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Syrie, Irak, Liban... Comment réinventer un nouveau Proche-Orient

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  • Syrie, Irak, Liban... Comment réinventer un nouveau Proche-Orient

    Une carte régionale qui n’impliquerait pas de modifications des frontières internationales et correspondrait aux vœux des peuples, pourrait être l’ébauche d’un nouveau Proche-Orient.

    Les précédents n’incitent guère à recommencer. Que ce soit à Vienne ou à Versailles, lorsque les diplomates se sont essayés à redessiner des frontières, ils n’ont fait que susciter de nouvelles guerres et révolutions.

    On ne touche pas aux cartes sans danger. C’est si vrai que « l’intangibilité des frontières » était devenue, depuis 1945, un principe sacré du droit international auquel la décolonisation elle-même n’avait que rarement dérogé mais le fait est, en même temps, que c’est l’éclatement d’Etats reconnus qui est au cœur des crises proche-orientales.

    La Syrie, l’Irak et le Liban ne sont plus que des Etats fictifs, avec des représentants à l’ONU et des ambassades à travers le monde mais sans plus d’unité sur le terrain. Le Liban est si divisé entre ses sunnites, ses chiites et ses diverses communautés et partis chrétiens qu’il n’arrive même plus à s’élire un président. Il n’y a plus un mais trois Irak, celui des chiites majoritaires qui trustent les institutions nationales mais n’a pas plus de vraie prise sur celui des Kurdes, devenus indépendants de fait, que sur celui des sunnites, passés sous la coupe de Daech ou divisés en territoires tribaux.

    Quant à la Syrie en guerre, théoriquement gouvernée par un président appartenant à la branche alaouite du chiisme, elle n’est plus qu’une mosaïque de fiefs sunnites, kurdes et chiites qui sont tous contrôlés par leurs propres armées - celles du pouvoir, de Daech, des Kurdes et des si nombreuses composantes de la majorité sunnite insurgée.

    Ces Etats ont, en un mot, vécu
    Dessinés sur les décombres de l’Empire ottoman par la Grande-Bretagne et la France qui s’étaient partagées le Proche-Orient à l’issue de la Première Guerre mondiale, rien ne les ressuscitera plus car leurs communautés ne veulent plus coexister et ne l’avaient, en réalité, jamais souhaité. L’Irak et la Syrie n’avaient tenu que sous la férule des puissances coloniales puis d’impitoyables dictatures. Le Liban n’était resté uni, jusqu’à la moitié des années 70, qu’en vertu de l’alliance des sunnites et des chrétiens maronites aujourd’hui rendue vaine par l’émergence des chiites et le soutien militaire que leur apporte l’Iran.

    Ces éclatements sont d’autant plus irréversibles que l’Iran chiite et l’Arabie sunnite se disputent une prééminence dans ces trois Etats au nom de la défense de leurs coreligionnaires et, avant tout, de leurs intérêts de puissances régionales.

    Non seulement les frontières du Liban, de l’Irak et de la Syrie sont d’ores et déjà effacées mais le Proche-Orient ne trouvera de paix durable que le jour où ses communautés ethniques et religieuses auront les moyens de se gouverner par elles-mêmes dans la définition d’un équilibre régional entre Riyad et Téhéran.

    Cela ne se fera pas de sitôt. La tâche est au moins difficile mais, pour peu qu’on y mette de la créativité et s’inspire des idées en germe en Syrie, elle n’est pas impossible.

    Trouver une forme juridique à un nouveau Proche-Orient
    Avec l’épuisement du pouvoir et de l’insurrection, le recul de Daech et la volonté commune des Américains et des Russes d’imposer un règlement, non seulement l’espoir d’un compromis syrien s’affirme mais ses grandes lignes s’esquissent. L’idée serait à la fois de constituer un gouvernement de transition avec des hommes du régime et de l’opposition, de lui confier tous les pouvoirs, y compris militaires, qui sont jusqu’à présent dévolus à Bachar al-Assad et de faire de la Syrie un Etat confédéral dans lequel chacune des communautés disposerait de la plus large autonomie au sein de ses propres cantons.

    Les frontières internationales de la Syrie ne seraient ainsi pas modifiées. La Syrie se survivrait à elle-même mais uniquement comme cadre internationalement reconnu d’un Commonwealth de länder, cantons, généralités ou Etats bénéficiant de leurs propres institutions.

    C’est déjà le cas du Kurdistan irakien. Les Kurdes de Syrie viennent de faire un pas dans cette direction en proclamant une « fédération » de leurs régions. Le sud et le nord du Liban sont déjà des territoires respectivement chiite et sunnite dont les liens avec Beyrouth sont devenus très relatifs. Politique et militaire, la réalité des faits a déjà inventé un nouveau Proche-Orient auquel il s’agit désormais de donner une forme juridique.

    Il faut, pour cela, commencer par la Syrie ; la stabiliser dans sa nouvelle forme ; la démilitariser progressivement ; proclamer, parallèlement, sa neutralité pour la mettre à l’abri de la rivalité irano-saoudienne et étendre, ensuite, ce modèle à l’Irak et au Liban, neutralité comprise.

    Contrairement aux précédents de Vienne et de Versailles, cette nouvelle carte régionale aurait des chances de ne pas être éphémère car elle n’impliquerait pas de modifications des frontières internationales et répondrait, elle, aux vœux profonds des peuples concernés qui l’ont déjà esquissée par la guerre.

    Ce n’est alors pas seulement un nouvel Irak, une nouvelle Syrie et un nouveau Liban qui verraient le jour. C’est aussi un nouveau Proche-Orient dans lequel ces Etats neutres et confédéraux seraient géographiquement encadrés par quatre Etats à l’histoire longue, l’Egypte, l’Arabie saoudite, la Turquie et l’Iran.*

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