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Arabie saoudite: Comment se passer du pétrole ? Des chantiers très risqués

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  • Arabie saoudite: Comment se passer du pétrole ? Des chantiers très risqués

    Depuis l’unification du pays en 1932, l’Arabie saoudite s’est reposée sur la rente pétrolière découverte en 1938. Tout au long du vingtième siècle, le pays a fourni le carburant qui a fait tourner le monde. Cette industrie a tellement crû, qu’elle représente aujourd’hui 60% de la valeur ajoutée produite chaque année, et 72% des revenus budgétaires en 2015.

    Tous les gouvernements successifs avaient annoncé vouloir diversifier l’économie saoudienne, mais ces plans n’ont jamais abouti. Les réformes étaient mises sur la table lorsque le prix du baril devenait trop bas et menaçait les équilibres macroéconomiques, puis ils étaient rangés dans les tiroirs lorsque les prix rebondissaient. Mais cette fois-ci, le contexte semble bien différent.

    D’abord, parce que la baisse du baril n’est pas uniquement conjoncturelle, mais également structurelle. Cela signifie que dans un marché énergétique qui a profondément changé, le prix du baril est condamné à rester relativement bas pendant longtemps. Le second élément tient à des facteurs démographiques. La population saoudienne est très jeune: 70% de la population a moins de 30 ans, 50% de la population a moins de 25 ans. Cela implique que la pression sur le marché du travail sera très forte d’ici 2030, pour intégrer tous ces demandeurs d’emplois.

    Le premier axe de travail sera de réformer les finances publiques. Il faudra développer des recettes alternatives indépendantes du pétrole.

    Le second axe sera de stimuler le développement du secteur privé; l’objectif est de le faire progresser de 40% du PIB à 65% en 2030. Pour cela, le pays compte développer de nouvelles industries locales.

    Le troisième axe sera la constitution d’un fonds public d’investissement colossal. Celui-ci existe déjà légalement et pèse 160 milliards de dollars. La propriété de SaudiAramco – l’entreprise pétrolière publique – sera transférée vers ce fonds, sachant qu’elle est valorisée à plus de 2 trillions de dollars.

    La vocation de cette entreprise est amenée à changer; elle devra se transformer au fil du temps en un véritable conglomérat industriel diversifié. Suivront alors les revenus dégagés par plusieurs privatisations: celle des hôpitaux, d’établissements scolaires, de Saudi Telecom… Ce fonds pèsera au final près de 3 trillions de dollars, le plus grand au monde. Il permettra de remplacer les revenus du pétrole, par des revenus d’investissements étrangers. Il faudra cependant prendre garde à plusieurs risques tout au long du chemin.

    Le premier est celui d’une perte d’efficience en raison de la taille astronomique des montants engagés. En effet, la rentabilité marginale du capital est décroissante. Investir aussi rapidement de tels montants pourrait amener à ne pas optimiser leur rentabilité. Il est donc nécessaire de ne pas précipiter les investissements, et de les étaler progressivement dans le temps. A titre d’exemple, en introduisant en Bourse à peine 5% du géant SaudiAramco, cela implique une levée de fonds de 100 milliards de dollars, soit la plus grande IPO de l’histoire, loin devant le chinois Alibaba qui a levé 25 milliards en 2014.

    Le deuxième risque est celui de trop investir à l’étranger et de ne pas allouer suffisamment de capital aux entreprises locales. En effet, l’Etat souhaite amener la part des PME dans l’économie saoudienne de 20% à 35%. Attention donc, à bien intégrer la PME dans un cadre de développement inclusif. Pourquoi ne pas aller plus loin, et réserver une fraction du fonds pour financer les start-ups saoudiennes ?

    Le troisième risque sera de ne pas être capable de doper la productivité de l’économie saoudienne, qui ne progresse que de +0,8% par an, contre +9,6% pour un pays comme la Chine. Pour cela, il faudra valoriser le capital humain, et encourager les jeunes à intégrer le secteur privé et à entreprendre, plutôt que chercher à rejoindre le secteur public qui emploie actuellement 90% des salariés saoudiens.

    Le quatrième risque est celui d’une bureaucratie trop lente, et d’une incapacité à implémenter et piloter ces changements majeurs, qui pourraient être mal accueillis par la tranche la plus conservatrice de la population. Mais ces changements plaisent aux jeunes, qui représentent l’écrasante majorité des Saoudiens.

    Le cinquième risque sera enfin de tout remettre dans les tiroirs si le baril de pétrole augmente. L’Arabie saoudite dispose de toutes les ressources matérielles et humaines pour réussir sa reconversion, bien qu’elle arrive tardivement. La clé sera de doper la productivité du secteur privé.

    Quelles industries locales développer ?

    Comme l’Arabie saoudite se classe troisième dans le monde en dépenses d’armement, et que ce poste représente la première ligne de son budget (25%), le but est de réorienter ces commandes vers de futures industries locales. Alors que les commandes locales ne représentent que 2% de l’enveloppe, le but est d’amener ce chiffre à 50%. Les futurs contrats d’armement seront donc assortis d’une clause additionnelle: la nécessité de produire sur place. L’Arabie saoudite compte également développer son industrie minière, avec des réserves d’uranium estimée à 6% des réserves mondiales. Elle compte aussi développer le tourisme religieux, en augmentant les capacités d’accueil de La Mecque et de Médine.

    Par Omar Fassal
    L'Economiste
    Si vous ne trouvez pas une prière qui vous convienne, inventez-la.” Saint Augustin
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