être rempli à la fin mars 2007, à l'issue du scrutin présidentiel.

    On prête à l'ancien ministre des Affaires étrangères Hubert Védrine cette expression aussi cynique que clairvoyante : «Il faut bien que les dictateurs gagnent des élections, sinon ils n'en organiseraient jamais.» Le colonel Vall a fait mieux que ça : non seulement il n'a pas créé de parti à sa botte mais il a juré à plusieurs reprises qu'il ne se présenterait pas à la présidentielle. En tout cas, pas à celle de 2007, justement pour ne pas «risquer» de connaître un plébiscite réservé aux autocrates. Cet ancien des écoles d'enfants de troupe françaises, qui fut major de l'académie militaire marocaine de Meknès, n'a que 54 ans ; il peut attendre la prochaine élection.

    Au printemps 2007, Ely Ould Mohamed Vall devrait rendre le pouvoir en bien meilleur état qu'il ne l'a trouvé. Car il a fait rédiger une Constitution très inspirée de celle de la Ve République française. Le père de ce texte fondamental n'est autre que l'ancien recteur de la faculté de droit de Nouakchott, Mohamed Lemine Ould Dahi. Celui-ci a eu le souci de favoriser les alternances démocratiques à la tête de l'Etat pour éviter ces présidences «à vie» qui sont monnaie courante en Afrique. Cet éminent juriste s'est également appliqué à conjurer toute aventure théocratique. La Constitution mauritanienne stipule en effet que personne n'a le droit de faire de la politique au nom de l'islam et de la religion. «Notre peuple n'a jamais eu cette mentalité et nous n'accepterons pas que des groupes puissent utiliser l'islam et la religion contre les Mauritaniens», a déclaré le président Vall dans une interview à RMC Moyen-Orient lors de sa visite à Paris en septembre dernier. Dans un Etat où les fanatiques de l'application de la charia ont déjà sévi, une telle prise de position en faveur d'une pratique religieuse modérée paraît plus que salutaire.

    Les premières élections libres que la Mauritanie ait connues ont comblé les attentes du président Vall. Les héritiers de l'ex-parti présidentiel ont été laminés et n'ont remporté que quelques sièges. Deux groupes peuvent revendiquer la victoire en ayant pratiquement fait jeu égal : les indépendants (dont le colonel Vall avait encouragé l'avènement) d'un côté, et l'ex-opposition au président Ould Taya, de l'autre. En outre, 17 femmes, soit près d'un siège sur cinq, font leur entrée au Parlement mauritanien.

    Aujourd'hui, les esprits chagrins craignent que le système électoral voulu par le président Vall n'ait conduit à l'instabilité. Il semble pourtant que ce choix soit délibéré, comme si le chef de l'Etat avait voulu contrebalancer le coup d'Etat militaire par un scrutin le plus ouvert possible. L'hebdomadaire Jeune Afrique écrivait récemment que la seule personnalité en mesure de rassembler un paysage politique aussi éparpillé, c'était Ely Ould Mohamed Vall lui-même. Mais cet appel du pied, qui n'est pas le premier, devrait rester sans effet. Le colonel putschiste ne cesse de répéter qu'il ne veut pas du fauteuil présidentiel. Peut-être y recommandera-t-il quelqu'un ?


    je reve d une dictature eclairee qui remettra l algerie sur les rails
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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