La plus grande banque publique du pays, la Banque extérieure d’Algérie (BEA), a annoncé, ce mercredi 18 mai, avoir récolté 50 milliards de dinars depuis le lancement, il y a un mois, de l’emprunt obligataire interne de l’État.Au-delà du montant, ce sont les indications qui ont été fournies qui retiennent l’attention : 60% à 70% de ces fonds proviennent d’entreprises publiques, tandis que les entreprises privées et les particuliers y ont contribué à hauteur de 30 à 40%, selon le PDG de l’institution financière, Mohamed Loukal.
Comprendre : la BEA a collecté des fonds déjà bancarisés.
Ce qui renseigne sur l’échec de l’initiative du gouvernement qui visait, avant tout, à attirer et « bancariser l’argent de l’économie informelle ».
Les entreprises fragilisées, moins d’argent pour l’investissement
Dans son exposé, Mohamed Loukal écarte tout effet d’éviction : un phénomène engendré par l’accaparement par l’emprunt obligataire des liquidités destinées au financement de l’économie.
Mieux, il s’agirait de mobiliser les dépôts à vue des entreprises « lesquels ne sont pas destinés au financement des investissements », selon le patron de la BEA.
Ainsi, l’emprunt obligataire permettrait d’immobiliser ces fonds pour la durée de l’emprunt (3 à 5 ans) « pour les adosser aux financements de l’investissement », assure-t-il.
Cela dit, cette situation soulève alors un autre problème.
Ces dépôts à vue, jugés « volatils » par M. Loukal, constituent la principale source de trésorerie des entreprises. Ce sont les disponibilités immédiates de liquidités des entreprises.
Ainsi, prendre le risque de les immobiliser, surtout en période de crise, est hasardeux.
C’est autant d’argent en moins à investir dans le développement de leurs activités.
Incompréhension de l’informel
Cette situation montre, une nouvelle fois, que le gouvernement ne comprend pas le fonctionnement du secteur informel ou le minimise.
Après l’échec de la procédure de mise en conformité volontaire (ou amnistie fiscale), le gouvernement a lancé cet emprunt obligataire.
Deux échecs d’affilée.
En effet, ces deux mesures n’ont pas suscité d’engouement chez les acteurs visés.
Pour l’amnistie fiscale, les acteurs de l’informel seraient alors obligés de s’insérer dans le circuit officiel et leur activité en serait alors affectée (impôts, charges…).
Dans le cas de l’emprunt obligataire, le placement de leurs fonds en obligations d’État, bien qu’assorti à des conditions attrayantes, n’est pas convaincant.
Tout d’abord, dans un cas, comme dans l’autre, les sanctions contre l’informel ne sont pas dissuasives.
Pourquoi placer son argent alors que rien n’oblige de le faire ?
Par ailleurs, il existe des placements jugés plus sûrs, comme les devises étrangères achetées sur le marché parallèle. Surtout, la dépréciation persistante du dinar pousse à se protéger contre ce risque de change.
Par ailleurs, l’incertitude qui plane sur l’économie du pays plaide en faveur d’un maximum de disponibilité d’argent « liquide », et non d’obligations dont la maturité est de 3 années.
TSA
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